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distingue si elles se sont formées dans une rivière navigable ou flottable, ou dans une rivière qui n'a aucun de ces deux caractères. Dans le premier cas, elles appartiennent à la nation; dans le second, elles se partagent entre les riverains des deux côtés, si elles sont sur le milieu de la rivière, ou elles appartiennent au propriétaire riverain du côté où elles se sont formées.

ART. 562. Si une rivière ou un fleuve, en se formant un bras nouveau coupe et embrasse le champ d'un propriétaire riverain et en fait une isle, ce propriétaire conserve la propriété de son champ, encore que l'isle se soit formée dans une rivière ou dans un fleuve navigable ou flottable.

C'est la justice même qui commande cette exception. La cité dédaignerait un moyen d'acquérir qui aurait sa source dans la ruine et le malheur du citoyen.

ART. 563.- Un fleuve ou une rivière abandonne-t-elle son ancien lit pour se former un nouveau cours ? les propriétaires des fonds nouvellement occupés prennent à titre d'indemnité l'ancien lit abandonné, chacun dans la proportion du terrain qui lui a été enlevé.

Ici la matière est peu susceptible de principes absolus; l'équité seule peut nous diriger. ART. 566. La règle générale est que l'accessoire doit suivre le principal, à la charge par le propriétaire de la chose principale, de payer la valeur de la chose accessoire.

Mais dans les choses mobilières, la difficulté est de discerner la chose qui doit être réputée principale, d'avec celle qui ne doit être réputée qu'accessoire.

ART. 567. -On répute chose accessoire celle qui n'a été unie que pour l'usage et l'or nement d'une autre.

ART. 568. Néanmoins, quand la chose unie est beaucoup plus précieuse que la chose principale, et quand elle a été employée à l'insu du propriétaire, celui-ci peut demander que la chose unie soit séparée pour lui être rendue, même quand il pourrait en résulter quelque dégradation de la chose à laquelle elle a été jointe.

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ABT. 569. Dans le doute, on peut regarder comme l'objet principal celui qui est le plus précieux, et regarder comme simplement accessoire celui qui est de moindre prix. Dans les choses d'égale valeur, c'est le volume qui

ART, 564. détermine. Les animaux peuvent sans doute devenir un objet de propriété. On distingue leurs différentes espèces.

La première est celle des animaux sauvages; la seconde, celle des animaux domestiques; et la troisième, celle des animaux qui ne sont ni entièrement domestiques, ni entièrement sauvages. Les animaux de la première espèce sont ceux qui ne s'habituent jamais au joug ni à la société de l'homme: le droit de propriété sur ces animaux ne s'acquiert que par l'occupation, et il finit avec l'occupation même.

Les animaux domestiques ne sortent pas de la propriété du maitre par la fuite; celui-ci peut toujours les réclamer.

Les animaux de la troisième espèce, qui ne sont ni entièrement domestiques ni entièrement sauvages, appartiennent, par droit d'accession, au propriétaire du fonds dans lequel ils ont été se réfugier, à moins qu'ils n'y aient été attirés par artifice.

Les animaux de cette troisième espèce sont l'objet d'une disposition particulière du projet de loi.

ART. 565. Nous allons examiner actuellement le droit d'accession par rapport aux choses mobilières.

Tome II.

ART. 570.Si un artiste a donné une nouvelle forme à une matière qui ne lui appartenait pas, le propriétaire de la matière doit obtenir la préférence en payant la main-d'œuvre.

ART. 571.-S'il s'agit pourtant d'une vile toile animée par le pinceau d'un habile peintre, ou d'un bloc de marbre auquel le ciseau d'un sculpteur aura donné la respiration, le mouvement et la vie, dans ce cas et autres semblables, l'industrie l'emporte sur le droit du propriétaire de la matière première.

ART. 572.-Une personne a-t-elle employé à un ouvrage quelconque une portion de matière qui lui appartenait et une portion qui ne lui' appartenait pas, la chose devient commune aux deux propriétaires dans la proportion de leur intérêt respectif.

