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donnés, le donataire sera dispensé de faire le rapport en nature. Dans le cas contraire ce rapport sera exigé.

Vous sentez, Législateurs, combien toutes ces règles, minutieuses peut-être au premier coup-d'œil, sont cependant essentielles et nécessaires; vous voyez aussi qu'elles sont fondées sur des principes de raison et de justice. Je ne m'étendrai pas davantage sur cet objet; je m'en rapporte à l'impression que la simple lecture fera certainement sur vos esprits.

ART. 382.-Le paiement des dettes est la première et la plus importante obligation des héritiers: les créanciers dont l'intérêt ne peut

être révoqué en doute peuvent s'opposer, pour la conservation de leurs droits, à ce que le partage soit fait hors de leur présence; mais ils ne peuvent pas attaquer un partage fait sans fraude en leur absence, à moins qu'il n'y eût été procédé au préjudice d'une opposition qu'ils auraient formée : ils sont bien maîtres d'intervenir, mais on n'est pas obligé de les appeler.

ART. 870.-Le projet règle la proportion

dans laquelle les cohéritiers et les légataires universels contribuent entre eux au paiement

des dettes; il conserve au surplus les droits des créanciers sur tous les biens de la succes

sion; et les règles proposées n'ayant d'ailleurs rien que de conforme à ce qui s'est pratiqué jusqu'à ce jour, je puis, je dois me dispenser d'entrer dans une plus longue expli

cation.

Je crois, Législateurs, vous avoir fait connaître l'esprit qui a dirigé la préparation de la loi la première intention du gouvernement a dû être de régler l'ordre des successions suivant le vœu de la nature, sa sollicitude a dû s'occuper ensuite des héritiers et des créanciers, véritables parties dans toute succession, pour n'offenser les intérêts ni des uns ni des autres.

Nous avons tracé des règles claires et précises, et nous avons cherché à les disposer dans un ordre qui en facilitàt l'étude et l'intelligence. Trop long-temps la volonté publique fut en quelque manière étouffée sous une masse de dispositions éparses, souvent incohérentes et * même contradictoires: chacun pourra désormais, avec un peu d'application, acquérir du moins la connaissance générale des lois qui doivent régir sa personne et ses propriétés :

il n'en faut pas davantage dans le cours ordinaire de la vie.

Mais on tomberait dans une étrange et funeste, erreur, si l'on pouvait supposer qu'une connaissance des lois, suffisante pour le commun des hommes, dût suffire également au magistrat chargé de les appliquer, ou au jurisconsulte qui exerce aussi une espèce de magistrature, bien flatteuse sans doute, puisqu'elle repose sur une confiance toute volontaire.

Ce n'est que par de longues veilles et par une profonde méditation sur les principes d'ordre naturel et de justice éternelle auxquels doivent se rattacher toutes les bonnes lois, que l'on peut apprendre à en faire une juste et prompte application dans cette variété infinie d'espèces que font éclore tous les jours mille circonstances imprévues, ou la malice inépuisable des plaideurs.

Malgré quelques dispositions bizarres qui ont échappé à d'utiles et successives réformes il sera encore nécessaire d'étudier dans nos coutumes l'histoire de la législation française, et d'y chercher les premières traces des règles que nous avons dû en extraire, comme plus adaptées au génie français et à nos mœurs

actuelles.

Mais c'est surtout dans les lois du peuple conquérant et législateur qu'on puisera, pour me servir des expressions d'un auteur moderne, ces principes lumineux et féconds, ces grandes cisions ou qui les préparent; c'est-là qu'il faut maximes qui renferment presque toutes les dé chercher, pour se les rendre familières et propres, ces notions sûres et frappantes qu'on peut regarder comme autant d'oracles de la justice.

Les compilations du droit romain ne sont pas, j'en conviens, exemptes de quelques défauts, ni d'un désordre qui doit en rendre l'étude pénible : mais quel courage ne serait pas soutenu par la perspective de cette riche et abondante moisson qui s'offre au bout de la carrière ! Les lois romaines, tirant d'ellesmêmes toute leur force sans autre autorité que celle de leur sagesse, ont su commander. à tous les peuples l'obéissance et le respect; un consentement unanime les a honorées du titre de raison écrite, et elles devront toujours être l'objet principal des méditations d'un bon magistrat et d'un véritable jurisconsulte.

