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pris par la mauvaise foi, ou arrachés au décou

ragement.

La faillite, qui n'était regardée que comme un malheur tant que la fraude n'était pas prouvée, laissait le failli indépendant pour l'administration de ses biens.

L'insouciance des créanciers, qui étaient sans guide et sans appui, les plaçait forcément dans la dépendance du débiteur.

Les syndics, choisis dans les premiers moments de la faillite, quelquefois par des créanciers supposés, souvent par des amis ou parents du failli, presque toujours par un petit nombre de créanciers présents qu'on désintéressait aux dépens des absents, déguisaient les malversations du failli, la vraie situation de la faillite, et forçaient les créanciers découragés à des traités désastreux, dont l'effet était d'óter au banqueroutier la honte, à ses victimes les trois quarts de leurs propriétés, et de laisser au débiteur les moyens d'afficher un luxe insultant. Si le traité n'avait pas lieu par la résistance de quelques créanciers indignés, l'union se formait; mais les liquidations étaient livrées à des hommes qui trouvaient leur intérêt à les éterniser: aucune autorité ne les surveillait, et les créanciers, fatigués par des lenteurs interminables, finissaient par renoncer à un espoir qu'aucune répartition ne soutenait,

Je ne parlerai pas des droits divers et souvent opposés des créanciers, de ceux des femmes qui, après avoir favorisé le luxe et le désordre de leurs maris, plaçaient sous leur nom, à l'abri de toutes poursuites, les dépouilles qu'ils avaient enlevées à leurs victimes: un orateur plus savant et plus éloquent que moi s'est chargé de vous exposer les lacunes de nos lois sur cette matière, et les moyens que nous avons cru devoir prendre pour remédier à ces abus.

L'ordre public n'était pas plus garanti que la propriété particulière. La loi ne connaissait que le malheur ou la friponnerie; elle présumait le malheur, il fallait prouver la fraude; le créancier en était chargé à ses frais; il était naturel qu'il s'occupât plus de sa propriété que de sa vengeance; aussi, malgré la sévérité de la loi contre les banqueroutes frauduleuses, rien n'a été plus rare que son application, et certes, rien n'était plus encourageant que cette impunité. *

- Après avoir exposé le tableau fidèle des abus qui existent, tableau dont nous ne croyons pas qu'on puisse contester la vérité, je dois

vous expliquer le systême de la loi nouvelle que nous proposons, afin de vous mettre à portée de juger si, comme nous osons nous en flatter, elle offre un remède suffisant à ces désordres, une protection assez vigilante aux créanciers, un frein assez redoutable pour l'inconduite et la fraude, et une garantie assez solide pour l'ordre public.

Le législateur, en s'occupant d'une loi si grave, se trouve d'abord placé entre deux écueils qu'il doit également éviter; celui d'être trop sévère pour le malheur, ou trop indulgent pour la mauvaise foi aussi, la première question qui nous a occupés, et celle dont la solution sert de base à tout le systême de la loi, est celle-ci :

ART. 439.- Un négociant qui manque à ses engagements, et qui fait faillite, doit-il être, par sa faillite, présumé frauduleux, ou considéré comme malheureux, jusqu'au moment où l'examen de tous ses livres et de toutes les créances aura fait reconnaitre la vérité?

Nous vous avons démontré tous les abus nés de l'ancienne loi, qui, ne regardant le failli que comme malbeureux, le laissait dans l'indépendance, lui conservait presque l'impunité, et forçait presque toujours les créanciers à signer à son gré son absolution et leur ruine.

D'un autre côté, il aurait paru bien rigoureux de considérer toute faillite comme un crime,, et de traîner devant les tribunaux criminels tout négociant que le malheur du temps ou la force des circonstances auraient mis dans l'impossibilité de remplir ses engagements.

Très-souvent la faillite est un naufrage dont on ne peut accuser que le sort : le commerce a ses orages comme l'Océan les événements du monde, les mouvements de la politique, la guerre, la paix, la disette, l'abondance même, apportent des changements imprévus, donnent des commotions subites au commerce, et troimpent ses combinaisons les plus sages; souvent, enfin, un négociant, trompé par sa confiance, et accablé à la fois par plusieurs banqueroutes qu'il éprouve, est contraint lui-même de manquer à des engagements qu'il se croyait certain de pouvoir tenir.

