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TITRE X I..

Du Dépôt et du Séquestre.

Décrété le 23 ventôse an XII (14 mars 1804); - Promulgué le 3 germinal (24 mars 1804).

[ARTICLES 1915 à 1963.]

EXPOSÉ DES MOTIFS, par M. le Conseiller-d'Etat REAL.

LÉGISLATEURS,

Séance du 18 ventóse an X11 (9 mars 1804).

Le gouvernement vous présente aujourd'hui le titre XI du livre III du Code civil; c'est celui qui traite du dépôt et du séquestre.

Dans une matière où les principes sont fixés depuis long-temps, il s'agissait non de créer des règles, mais de recueillir celles dont un long usage a démontré la justice et l'utilité; c'est ce que nous faisons dans le projet de loi qui vous est soumis..

il est néanmoins difficile de ne pas connaitre dans le dépôt quelque chose qui place la bonne foi inhérente à ce contrat dans des limites plus étroites que celles qui sont assignées à d'autres

contrats.

ART. 1930. -Le dépositaire ne pourra donc se servir de la chose déposée, si l'usage ne lui'en a été permis; car la chose peut rece voir du préjudice de ce simple usage.

Après avoir défini le dépôt, désigné sa gratuité, comme son principal caractère, et dé-il claré qu'il ne peut avoir que des choses mobilières pour objet; le projet conserve sa division naturelle en dépôt volontaire et dépôt nécessaire.

Le dépôt volontaire est un contrat dont les règles, en ce qui touche à la manière dé le former et à la capacité des personnes, ne présentent rien que de conforme aux principes admis dans les conventions en général.

Il faut en dire à-peu-près autant des 'obligations respectives qui en naissent.

ART. 1927, 1928, 1929-Ainsi, le dépositaire doit tous ses soins à la chose déposée; et si elle se détériore par son fait ou sa négligence, il en répondra selon le degré d'intensité que done neront à cette responsabilité, soit les conventions des parties, soit les circonstances dans lesquelles le contrat se sera formé; mais il ne répondra des accidents de force majeure qu'au tant qu'il aura été mis en démeure de restituer la chose déposée.

Tous les contrats sont de bonne foi, et nulle part dans le Code l'on n'a attribué plus spécialement ce caractère aux uns qu'aux autres;

Si elle lui a été remise scellée ou cachetée ne devra rien se permettre pour la décou vrir ce serait un abus de confiance. ART. 1932. Quelle que soit cette chose,. il devra rendre celle qui lui aura été confiée, la rendre identiquement, et cette règle sera ob servée même quand il s'agirait de sommes monnoyées; autrement, et s'il suffisait de rendre. en pareilles quantités ou espèces, le contrat. serait dénaturé, et le dépôt se trouverait converti en un simple prêt ou commodat.

ART. 1936. Si la chose déposée produit des fruits ils appartiennent au déposant, comme un accessoire de la propriété qui n'a point changé de mains: le dépositaire devra "done" en faire raison.

Telles sont ses principales obligations; mais il peut accidentellement en être rédimé, comme il peut lui en survenir d'autres: par exemple, si la chose lui a été enlevée par une force majeure et remplacée par une autre, il ne devra plus restitution de la chose déposée, mais bien de celle qui aurait été laissée en remplacement:

ART. 1935. En thèse générale, l'héritier est tenu de la même manière et avec la même:

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étendue que celui qu'il représente; mais en matière de dépôt, cette règle recevra une exception. Ainsi, si l'héritier du dépositaire aliène la chose déposée, mais qu'il aura cru lui appartenir, sa bonne foi viendra à son secours, et il ne devra que le prix qui aura été convenu dans l'acte de vente.

ART. 1944. Mais en quel temps la restitution sera-t-elle faite et à qui?

Le dépôt doit être restitué dès qu'il est réclamé; il n'y a point à cet égard de stipulation de délai qui puisse s'opposer à la remise du dépôt; et le dépositaire, qui doit toujours être prêt à le rendre, peut y être nécessairement contraint si d'ailleurs il n'existe pas entre ses mains de saisies ou des oppositions qui empêchent la restitution de la chose déposée.

