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cision du contrat de vente pour cause de lé- | sion?

véritable époque de la promulgation de la loi II, au code de rescindenda venditione? Par quel prince a-t-elle été promulguée? Existe

La loi II au Code de rescindenda venditione, admet cette rescision lorsque la lésion est d'outre-t-il des lois contraires dans la vaste compilation moitié du juste prix.

Cette foi avait été adoptée en France, tant dans les pays de coutume que dans les pays de droit écrit.

L'introduction du papier monnaie pendant la révolution eut une telle influence sur les opérations commerciales, et produisit une si grande mobilité dans la valeur relative de toutes choses, que l'action rescisoire pour cause de lésion parut incompatible avec les circonstances dans lesquelles on vivait.

Les affaires prenant ensuite un cours plus réglé, on proposa de rétablir l'action rescisoire. Il y eut quelque diversité d'avis. On renvoya à statuer sur cet objet, lorsqu'on s'occuperait de la rédaction d'un Code civil.

Le moment est arrivé, et il s'agit aujourd'hui de savoir si l'action rescisoire pour cause de lésion sera ou ne sera pas consacrée par notre législation civile.

En France, nos jurisconsultes ont été uniformes jusqu'ici sur la justice de cette action. Quelques auteurs étrangers, et entre autres des docteurs allemands, ont publié une doctrine contraire à celle de nos jurisconsultes. Parmi ces auteurs il en est qui attaquent le principe même de l'action rescisoire, et qui soutiennent que la lésion, quelque énorme qu'elle soit, ne peut donner lieu à la rescision du contrat de vente. D'autres reconnaissent que le principe sur lequel on fonde l'action rescisoire, est bon en soi; mais qu'il ne peut être réalisé dans la pratique, sans entraîner des dangers et des abus de toute espèce.

Quelques-uns, avec plus de science que de lumières, ont cherché à établir que la loi II, au Code de rescindenda venditione, sur laquelle repose tout le systême de l'action rescisoire pour cause de lésion n'est pas l'ouvrage des empereurs auxquels on l'attribue; que ce texte se trouve en contradiction avec toutes les lois romaines publiées dans le temps de la république, et avec d'autres lois faites par les empereurs même que l'on suppose auteurs de la loi dont il s'agit.

Nous avons examiné la question sous les différents points de vue qu'elle présente.

D'abord nous avons écarté toutes les discussions de date et de chronologie. Quelle est la

du droit romain? Dans ce moment, toutes ces recherches sont plus curieuses qu'utiles. Nous savons que la loi II au Code de rescendenda venditione, est dans le Recueil de Justinien, et qu'elle a été constamment suivie et respectée parmi nous et dans presque tous les états de l'Europe. Quel poids peuvent donc avoir des dissertations obscures et uniquement relatives à la date de cette loi, lorsque tant de siècles et tant de peuples ont rendu si solennellement hommage à la sagesse de ses dispositions?

Dire que, dans les temps florissants de la république on ne connaissait point à Rome l'action rescisoire pour cause de lésion, c'est proposer une observation inconcluante. Les lois n'ont été faites que successivement, selon les besoins et les circonstances. L'orateur romain remarque qu'il fut un temps où il n'existait aucune loi contre le parricide. Une loi naît ordinairement d'un abus qui se manifeste, et qu'il importe à la société de réprimer. Tant que les mœurs gouvernent on a peu de lois. Les codes des nations se développent et s'étendent à mesure qu'on sent davantage le besoin de faire des lois pour corriger les mœurs. On a établi des lois contre le péculat, quand la fréquence de ce crime les a provoquées. On a vraisemblablement établi l'action rescisoire quand des surprises ou des fraudes jusque-là inouies ont averti le législateur qu'il était temps de ramener la bonne foi dans les ventes et dans les achats. Ainsi, il serait absurde de chercher un préjugé contre la loi II du Code de rescindenda venditicne, dans l'époque plus ou moins ancienne à laquelle cette loi peut avoir été publiée. Ceux qui croient avoir fait une découverte chronologique veulent tout rapporter à cette découverte, parce qu'on s'attache toujours fortement à ce que l'on sait le mieux. Mais le législateur et le jurisconsulte ont une tâche plus importante à remplir. Ils ne doivent pas se borner à recueillir et à concilier des textes épars; ils doivent choisir au milieu de toutes les idées et de toutes les maximes de législation qui ont été jetées dans le monde, celles qui se combinent le mieux avec les besoins de la société et le bonheur des hommes. En conséquence, laissant à l'écart tout ce

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qui est étranger au fond des choses nous avons uniquement pesé les principes qui pouvaient éclairer notre détermination.

