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« n'avoir pas deviné qu'il passerait quelqu'un dans cet <«< endroit (1). »

Ce qui vient d'être dit sur le bûcheron s'applique à toute autre espèce d'ouvriers, qui sont exposés, par la nature de leurs travaux, à compromettre la sûreté du voisinage, tels que des mâçons, couvreurs, plombiers, etc.

Il leur est enjoint de suspendre à la portée de la vue un signal qui serve d'avertissement aux passans. Le signal usité en France, depuis long-temps, est une croix formée de deux lattes (2).

Lorsque le malheur est arrivé par l'effet d'un voisinage dangereux qu'on pouvait éviter, celui qui est victime de l'accident n'a aucune indemnité à prétendre, parce qu'il doit s'imputer son imprudence d'avoir bravé un danger qui lui était connu.

La loi 11 áu Dig. ad Leg. Aquil., en donne un exemple assez bizarre.

« Plusieurs particuliers faisaient une partie de ballon; « un des joueurs ayant poussé le ballon trop rapide«ment, le ballon vint à tomber sur la main d'un bar« bier qui rasait un esclave, de manière que le rasoir lui « coupa la gorge.

(1) Si putator, ex arbore ramum cum dejiceret, vel machinarius, hominem prætereuntem occidit, ita tenetur, si is in publicum iter decidat, nec ille PROCLAMAVIT ut casus ejus evitari possit. Quod si nullus erit iter, dolum duntaxat præstare debet, ne immittat in eum quem viderit transeuntem ; nam culpa ab eo cxigenda non est, cum divinare non potuerit, an per cum locum aliquis transiturus sit.

(2) C'est à cet usage que Boileau fait allusion dans la sixième satire sur les embarras de Paris, vers 40.

Lá je trouve une Croix de funeste présage,

Et des couvreurs, grimpant aux toîts d'une maison,

En font pleuvoir l'ardoise et la tuile à foison.

On demande à qui la faute de cet événement doit être imputée.

«

« Proculus (1) décide que l'action est ouverte contre « le barbier, et je pense qu'il a raison, en supposant « néanmoins que le barbier s'est installé auprès d'une place consacrée habituellement à un pareil jeu, ou bien qui était le siège d'un nombreux rassemblement; mais je pense aussi qu'il y a quelque réproche à faire à celui qui s'est livré au rasoir d'un barbier installé dans un poste aussi dangereux (2). »

«

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Arrêt du parlement de Provence du 6 mars 1655, qui juge que le maçon n'est pas responsable de l'accident qui pourra arriver par l'effet d'une pierre tombéc d'un bâtiment, quand il a suspendu la marque indicative du danger. (Boniface, tom. I, liv. 8, tit. 20, chap. 2.) (3).

(1) --Procures (Licinius) vivait dans le Ie siècle, sous l'empire d'Othon et de Vitellius. Il devint le chef d'une secte qui porta son nom (proculéienne), et qui était en opposition avec la secte sabinienne dont le chef était Sabinus ( Cœlius. ) Ces deux chefs de sectes étaient divisés sur la manière dont devait s'appliquer la loi. Les Proculėiens voulaient qu'on l'entendît de la manière la plus conforme à l'équité, sans s'arrêter servilement à la lettre.

Les Sabiniens, au contraire, ne s'attachaient qu'à la disposition ponctuelle, sans s'embarrasser des conséquences.

Ce schisme fit un grand bruit dans l'empire romain, et tint les esprits occupés pendant plus d'un siècle.

Proculus composa quarante livres d'épîtres qui ont fourni plusieurs lois au Digeste, dans lequel il est cité environ trente fois.

(2) Si cum pilà quidam luderent, vehementiùs, quis, pilâ percussá, in tonsoris manus eam dejecerit, et sic, servi, quem tonsor radebat, gula sit præcisa, adjecto cultello, in quocumque corum culpa sit, eum lege aquiliâ teneri.

Proculus in tonsore esse AIT culpam, et sane; si ibi tondebat, ubi ex consuetudine ludebatur, vel ubi transitus frequens erat, est quod ei imputetur. Quamvis nec illud malè dicatur, si in loco periculoso, sellam habenti tonsori se quis commiserit, ipsum de se queri debere.