Cette restitution ne peut être valablement faite qu'au déposant ou à la personne qu'il a proposée; ou, s'il est mort, à ceux qui le représentent, et qui, en cas que le dépôt soit indivisible, doivent s'accorder pour le recevoir.

S'il y a eu changement d'état dans la personne du déposant, comme si le dépôt a été fait par une femme qui depuis est mariée et aura transporté l'administration de ses biens à son mari, la restitution du dépôt sera faite à celui-ci.

Dans l'hypothèse inverse, si un mari ou un tuteur ont déposé une chose appartenante à la femme ou au pupille, et que le titre de l'administration cesse avant la remise du dépôt, la restitution s'en fera soit à la veuve, soit au pupille devenu majeur.

ART. 1938. L'extrême simplicité de ces règles diverses excluait toute controverse à ce sujet : mais si le dépositaire est instruit que la chose qui lui est remise à ce titre n'appartient pas au déposant, que devra-t-il faire, et comment en ce cas la restitution s'opérera-t-elle ? Cette question, la seule qui présentât quelque difficulté, a été examinée avec soin, et suivie de la décision comprise en l'article 1938.

Quelques avis tendaient à interdire dans l'espèce proposée toute restitution au déposant; mais on a jugé préférable de valider la restitution qui lui sera faite après néanmoins que le dépositaire aurait dénoncé le dépôt au propriétaire, avec sommation de le réclamer dans un délai suffisant.

Cet avertissement satisfait à la morale et à la justice; mais si celui qui a été averti ne fait

point ses diligences, la loi doit présumer que le déposant et le propriétaire se sont arrangés : en tous cas le dépositaire ne saurait être astreint ni à des poursuites ultérieures, qui pourraient l'exposer personnellement à des dommages et intérêts, ni à rester indéfiniment chargé du dépôt.

Je vous ai retracé, législateurs, les obligations du dépositaire : celles du déposant sont beaucoup moins étendues.

ART. 1947, 1948.- De la part de ce dernier, tout consiste à rembourser au dépositaire les dépenses qu'il a faites pour la conservation du dépôt, et à l'indemniser des pertes que ce dépôt aurait pu lui causer mais jusqu'au paiement de ces dépenses et indemnités, le dépôt peut être retenu; car il est naturellement et sans le secours d'aucune stipulation, le gage des créances dont il est la cause.

Après avoir traité du dépôt volontaire, le projet de loi qui vous est soumis règle ce qui3 est relatif au dépôt nécessaire.

Il ne s'agit plus ici d'un contrat, mais plus exactement d'un quasi-contrat fondé sur la nécessité, (Art. 1949) et dont les suites méritent d'autant plus la protection de la loi, que, dans la plupart des cas où il y a lieu d'eu faire l'application, cette application est récla mée par des êtres malheureux, victimes d'un incendie, d'une ruine, d'un pillage ou d'un. naufrage.

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ART. 1950. Quand au milieu d'une telle catastrophe on peut sauver ses effets, on le fait sans recourir aux moyens que la loi prescrit pour établir les conventions ordinaires; ainsi la preuve par témoins d'un tel dépôt sera admise, quand même son objet s'élèverait audelà de cent cinquante francs.

-

que

ART. 1953. C'est aussi un dépôt regardé comme nécessaire celui des effets qu'un voyageur apporte dans une auberge ou hôtellerie; car ils y sont placés sous la foi publique, et l'aubergiste repond et du dommage qui leur aurait été causé et même du vol qui en aurait été fait, à moins qu'il ne soit l'effet d'une force majeure.

Cette disposition depuis long-temps admise par nos lois était trop utile pour n'être pas maintenue dans notre nouveau Code. Sans doute elle impose de grandes obligations aux aubergistes et hôteliers; mais elle pourvoit à l'ordre public, et elle est indispensable pour la sécurité des voyageurs,

Je viens, législateurs, d'indiquer rapidement les dispositions qui s'appliquent au dépôt, et leurs motifs; il me reste à vous entretenir de la partie du projet relatif au séquestre.