Les auteurs qui attaquent l'action rescisoire pour cause de lésion jusque dans sa source prétendent que le contrat fait tout que les hommes ne doivent pas être admis à revenir contre leur propre fait; que la valeur des choses varie journellement; qu'elle n'est souvent relative qu'à la situation et à la convenance des personnes qui vendent et qui achètent; qu'il est impossible d'avoir une mesure fixe et commune; qu'il serait conséquemment déraisonnable de supposer et de chercher un juste prix autre que celui qui a été

convenu entre contractants.

A dieu ne plaise que nous veuillons affaiblir le respect qui est dû à la foi des contrats! Mais il est des règles de justice qui sont antérieures aux contrats même, et desquelles les contrats tirent leur principale force. Les idées du juste et de l'injuste ne sont pas l'unique résultat des conventions humaines; elles ont précédé ces conventions, et elles en doivent diriger les pactes. De-là les jurisconsultes romains, et après eux toutes les nations policées, ont fondé la législation civile des contrats sur les règles immuables de l'équité naturelle. Or, quelles sont ces règles?

Déjà, législateurs, vous les avez consacrées par vos suffrages.

Vous avez proclamé la maxime, qu'aucune obligation ne peut exister sans cause, qu'aucune obligation ne peut même exister sans une cause raisonnable et proportionnée. Quel est donc le sens, quelle est l'application de cette

maxime?

Di tinguons les contrats de bienfaisance d'avec les contrats intéressés. Pour la validité des uns et des autres, il faut sans doute une cause, car la nécessité de la cause s'applique indéfiniment à toutes les obligations, à tous les contrats.

Pour ce qui concerne les contrats de bienfaisance, la cause se trouve suffisamment dans le sentiment qui les produit. On n'a pas voulu priver les hommes du doux commerce des bienfaits.

On peut examiner, relativement à ces sortes de contrats, si la cause est contraire aux bonnes mœurs, si elle est licite ou si elle ne l'est pas; mais on ne peut jamais exciper du défaut de cause, parce que la cause d'un acte de bien

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faisance est toujours dans la hienfaisance même.

Il en est autrement des contrats intéressés. La cause de ces sortes de contrats est, selon les jurisconsultes, l'intérêt ou l'avantage, qui est le motif et comme la raison d'un engagement.

Il y a donc à examiner si cet intérêt ou cet avantage est réel ou imaginaire, s'il est proportionné, c'est-à-dire s'il y a un équilibre raisonnable entre ce que l'on donne et ce que l'on reçoit.

Dans un contrat de vente, la causé de l'engagement est, pour le vendeur, d'échanger une chose quelconque contre de l'argent, et pour l'acquéreur, d'échanger son argent contre la chose qu'on lui transporte. Ce contrat a été rangé dans la classe des contrats commutatifs. On définit le contrat commutatif, celui par lequel on donne une chose pour en recevoir l'équivalent.

De là vient le principe qu'il ne peut exister de vente proprement dite sans la stipulation d'un prix; et puisque le prix doit être l'équivalent de la chose vendue, il faut que le prix réponde à la valeur de cette chose: s'il y a lésion, c'est-à-dire, s'il n'y a point d'équilibre entre la chose et le prix, le contrat se trouve sans cause, ou du moins sans une cause raisonnable et suffisante à l'égard de la partie.

Ainsi, l'action rescisoire pour cause de lésion a son fondement dans les maximes communes à tous les contrats, et elle est uné conséquence immédiate, une conséquence nécessaire de la nature particulière du contrat de vente.

Tout cela est bon en théorie, dit-on; mais comment connaitre dans la pratique que le prix stipulé dans un acte de vente et équivalent à la chose vendue? Peut-on avoir une mesure connue et fixe? la situation respective des parties, leur convenance n'exigeraient-elles pas une mesure particulière pour chaque hypothèse, pour chaque contrat?

Pourquoi donc la convention ne serait-elle pas l'unique loi des parties, puisqu'elle est le plus sûr et même l'unique, garant de leur désir et de leurs besoins réciproques?

La réponse à ces objections exige un certain développement.

En général, la valeur de chaque chose n'est que l'estimation de son utilité.

On appelle prix la portion ou la somme

d'argent qui, comparée à cette valeur, est réputée lui être équivalente?