De tous les privilèges dont l'homme s'enorgueillit, je n'en connais qu'un de réel; c'est

celui de pouvoir s'instruire et raisonner : sans doute l'exercice de cette faculté est utile dans tous les états; mais il est un besoin absolu pour ceux qui prétendent à l'honneur d'éclairer ou de juger leurs concitoyens.

Pardonnez, législateurs, des réflexions qui ne tiennent peut-être pas directement à l'objet que j'ai dû me proposer; j'espère cependant que vous ne les jugerez pas déplacées

dans un siècle où l'on semble épuiser toutes les ressources de l'esprit pour se dispenser d'acquérir de la science.

Je n'ajouterai qu'un mot: le projet que nous vous présentons, long-temps médité au conseil d'état, a encore acquis un degré de perfection par les observations des commissaires du Tribunat.

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TITRE II.

Des Donations entre-vifs et des Testaments.

Décrété le 13 floréal an x1 (3 mai 1803); — Promulgué le 23 du même mois (13 mai 1803).

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[ARTICLES 893 à 1100.]

EXPOSÉ DES MOTIFS, par M. le Conseiller-d'État BIGOT DE PRÉAMENEU. Séance du 2 floréal an x1 (22 avril 1803).

LÉGISLATEURS,

ART. 893. Le titre du Code civil qui a pour objet les donations entre-vifs et les testaments rappelle tout ce qui peut intéresser l'homme le plus vivement, tout ce qui peut captiver ses affections. Vous allez prononcer sur son droit de propriété, sur les bornes de son indépendance dans l'exercice de ce droit; vous allez poser la principale base de l'autorité des pères et mères sur leurs enfants, et fixer les rapports de fortune qui doivent unir entre eux tous les autres parents; vous allez régler quelle est dans les actes de bienfaisance et dans les témoignages d'amitié ou de reconnaissance, la liberté compatible avec les devoirs de famille.

Il est difficile de convaincre celui qui est habitué à se regarder comme maître absolu de sa fortune, qu'il n'est pas dépouillé d'une partie de son droit de propriété lorsqu'on veut l'assujétir à des règles, soit sur la quantité des bieus dont il entend disposer, soit sur les personnes qui sont Pobjet de son affection, soit sur les formes avec lesquelles il manifeste sa volonté.

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Lorsque la nature et la loi l'ont établi le chef et le magistrat de sa famille, il ne peut exercer ses droits et ses devoirs s'il n'a pas les moyens de récompenser les uns, de punir les autres, d'encourager ceux qui se portent au bien, de donner des consolations à ceux qui éprouvent les disgraces de la nature ou les revers de la fortune ces moyens sont principalement dans le meilleur emploi de son patrimoine, et dans la distribution que sa justice et sa sagesse lui indiquent.

Celui qui a perdu les auteurs de ses jours, et qui n'a pas le bonheur d'être père, croit encore avoir droit à une plus grande indépendance dans ses dispositions: il n'a de penchant à suivre que celui de ses affections ou de la reconnaissance. Si ses parents ont rompu ou n'ont point entretenu les liens qui les ont unis, il ne croit avoir à remplir envers aux aucun devoir.

C'est surtout lorsque l'homme voit approcher le terme de sa vie, qu'il s'occupe le plus du sort de ceux qui doivent après sa mort le représenter; c'est alors qu'il prévoit l'époque où il ne pourra plus, en tenant une balance juste, rendre heureux tous les membres de sa famille, et où les bons parents envers lesquels il avait réellement des devoirs à remplir, ne se distingueront plus de ceux qui n'aspiraient qu'à la possession de ses biens.

C'est dans le temps où la parque fatale commence à être menaçante, que l'homme cherche sa consolation, et le moyen de se résigner avec moins de peine à la mort, en faisant à son gré la disposition de sa fortune.