Il y a deux espèces de séquestres, le séquestre conventionnel et le séquestre judiciaire.

ART. 1956. Le séquestre conventionnel et le dépôt diffèrent principalement entre eux, en ce que dans le dépôt, la chose déposée, soit qu'elle soit la propriété d'un seul ou la propriété indivise de plusieurs, appartient sans contradiction à ceux qui font le dépôt, au lieu que le séquestre s'applique de sa nature à des objets litigieux.

Ainsi, lorsque plusieurs personnes se disputent la propriété d'une chose et conviennent néanmoins que durant le litige elle restera en la possession d'un tiers désigné, c'est un séquestre conventionnel.

Un tel séquestre peut s'établir même sur des immeubles, et les obligations de celui qui en est chargé sont d'ailleurs très-peu différentes de celles du dépositaire.

ART. 1960.- Cependant la restitution de l'objet séquestré ne s'accomplit pas toujours d'une manière aussi simple que celle d'un dépôt. Dans cette dernière espèce les propriétaires sont connus ; dans le cas du séquestre, ils sont incertains, puisque leurs droits sont litigieux. Celui qui est chargé d'un séquestre même conventionnel ne pourra donc le remettre

qu'après le jugement du litige, ou, si les parties s'arrangent, du consentement de toutes celles intéressées au séquestre : nous disons du consentement de toutes les parties intéressées; car l'on n'a pas cru que cette disposition dût se borner aux seules personnes qui auraient constitué le séquestre, mais qu'elle devait s'étendre à toutes celles qui, par leur intervention au litige, auraient manifesté des prétentions capables d'exiger leurs concours lors de la remise de l'objet séquestré.

ART. 1963. Ce qui vient d'être dit à l'égard du séquestre conventionnel laisse peu de chose à dire sur le séquestre judiciaire.

En effet, si l'on en excepte la disposition qui assigne de plein droit un salaire au gardien judiciaire, on trouvera que l'un ou l'autre de ces séquestres sont régis par des règles communes ou semblables, et il ne pouvait en être autrement; car la seule différence qui existe entre ces deux séquestres, c'est que dans l'un le gardien est nommé par les parties, et dans l'autre par la justice, mais dans les mêmes vues, et, dans l'un comme dans l'autre cas, pour la conservation d'une chose litigieuse.

Législateurs, la matière dont je viens de vous entretenir n'offrait point de difficultés sérieuses; simple dans son objet et juste dans ses détails, le projet qui vous est présenté n'a sans doute pas besoin de plus amples développements pour mériter et obtenir votre sanction,

TITRE XII.

Des Contrats aléatoires.

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Décrété le 19 ventôse an XII (10 mars 1804);-Promulgué le 29 du même mois (20 mars 1804). [ARTICLES 1964 à 1983.]

EXPOSÉ DES MOTIFS par M. le Conseiller-d'Etat PORTALIS.
Séance du 14 ventőse an x11 (5 mars 1804).

LÉGISLATEURS,

Les contrats aléatoires sont la matière du projet de loi qui vous est soumis. Il définit ces Contrats; il énumère leurs diverses espèces; et, après avoir distingué ceux qui appartiennent au

droit maritime d'avec ceux qui appartiennent au droit civil, il fixe les règles convenables à ces derniers.

Dans l'ordre simple de la nature, chacun est

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tenu de porter le poids de sa propre destinée; Le prêt à grosse aventure était connu des dans l'ordre de la société, nous pouvons, au anciens: nous en avons la preuve dans les lois moins en partie, nous soulager de ce poids surromaines. L'argent prêté dans la forme, et

les autres. C'est la fin principale des contrats aléatoires. Ces contrats sont le produit de nos espérances et de nos craintes: on veut tenter la fortune, ou être rassuré contre ses caprices. Aussi, dans tous les temps, on a commercé des choses incertaines et éventuelles. Les plus anciennes lois prouvent que les hommes, toujours jaloux de soulever le voile mystérieux qui leur dérobe l'avenir, ont constamment cherché à embrasser par leurs conventions des objets qu'ils peuvent à peine atteindre par leur faible prescience.

selon les principes qui régissent cette espèce de contrat, était appelé Pecunia trajectitia. L'emprunteur n'était tenu de rendre ni la somme principale ni le change, si le navire venait à périr par fortune de mer dans le cours du voyage déterminé: il était au contraire obligé de tout restituer avec l'intérêt nautique stipulé, si le voyage était heureux.

