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régler l'usage de ces biens par les lois civiles, le pouvoir de disposer de ces biens pour des objets d'utilité publique, la faculté de lever des impôts sur les mêmes biens. Ces différents droits réunis forment ce que Grotius (1), Puffendorf(2), et autres, appellent le domaine éminent du souverain; mots dont le vrai sens, développé par ces auteurs, ne suppose aucun droit de propriété, et n'est relatif qu'à des prérogatives inséparables de la puissance publique.

Cependant des jurisconsultes célèbres craignant que, dans une matière aussi délicate, on ne pût trop aisément abuser des expressions les plus innocentes, se sont élevés avec force contre les mots domaine éminent, qu'ils ont regardés comme pleins d'incorrection et d'inexactitude. Les discussions les plus solennelles sur ce point ont long-temps fixé l'attention de toutes les universités de l'Europe (3): Mais il faut convenir que cette dispute se réduisait à une pure question de mots, puisqu'en lisant les ouvrages qui ont été respectivement publiés on s'apperçoit que tous nos controversistes s'accordent sur le fond même des choses, et que ceux d'entre eux qui parlaient des prérogatives du domaine éminent, les limitaient aux droits que les autres faisaient dériver de l'empire ou de la souveraineté.

En France, et vers le milieu du dernier siècle, nous avons vu paraître des écrivains dont les opinions systématiques étaient vraiment capables de compromettre les antiques maximes de l'ordre naturel et social. Ces écrivains substituaient au droit incontestable qu'a l'état ou le souverain de lever des subsides, un prétendu droit de copropriété sur le tiers du produit net des biens des citoyens.

Les hommes qui prêchaient cette doctrine se proposaient de remplacer toutes les lois fondamentales des nations par la prétendue force de l'évidence morale, presque toujours obscurcie par les intérêts et les passions, et toutes les formes connues de gouvernement par un despotisme légal (4), qui impliquerait contradiction jusque

(1) De la paix et de la guerre, liv. I, ch. I, paragr. 6; ch. III, paragr. 6, liv. II, ch. XIV, paragr. 7; liv. III,

ch. XX.

(2) Du droit de la nature et des gens, liv. VIII, ch. V. (3) Fleicher, Institutiones juris naturæ et gentium, liv. III, chap. XI, paragr. II.

Leyser, dans sa dissertation Pro imperio contra dominium eminens, imprimée à Wirtemberg en 1673.

(4) Voyez un ouvrage intitulé: de l'Ordre essentiel des sociétés politiques.

dans les termes; car le mot despotisme, qui annonce le fléau de l'humanité, devait-il jamais être placé à côté d'un mot legal qui caractérise le règne bienfaisant des lois?

Heureusement toutes ces erreurs viennent échouer contre les principes consacrés par le droit naturel et public des nations. Il est reconnu partout que les raisons qui motivent pour les particuliers la nécessité du droit de propriété, sont étrangères à l'état ou au souverain, dont la vie politique n'est pas sujette aux mêmes besoins que la vie naturelle des individus.

Nous convenons qué l'état ne pourrait subsister s'il n'avait les moyens de pourvoir aux frais de son gouvernement; mais en se procurant ces moyens par la levée des subsides, le souverain n'exerce point un droit de propriété ; il n'exerce qu'un simple pouvoir d'administration.

C'est encore, non comme propriétaire supérieur et universel du territoire, mais comme administrateur suprême de l'intérêt public, que le souverain fait des lois civiles pour régler l'usage des propriétés privées. Ces propriétés ne sont la matière des lois que comme objet de protection et de garantie, et non comme objet de disposition arbitraire. Les lois ne sont pas de purs actes de puissance; ce sont des actes de justice et de raison. Quand le législateur publie des réglements sur les propriétés particulières, il n'intervient pas comme maître, mais uniquement comme arbitre, comme régulateur, pour le maintien du bon ordre et de la paix.