ART. 574. Si une chose a été formée par uu mélange de plusieurs matières appartenant à divers propriétaires, le propriétaire de la matière la plus considérable et la plus précieuse peut demander à garder le tout, en remboursant le prix des matières qui ne lui – appartenaient pas.

ART. 575.- Si on ne peut distinguer quello est la plus précieuse des matières mélangées,

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la chose provenue du mélange demeurera commune à tous les divers propriétaires.

La communauté donne ouverture à la licitation.

ART. 576. Dans tous les cas où le propriétaire de la matière employée à un ouvrage sans son aveu peut réclamer l'entière propriété du tout, il lui est libre de demander le remplacement de sa matière en même nature, quantité, poids, mesure et bonté, ou d'exiger qu'on lui en paie la valeur.

-

ART. 577. Au reste, suivant les circonstances, le propriétaire a l'action en dommages et intérêts, et même l'action criminelle contre celui qui à employé à son insu une matière qui ne lui appartenait pas.

ART. 565. Les règles qui viennent d'être tracées ne sauraient convenir à toutes les hypothèses. Tout ce que peut le législateur en pareille occurrence, c'est de diriger le juge. C'est à la sagesse du juge, dans une matière aussi arbitraire, à résoudre les différents cas qui peuvent se présenter, et qui n'ont pu être F'objet d'une prévoyance particulière.

Tel est, législateurs, dans son ensemble et dans ses détails, le projet de loi sur la propriété.

Vous ne serez point surpris que ce projet se réduise à quelques définitions à quelques règles générales: car le corps entier du code civil est consacré à définir tout ce qui peut tenir à l'exercice du droit de propriété; droit fondamental sur lequel toutes les institutions sociales reposent, et qui, pour chaque individu, est aussi précieux que la vie même, puisqu'il Tui assure les moyens de la conserver.

La cité n'existe, disait l'orateur romain, que pour que chacun conserve ce qui lui appartient. Avec le secours de cette grande vérité, cet orateur philosophe arrêtait de son temps tous les mouvements des factions occupées à désorganiser l'empire.

C'est à leur respect pour la propriété que les nations modernes sont redevables de cet esprit de justice et de liberté qui, dans les temps même de barbarie, sut les défendre contre les violences et les entreprises du plus fort. C'est la propriété qui posa dans les forêts de la Germanie les premières bases du gouver

nement représentatif. C'est elle qui a donné naissance à la constitution politique de nos anciens pays d'états, et qui, dans ces derniers temps, nous a inspiré le courage de secouer le joug et de nous délivrer de toutes les entraves de la féodalité.

ART. 544. Législateurs, la loi reconnaît que la propriété est le droit de jouir et de disposer de son bien de la manière la plus absolue, et que ce droit est sacré dans la personne du moindre particulier. Quel principe plus fécond en conséquences utiles?

Ce principe est comme l'ame universelle de toute la législation; il rappelle aux citoyens ce qu'ils se doivent entre eux, et à l'état ce qu'il doit aux citoyens; il modère les impôts; il fixe le règne heureux de la justice; il arrête dans les actes de la puissance publique les graces qui seraient préjudiciables aux tiers; il éclaire la vertu et la bienfaisance même ; il devient la règle et la mesure de la sage composition de tous les intérêts particuliers avec l'intérêt commun; il communique ainsi un caractère de majesté et de grandeur aux plus petits détails de l'administration publique.

Ainsi vous avez vu le génie qui gouverne la France établir sur la propriété les fondements inébranlables de la république.

Les hommes dont les possessions garantissent la fidélité, sont appelés désormais à choisir ceux dont les lumières, la sagesse et le zèle, doivent garantir les délibérations.

En sanctionnant le nouveau code civil, vous aurez affermi, législateurs, toutes nos institutions nationales.

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Déjà vous avez pourvu à tout ce qui concerne l'état des personnes : aujourd'hui vous com mencez à régler ce qui regarde les biens. Il s'agit, pour ainsi dire, de lier la stabilité de la patrie à la stabilité même du territoire. On ne peut aimer sa propriété sans aimer les lois qui la protègent. En consacrant des maximes favorables à la propriété, vous aurez inspiré l'amour des lois : vous n'aurez pas travaillé seulement au bonheur des individus, à celui des familles particulières, vous aurez créé un esprit public, vous aurez ouvert les véritables sources de la prospérité générale,' vous aurez préparé le bonheur de tous.

