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Ce projet d'article ne fut point mis en entier dans l'ordonnance, mais il a toujours été regardé comme une explication utile pour guider les juges et prévenir les abus; ces abus sont encore moins à craindre depuis que les motifs des jugements doivent y être énoncés.

On trouve dans cette ancienne loi, au nombre des ouvertures de requête civile, le cas d'un jugement sur des offres, ou sur des consentements qui aient été désavoués, et le désaveu jugé valable. On a tracé dans le présent Code, à l'égard des effets du désaveu jugé valable, une règle plus simple et plus expéditive.

ART. 483.-Les délais dans lesquels la requête civile doit être signifiée, ont été abrégés par les considérations précédemment développées.

ART. 488.-Il n'y avait rien à ajouter à la sagesse de l'ancienne ordonnance sur le temps où les délais commenceront à courir dans le cas de faux, de dol, de découverte de pièces nouvelles, de contrariété de jugements.

ART. 484.-A l'égard des mineurs, on observera que si, relativement à l'appel, on a cru pouvoir les soumettre au même délai que les majeurs, en prenant la précaution d'ordonner que le jugement sera signifié tant au tu teur qu'au subrogé tuteur, cette mesure ne pouvait s'appliquer à un jugement en dernier ressort, contre lequel il y a des moyens de requête civile. En vain le subrogé tuteur serait-il averti de ce jugement, lorsque ce n'est pas dans ses mains, mais dans celles du tuteur chargé de défendre le mineur, que sont les renseignements et les pièces.

Il n'y a pour le mineur, ainsi condamné de ressource assurée que dans le droit qui lui est donné de se pourvoir en requête civile, lorsqu'il sera devenu majeur.

Ce n'est pas même prolonger injustement Pincertitude du sort de ceux qui plaident contre les mineurs, puisque, dans presque tous les cas où la requête civile est admissible, celui qui a obtenu le jugement ainsi attaqué ne saurait être présumé avoir ignoré que la religion des juges n'a pas été éclairée, ou qu'elle a été surprise.

Cette considération, jointe à la crainte que le mineur n'ait eu aucune connaissance du jugement et des faits sur lesquels il peut établir son droit, ont paru des motifs suffisants pour imposer à l'adversaire l'obligation de signifier ce jugement au mineur devenu majeur, et ce sera seulement à compter de cette signification Tome II.

que commenceta le délai dans lequel la requête civile devra être présentée.

ART. 490, 491. Elle doit toujours être portée devant le tribunal où le jugement attaqué a été rendu; ainsi, lors même que l'occasion de se pourvoir en requête civile est survenue dans une contestation qui s'instruit en un autre tribunal, cette requête ne peut être présentée qu'au tribunal même qui a rendu le jugement. Dans ce dernier cas, l'ordonnance de 1667, avait fait, pour établir la compétence, plusieurs distinctions.

S'il s'agissait d'un jugement interlocutoire, ou d'un jugement dans lequel le demandeur en requête civile n'aurait pas été partie, la connaissance en était attribuée au tribunal où le jugement était produit.

La requête civile contre un jugement définitif, contradictoire ou par défaut entre les mêmes parties, devait être portée devant le tribunal qui l'avait rendu, à moins que les parties ne consentissent respectivement qu'il fût procédé sur cette requête devant le tribunal où le jugement était produit, ou qu'il fût sursis au jugement.

Dans ce systême, on avait considéré que, quand les parties avaient reçu définitivement la loi d'un tribunal, c'était à ce tribunal seul qu'il devait appartenir de la révoquer, à moins que les parties ne consentissent à se soumettre au tribunal devant lequel elles se trouvaient.

Ces dispositions furent dès-lors regardées comme étant d'une exécution difficile; elles sont tombées en désuétude ou ont été diversement exécutées.

Dans le nouveau code, on est parti, à cet égard, d'une idée plus juste et qui présente le moins d'inconvénients.

La requête civile n'y est, dans tous les cas, considérée que comme une suite, un complé ment de la procédure sur laquelle est intervenu le jugement ainsi attaqué.

Cette requête doit donc aussi, dans tous les cas, être renvoyée au tribunal qui a rendu le jugement.

Il y avait une grande erreur à faire dépendre. du consentement des parties, soit la compétence du tribunal où le jugement était produit, soit le sursis de la procédure.

On était, à l'égard de la compétence, tombé dans l'inconvénient qu'un tribunal inférieur se trouvait investi du pouvoir d'anéantir le jugement d'une cour souveraine.

