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rir à des violences qui étaient souvent suivies des plus funestes accidents.

Je ne m'arrêterai point sur les articles suivants, qui ne font que rappeler les principes qui n'ont jamais été contestés et qui sont relatifs, soit aux formalités qui doivent être constatées par le procès-verbal d'emprisonnement et par l'écrou du débiteur, soit aux aliments, soit aux recommandations; je me contenterai d'arrêter un moment votre attention sur quelques articles qui contiennent, ou des dispositions nouvelles, ou des décisions sur quelques points controversés.

Ainsi, dans l'article 792, vous remarquerez la disposition d'après laquelle celui qui est arrêté comme prévenu d'un délit peut aussi être recommandé, et doit être retenu par l'effet de la recommandation, encore que son élargissement ait été prononcé et qu'il ait été acquitté du délit.

Ainsi, l'article 796 décide que la nullité de l'emprisonnement, pour quelque cause qu'elle soit prononcée, n'emporte point la nullité des recommandations.

Ainsi, d'après les articles 797 et 799, le débiteur dont l'emprisonnement a été déclaré nul, peut obtenir des dommages et intérêts; mais aussi il peut être arrêté un jour franc après sa sortie.

Ainsi, le paragraphe V de l'article 800 décide la question long-temps controversée, que le privilége du septuagénaire s'applique à celui qui commence sa 70.e année.

Dans ce titre, le législateur ne doit pas craindre d'établir franchement les conséquences nécessaires d'un principe dont l'admission a été jugée indispensable; et puisque la contrainte par corps a été adoptée par le Code, cette contrainte doit recevoir son exécution. Qu'elle soit une peine, comme l'ont pensé quelques jurisconsultes, qu'elle ne soit, comme d'autres l'affirment, qu'un moyen de forcer au paiement un débiteur que l'on présume tenir ses biens cachés, tous doivent au moins convenir que cette disposition rigoureuse inspire une crainte salutaire, prévient des spéculations hasardées, et peut seule arracher de quelques commerçants ce que la bonne foi obtient du plus grand nombre. Nous avons donc dû écarter toutes ces nullités fondées sur des moyens de pure considération; nous n'avons pas dû voir surtout l'affranchissement de la contrainte par corps dans un défaut de formes. (Art. 786.) Nous avons aussi dû sans doute rassurer le débiteur

contre toute espèce de surprise; mais, à cet égard, les plus grandes précautions ont été prises; et parmi ces précautions, il en est une que vous aurez remarquée, celle qui laisse au débiteur arrêté la faculté de se faire conduire devant le juge du lieu, qui, après l'avoir entendu, rend un jugement provisoire sur référé.

Ces jugements sur référé, introduits par la seule force des choses, inconnus dans quelques parties de l'empire, avaient besoin d'être mieux définis et régularisés; c'est ce qui a été fait par le titre qui termine cette partie du Code.

TITRE XVI.

Des Référés.

Notre projet de Code, comme toutes les lois qui ont traité de la procédure, fixe des délais avant l'expiration desquels aucun jugement ne peut être prononcé.

On a reconnu que les mêmes délais ne pou vaient convenir à tous les cas; et ils ont été pour certaines circonstances plus rapprochés, selon que ces circonstances requièrent plus ou moins de célérité.

Mais il n'est pas un homme, ayant l'expérience des affaires, qui n'ait eu occasion de reconnaitre très-souvent qu'il est des circonstances dans lesquelles le délai d'un seul jour, et même le délai de quelques heures, peuvent être la source des plus grandes injustices, et. causer des pertes irréparables.

C'est dans les grandes villes, c'est surtout dans cette capitale et au milieu de son immense population que cette vérité est, à chaque instant du jour, reconnue.

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Aussi, dès 1685, an édit donné pour l'administration de la justice du Châtelet de Paris, ordonne que dans plusieurs cas, dont il fait une longue énumération, le lieutenant civil pourra ordonner que les parties comparaîtront le jour même dans son hôtel pour y être entendues et étre par lui ordonné par provision ce qu'il estimera juste.

L'existence de cet édit nous permet de supposer qu'il n'a fait que confirmer ou régulariser un usage introduit bien antérieurement; usage que nous retrouvons encore dans cette assignation verbale dans cette clameur de haro, à laquelle les habitants de l'ancienne Normandie obéissaient avec une respectueuse soumission.