TITRE III

De l'Usufruit, de l'Usage et de l'Habitation.

Décrété le 9 pluviôse an III (30 janvier 1804); - Promulgué le 19 du même mois (9 février 1804). g

[ARTICLES 578 à 636.1

EXPOSÉ DES MOTIFS par M. le Conseiller-d'État GALLI.

LÉGISLATEURS,

Seance du 28 nivóse an X11 (19 janvier 1804).

Nous venons vous présenter, au nom du gouvernement, le titre de l'Usufruit, de l'Usage, et de l'Habitation. C'est le troisième du livre II du projet de Code civil.

Ce titre est divisé en deux chapitres:
Le premier concerne l'Usufruit;
Le deuxième, l'Usage et l'Habitation.

ART. 578.-On commence, dans le premier, par définir ce que c'est que l'Usufruit. C'est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance.

Quelque difficile que puisse être toute définition (1), et quoiqu'il soit très-dangereux - d'en insérer dans un corps de lois, cependant, comme le Code civil ne contient pas seulement des règles pour les juges, mais aussi des instructions pour chaque citoyen, il est bon d'en trouver quelques-unes brièves et précises, qui, éclairant les juges et les parties en mêmetemps, dissipent toute incertitude et ne laissent aucune ressource à la chicane.

Aussi ne définit-on pas l'Usufruit, comme d'autres l'ont défini (2), le droit de jouir d'une chose dont on n'est pas le proprietaire, la conservant entière et sans la détériorer ni la diminuer. Ces dernières paroles auraient emporté l'exclusion des choses qui se consomment par l'usage ou qui se détériorent, et desquelles cependant on peut avoir l'usufruit, sous le nom d'usufruit impropre, comme s'expriment les

(1) L. CCII ff. de Regulis juris.

(2) Domat, liv. I, titre II, de l'Usufruit, §. 1.

praticiens, ou de quasi usufructus, comme le dit formellement le texte dans les Institutes (1); et ce, par suite de la règle générale, que l'usufruit peut s'établir sur toutes les choses qui sont en notre patrimoine (2), soit qu'elles se conservent, soit qu'elles se détériorent, soit qu'elles se consomment.

Voilà pourquoi, dans ce Code, on a préféré l'expression de la loi romaine (3), salva rerum substantia.

ART. 581.Et c'est pour la même raison qu'on déclare, article 581, que l'usufruit peut étre établi sur toute espèce de biens meubles ou immeubles, et par conséquent sur des choses aussi qui se consomment par l'usage, ou qui se détériorent.

ART. 579.-L'article 579 décide que l'usufruit est établi par la loi ou par la volonté de

l'homme :

Par la loi, tel que l'usufruit légal, appartenant aux père et mère sur le bien de leurs enfants, dont est parlé à l'article 601.

Par la volonté de l'homme, telque celui qui est porté par un testament, par un contrat. C'est cet usufruit qui nous procure, qui nous facilite des libéralités, des actes de bienfaisance et de gratitude. C'est par le moyen de cet usufruit que des transactions les plus épineuses quelquefois se combinent, que les acquisitions les plus importantes et les plus difficiles se font; c'est

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par lui que les époux se rendent mutuellement les derniers témoignages de leur tendresse.

ART. 586.- Les fruits civils sont réputés, dit l'article 586, s'acquérir jour par jour, et appartiennent à l'usufruitier, à proportion de la durée de son usufruit.

L'article applique ensuite cette règle au prix des baux à ferme, comme aux loyers des maisons et aux autres fruits civils dans la classe desquels l'art. 584 range le prix des baux à ferme.

Cette application fait cesser toutes les questions qui s'agitaient autrefois entre le propriétaire et l'héritier de l'usufruitier, sur le mode de répartir un prix qui, représentant des fruits naturels, paraissait devoir suivre la nature de ceux-ci, et non celle des autres.