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Quant au sursis de la procédure, il peut, dans le cas dont il s'agit, être un acte d'équité ou même de nécessité qui doit, indépendamment de la volonté des partics, être laissé à la prudence du juge.

diction en ce que, d'une part, l'autorité de la chose jugée ne pouvait être attaquée que dans certains délais et avec de grandes précautions tandis que, d'autre part, on pouvait, meine après le délai, et sans aucune forme, revenir encore contre les jugements.

A l'égard des jugements dans lesquels les demandeurs en requête civile n'ont pas été C'était ouyrir après coup le champ le plus parties, on ne peut pas dire qu'elle ne soit que libre aux procédures énormes, qui étaient la suite ou le complément d'une procédure; ils presque tou ours la suite des requêtes civiles. ont une autre voie, celle de la tierce opposi-Les moyens énoncés dans la consultation seront tion, qui, comme moins dispendieuse, était les seuls qu'il sera permis de discuter à l'aupréférée, lors même que l'ordonnance de 1667 dience ou par écrit. ouvrait à la fois aux plaideurs cette voie et celle de la requête civile.

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ART. 494, 495. On a maintenu les précautions prises par nos anciennes lois, pour que, sous le titre de requête civile, l'on ne présente pas des moyens non recevables, ou que l'on mettrait en avant, sans être en état d'en faire la preuve.

Les moyens seront rejetés, comme n'étant pas légitimes, et sans autre examen, si cette légitimité n'est attestée par trois anciens avocats; et si le demandeur en requête civile n'a d'avance consigné les sommes déterminées par la loi, à titre d'amende et de dommages et intérêts.

ART. 497.- Un autre moyen, plus puissant encore, contre les requêtes civiles dictées par la chicane, ou par la passion, se trouve dans la disposition qui ordonne l'exécution du jugement ainsi attaqué. Nulles défenses de l'exécuter ne peuvent être accordées; et même, lorsqu'il s'agira de délaissement d'un héritage, le demandeur en requête civile ne sera reçu à plaider qu'en justifiant que ce délaissement est effectué.

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ART. 501. Les effets de la requête civile, lorsqu'elle est admise, sont de remettre les parties dans le même état où elles étaient avant le jugement ainsi attaqué; les sommes consignées d'avance seront en conséquence rendues. Les objets de la condamnation qui auraient été perçus, seront restitués, et, dans le cas de deux jugements contraires, le jugement non rétracté reprendra toute sa force.

ART. 503. Il faut qu'il y ait un terme aux procédures; et si ce motif fait rejeter les requêtes civiles les mieux fondées, lorsqu'elles. n'auront pas été signifiées dans les formes et dans les délais prescrits, à plus forte raison ne doit-on point admettre une nouvelle demande en requête civile, soit contre le jugement déjà attaqué par cette voie, soit contre le jugement qui l'aura rejetée, soit enfin contre le jugement rendu sur le rescisoire. Non-seulement une pareille procédure sera nulle, mais l'avoué lui-même qui, ayant occupé sur la première demande, occuperait sur la seconde, sera responsable des dommages et intérêts.. De la Prise à partie.

ART. 505.

Si, dans le Code, on avait pu se décider par les sentiments de respect qu'inspirent en France, plus que dans toute autre partie de l'Europe, l'impartialité, l'exactitude et l'extrême délicatesse des magistrats, on n'y aurait même pas prévu qu'il pût s'en trouver dans le cas d'être pris à partie; mais ne suffit-il pas que des exemples, quelque rares qu'ils soient, puissent se présenter, pour que la magistrature entière doive désirer qu'il y ait une loi sévère, sous l'égide de laquelle les parties lésées obtiendront des dommages et intérêts, ou feront même, suivant les circonstances, prononcer des peines plus graves?

S'il faut que les parties aient l'assurance

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d'obtenir justice même contre leurs propres juges, l'intérêt public exige aussi que les ministres de la justice ne soient pas dépouillés de toute dignité, comme ils le seraient, si les plaideurs, au gré de leur ressentiment et de leurs diverses passions, avaient le droit de les obliger de descendre de leur tribunal, pour justifier de leur conduite. Cet abus nous replacerait au temps où, par un reste d'abus encore plus grand de l'ancien régime féodal, les juges étaient eux-mêmes responsables de leurs jugements.

Entre les magistrats et leurs plaideurs, il n'est qu'une seule autorité qui puisse en même-temps convenir à la dignité des uns et à la sûreté des autres; c'est l'autorité de la loi elle-même, qui en spécifiant les cas dans lesquels un plaideur doit être admis à traduire en justice son propre juge, pose la barrière que le respect dû à la magistrature doit empêcher

de franchir.

Les causes légitimes de prise à partie, énoncées dans le Code, sont le dol, la fraude ou la concussion, qu'on prétendrait avoir été commis, soit dans le cours de l'instruction, soit lors du jugement.