Ces considérations, justes et puissantes, doivent fixer fortement l'attention du législa teur, et l'éloigner également, et d'une sévérité trop inflexible, et d'une indulgence trop dangereuse,

On a donc cru qu'il fallait considérer tout failli, non comme un coupable, non comme un homme innocent, mais comme un débiteur dont la conduite exigeait un examen rigoureux et une solide garantie.

Il existe un délit, puisqu'il y a eu violation d'engagements et de propriétés. Celui qui a commis ce délit peut y avoir été conduit par le malheur, par l'inconduite ou par la mau

vaise foi.

Si c'est par le malheur, le malheur, il doit être protégé; si c'est par inconduite, il doit subir une correction; si c'est par fraude, il doit être livré à toute la sévérité de la justice criminelle.

Le malheur doit être démontré par le failli; l'inconduite, prouvée par les créanciers ou la partie publique; la fraude, poursuivie par l'autorité.

Dans tous les cas, le failli ne doit plus disposer de l'administration de ses biens; ils sont le gage et la propriété de ses créanciers; il ne doit même avoir la liberté de sa personne que lorsque l'examen de sa conduite offre la présomption de son innocence.

que ses créanciers sont inconnus, ne sont pas vérifiés; tant que les créanciers absents n'ont pas été mis à portée de faire valoir leurs droits, l'administration de ses biens, l'examen de ses papiers, la conduite de ses affaires, doivent être confiés à des mains désintéressées, nommées par le tribunal de commerce, et sur veillées par un juge de ce tribunal. Les créaneiers, dès qu'ils sont connus, doivent intervenir dans le choix des hommes chargés de leurs intérêts on leur donne connaissance de toute la marche, de tous les détails de l'administration de la faillite; le commissaire accélère leur réunion, leur vérification; aucun traité ne peut être conclu entre eux et le débiteur, qu'à la majorité des voix, combinée avec une majorité en sommes égales aux trois quarts de leurs créances.

S'il n'y a pas de concordat, les créanciers, tous réunis, tous vérifiés, éclairés par les comptes que leur rend une administration impartiale, nomment des syndics, qui, sous la surveillance du commissaire et l'autorité du tribunal, font une liquidation prompte et des répartitions égales.

Pendant toute la marche de ces opérations, le commissaire, les agents, les syndics; sont tenus de faire connaître au magistrat de sûreté toutes les circonstances de la faillite; il peut,

par lui-mêine, prendre les renseignements nécessaires, et, dès qu'il lui apparaît quelque indice ou d'inconduite ou de fraude, il doit appeler le filli devant le tribunal correctionnel, ou le traduire devant le tribunal criminel.

Tel est l'esprit général du systême de la loi que SA MAJESTÉ nous ordonne de vous présenter; nous croyons que ses utiles résultats seront,

Premièrement, d'offrir aux créanciers une. garantie solide, une protection active et surveillante, une certitude ou de terminer leurs affaires par un juste concordat, ou d'obtenir une prompte liquidation;

Deuxièmement, de réprimer le luxe scan daleux et l'imprudence des spéculations hasardées, par la crainte du nom de banqueroutier et des peines correctionnelles appliquées à la banqueroute d'inconduite;

Troisièmement, d'assurer le châtiment de la mauvaise foi, et d'effrayer par d'utiles exemples; Quatrièmement, enfin, d'offrir à tout négociant honnête et malheureux les moyens de se tirer de la position incertaine et cruelle où l'ancienne législation le laissait, et de conserver au moins son honneur en perdant sa fortune; car la rigueur même de la loi offre une garantie certaine pour la probité, et tout négociant que des circonstances forcées auront réduit à la vécessité de ne pas remplir ses e:gagements, ne sera plus confondu avec l'imprudent qui a joué l'argent de ses créanciers, ou le fripon qui l'a volé. Le négociant probe, mais infortuné, après avoir subi toutes les rigueurs des formes dont je viens d'indiquer l'ensemble, et après avoir vu ses livres, ses créances, ses papiers, sa conduite, soumis à une surveillance si active, si impartiale, si rigide; sa liquidation opérée sans que les agents, les syndics, les commissaires, les créanciers, la partie publique aient pu trouver la moindre cause de le conduire devant les tribunaux pourra exiger hautement l'estime et la pitié ; il pourra même conserver l'espoir, en complétant ses paiements, si quelques circonstances lui en offrent les moyens, d'obtenir une réhabilitation d'autant plus honorable, que nous avons cher. ché à la rendre plus difficile.