Mais les anciens n'avaient aucune idée de l'assurance, contrat infiniment plus étendu dans son application, et plus important par ses effets.

Noususs

Avant que la boussole ouvrit l'Univers, on de l'Afrique; l'existence de l'Amérique n'était ne connaissait que quelques bords de l'Asie et pas même soupçonnée. Le commerce maritime avait peu d'étendue et d'activité; les vues des

Quel est le résultat de ces conventions? Nous nous créons des biens présents, en assignant un prix à des probabilités plus ou moins éloignées; de simples espérances deviennent des richesses réelles; et des maux qui, peut-être, ne seront que trop réels un jour, sont écartés ou adoucis par la sagesse de nos combinaisons : nous amor-armateurs étaient rétrécies comme leur.comtissons les coups du sort, en nous associant pour les partager..

Enoncer le principe des contrats aléatoires, c'est avoir suffisamment justifié la légitimité de ces contrats. Quoi de plus légitime que de mettre en commun nos craintes, nos espérances et toutes nos affections, pour ne pas abandonner au hasard ce qui peut être réglé par le conseil, et pour nous aider mutuellement, par des pactes et pour nous aider mutuellement, par des pactes secourables, à courir avec moins de danger les diverses chances de la vie.!

Tous les contrats qui peuvent être réputés aléatoires ne sauraient recevoir un nom particulier. Les principaux sont :

ART. 1964.-L'assurance, le prêt à grosse aventure, le jeu et le pari, la rente viagère.

Parmi ces contrats, il en est dans lesquels une seule des parties contractantes s'expose à un risque au profit de l'autre partie, moyennant une somme que celle-ci donne pour prix de ce risque. Dans le plus grand nombre, chacune des parties court un risque à-peu-près égal,

En conséquence, le contrat aléatoire en général est défini par le projet de loi, une convention réciproque, dont les effets, quant aux avantages et aux pertes, soit pour toutes les parties, soit pour l'une ou plusieurs d'entre elles, dépendent d'un événement incertain.

Dans l'énumération des contrats aléatoires, l'assurance et le prêt à grosse aventure occupent le premier rang.

merce. Avec la boussole, des voyageurs hardis virent une mer immense, qui s'offrait à eux sans bornes; ils s'élancèrent avec intrépidité dans cette vaste région des orages, et ils découvrirent un nouveau ciel et une nouvelle

terre. Alors l'industrie humaine se fraya des routes jusque-là inconnues; l'Univers s'étendit, et l'Italie, qui, selon l'expresssion d'un auteur célèbre, avait été si long-temps le centre du monde commerçant, ne se trouva plus sous ce rapport que dans un coin du globe.

Cette époque fut celle des grandes entreprises commerciales. Le négociant ne fut plus étranger nulle part; ses affaires parti culières se trouvèrent liées avec les affaires publiques des différents Etats; il fut obligé d'avoir l'œil sur toutes les nations pour porter à l'une ce qu'il exportait de l'autre ; et de grands moyens devinrent nécessaires pour exécuter de grands projets.

Dans le nombre de ces moyens, le plus efficace peut-être fut l'invention du contrat d'assurance. Par ce contrat, qui consiste à prendre sur sei les périls que courent sur mer les marchandises d'un autre, il arrive que la fortune privée d'un armateur se trouve garantie par celle d'une foule d'assureurs de tous les pays, de toutes les contrées, qui consentent à lui répondre de tous les événements. Un seul particulier peut ainsi faire le commerce le plus riche et le plus étendu avec

le crédit, la force et les ressources de plu- | titude quelconque d'un événement. L'assu

sieurs nations.