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Ce qui pouvait en 1685 n'être qu'utile, doit étre, sans contredit, reconnu indispensable en 1806. Il ne s'agit plus que de coordonner celte institution au systême général, et d'empêcher qu'on ne puisse en abuser.

D'après l'article 806, on ne doit prendre la voie du référé que dans les cas d'urgence, ou lorsqu'il s'agira de statuer provisoirement sur les difficultés relatives à l'exécution d'un titre exécutoire ou d'un jugement.

Les lignes tracées par la seconde partie de cette disposition sont assez fortement prononcées pour qu'on ne puisse les franchir sans une évidente mauvaise foi.

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Nous croyons que cette inquiétude n'est pas fondée, et que, sans rappeler la longue nomenclature des cas prévus par l'édit de 1685, la loi s'explique assez clairement en n'attri buant à l'audience des référés que les cas d'urgence. Le discernement et la probité du président ou du juge délégué feront le reste. Renvoyant à l'audience les contestations qui ne seraient portées en l'hôtel que par une indiscrète et avide précipitation, il n'hésitera point à prononcer sur celles auxquelles le moindre retard, ne fût-il que de quelques heures, peut porter un préjudice irréparable.

L'article 809, qui ordonne l'exécution provisoire de ces ordonnances, et qui les soustrait à l'opposition, empêche en même temps les abus qui pourraient en résulter, en prononçant que ces ordonnances ne font aucun préjudice au principal; que par conséquent elles sont essentiellement provisoires, et qu'elles ne pourront jamais devenir définitives que par un jugement d'audience.

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CODE

DE PROCÉDURE CIVILE.

DEUXIÈME PARTIE.

PROCÉDURES DIVERSES.

LIVRE Ier.

Décrété le 14 avril 1806; - Promulgué le 2 mai suivant.

[ARTICLES 812 à 906.]

EXPOSÉ DES MOTIFS par M. le Conseiller-d'État BERLIER.

MESSIEURS,

Séance du 12 avril 1806.

Le projet que SA MAJESTÉ nous a chargés de vous présenter fait partie de ceux qui doivententrer dans la composition du Code de la procédure civile.

Déjà vous connaissez la partie de ce travail qui s'applique au mode ordinaire d'instruire et de juger les contestations qui s'élèvent entre les citoyens.

L'on vous a donné connaissance aussi de ce qui regarde l'exécution des jugements:

Mais l'instruction des procès, dans le sens attaché à ce mot, et l'exécution des jugements, sont loin d'embrasser toutes les actions judiciaires que comportent les besoins de la société.

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genre, et où se fussent réunies toutes les autres actions judiciaires.

Si ce premier plan n'a pas été suivi, et si l'on a renoncé à un titre plus exact peut-être, mais dont la généralité eût rendu l'acception plus vague, le fond de la pensée est resté, et va se réaliser aujourd'hui, en insérant dans le Code dit de la Procédure, toutes les actions, même celles qui, sans constituer essentiellement des procès, peuvent intéresser le ministère du juge, ou celui des officiers de justice.

Sous ce point de vue, le Code qui vous est soumis aura l'avantage d'avoir réglé beaucoup d'objets que n'embrassait point l'ordonnance de 1667.

C'est d'après cette pensée que les hommes En effet, cette ordonnance, dont plusieurs qui, les premiers, s'étaient occupés du grand dispositions ont mérité d'être maintenues dans et utile projet de donner à la France un Code la partie du nouveau Code qui traite de la procivil, se proposaient d'y insérer un livre in-cédure ordinaire, n'en offre qu'un bien petit titulé des Actions, dans lequel la procédure nombre d'analogues aux titres qui vont vous eût été comprise, comme l'espèce l'est dans le être présentés. Tome II. 48

:

C'est dans des édits ou déclarations du Roi, | dans des statuts locaux et dans la jurisprudence, que se trouvent la plupart des règles qu'on appliquait aux procédures diverses, et il est inutile de dire qu'il y avait, sur plusieurs points, très-peu d'uniformité.

Ces sources ont été consultées; l'expérience a été respectée, non en maître qui commande, mais en guide qui éclaire.