Lors de l'étrange révolution qui fut opérée par l'établissement du régime féodal, toutes les idées sur le droit de propriété furent dénaturées, et toutes les véritables maximes furent obscurcies; chaque prince dans ses états voulut s'arroger des droits utiles sur les terres des particuliers, et s'attribuer le domaine absolu de toutes les choses publiques. C'est dans ce temps que l'on vit naître cette foule de règles extraordinaires qui régissent encore la plus grande partie de l'Europe, et que nous avons heureusement proscrites. Cependant, à travers toutes ces règles, quelques étincelles de raison qui s'échappaient laissaient toujours entrevoir les vérités sacrées qui doivent régirl'ordre social.

Dans les contrées où les lois féodales dominent le plus, on a constamment reconnu des biens libres et allodiaux; ce qui prouve que

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l'on n'a jamais regardé la seigneurie féodale comme une suite nécessaire de la souveraineté. Dans ces contrées, on distingue dans le prince deux qualités, celle de supérieur dans l'ordre des fiefs, et celle de magistrat politique dans l'ordre commun. On reconnaît que la seigneurie féodale ou la puissance des fiefs n'est qu'une chose accidentelle qui ne saurait appartenir à un souverain, comme tel. On ne range dans la classe des prérogatives de la puissance Souveraine, que celles qui appartiennent essentiellement à tout souverain, et sans lesquelles il serait impossible de gouverner une société politique.

On a toujours tenu pour maxime que les domaines des particuliers sont des propriétés sacrées qui doivent être respectées par le souverain lui-même. ART. 545. D'après cette maxime, nous avons établi, dans le projet de loi, que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

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L'état est, dans ces occasions, comme un particulier qui traite avec un autre particulier. C'est bien assez qu'il puisse contraindre un citoyen à lui vendre son héritage, et qu'il lui ôte le gran privilège qu'il tient de la loi naturelle et civile de ne pouvoir être force d'aliéner son bien.

Pour que l'état soit autorisé à disposer des domaines des particuliers, on ne requiert pas cette nécessité rigoureuse et absolue qui donne aux particuliers même quelque droit sur le bien d'autrui (1). Des motifs graves d'utilité publique suffisent; parce que, dans l'intention raisonnablement présumée de ceux qui vivent dans une société civile, il est certain que chacun s'est engagé à rendre possible par quelque sacrifice personnel ce qui est utile à tous; mais le principe de l'indemnité due au citoyen dont on prend la propriété est vrai dans tous les cas sans exception. Les charges de l'état doivent être supportées avec égalité et dans une juste proportion. Or toute égalité, toute proportion serait détruite, si un seul ou quelques-uns pouvaient jamais être soumis à faire des sacrifices auxquels les autres citoyens ne contribueraient pas.

(1) On sait le droit qu'a tout propriétaire qui n'a point d'issue pour arriver à son domaine, d'obliger les proprićtaires à lui donner, en payant, passage sur leurs propres

terres.

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Les fruits civils;

Le croit des animaux, appartiennent au propriétaire ;

On appelle fruits naturels de la terre ceux qu'elle produit sans le secours de l'art. On appelle fruits industriels ceux que la terre ne produirait pas sans le travail de l'homme. On ne croit pas avoir besoin de motiver la disposition qui rend propriétaire de ces fruits celui qui est déjà propriétaire de la terre même; car, dans l'ordre et la marche des idées, c'est la nécessité de reconnaître le droit du cultivateur sur les fruits provenus de son travail et de sa culture, qui, au moins jusqu'à la récolte, a fait supposer et reconnaître son droit sur le fonds même auquel il a appliqué ses labours. C'est ainsi que d'année en année le cultivateur s'assurant les mêmes droits par les mêmes travaux, la jouissance s'est changée pour lui en possession continue, et la possesion continue en propriété. Il faut donc bien avouer que le propriétaire du fonds est nécessairement propriétaire des fruits, puisque c'est le droit originaire du cultivateur sur les fruits qui a fondé la propriété même du sol.

De plus, la propriété du sol serait absolument vaine, si on la séparait des émoluments naturels ou industriels que ce sol produit. L'usufruit peut être séparé à temps de la propriété par convention ou par quelque titre particulier; mais la propriété et l'usufruit vont nécessairement ensemble, si l'on ne consulte que l'ordre commun et général.

La règle que nous avons établie pour les fruits naturels et industriels de la terre, s'applique au croît des animaux qui sont élevés et nourris par nos soins, et aux fruits civils qui sont le résultat d'une obligation légale ou volontaire.