Quelques jurisconsultes opposent à ces idées d'indépendance dans l'exercice du droit de propriété, que celui qui dispose pour le temps où il n'existera plus n'exerce point un droit naturel; qu'il n'y a de propriété que dans la possession, qui finit avec la vie ; que la transmission des biens après la mort du possesseur appartient à la loi civile, dont l'objet est de prévenir le désordre auquel la société serait exposée, si ces biens étaient alors la proie du premier occupant, ou s'il fallait les partager entre tous les membres de la société, comme une chose devenue commune à tous.

Ces jurisconsultes prétendent que l'ordre primitif et fondamental de la transmission des biens après la mort, est celui des successions ab intestat, et que si l'homme a quelque pouvoir de disposer pour le temps où il n'existera plus, c'est un bienfait de la loi; que c'est une portion de son pouvoir qu'elle lui cède, en posant les bornes qu'il ne peut excéder, et les formes auxquelles il est assujéti; que la transmission successive des propriétés n'aurait pu être abandonnée à la volonté de l'homme, volonté qui n'eût pas toujours été manifestée, qui souvent est le jouet des passions, qui, trop variable n'eût point suffi pour établir l'ordre général que le maintien de la société exige, et que la loi seule peut calculer sur des règles équitables et fixes.

Ce systême est combattu par d'autres publicistes, qui le regardent comme pouvant ébranler les fondements de l'ordre social, en altérant les principes sur le droit de propriété : ils pensent que ce droit consiste essentiellement dans l'usage que chacun peut faire de ce qui lui appartient; que si sa disposition ne doit avoir lieu qu'après sa mort, elle n'en est pas moins faite pendant

sa vie, et qu'en lui contestant la liberté de disposer, c'est réduire sa propriété à un simple usufruit.

Au milieu de ces discussions, il est un guide que l'on peut suivre avec sûreté; c'est la voix que la nature a fait entendre à tous les peuples, et qui a dicté presque toutes les législations.

Les liens du sang, qui unissent et qui constituent les familles, sont formés par les sentiments d'affection que la nature a mis dans le cœur des parents les uns pour les autres; l'énergie de ces sentiments augmente en raison de la proximité de parenté, et elle est portée au plus haut degré entre les pères et mères et leurs enfants.

Il n'est aucun législateur sage qui n'ait considéré ces différents degrés d'affection comme lui présentant le meilleur ordre pour la transmission des biens.

Ainsi la loi civile, pour être parfaite à cet égard, n'a rien à créer, et les législateurs ne s'en sont écartés que quand ils ont sacrifié à l'intérêt de leur puissance le plus grand avantage et la meilleure organisation des familles.

Lorsque la loi ne doit suivre que les mouvements même de la nature, lorsque, pour la transmission des biens, c'est le cœur de chaque membre de la famille qu'elle doit consulter, on pourrait regarder comme indifférent que la transmission des biens se fit par la volonté de l'homme, ou que ce fût par l'autorité de la loi.

Il est cependant, en partant de ces premières idées, un avantage certain à laisser agir jusqu'à un certain degré la volonté de l'homme.

La loi ne saurait avoir pour objet que l'ordre général des familles ; ses regards ne peuvent se fixer sur chacune d'elles, ni pénétrer dans son intérieur pour calculer les ressources, la conduite, les besoins de chacun de ses membres et pour régler ce qui conviendrait le mieux à sa prospérité.

Ce sont des moyens de conservation que le père de famille peut seul avoir: sa volonté sera donc mieux adaptée aux besoins et aux avantages particuliers de sa famille.

L'avantage que la loi peut retirer en laissant agir la volonté de l'homme est trop précieux pour qu'elle le néglige; et dès-lors elle n'a plus à prévoir que les inconvénients qui pourraient résulter de ce qu'on aurait entièrement livré le sort des familles à cette volonté.

Elle peut u'avoir pas été manifestée, soit par négligence, soit par l'incertitude du dernier

moment; elle peut aussi être dégradée par des passions injustes: mais, soit que le chef de famille n'ait pas rempli sa mission, soit qu'il ait violé les devoirs et les sentiments naturels, la loi ne devra se mettre à sa place que pour réparer ses omissions ou ses torts.