On a toujours distingué le juste prix d'avec le prix conventionnel : on a eu raison; car le prix conventionnel et le juste prix diffèrent souvent l'un de l'autre.

Le prix conventionnel n'existe que par le fait même de la convention; il ne peut être que le résultat des rapports singuliers qui rapprochent les contractants. Le juste prix est déterminé par des rapports plus étendus, qui ne tiennent pas uniquement à la situation particulière dans laquelle deux contractants peuvent accidentellement se trouver.

Le prix conventionnel n'est que l'ouvrage des volontés privées qui ont concouru à le fixer. Le juste prix est le résultat de l'opinion com

mune.

tous les jours le prix conventionnel avec le juste prix, pour savoir si un contrat auquel on donne le nom de contrat de vente en a véritablement les caractères et la nature. Ainsi on juge par la vilité du prix stipulé dans un acte, que cet acte, présenté comme une vente, n'est qu'une donation déguisée. On juge encore par la vilité du prix, que, sous la forme d'une vente faite avec faculté de rachat, on a voulu cacher un prêt sur gage. Enfin c'est par la vilité du prix que l'on découvre si l'abandon d'un immeuble sous la condition d'une rente viagère présente un contrat onéreux ou une pure libéralité.

Or, si les lois présupposent l'existence d'un juste prix indépendant du prix conventionnel, lorsqu'il s'agit de prononcer sur les questions que nous venons d'annoncer, comment pourraiton méconnaître ce juste prix quand il s'agit de lésion? La lésion n'est-elle pas une injustice inconciliable avec les principes d'équité et de réciprocité qui doivent être l'ame de tous les contrats? N'avons-nous pas démontré qu'elle choque l'essence même du contrat de vente? Pourquoi donc voudrait-on renoncer à l'espoir de la découvrir et de la faire réparer?

La lésion, en soi, est odieuse et illicite. Déjà l'action rescisoire, pour cause de lésion, est admise, dans notre Code civil, comme un moyen légal de restitution; car la lésion simple fait restituer les mineurs; et la loi déclare qu'ils ne sont point restitués comme mineurs, mais comme lésés: Non tanquam minor, sed tanquam læsus.

Nous vivons en société. Tout ce qui forme la propriété parmi les hommes réunis dans la même patrie, dans la même cité, 'n'est pas tout à la fois dans le commerce. Les métaux ou les monnaies, qui sont les signes de la valeur des choses, ne circulent pas toujours en même quantité; la concurrence des vendeurs et des acheteurs n'est pas constamment la même : tout cela dépend de la situation et des besoins variables de ceux qui se présentent pour vendre et pour acheter. Il est vrai, néanmoins, que la situation et les besoins de tous les vendeurs et de tous les acheteurs, ou du plus grand nombre, different peu, si on considère les choses et les hommes dans le même temps, dans le même lieu, et dans les mêmes circonstances: or, c'est de cette espèce de conformité, de situation et de besoins que se forme par l'opinion publique une sorte de prix commun ou courant qui donne aux objets mobiliers ou immobiliers une valeur à peu près certaine tant que les mêmes circonstances subsistent. De là on voit journel-est lement le prix des marchandises et des immeubles annoncé dans les feuilles périodiques de nos cités principales,

Il y a donc pour chaque chose un juste prix уа qui est distinct et indépendant du prix conventionnel. Le prix conventionnel peut s'écarter et s'écarte réellement du juste prix, quand la cupidité d'une part, et la nécessité de l'autre, deviennent la seule balance des pactes ou des accords arrêtés entre les parties qui traitent en

semble.

On reconnaît si bien un juste prix indépendant du prix conventionnel, que l'on confronte

Lorsque vous avez adopté la partie du Code qui concerne les successions, vous avez décrété, législateurs, que la lésion du tiers au quart suffit pour faire rescinder un acte de partage passé entre majeurs.

En admettant dans le projet de loi qui vous aujourd'hui soumis, la lésion comme moyen de rescision contre le contrat de vente, nous n'avons donc fait qu'appliquer à ce contrat un principe récemment et solennellement consacré par vos suffrages..