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Il est censé ignorer les vices de son titre tant qu'on ne constate pas qu'il les connaissait.

La loi civile ne scrute pas les consciences. Les pensées ne sont pas de son ressort; a ses yeux le bien est toujours prouvé quand le mal ne l'est pas.

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soit, comporte quelques limites que l'état de société rend indispensables.

Vivant avec nos semblables, nous devons respecter leurs droits, comme ils doivent respecter les nôtres. Nous ne devons donc pas nous permettre, même sur notre fonds, des procédés qui pourraient blesser le droit acquis d'un voisin ou de tout autre. La nécessité et la multiplicité de nos communications sociales ont amené sous le nom de servitudes et sous d'autres, des devoirs, des obligations, des services, qu'un propriétaire ne pourrait méconnaître sans injustice et sans rompre les liens de l'association commune.

En général les hommes sont assez clairvoyants sur ce qui les touche on peut se reposer sur l'énergie de l'intérêt personnel du soin de veiller sur la bonne culture. La liberté laissée au cultivateur et au propriétaire, fait de grands biens et de petits maux. L'intérêt public est en sûreté quand, au lieu d'avoir un ennemi, il n'a qu'un garant dans l'intérêt privé.

Cependant, comme il est des propriétés d'une telle nature, que l'intérêt particulier peut se sition avec l'intérêt général dans la manière trouver facilement et fréquemment en oppod'user de ces propriétés, on a fait des lois et des les domaines qui consistent en mines réglements pour en diriger fage tels sont forêts, et en d'autres objets pareils, et qui ont dans tous les temps fixé l'attention du légis

ART. 551. — Non-seulement le droit de propriété s'étend sur tout ce qui est produit par la chose dont on est propriétaire; mais il s'étend encore sur tout ce qui s'y unit et s'y incor-lateur. pore, soit naturellement, soit artificiellement. C'est ce qu'on appelle droit d'accession.

Pour bien apprécier le droit d'accession, il est nécessaire de parler séparément des choses mobilières, et des choses immobilières.

ART. 552.- Nous avons posé le principe que la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous.

Nous en avons conclu que le propriétaire peut faire au-dessus toutes les plantations et constructions, et au-dessous toutes les constructions et fouilles qu'il juge convenables,

Ou comprend que la propriété serait imparfaite, si le propriétaire n'était 1.bre de mettre à profit pour son usage toutes les parties extérieures et intérieures du sol ou du fonds qui lui appartient, et s'il n'était le maître de tout l'espace que son domaine renferme.

Nous n'avons pourtant pas dissimulé que le droit du propriétaire, quelque étendu qu'il

en

Dans nos grandes cités, il importe de veiller édifices qui les décorent. Un propriétaire ne sur la régularité et même sur la beauté des saurait avoir la liberté de contrarier par ses constructions particulières les plans généraux · de l'administration publique.

Un propriétaire, soit dans les villes, soit dans les champs, doit encore se résigner à subir les gênes que la police lui impose pour le maiutien de la sûreté commune.

Dans toutes ces occurrences, il faut soumettre toutes les affections privées, toutes les volontés particulières, à la grande peusée du bien public,

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ART. avoir averti les propriétaires de l'étendue et des limites naturelles de leurs droits, on s'est occupé des hypothèses dans lesquelles la propriété foncière ou immobiliaire peut accidentellement s'accroître, Il peut arriver, par exemple, qu'un tiers

vienne faire des plantations dans le bien d'autrui, ou y construire un édifice : à qui appartient cet édifice ou cette plantation? Nous supposons le tiers de bonne foi; car s'il ne l'était pas, s'il n'avait fait qu'un acte d'émulation et de jalousie, son procédé ne serait qu'une entreprise, un attentat. Il ne s'agirait point de peser un droit, mais de réprimer un délit. Les divers jurisconsultes ne se sont point accordés sur la question de savoir si la plantation faite dans le fonds d'autrui appartient à celui qui a planté, ou au propriétaire du fonds sur lequel la plantation a été faite. Les uns ont opiné pour le propriétaire du fonds, et les autres pour l'auteur de la plantation.