ART. 590.-A l'égard des arbres qu'on peut tirer d'une pépinière, il est dit, art. 590, que l'on se conformera aux usages des lieux pour des lieux pour leur remplacement.

ART. 593. Quant aux échalas pour les vignes, qu'on peut prendre dans les bois, et quant aux produits aunuels ou périodiques, qu'on peut prendre sur les arbres, l'article 593 statue que l'on doit suivre l'usage du pays ou la coutume du propriétaire.

Ainsi sont respectées et maintenues, partout où il le faut, les coutumes, les habitudes des citoyens.

Cette excellente partie de la législation est également due aux sages réflexions des rédacteurs du projet de Code civil, puisqu'ils avaient, dans leur discours préliminaire, manisfesté le désir qu'il y eût une tradition suivie d'usages, de maximes et de règles, afin que l'on fût en quelque sorte nécessité à juger aujourd'hui comme on a déjà jugé hier (1).

ART. 602.-L'article 602 porte: Si l'usufruitier ne trouve pas de caution, les immeubles sont donnes à ferme ou mis en séquestre ;

Les sommes comprises dans l'usufruit sont placées;

Les denrées sont vendues, et le prix en provenant est pareillement place;

Les intérêts de ces sommes et les prix des fermes appartiennent dans ce cas à l'usufruitier.

Cette jurisprudence est bien plus judicieuse, bien plus mûrie que celle de ces pays où, l'usufruitier pauvre, isolé ou étranger, ne trouvant

point de caution, l'on doit s'en tenir à la cau

(1) Projet de Code, page 12 du Discours préliminaire.

tion juratoire. Mais cette caution juratoire serait-elle aussi satisfaisante pour le propriétaire? Cette caution, qui n'est que de paroles, pourrait-elle valoir au propriétaire autant que lui valent les moyens prescrits par cet article?

ART. 603. Néanmoins, s'il est juste de n'admettre aucune caution juratoire dans le cas énoncé, il est également conforme à la justice et aux principes d'une équitable commisération de l'avoir adoptée dans le cas de l'article 603, où il est précisément dit que l'usufruitier peut demander, et les juges peuvent accorder, suivant les circonstances qu'une partie des meubles nécessaires pour son usage lui soit délaissée sous sa simple caution juratoire.

ART. 619.-L'article 619 établit que l'usufruit qui n'est pas accordé à des particuliers ne dure que trente ans.

On n'a pas adopté ici l'opinion du texte romain (1) Placuit centum annis tuendos esse municipes. A la vérité on ne pourrait trouver bien solide la raison qui y est alléguée, quia is finis vitæ longævi hominis est. Comment! is parce qu'un homme peut vivre cent ans, il faudra décerner l'usufruit aussi pour cent ans à une ville ou autre communauté? Je ne comprends pas la conséquence de ce principe: mais je comprends bien la doctrine de l'immortel Domat, qui, devançant l'opinion de notre Code, pensait qu'il y aurait eu bien plus de raison de fixer cet usufruit à trente années seulement (2).

Après avoir donné avec beaucoup de précision la définition de l'usufruit, après en avoir expliqué la nature, après avoir dit comment et sur quelle chose il peut s'établir, on est passé de suite, art. 582 et suivants, aux droits de l'usufruitier, sans s'occuper des autres distinctions que des interprêtes des siècles passés avaient inventées en les exprimant par des locutions étrangères au texte, et vraiment barbares, telle que celle-ci : Inter usumfructum casualem et usumfructum formalem, sous le prétexte qu'elles étaient plus propres à l'intelligence des anciens jurisconsultes, tandis qu'au contraire d'interminables disputes et d'innombrables procès ont été les seuls fruits de ces subtilités.

Législateurs, je vous ai peut-être entretenus

(1) Liv. VIII, ff. de Usuf. et usuf. legato. L. An Usuf 56 de Usuf.

(2) Titre XI de l'Usufruit, in fine..`

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plus qu'il ne fallait du droit romain; mais je suis né en Italie, d'où il tire son origine, où les Pandectes ont été retrouvées, où ses maximes triomphent, et où il faisait notre droit com

mun.