Je viens de vous faire connaître l'esprit da système de la loi nouvelle ; je vais à présent en suivre la marche, et vous exposer sommairement les motifs des principales dispositions qu'ellé reuferme.

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ART. 439. Je ne vous parlerai pas des dispositions générales qui sont placées à la tête de la loi; l'exposé que je viens de faire du systême qui les a dictées, vous a, je l'espère, suffisamment expliqué la distinction que nous croyons nécessaire d'établir entre la faillite, la banqueroute, et la banqueroute frauduleuse.

ART. 440, 441, 444.- Le chapitre premier Le chapitre premier contient les dispositions que les rédacteurs du projet de Code et les chambres et tribunaux de commerce avaient jugé convenable d'ajouter aux dispositions de l'ordonnance de 1673, pour fixer avec plus de précision l'ouverture de la faillite, et pour empêcher l'existence de tous les actes frauduleux que le négociant qui préle négociant qui prévoit sa faillite pourrait être tenté de faire dans les dix jours qui la précèdent.

ART: 442.-L'article 6 de ce chapitre fixera particulièrement votre attention; il déclare que le failli, à dater du jour de sa faillite, est dessaisi de plein droit de l'administration de tous ses biens cette disposition seule suffirait déjà pour mettre un frein au scandale qui vous a le plus frappé dans les faillites, et pour offrir aux créanciers une juste espérance de ne plus voir disparaître ce que le malheur ou l'inconduite ont pu leur laisser.

ART. 449.-Dans le chapitre second, vous remarquerez le soin avec lequel la loi veille à la promptitude de l'apposition des scellés, précaution salutaire et sans laquelle le sort des créanciers serait si facilement compromis.

ART. 454, 455. Après avoir dessaisi le failli de l'administration de ses biens, et apposé le scellé sur ses effets et ses papiers, il fallait, premièrement, s'assurer de la personne du débiteur jusqu'au moment où l'on aura reconnu s'il est innocent, imprudent ou coupable; deuxièmement, organiser l'administration de ses biens, qui ne sont, pour ainsi dire, déjà plus sa propriété, et qui doivent servir de gage à des créanciers que l'on ne connaît pas encore. Autrefois, les premiers venus, se disant créanciers, nommaient des syndics, et je crois vous avoir prouvé combien cette première imprudence avait été favorable à la mauvaise foi, et funéste pour ses victimes. ART. 456. Nous avons pensé que cette administration temporaire devait être confiée à des hommes désintéressés à des agents nommés par le tribunal du commerce, et quoiqu'il parût difficile de prendre un parti plus sage et qui offrît plus de garantie à l'or

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dre public et à l'intérêt privé, on a cru devoir placer ces agents sous la surveillance immédiate d'un commissaire choisi parmi les juges du tribunal de commerce. Le besoiu d'une telle surveillance était si généralement senti, que lorsque les rédacteurs du projet de Code proposèrent d'établir pour les faillites un commissaire du Gouvernement près des tribunaux de commerce, la majorité des chambres de commerce approuva cet établissement dont les inconvénients étaient cependant palpables. L'influence d'un tel magistrat sur les tribunaux de négociants, dénaturait leur institution; et d'ailleurs, nous croyons superflu de démontrer combien il pourrait y avoir de danger à donner constamment aux mêmes hommes des fonctions si délicates, dans lesquelles on se trouve sans cesse exposé aux piéges de la séduction et à la méfiance du malheur.

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ART. 462, 463, 464. — L'objet du chapitre IV est de régler les fonctions des agents, et la conduite qu'ils doivent tenir à l'égard du failli; presque toutes ces dispositions tendent à assurer le prompt examen des livres et des effets du failli, à reconnaître si le débiteur peut être mis provisoirement en liberté, et appelé pour donner les éclaircissements nécessaires sur sa situation : les agents peuvent recevoir les sommes dues, et vendre les denrées sujètes à un dépérissement prochain. On a pris toutes les précautions nécessaires pour la sûreté des sommes perçues, et pour borner les attributions de cette administration provisoire aux mesures d'une urgente nécessité.