Les juges peuvent encore être poursuivis pour le paiement de dommages et intérêts, lorsque la loi les déclare responsables sous cette peine. Ces cas sont bornés à ceux où les juges sont inexcusables ils n'auront point, dans leurs fonctions, à craindre comme un écueil les rigueurs de la loi. Elle prend une juste confiance dans le respect qu'elle leur inspire.

Un fait inexcusable et qui a dû fixer l'atteation des législateurs, est le déni de jus

tice.

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que le déni de justice soit à la fois prouvé et caractérisé par deux réquisitions faites aux juges, dans la personne des greffiers: si les parties sont en souffrance, elle ne sera que très-peu prolongée par ces réquisitions, qui se feront à des intervalles très-courts, et l'huissier qui refuserait de les signifier serait interdit.

Dans l'ancienne législation, les sommations de juger ne pouvaient être faites qu'aux juges dont la juridiction n'était pas en dernier ressort; on n'avait, à l'égard de ceux dont les jugements étaient souverains, d'autre ressource que de porter ses plaintes au Chancelier ou au Conseil du Roi. On arrêtait ainsi le cours de la justice par égard pour la dignité des magistrats. Mais la dignité de la justice elle-même ne serait-elle pas dégradée si, en considération de ses ministres, sa marche était variable ou chancelante? Ne doit-on pas encore observer que des juges souverains, ordinairement placés dans un plus grand tourbillon d'affaires, et moins rapprochés des plaideurs que les autres juges, sont plus exposés à laisser, contre leur intention, des parties en souffrance!

Peut-être aussi avait-on peine à concilier l'idée du respect envers les magistrats avee l'idée qu'emportait l'expression même de sommation. Un acte de réquisition ne pourra blesser la dignité d'aucun juge.

ART. 510. Ce serait en vain que, dans la loi, on aurait énoncé comme nécessaires les causes qui autorisent la prise à partie, s'il suffisait de les alléguer, pour qu'un juge fût traduit en justice. Il est donc également indispensable que de pareilles allégations soient soumises d'abord à l'examen du tribunal devant lequel la demande sera intentée; il la rejetera si, dénuée de vraisemblance, elle ne lui paraît avoir d'autre fondement que des passions, ou des ressentiments contre la justice, plutôt que contre les juges. « Les parties, disait le célèbre d'Aguesseau, dans un réquisitoire du 4 juin « 1699, doivent garder un silence respectueux « sur la conduite des ministres de la justice, jusqu'à ce que la justice elle-même ouvre la « bouche à leur plainte

«

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Le caractère du juge devra être respecté dans la requête même qui aura pour objet d'être autorisé à le poursuivre. Il est défendu, sous des peines graves contre la partie, et même contre rieux. son avoué, d'y employer aucun terme inju¬

ART. 509. Une autre garantie donnée à-la-fois aux juges et aux parties, est dans le degré de supériorité des tribunaux chargés de prononcer sur les demandes en prise à partie.

Ces demandes étaient, avant la révolution, considérées comme tenant à la haute police; et les parlements étaient en possession d'exercer cette juridiction sur les juges de tous les tribunaux de leur ressort, sans qu'il y eût, à cet égard, aucune loi générale.

Le recours immédiat au tribunal supérieur a le double avantage d'écarter toute inquiétude de prévention, de partialité, de ménagement, et d'empêcher qu'un juge ne soit traîné d'un tribunal à l'autre. Ces motifs ont fait décider que les cours d'appel prononceront sur les prises à partie contre les juges de paix, contre les tribunaux de commerce, ou de première instance, ou contre quelqu'un de leurs membres; contre un juge d'une cour d'appel, ou d'une cour criminelle.

ne

Les cours d'appel, les cours criminelles, ni même l'une de leurs sections qui, dans ses fonctions, représente la cour entière, peuvent être prises à partie que devant la hautecour impériale. Devant cette puissance suprême, l'autorité d'une cour de justice ne pourra la dispenser de se justifier; et l'éclatante solennité du jugement sera également propre à venger un corps auguste mal-à-propos inculpé, ou la magistrature entière, en frappant les mamagistrats coupables..

mé, et que l'une et l'autre partie ne consentissent qu'il demeurât juge.

On a peine à concevoir qu'un plaideur fasse descendre un juge de son tribunal pour l'inculper, et qu'en même-temps il consente à l'avoir pour juge; mais ce qui semble évident, c'est qu'un juge contre lequel une prise à partie a été admise, compromettrait et sa délicatesse et la dignité de la justice, si, même en supposant ce consentement il connaissait du différend à l'occasion duquel il a été pris à partie. Il ne serait même pas convenable qu'avant qu'il eût été statué sur la prise à partie, il pût connaître des autres causes, que son adversaire, les parents de cet adversaire en ligne directe, ou la personne qui lui serait unie par mariage, pourraient avoir dans le même tribunal.