Les partisans du systême contraire à celui du projet de loi remarquent qu'il y a une trèsgrande différence entre un acte de partage et un contrat de vente; qu'un acte de partage exige une égalité plus parfaite entre les parties; que, dans cette espèce d'acte, chacun doit exactement retirer ce qui lui appartient, tandis que dans un contrat de vente les contractants se livrent en quelque sorte à des spé

culations purement volontaires, déterminées par le besoin ou par la convenance du moment, d'où l'on conclut que des majeurs qui sont arbitres de leur fortune, et qui doivent savoir ce qu'ils font, sont peu recevables à se plaindre d'avoir été lésés. On ajoute que si l'action rescisoire pour cause de lésion pouvait être admise en matière de vente, il arriil arriverait souvent que l'on viendrait au secours d'un vendeur qui, après s'être ménagé par son contrat un secours d'argent auquel il serait redevable du rétablissement de ses affaires, ne craindrait pas de revenir ensuite contre son propre fait, et de se jouer de la foi de ses engagements. De plus les propriétés, dit-on, seraient trop incertaines; il n'y aurait plus rien de fixe dans le commerce de la vie. L'intérêt public, la sûreté des contrats et des patrimoines exigent donc qu'une vente ne puisse être rescindée pour cause de lésion.

par

Ces objections sont visiblement dictées par l'esprit de systême, qui ne considère jamais les choses avec une certaine étendue, et qui, dans ses observations, se jette ordinairement d'un seul côté, en perdant de vue tous les autres. Nous convenons qu'il y a de la différence entre un acte de partage et un contrat de vente; il faut une égalité plus parfaite entre des copartageants qu'entre des individus qui vendent et qui achètent : mais cette différence n'a jamais été méconnue. Les lois qui ont admis l'action rescisoire dans les actes de tage et dans les contrats de vente n'ont exigé qu'une lésion du tiers au quart pour faire rescinder les actes de partage; tandis qu'elles ont requis une lésion plus forte, telle, par exemple, qu'une lésion d'outre moitié du juste prix, pour faire rescinder un contrat de vente. Sans doute, il faut observer l'égalité dans les actes de partage mais est-il un seul contrat dans lequel il soit permis de ne point garder la bonne foi ou de ne point observer la justice? On ne cesse de répéter que les contrats de vente ne sont que des spéculations déterminées par le besoin ou par la convenance. Expliquons-nous une fois pour toutes sur ce point. Nous l'avons déjà dit : en matière de vente on appelle en général besoin ou convenance du vendeur le besoin ordinaire que tout vendeur a de vendre pour avoir un argent qui lui convient mieux que sa marchandise ou son immeuble. On appelle besoin de convenance de l'acheteur le besoin que tout acheteur a

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Il est sans doute naturel que l'on veuille vendre cher et acheter à bon marché : c'est ce que les lois civiles de toutes les nations recon- . naissent lorsqu'elles déclarent qu'il est permis, jusqu'à un certain point, à un vendeur et à un acheteur de se circonvenir mutuellement : sese invicem circumvenire, pour tirer le meilleur parti possible de leur position respective. Mais il ne faut pas étendre trop loin cette sorte de permission ou de tolérance.

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Le juste prix des choses ne réside pas dan's un point indivisible; il doit se présenter à nous avec une certaine latitude morale: deux choses, quoique de la même espèce, ne sont jamais absolument ni mathématiquement semblables. L'avantage que l'on peut retirer des mêmes choses n'est jamais exactement le même pour tout vendeur et pour tout acheteur; il serait donc impossible de partir, pour la fixation du juste prix, d'une règle absolue et inflexible dans tous les cas: mais si l'on veut asseoir le règne de la justice, il ne faut pas que l'on puisse s'écarter trop considérablement de ce prix commun, qui est réglé par l'opinion, et qu'on appelle le juste prix, puisqu'il est le résultat équitable et indélibéré de toutes les volontés et de tous les intérêts.

La lésion résulte de la différence qui existe entre le prix commun ou le juste prix, et le prix conventionnel.

Toute lésion pratiquée sciemment est un acte d'injustice aux yeux de la morale, mais ne saurait être un moyen de restitution aux yeux de la loi. La vertu est l'objet de sa morale. La loi a plus pour objet la paix que la vertu. Si la moindre lésion suffisait pour résoudre la vente. il y aurait parmi les hommes presqu'autant de procès qu'il se fait d'acquisitions. C'est pour éviter cet inconvénient général que les lois romaines avaient cru devoir fermer les yeux sur quelques inconvénients particuliers, et prendre une sorte de milieu entre les règles d'une justice trop exacte et les spéculations odieuses de la cupidité humaine. Ces lois avaient en consé. quence abandonné à la liberté du commerce tout l'espace qui est entre le juste prix et la lésion d'outre moitié de ce juste prix, espace

dans lequel le vendeur et l'acheteur ont la fa-, culté de se jouer. Dans le nouveau projet de loi, nous allons plus loin que les législateurs romains: nous exigeons que la lésion excède les sept douzièmes du juste prix; mais il faut convenir que quand une lésion aussi énorme est constatée, on ne pourrait la tolérer sans renoncer à toute justice naturelle et civile.