ART. 470. Le bilan est l'objet que traite le chapitre V. Les anciennes lois et les usages avaient tout prévu à cet égard; nous n'y avons ajouté que le droit donné au juge-commissaire d'interroger tous les individus qui pourraient lui donner des renseignements utiles. pour la formation ou rectification du bilan.

ART. 476, 481, 482. Le chapitre VI est relatif à la nomination des syndics provisoires; lorsque les créanciers connus se sont réunis en certain nombre, ils proposent une liste triple

du nombre des syndics provisoires qu'ils jugent devoir être nommés: sur cette liste, le tribunal fait sa nomination. On a cru que cette disposition était la seule qui pût concilier le droit et l'intérêt des créanciers avec la certitude d'un bon choix. Après la nomination des syndics provisoires, les agents cessent leurs fonctions, et ces agents ne reçoivent d'indemnités que s'ils ne sont pas créanciers; c'est presque donner la certitude que les agents seront toujours pris par le tribunal parmi les créanciers, hors les cas très-rares où le tribunal aurait eu de justes motifs de suspecter les titres des premiers créanciers qui se seraient fait connaitre au moment de la faillite.

Nous insistons sur ce point, car l'apparente complication qu'offre le systême qui crée des agents, des syndics provisoires, et des syndics définitifs, doit disparaître dans l'exécution de la loi, et il est plus que probable que les choix faits par le tribunal inspireront une juste confiance aux créanciers, et presque toujours les mêmes hommes dans une faillite, qui auront été agents, seront confirmés comme syndics provisoires, et deviendront, s'il y a lieu, syndics définitifs.

ART. 486.-Les syndics provisoires doivent procéder diligemment à la levée des scellés et à l'inventaire; ces opérations sont l'objet du chapitre VII; c'est là qu'on a cru devoir placer la disposition importante qui oblige les agents, les syndics, à mettre sous les yeux du magistrat de sûreté tous les renseignements qui peuvent lui faire connaître les circonstances de la faillite, et cette mesure sévère sera l'effroi du crime et la sauve-garde de l'innocence.

ART. 497.-Vous remarquerez encore, dans ce chapitre, la disposition qui ordonne de verser à la caisse d'amortissement tous les fonds perçus par les agents et syndics; vous penserez, sans doute, comme nous, qu'on peut être assuré de la promptitude des liquidations, lorsque personne ne pourra plus avoir d'intérêt à en prolonger la durée.

ART. 501, 505, 514, 515, 519.- La vériLa vérification des créances est soumise à des formes consacrées par l'approbation de toutes les chambres de commerce; et la surveillance du commissaire que nous y avons ajoutée doit donner, sur cet objet important, une complète sécurité : les enquêtes autorisées, l'apport des registres or donné dans certains cas, doivent rassurer tout créancier légitime, et dissiper toute craïnte

d'erreur ou de fraude à cet égard. Les créanciers étant tous reconnus et vérifiés, s'assembleront, et recevront les comptes des syndics provisoires; ils pourront faire avec leur débiteur un traité, mais ce traité ne peut s'établir que par le concours d'un nombre de créanciers formant la majorité, et représentant en outre, par leurs titres, les trois quarts de la totalité des sommes dues. C'est par ce moyen que nous avons cru mettre une digue à ces traités désastreux, que la collusion d'un petit nombre de gros créanciers surprenait à la majorité, lorsqu'on ne considérait que la force des créances, ou à ces traités tout aussi désavantageux qu'une majorité en nombre de petits créanciers, pressés par le besoin, pouvait faire contre le vœu et l'intérêt des créanciers auxquels il était dû des sommes considérables: nous croyons, par cette mesure, avoir rempli ce que veut la justice et ce que l'ordre exige. Ce traité ne peut être valable qu'après avoir été homologué, et jamais l'homologation n'aura lieu lorsque le failli se trouvera prévenu d'inconduite ou de fraude.