Il en est qui ont voulu établir une sorte de société entre le planteur et le propriétaire foncier, attendu que d'une part les plantes sont alimentées par le fonds, et que d'autre part elles ont par elles-mêmes un prix, une valeur qui ont été fournis par tout autre que celui à qui le fonds appartenait. Il faut, a-t-on dit, faire un partage raisonnable entre les parties intéressées. Cette opinion est celle de Grotius, et de quelques autres publicistes célèbres Grotius a été réfuté par Puffendorf; ce dernier a fait sentir avec raison tous les inconvénients qu'il y aurait à établir une société forcée entre des hommes qui n'ont pas voulu être associés; il a prouvé qu'il serait impossible de conserver l'égalité entre les parties intéressées dans le partage des produits d'une telle société; il a observé qu'il serait dangereux d'asservir ainsi une propriété foncière à l'insu et contre le gré du propriétaite; et que d'ailleurs chacun étant maître par le droit de faire cesser toute possession indivise et de séparer ses intérêts de ceux d'autrui, il n'y avait aucun motif raisonnable d'imposer au propriétaire d'un fonds une servitude insolite et aussi contraire au droit naturel qu'au droit civil.

A travers les différents systèmes des auteurs, nous sommes remontés au droit romain, qui décide qu'en général tout doit céder au sol qui est immobile, et qu'en conséquence dans la nécessité de prononcer entre le propriétaire du sol et l'auteur de la plantation, qui ne peuvent demeurer en communion malgré eux pour le même objet, le propriétaire du sol doit avoir la préférence, et obtenir la propriété des choses qui ont été accidentellement réunies à son fonds. La loi romaine ne ba

lance pas entre le propriétaire foncier et le tiers imprudent qui s'est permis avec plus ou moins de bonne foi, une sorte d'incursion dans la propriété d'autrui.

Dans le projet de loi, nous sommes partis du principe que toutes les plantations faites dans un fonds sont censées faites par le propriétaire de ce fonds, et à ses frais, si le contraire n'est prouvé.

ART. 555. Nous donnons au propriétaire du sol sur lequel un tiers a fait des plantations, la faculté de les conserver d'obliger ce tiers à rétablir les lieux dans leur premier état.

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ou

Dans le premier cas, nous soumettons la propriétaire à payer la valeur des plantations qu'il conserve et le salaire de la main d'œuvre, sans égard à ce que le fonds même peut avoir gagné par la plantation nouvelle.

Dans le second cas, le tiers planteur est obligé de rétablir les lieux à ses propres frais et dépens; il peut même être exposé à des dommages et intérêts, il supporte la peine de sa légéreté et de son entreprise.

Nous avons suivi l'esprit des lois romaines. Nous décidons par les mêmes principes les questions relatives aux constructions de bâtiments et autres ouvrages faits par un tiers sur le sol d'autrui ; nous donnons au propriétaire la même alternative. Nous avons pensé qu'on ne saurait trop avertir les citoyens des risques qu'ils courrent quand ils se permettent des entreprises contraires au droit de propriété.

Nous avons excepté de la règle générale le cas où celui qui aurait planté ou construit dans le fonds d'autrui, serait un possesseur de bonne foi qui aurait été évincé sans étre condamné à la restitution des fruits, et qui aurait planté ou construit pendant sa possession. Dans ce cas, le propriétaire est tenu, ou de payer la valeur des constructions ou plantations, ou de payer une somme égale à l'augmentation de valeur que ces plantations et constructions peuvent avoir apportées au sol. ART. 554. Nous nous sommes occupés de l'hypothèse où le propriétaire d'un fonds fait des plantations et constructions avec des matériaux qui appartiennent à un tiers.

Nous avons pensé, dans une telle hypothèse, que ce tiers n'a pas le droit d'enlever ses matériaux, mais que le propriétaire du fonds doit en payer la valeur, et qu'il peut même, selon les circonstances, être condamné

à des dommages et intérêts. Cela est fondé sur le principe que personne ne peut s'enrichir aux dépens d'autrui.

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ART. 556. Le projet de loi termine la grande question des alluvions. Il décide, conformément au droit romain, que l'alluvion profite au propriétaire riverain, soit qu'il s'agisse d'un fleuve ou d'une rivière navigable, flotable ou non, à la charge, dans le premier cas, de laisser le marche - pied ou chemin de halage conformément aux réglements.