C'est dans cet esprit que la disposition de la loi de 1667 a été modifiée.

Ainsi, sous tous les rapports, on a pris des précautions pour que la justice soit à l'abri des abus que pourraient commettre ses ministres, et des atteintes que voudrait porter à la dignité des juges l'animosité des plaideurs.

Telles sont, Messieurs, les règles à suivre par ceux qui voudront se pourvoir contre les jugements, soit par appel, soit par tierce opposition, ou requête civile, soit enfin par ceux qui voudront diriger leurs attaques contre les juges mêmes. Vous avez vu que ces règles ont été puisées dans les lois antérieures, ou indiquées par l'expérience. L'exposition qui vous sera faite des autres parties de ce Code, vous convaincra de plus en plus des efforts faits par le Gouvernement pour améliorer cete

ART. 514. L'ordonnance de 1667 avait interdit au juge pris à partie, la connaissance du différend qui avait donné occasion à cette attaque, à moins qu'il n'eût été follement inti-partie de la législation.

LIVRE V.

De l'Exécution des Jugements.

Décrété le 21 avril 1806,-Promulgué le 1.er mai suivant.
[ARTICLES 517 à 811.]

EXPOSÉ DES MOTIFS, par M. le Conseiller-d'Etat REAL.

MESSIEURS,

Séance du 11 avril 1806.

Nous venons vous présenter le cinquième Livre du Code de procédure civile.

Son titre seul suffit pour faire sentir toute son importance. Il s'agit de l'exécution des jugements, c'est-à-dire de l'exercice de tous les droits, de l'accomplissement de tous les devoirs et de toutes les conventions. Toutes les parties du Code qui ont précédé celle que nous avons l'honneur d'offrir à votre sanction, ne sont que des moyens pour arriver à ce but unique de toute action intentée, à cette exécution, sans laquelle les devoirs, les droits, les conventions, la propriété, ne seraient que de vaines théories sans application.

Ici, la force vient à l'appui du droit reconnu ou déclaré; mais comme, dans toute société bien organisée, nul ne peut, de sa propre autorité, obliger par la force son adversaire à remplir un devoir, à exécuter une convention, à obéir à un jugement, la force publique supplé à la violence particulière, et les officiers dépositaires de cette force interviennent pour l'exercer.

L'emplo de cette force n'est pas toujours nécessaire; armi ceux qui sont traduits en justice, il est quelques plaideurs de bonne foi qui obéissent Ss contrainte au jugement qui les a éclairés; il n est un plus grand nombre k qui, redoutant dispendieux de l'ea ution forcée, se résignent. Pour ces plaideurs, a suffi d'établir quelques dispositions, d'aprèssquelles on puisse facilement et promptent opérer et constater l'exécution volontaire." livre V, les titres relats premiers titres du aux Offres réelles et au Bénéfice de cession, se trouvent dans se trouvent dans

résultats déshonorants et

le livre I.er de la seconde partie, sont consacrés à l'exécution volontaire; les autres titres du livre V traitent de l'exécution forcée.

Dans les premiers livres, le législateur a ouvert au plaideur l'entrée du temple de la justice, et lui en a fait parcourir tous les détours. Dans le livre V, le plaideur n'est plus devant les tribunaux; le jugement est prononcé ; la partie condamnée est supposée, ou ne vouloir pas, ou ne vouloir plus s'opposer à son exécution.

En comparant cette partie du Code de procédure à la partie correspondante de l'ordonnance de 1667, vous reconnaîtrez d'abord que le projet soumis à votre sanction offre un systême entier et complet dont l'ordonnance de 1667 ne présentait que quelques parties.

Ainsi, comme dans l'ordonnance de 1667, vous trouverez dans cette partie du Code de procédure tout ce qui est relatif aux récep tions de caution, à la liquidation des dommages et intérêts, à la liquidation des fruits, aux redditions de comptes, à la liquidation des dépens, aux saisies-exécutions et à la contrainte par corps; mais vous trouverez de plus les. régles tracées pour les saisies-arrêts, pour les saisies de rentes, pour les saisies-immobilières, pour les distributions par contribution, et pour les ordres dont l'ordonnance de 1667 n'a point parlé.

Ces règles, il fallait les chercher soit dans les lois antérieures, dont presque toutes les dispositions étaient ou tombées en désuétude ou diversement interprétées, soit dans des déclarations, des arrêts du Consel, provoqués par des usages, des circonstances ou des besoins

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