Si la volonté n'a pas été manifestée, la loi n'a point à établir une règle nouvelle : elle se conforme, dans l'ordre des successions, à ce que font les parents lorsqu'ils suivent les degrés naturels de leur affection. Si ce n'est pas la volonté déclarée de celui qui est mort, c'est sa volonté présumée qui exerce son empire.

Lorsqu'elle est démentie par la raison, lorsqu'au lieu de l'exercice du plus beau droit de la nature, c'est un outrage qui lui est fait; lorsqu'au lieu du sentiment qui porte à conserver, c'est un sentiment de destruction et de désorganisation qui a dicté cette volonté, la loi ne fait encore que la dégager des passions nuisibles, pour lui conserver ce qu'elle a de raisonnable. Elle n'anéantit point les libéralités excessives, elle ne fait que les réduire. La volonté reste entière dans tout ce qu'elle a de compatible avec l'ordre public.

Ainsi, les propriétaires les plus jaloux de leur indépendance n'ont rien à regretter; ils ne peuvent la regarder comme altérée par la loi civile, soit que cette loi supplée à leur volonté non manifestée en établissant l'ordre des suc

cessions, soit que par des règles sur les dona

tions et les testaments elle contienne cette volonté dans des bornes raisonnables.

Que la faculté de disposer de ses biens soit un bienfait de la loi, ou que ce soit l'exercice du droit de propriété, rien n'est plus indifférent, pourvu que la loi ne soit pas contraire aux principes qui viennent d'être exposés. S'il en était autrement, si le législateur, dirigé par des vues politiques, avait rejeté le plan tracé par la nature pour la transmission des biens. si la faculté de disposer était resserrée dans des limites trop étroites, il serait dérisoire de soutenir que cette faculté ainsi réduite fût encore un bienfait, et que sous l'empire d'une pareille loi il y eût un libre exercice du droit de priété.

pro

Mais heureusement le système dans lequel la faculté de disposer a toute l'étendue que comportent les sentiments et les devoirs de famille, est celui qui s'adapte le mieux à toutes les for

mes de gouvernements, à moins que le gouverment ne soit absolument despotique.

En effet, lorsque les familles auront un intérêt politique à ce que la distribution des biens reçoive des modifications, d'une part cet intérêt entrera dans les calculs du père de famille, et de l'autre son ambition ou sa vanité seront contenues par les devoirs que la loi ne lui permettra pas de transgresser. La loi qui donnerait à l'ambition la facilité de sacrifier ces devoirs serait destructive des familles, et sous aucun rapport elle ne pourrait être bonne.

Il faut encore observer que la loi civile, qui s'écarte le moins de la loi naturelle par cela même qu'elle est susceptible de se plier aux différentes formes de gouvernements, est aussi celle qui peut le mieux fixer le droit de propriété, et le préserver d'être ébranlé par les révolutions.

Lorsque la faculté de disposer, renfermée dans de justes bornes, présente de si grands avantages, il n'est point surprenant qu'elle se trouve consacrée dans presque toutes les législations.

Les plus anciens monuments de l'histoire fournissent les preuves de l'usage des testaments, sans que l'on puisse y découvrir l'époque où cet usage a commencé.

Il eut lieu chez les Egyptiens.

On le retrouve dans les villes de Lacédémone, d'Athènes, et dans toutes les contrées de la Grèce.

Lorsqu'environ trois cents ans après la fondation de Rome ses députés revinrent d'Athènes avec le recueil de lois qu'ils adoptèrent, celle qui concerne les testaments est exprimée en ces termes : Pater familias, uti legassit super familiâ pecuniâque sud, ita jus esto.

Ainsi les Romains, pénétrés alors plus que jamais du sentiment de la liberté publique, ne lui trouvèrent pas de fondement plus solide qu'en donnant au père de famille une autorité absolue. Ils craignirent sans doute que la loi ne s'égarât plutôt que l'affection des pères; et cette grande mesure fut une des bases de leur gou

vernement.

Lestestaments étaient connus dans les Gaules avant que le droit romain y fût introduit. Marculfe, dans son recueil des formules, nous a conservé celles qu'on employait pour transmettre ainsi ses biens.