L'alluvion est un atterrissement ou accroissement qui se forme insensiblement aux fonds riverains d'un fleuve ou d'une rivière.

Les principes de la féodalité avaient obscurci cette matière; on avait été jusqu'à prétendre que les alluvions formées par les fleuves et rivières appartenaient au prince, lorsqu'il s'agissait d'une rivière ou d'un fleuve navigable; ou au seigneur haut-justicier, lorsqu'il s'agissait d'une rivière ou d'un feuve non navigable. Les propriétaires riverains étaient entièrement écartés par la plupart des

coutumes.

Dans les pays de droit écrit, ces propriétaires s'étaient pourtant maintenus dans leurs droits; mais on voulut les en dépouiller peu d'années avant la révolution, et l'on connaît à cet égard les réclamations solennelles de l'ancien parlement de Bordeaux qui repoussa avec a tant de lumières que de courage les entreprises du fisc, et les intrigues ambitieuses de quelques courtisans dont le fisc n'était que le prête-nom. Il fut établi à cette époque que les alluvions doivent appartenir au propriétaire riverain. par cette maxime naturelle que le profit appartient à celui qui est exposé à souffrir le dommage. Des propriétés riveraines sont menacées plus qu'acune autre. Il existe, pour ainsi dire, une sorte de contrat aléatoire entre le propriétaire du fonds riverain et la nature, dont la marche peut à chaque instant ravager ou accroître ce fonds.

Le système féodal a disparu; conséquemment il ne peut plus faire obstacle au droit des riverains.

Mais dira-t-on que les fleuves et les rivières navigables sont des objets qui appartiennent au droit public et des gens, et qu'ainsi les alluvions produites par ces fleuves et par ces rivières ne peuvent devenir la matière d'une propriété privée.

Nous répondrons, avec Dumoulin, que les

propriétés privées ne peuvent certainement s'accroître des choses dout l'usage doit demeurer essentiellement public mais que toutes celles qui sont susceptibles de possession et de domaine, quoiqu'elles soient produites par d'autres qui sont régies par le droit public, peuvent devenir des propriétés privées, et le deviennent en effet, comme les alluvions qui sont produites par les fleuves et les rivières navigables, et qui sont susceptibles par ellesmêmes d'être possédées par des particuliers, à l'instar de tous les autres héritages.

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Nous avons cru devoir rétablir les propriétaires riverains dans l'exercice de leurs droits naturels. Nous les avons seulement soumis relativement aux fleuves et rivières navigables, à laisser libre l'espace de terrain suffisant pour ne pas nuire aux usages publics. ART. 557. Ce que nous avons dit des alluvions s'applique aux relais que forme l'eau courante qui se retire insensiblement de l'une de ses rives en se portant vers l'autre. Le propriétaire de la rive découverte profite de ces relais, sans que le riverain du côté opposé puisse venir réclamer le terrain qu'il a perdu. Entre riverains, l'incertitude des accidents forme la balance des pertes et des gains, et maintient entre eux un équilibre raisonnable.

Les délaissements formés par la mer sont régis par d'autres principes, parce qu'ils tiennent à un autre ordre de choses: ils sont exceptés des maximes que nous avons établies.

ART. 559. Si un fleuve ou une rivière opère une révolution subite dans la propriété d'un riverain, et emporte une partie considérable de cette propriété pour la joindre à une autre, le propriétaire évincé par le fleuve ou par la rivière peut réclamer pendant un an la portion de terrain dont il a été si brusquement dépouillé ; mais après ce temps, il ne peut plus réclamer.

ART. 558. L'alluvion n'a pas lieu à l'égard des lacs et étangs, dont le propriétaire conserve toujours le terrain que l'eau couvre quand elle est à la hauteur de la décharge de l'étang, encore que le volume de l'eau vienne à diminuer.

Réciproquement, le propriétaire de l'étang n'acquiert aucun droit sur les terres riveraines que son eau vient à couvrir dans les crues extraordinaires.

La justice de cette disposition est évidente par elle-même.

ART. 560, 561. —

Quant aux isles, on

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