Si l'on a adopté d'assez graves changements en quelques parties, ils ont été, ou indiqués par les vices reconnus de ce qui se pratiquait autrefois, ou prescrits par le besoin de mettre les nouvelles procédures en harmonie avec les règles posées par le Code Napoléon; car le but serait manqué, si le nouveau Code n'avait pas toujours en vue la loi fondamentale dont il doit être l'appui, et quelquefois le développement.

Législateurs, après cette exposition générale des vues qui ont présidé à cette partie du travail, je dois vous en faire connaître plus particulièrement les détails, en appliquant séparément à chacun des titres qui composent le premier livre de la II.e partie du Code de procédure, les observations qui les con

cernent.

Ces titres sont au nombre de douze. ART. 812. Le premier traite des Offres de paiement et de la Consignation.

Déjà le Code Napoléon (art. 1257 et suivants), a posé les principes propres à ce mode d'extinction des obligations, et il ne s'agit pas aujourd'hui de les remettre en discussion mais de régler tant la forme du procès-verbal d'offres, que la procédure à suivre pour faire statuer sur les offres et la consignation.

Les dispositions relatives à cet objet, peu nombreuses et extrêmement simples, n'ont nul besoin d'analyse.

ART. 819, 820, 821. Le titre II traite de la Saisie-gagerie et de la Saisie-arrêt sur débiteurs forains.

La saisie-gagerie, ou, en d'autres termes, la saisie à laquelle les propriétaires et principaux locataires de maisons ou biens ruraux font procéder, pour loyers et fermages à eux dus, sur les effets et fruits étant dans leurs bâtiments, ou sur leurs terres, a toujours été considérée comme une action digne de la plus grande faveur.

Cette faveur est due à l'origine de telles créances; elles ont toujours été privilégiées, et

l'article 2102 du Code Napoléon leur a conservé ce caractère.

Ainsi, les effets mobiliers qui garnissent une maison, ou les fruits qui proviennent de la terre, sont le gage naturel du propriétaire de la maison ou du champ.

Mais ce gage est mobile et pourrait échapper, si la loi n'en permettait pas l'appréhension par des voies promptes et faciles.

ART. 822. La saisie-arrêt sur débiteurs forains n'a pas sans doute la même faveur d'origine; mais la présence accidentelle du débiteur devient pour le créancier un juste motif de pourvoir à ses intérêts par des mesures promptes; car il y a péril dans le retard.

Dans l'une comme dans l'autre de ces espèces, il y a lieu de subvenir au créancier, en dégageant les saisies de quelques-unes des formalités ordinaires, sans néanmoins les en rédimer à tel point qu'elles puissent devenir vexatoires.

Ce sont ces vues qui ont présidé à la rédaction des sept articles qui composent le titre II, et leur simple lecture vous convaincra sans doute que leur objet a été rempli. ART. 826-829. Le titre III traite de la Saisie - revendication.

Il ne s'agit pas ici de cette revendication qui, en matière de commerce, s'exerce sur la chose vendue et livrée, mais restée intacte dans les mains de l'acheteur.

Ce sera une question peut-être que de savoir si un tel privilége doit exister, et s'il n'engendre pas plus de fraudes que de réels et justes avantages; mais cette question est réservée à la discussion qui s'ouvrira sur le Code de commerce, et notre projet a pris un soin extrême de ne rien préjuger sur les questions de cette nature.

La saisie-revendication, objet de ce titre, est celle que le propriétaire exerce sur sa chose non aliénée et détenue par un tiers.

Comme, dans une telle position, et en matière mobilière surtout, le détenteur de la chose aura ordinairement pour lui la présomption de propriété, si elle n'est pas détruite par un titre qui fasse voir que sa possession n'est que précaire, une grande circonspection sera souvent nécessaire pour permettre la saisie; non pourtant qu'il faille toujours l'exhibition d'un acte, mais du moins un examen judiciaire.

Ainsi, nulle saisie-revendication ne pourra procéder que d'une permission accordée par le président du tribunal, et sauf même, s'il ya, après cette permission, refus d'ouvrir les portes ou opposition à la saisie, à en référer au juge; pendant lequel temps il sera sursis aux poursuites.