(3) HYACINTHE Boniface, avocat au Parlement d'Aix, au XVIIe siè

[[Les inondations, les avalanches ou éboulemens, soit de terre, soit de rochers, et les autres accidens qui arrivent sans la faute des hommes, ne donnent lieu à aucune indemnité (1). Les effets de la force majeure sont supportés par le maître de la chose endommagée, sans qu'il puisse avoir recours par des indemnités contre qui que ce soit. Rapinæ, tumultus, incendia, aquarum magnitudines, impetus prædonum, à nullo præstantur. (L. 23. ff. de reg, jur. )

Si, cependant, il y a négligence, les conséquences du cas fortuit doivent être à la charge de celui qui l'a commise. Si on néglige, par exemple, les réparations d'une digue, en sorte qu'à l'époque où arrivent les crues les eaux s'étendent et causent du ravage sur la propriété voisine, il est certain que celui qui l'a éprouvé peut demander des dommages intérêts à celui qui n'a pas fait les réparations.

Lorsqu'il s'échappe une pierre, une tuile, ou une pièce de bois d'une maison que l'on construit ou que l'on répare, et que cette chute cause du dommage à quelqu'un, celui qui commande aux ouvriers est responsable, parce que l'événement arrive par sa faute, et qu'il pouvait le prévenir.]]

(Voy. Incendie.)

S X. ACCÔTEMEnt.

C'est ainsi que l'on appelle la partie d'un chemin ou d'une chaussée qui se trouve entre le fossé et l'encaissement ou l'empierrement. On donne encore le nom

cle, auteur d'un recueil d'arrêts en 5 vol. in fol. ; son ouvrage est divisé suivant l'ordre du code Justinien.

· (1) Code civil, art, 1148. — Répertoire de M. Merlin, vo Cas fortuit.

d'accôtement anx remparts naturels ou factices qui embrassent ou soutiennent un canal ou une rivière. Les propriétaires riverains ont le droit de dénoncer ceux qui porteraient atteinte à ces deux espèces d'accôtement, soit en pratiquant des saignées sur les canaux ou rivières, soit en obstruant le passage des chemins et chaussées.

La conservation de l'accôtement tient à l'ordre public, et est soumise à l'inspection de la police. ·

C'est surtout contre les propriétaires voisins que se dirige l'action de cette surveillance, parce que ce sont ces propriétaires qui ont quelque intérêt à porter atteinte à l'accôtement, surtout en matière de canaux et de rivières.

Les lois romaines nous fournissent l'exemple d'une extrême sévérité contre un pareil délit, au sujet de l'accôtement du Nil.

Personne n'ignore que la terre d'Egypte reçoit toute sa fertilité de l'épanchement des eaux du Nil, qui ne versent leurs bienfaits sur la généralité du pays, qu'autant qu'elles montent à la hauteur de douze coudées.

Néanmoins, il se trouve des propriétaires voisins qui, par l'empressement d'assurer leur récolte, dégradent l'accôtement pour pratiquer des saignées et dérivations partielles sur leurs héritages.

Ce procédé est d'autant plus coupable, qu'il peut avoir l'effet, en retardant l'exhaussement des eaux, de ruiner la récolte générale.

Comme l'Egypte était le grenier de l'Italie, on conçoit que le gouvernement romain dut apporter une grande sollicitude à maintenir la hauteur du fleuve, en s'environnant de toutes les mesures capables de prévenir les manœuvres et la cupidité des propriétaires ri

verains; la législation de cette matière porte même un caractère d'atrocité.

La loi unique, au cap. de Nili aggeribus non rumpendis, ordonne que les coupables soient brûlés vifs sur les bords du fleuve (1).

Le droit français n'offre rien qui approche de cette rigueur sur la police des accôtemens.

L'ordonnance du bureau des finances de la généralité de Paris, du 30 avril 1772, « enjoint aux propriétaires << de maisons ou héritages de la généralité, de réparer « et entretenir, chacun en son endroit, les revers de pavé et les accôtemens de chaussée faits entre leurs <<< maisons ou héritages et la chaussée du milieu, et de « combler les trous qui s'y trouveront, de façon que les << eaux n'y puissent séjourner. »

Une autre ordonnance du même bureau, du 2 août 1774, art. 1, « défend aux mendians, bergers, et à < tous autres particuliers, de construire ni pratiquer « sur les açcôtemens, berges ou fossés des grands che« mins, aucune cabane ou loge, pour s'y retirer dans « les mauvais temps, et de séjourner dans les mêmes « lieux en y mendiant, sous peine d'amende, pour la première fois, et d'emprisonnement en cas de réci« dive. »

a

Une ordonnance de l'intendant de Paris, du 12 décembre 1780, défend de creuser les accôtemens et d'en enlever les terres, sous peine d'amende.

(1) Flammis eo loco consumatur, in quo vetustatis reverentiam et, propemodum, imperii ipsius appetierit securitatem.

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