En sollicitant votre indulgence, j'emprunterai la voix d'un Français, du célèbre Dumoulin: il s'exprime ainsi dans sa préface de la Coutume de Paris, n.o 110: E jure scripto mutuamur quod æquitati consonum invenitur, non quod fuerimus subditi Justiniano aut successoribus ejus, sed quia jus illo auctore à sapientissimis viris ordinatum, tam est æquum, rationabile, et undequaque absolutum, ut omnium ferè christianarum gentium usu et approbatione commune sit effectum.

Je ne ferai pas une analyse plus étendue des dispositions du titre. Elles ne sont susceptibles d'aucune objection, et n'ont par conséquent pas besoin d'être développées : il suffira donc de vous en faire lecture pour que votre sagesse les apprécie.

(1) Sans doute, législateurs, c'est un honneur bien grand que celui de pouvoir monter à cette auguste tribune, et il est encore plus grand pour moi, qui seul n'aurais jamais pu y aspirer.

Oui, législateurs, ce c'est que le bénéfice de la réunion accordé au peuple Piémontais qui a fait rejaillir sur moi cet honneur, non pas mon propre mérite.

Instruit depuis quelque temps par les lumières de mes illustres collègues, j'ai quelquefois espéré pouvoir satisfaire à la tâche qui m'était imposée de parler devant vous pour la première fois; mais, d'autre part, ébloui chaque jour par leur éloquence, frappé de l'énergie de leurs sentiments, pénétré de la justesse de leurs maximes, je n'ai pas le courage d'élever une voix impuissante et timide après tant d'orateurs qui rappellent souvent les Démosthène, les Cicéron et les Eschine.

Je ferai donc beaucoup mieux, de resserrer mon discours, et de le soustraire ainsi à une censure qui paraîtrait juste à plus d'un titre.

(1) Cette dernière partie du discours de M. Galli n'est pas insérée dans la discussion du projet de Code civil, imprimée en 5 vol. in-4; néanmoins nous avons cru devoir la conserver dans cette édition.

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Devenu citoyen français, seulement depuis une très-courte époque, il n'est pas surprenant que je n'aie pas suivi le conseil d'un de vos plus célèbres magistrats, d'Aguesseau, lorsqu'il dit qu'une de nos premières études doit être celle de notre patrie, de son histoire, de sa législation, de ses mœurs. Je ne suis pas à même à même, autant qu'un Français, de discerner toutes les beautés de votre Code, celles, dis-je, qui résultent de son parallèle avec les abus et les vices du précédent.

Je connais quelques-uns de ces inconvé nients, tels que cette masse immense, cet informe chaos de tant de coutumes; mais, je le répète, je ne suis pas à même de calculer exactement, et par une juste comparaison, tout le bien de l'un et tout le mal de l'autre.

En vérité, législateurs, je crains fort que, par suite de ce nouveau Code ne soient presque ensevelis dans un éternel oubli ces grands jurisconsultes de la France, Duaren, Talon Térasson, d'Aguesseau Domat Pothier; et il me fâcherait plus encore d'y voir ensevelis un Cujas, un Favre.

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Voulez-vous savoir le motif de ma juste prédilection? je vous le dirai.

Cujas, natif de Toulouse, fut appelé en Piémont, par Emmanuel Philibert. C'est dans ses écrits que les Piémontais apprirent les vrais éléments de la jurisprudence. Oui, l'université de Turin s'honore toujours de son nom. montais sont reconnaissants et le seront à Les Piémontais furent ses disciples; les Piéjamais.

Et quant à Favre, jadis premier président à Chambéry, il naquit à Bourg, en 1557; la Bresse était alors sous la domination de la Savoie.

D'autre part, il est consolant pour moi de penser que si ce nouveau Code est le fruit de profondes méditations, il fut surtout puisé dans les sources des lois romaines.

Et c'est d'après une source si pure et si sacrée, c'est d'après l'appui de tant d'hommes savants dont la France abonde, que son restaurateur, le génie du monde, s'est intimement persuadé de ce que disait Euripide Nihil est in civitate præstantius quàm leges bene positæ.

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