Je passe au titre IV.

Ce titre traite de la Surenchère sur aliénation volontaire.

Il peut être considéré comme le complément des dispositions du Code Napoléon sur cette matière, et l'importance de quelques-uns des articles ajoutés m'impose le devoir de fixer plus spécialement votre attention sur eux.

ART. 832. - D'après le Code Napoléon, les créanciers hypothécaires peuvent surenchérir et requérir une nouvelle mise aux enchères du fonds vendu par le débiteur, sous diverses conditions, notamment sous celle de donner caution jusqu'à concurrence du prix et des charges.

Mais le délai pour remplir cette condition n'est point indiqué, et ce silence a donné lieu ou du moins fourni le prétexte de douter si cette obligation devait s'effectuer avant la nouvelle adjudication, ou s'il suffisait d'offrir à cette époque la caution prescrite.

La seule raison indiquait sans doute que la caution devait être fournie avant la seconde adjudication; un nouvel article l'exprime formellement, et désigne l'acte dans lequel cette offre doit être faite, ainsi que le délai pour la réaliser.

ART. 834, 835.- Un objet plus grave se présente à la discussion; ça été la question de savoir si les créanciers, ayant un titre hypothécaire antérieur à la vente, mais non inscrit à cette époque, pouvaient, comme les créanciers inscrits, ou ayant des hypothèques légales, requérir la mise aux enchères du fonds vendu par leur débiteur.

tissement d'agir, il convenait même d'ajouter un délai quelconque.

Pour la négative, on opposait principalement l'art. 2166 du Code Napoléon, qui n'accorde le droit de suivre l'immeuble, en quelques mains qu'il passe, qu'aux créanciers ayant privilége ou hypothèque inscrite; on ajoutait que tout le systême de la publicité reposait sur l'inscription, sans laquelle il ne pouvait y avoir d'autres hypothèques valables que les hypothèques légales, affranchies de cette formalité. L'on niait que le tiers acquéreur, eût besoin de transcrire son acte pour mettre son acquisition à l'abri des hypothèques non inscrites; et l'on observait, à l'appui de cette opinion, que la formalité de la transcription consacrée par la loi du 11 brumaire an VII (Art. 26), et reproduite dans le projet de Code Napoléon, en avait été formellement retranchée : d'où l'on concluait que la volonté du législateur s'était prononcée contre la transcription en ce sens qu'elle fût utile pour purger les hypothèques non inscrites, ou pour empêcher qu'il n'en fût établi de

nouvelles.

Il était difficile de ne point reconnaître cette dernière opinion comme la plus conforme au Code Napoléon; mais il était aisé de sentir que la première avait un but juste et utile, et présentait une modification qu'il était bon d'ac

cueillir.

Dans cette conjecture, on a adopté pour le passé et l'avenir un parti qui respecte les droits de l'un et de l'autre temps.

Comme la disposition nouvelle n'atteindra que les aliénations qui seront faites à l'avenir, les tiers-acquéreurs qui auront contracté sous l'empire de la loi qui nous régit en ce moment, n'en recevront aucun dommage.

A l'égard des créanciers, ils conserveront désormais la faculté de s'inscrire jusqu'à l'expiration de la quinzaine qui suivra la transcription de l'acte d'aliénation.

Pour l'affirmative, on se prévalait surtout des expressions générales de l'article 2182 du Code Napoléon; on ajoutait que le créancier ne pouvait perdre son hypothèque et les droits en résultant, par le seul fait de son débiteur vendant à son insu, et que le créancier devait au moins être mis en demeure par un acte ayant une grande publicité, tel que la transcription du contrat de vente: d'où l'on concluait que le droit du créancier même non inscrit subsistait jusqu'à cette transcription, à laquelle, en la considérant comme un aver-lui serait impossible de remplir.

Leur inscription tardive leur assignera, parmi les créanciers, un rang inférieur, mais elle n'éteindra pas leurs droits sur le fonds aliéné, et envers le tiers-acquéreur.

Celui-ci pourtant ne sera pas tenu de leur faire les significations prescrites à l'égard des créanciers inscrits; il est censé ne point connaître ceux dont l'inscription n'existe pas, et la loi ne saurait lui imposer une obligation qu'il

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