Ce n'est sans doute pas le moment de développer les règles relatives au contrat d'assurance et au prêt à grosse aventure. Ces deux contrats demeurent étrangers au Code civil: le projet de loi n'en fait mention que pour déclarer qu'ils sont dans la classe des contrats aléatoires, et qu'ils sont régis par les lois maritimes.

On s'est occupé du jeu, du pari, et de la rente viagère.

CHAPITRE PREMIER.

Du jeu et du pari.

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ART. 1965. Il est déclaré que la loi n'accorde aucune action pour une dette du jeu ou pour le paiement d'un pari. ART. 1966. Les jeux propres à exercer au fait des armes, les courses à pied ou à che val, les courses de chariot, le jeu de paume, et autres jeux de même nature qui tiennent à l'adresse et à l'exercice du corps, sont exceptés de la disposition précédente.

Néanmoins on a cru devoir laisser aux tribunaux le droit de rejeter la demande, quand la somme leur paraît excessive.

Le principe que la loi n'accorde aucune action pour les dettes du jeu, n'est donc rigoureusement appliqué, dans le systême du projet de loi, qu'aux obligations qui ont leur source dans les jeux dont le hasard est l'unique élément. Les lois pourraient-elles protéger de telles obligations?

Nul engagement valable sans cause. La maxime est incontestable.

Or, quelle est la cause d'une promesse ou d'une obligation contractée au jeu? l'incerti tude du gain ou de la perte il serait im, possible d'assigner une autre cause.

Nous savons, que des événements incertains sont une matière licite à contrat, et que les espérances et les risques peuvent recevoir un prix; mais nous savons aussi qu'il faut quelque chose de plus solide et de plus réel que le désir bizarre de s'abandonner aux caprices de la fortune, pour fonder des causes sérieuses d'obligation entre les hommes,

Il est une grande différence entre un contrat qui dépend d'un événement incertain, et un contrat qui n'a pour cause que l'incer

Tome II.

rance, par exemple, le prêt à grosse aventure, dépendent d'un événement incertain. Mais l'incertitude de l'événement n'est pas le seul motif du contrat. La faveur accordée par les lois à l'assurance et au prêt à grosse aventure est fondée sur deux choses : le péril de la mer, qui fait que l'on ne s'expose à prêter son argent, ou à garantir celui des autres, que moyennant un prix proportionné aux chances que l'on court; et la facilité que les assureurs et les prêteurs donnent à l'emiprunteur ou à l'assuré, de faire promptement de grandes affaires et en grand nombre: au lieu que les obligations contractées au jeu, n'étant fondées sur aucun motif utile ni raisonnable, ne peuvent appeler sur elles la protection du législateur,

Que font deux joueurs qui traitent ensemble? Ils se promettent respectivement une somme déterminée, dont ils laissent la disposition à l'aveugle arbitrage du hasard. Où est donc la cause de l'engagement? On n'en voit aucune?

Le désir et l'espoir du gain sont pour chaque partie les seuls mobiles du contrat. Ce désir et cet espoir ne s'attachent à aucune action; ils ne supposent aucune réciprocité de service chaque joueur n'espère que de sa fortune, et ne se repose que sur le malheur d'autrui. A la différence des contrats ordi, naires qui rapprochent les hommes, les promesses contractées au jeu les divisent et les isolent.

On ne peut être heureux au jeu que de l'infortune des autres : tout sentiment naturel entre joueurs est étouffé, tout lien social est rompu. Un joueur forme le vœu inhumain et impie de prospérer aux dépens de ses semblables; il est réduit à maudire le bien qui leur arrive, et à ne se complaire que dans leur ruine.

On ne peut donc trouver dans les promesses et les contrats dont nous parlons, une cause capable de les rendre vraiment obligatoires. Sans doute le jeu peut n'être qu'un délassement, et dans ce cas il n'a rien d'o:lieux ni d'illicite; mais il est également vrai que sous ce rapport il ne saurait être du ressort des lois; il leur échappe par son objet et par son peu d'importance.

Le jeu dégénère-t-il en spéculation de commerce: nous retombons dans la première

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