La faculté de disposer, soit par donation, soit

par testament, fait partie de la législation de Cette manière de disposer, dont on trouve tous les peuples de l'Europe. les premières traces dans la législation roChez les uns, et c'est, comme on l'a déjà ob-maine, n'entra point dans son systême priservé, le plus grand nombre, les législateurs ont pris pour base de tout leur systême la présomption des différents degrés d'affection des parents entre eux, et leur confiance dans cette affection les a déterminés à laisser aux parents eux-mêmes toute la liberté qui est compatible avec les devoirs que la nature ne permet pas de transgresser.

D'autres législateurs ont aussi établi l'ordre de succéder sur les présomptions d'affections, suivant les degrés de parenté; mais par une sorte de contradiction, n'ayant aucune confiance dans les parents, ils ont mis des bornes étroites à la faculté de disposer envers leurs parents, cette volonté a même été, dans quelques pays, entièrement enchaînée.

D'autres enfin se sont écartés de ces principes : ils ont cru qu'ils pouvaient mettre au nombre des ressorts de leur autorité le mode de transmission et de répartition des biens. Ils ne se sont pas bornés à donner une impulsion à la volonté de l'homme, ils l'ont rendue presque nulle, en ne lui confiant qu'une petite partie de biens.

On n'a point hésité, dans la loi qui vous est poste, à donner la préférence au systême fonté sur les degrés d'affection entre parents, et sur la confiance à laquelle cette affection leur donne droit.

Après avoir posé ce principe fondamental sur la transmission des biens, il a fallu en déduire des conséquences.

Déjà celles qui sont relatives aux biens des personnes qui meurent sans en avoir disposé vous ont été présentées dans le titre des successions.

Il reste à régler ce qui concerne les donations entre-vils et les testaments.

Il faut d'abord établir les principes généraux, fixer ensuite la quotité des biens dont on pourra disposer, et enfin prescrire des formes suffisantes pour constater la volonté de celui qui dispose, et pour en assurer l'exécution. Tel est le plan général et simple de cette importante loi.

ART. 896. Parmi les règles communes à tous les genres de dispositions, et que l'on a placées en tête de la loi, la plus importante est celle qui confirme l'abolition des substitutions fidéicommissaires.

Tome II,

mitif de transmission des biens. Le père de famille put, avec une entière indépendance, distribuer sa fortune entre ceux qui existaient pour la recueillir. Ils n'eurent point l'autorité de créer à leur gré un ordre de successions, et d'enlever ainsi la prérogative de ceux qui, dans chaque génération devaient aussi être investis de la même magistrature. L'esprit de fraude introduisit les substitutions l'ambition se saisit de ce moyen et l'a perpétué.

On avait réussi à éluder la loi pour avantager des personnes incapables de recevoir : on essaya le même moyen pour opérer une transmission successive au profit même de ceux qui ne seraient point sous le coup des lois exclusives.

Ce ne fut que sous Auguste dans le huitième siècle depuis la fondation de Rome, que les fideicommis au profit de personnes capables furent autorisés par les lois.

En France on comptait dix coutumes qui formaient environ le cinquième de son territoire, où la liberté de substituer avait été défendue, ou au moins resserrée dans des bornes très-étroites.

Dans le reste de la France les substitutions furent d'abord admises d'une manière aussi indéfinie que chez les Romains, qui n'avaient point mis de bornes à leur durée.

Il était impossible de concilier avec l'intérêt général de la société cette faculté d'établir un ordre de succession perpétuel et particulier à chaque famille, et même un ordre particulier à chaque propriété qui était l'objet des substitutions. L'ordonnance d'Orléans de 1560 régla que celles qui seraient faites à l'avenir ne pourraient excéder deux degrés; mais ce remède n'a point fait cesser les maux qu'entraîne cette manière de disposer.

L'expérience a prouvé que, dans les familles opulentes, cette institution n'ayant pour but que d'enrichir l'un de ses membres en dépouillant les autres, était un germe toujours renaissant de discorde et de procès. Les parents nombreux qui étaient sacrifiés et que le besoin pressait n'avaient de ressource que dans les contestations qu'ils élevaient, soit sur l'interprétation de la volonté, soit sur la composition du patrimoine, soit

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