Il importe peu d'observer que l'on peut rencontrer des bypothèses dans lesquelles un vendeur qui n'aurait aucune ressource s'il ne vendait pas, trouve dans le modique prix qu'on lui donne un secours suffisant pour commencer sa fortune ou la rétablir. Ce sont là des circonstances extraordinaires sur lesquelles on ne saurait fonder un plan de législation. Le plus souvent un acquéreur avide abuse de la misère et de la triste situation de son vendeur pour obtenir à vil prix une propriété arrachée, pour ainsi dire, au malheur et au désespoir.

Nous ajouterons que pour juger si un contrat est lésif, ou s'il ne l'est pas, il faut confronter le prix avec la chose, et non avec des circonstances accidentelles et fortuites, qui ne font pas partie du prix. La vente n'est point ordinairement un contrat aléatoire; elle ne le devient que quand elle porte sur des choses incertaines, et alors l'action rescisoire pour cause de lésion pas lieu mais toutes les fois qu'une vente porte sur une chose déterminée, il serait absurde qu'au lieu de juger du prix stipulé pour la valeur de la chose vendue, on fût admis à exciper des circonstances singulières et extraordinaires, dont les suites, sont incertaines et qui sont absolument étrangères au contrat.

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:

On prétend que des majeurs doivent savoir ce qu'ils font, qu'on ne doit point présumer qu'ils ont été lésés, et qu'ils ne doivent conséquemment pas pouvoir revenir contre la foi de leurs engagements sous prétexte de lésion.

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Dans plusieurs textes du droit la lésion ultradimidiaire est présentée plutôt comme une fraude que comme une simple lésion. Non læsio, sed potius deceptio. C'est sous ce même point de vue qu'elle a été présentée par six ou sept de nos anciennes coutumes, qui au lieu de se servir du simple mot de lésion, ont employé celui de déception d'outre-moitié.

Ce serait donc évidemment autoriser le dol et la fraude que de refuser l'action rescisoire dans les cas d'une lésion aussi considérable que celle qui est énoncée dans le projet de loi, et qui est plus qu'ultra-dimidiaire.

Au surplus, pourquoi le dol, l'erreur et la crainte sont-ils des moyens de restitution pour les majeurs eux-mêmes? C'est, entre autres raisons, parce que l'on présume qu'il n'intervient point un véritable consentement de la part de celui qui se trompe ou qui est trompé, errantis aut decepti nullus est consensus. Or peut-on dire que celui qui est énormément lésé aurait adhéré au contrat, s'il avait connu cette lésion, ou s'il avait été dans une situation assez libre pour ne pas la souffrir?

Quels sont les effets ordinaires du dol, de l'erreur et de la crainte? En dernière analyse ces effets aboutissent à une lésion que les lois veulent prévenir ou réparer, en protégeant les A entendre cette objection, on dirait que citoyens contre les diverses espèces de surprise des majeurs ne doivent jamais être écoutés qui peuvent être pratiquées à leur égard. Comquand ils se plaignent, Nous avons pourtant ment donc, dans quelque hypothèse que ce vu que dans le code civil ils sont écoutés, soit, les lois pourraient-elles voir avec indifmême pour cause de lésion, quand ils se plai-férence un citoyen lésé au-delà de toutes les gnent de l'inégalité qui s'est glissée dans un acte de partage.

Dans tous les contrats, le dol, l'erreur, une crainte grave, sont, par la disposition précise de nos lois, des moyens légitimes et suffisants pour faire restituer les majeurs. Or, la lésion, telle que le projet de loi la fixe, pour qu'elle puisse devenir un moyen de restitution n'équi

bornes, et d'une manière qui constate évidemment quelque fraude ou quelque erreur?

La majorité du contractant qui a été lésé empêche-t-elle qu'on n'assure à ce contractant l'action redhibitoire pour les vices cachés de la chose vendue, une indemnité raisonnable pour

(1) Dumoulin, dans son Traité De usuris.

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