ART. 527. Si le traité n'a pas lieu, les créanciers formeront un contrat d'union, et nommeront des syndics définitifs, chargés, sous la surveillance du commissaire et l'autorité du tribunal, de rectifier le bilan s'il y a lieu, d'administrer la faillite, de percevoir, de vendre et de procéder à la liquidation de la masse, selon l'ordre des diverses espèces de créances.

C'est ici que, nous reposant du devoir d'exposer les motifs d'une loi sévère, nous pouvons, après tant de mesures dictées par une sage défiance et par une rigueur nécessaire, vous parler de celle que le malheur inspire à l'humanité.

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ART. 530. Dans ce chapitre, vous trouverez des dispositions qui règlent les secours que la masse doit donner au fail!i avec lequel elle n'a point traité ces secours seront proportionnés à ses besoins, à son état, surtout à sa conduite, et au plus ou moins de perte qu'il fera supporter à ses créanciers. Vos sentiments sont trop conformes aux nôtres pour craindre que vous n'approuviez pas une mesure de bienfaisance, lorsqu'elle est réglée par la justice.

M. Treilhard, mon collègue, vous développera les motifs des dispositions contenues dans les chapitres IX, X et XI, relatifs aux différentes natures de créances.

ART. 566. Je passe au titre II du projet

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de la loi; il règle les formes à suivre pour la [ cession des biens; mais comme toutes les dispositions qu'il renferme sont tirées du Code de procédure civile, il n'exige aucune observation particulière.

ART. 576.-Le titre III contient une innovation importante, et mérite par conséquent de fixer votre attention.

La revendication était d'usage en France depuis long-temps, et cette faveur, accordée au vendeur de reprendre sa marchandise lorsqu'il pouvait en prouver l'identité, lorsqu'il la retrouvait sous balle, sous corde et sans altération, n'était réglée par aucune loi, et variait suivant les localités : cet usage était la source d'un grand nombre de contestations, et le sujet perpétuel des plaintes des créanciers dans toutes les faillites; ils supportaient avec peine ce privilége, et le regardaient comme une injustice. Les rédacteurs du projet de Code avaient supprimé et interdit toute revendication; le plus grand nombre des chambres et des tribunaux de commerce avaient approuvé ce changement par leur silence; d'autres avaient motivé leur approbation; quelques-uns avaient voté pour le maintien de la revendication, s'appuyant principalement sur cette raison, qu'il ne fallait pas changer sans nécessité un usage anciennement établi en France, et suivi dans quelques autres pays.

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ART. 577, 578. Après un examen approfondi, on a reconnu que l'usage de la revendication était une source de procès et un moyen de fraude, que la sagesse voudrait en vain régler un usage qui n'est fondé ni sur le droit. ni sur l'équité, et que son plus grand inconvénient était surtout de laisser, par ce privilége,

le sort des créanciers à la merci de la volonté du failli, qui pouvait à son gré favoriser l'un, sacrifier l'autre, en conservant ou en dénaturant les signes qui peuvent constater l'identité, et en retardant ou accélérant la vente des effets

qui lui auraient été livrés. D'après ces considé rations, on s'est décidé à ne permettre la revendication que pour la marchandise en dépôt, pour celles qui sont en route, et qui n'ont pu encore être sujètes à aucune confusion dans les magasins de l'acheteur : nous l'admettons encore pour les remises en effets non encore échus, ou échus et non encore payés, si ces remises ont été faites avec le simple mandat d'en recouvrer et d'en garder la valeur à la disposition du propriétaire.

On espère, par cette décision, rendre un service essentiel au commerce, tarir la source d'une foule de procès, et remplir le vœu de la majorité des chambres des tribunaux dont on a consulté l'opinion.

ART. 586, 587, 588.- Le titre IV traite de la banqueroute simple ; il paraît démontré qu'en en consacrant les dispositions, vous porterez le remède le plus efficace au scandale qui excitait l'indignation générale; car, on ne peut se le dissimuler, la fraude n'est pas la cause la plus commune de ce désordre; l'ignorance, le luxe, l'imprudence, en sont les véritables sources, et, par l'ancienne loi, l'impunité leur était assurée; dès que la fraude n'était pas démontrée, l'innocence était reconnue; le crime pouvait être puni; mais rien ne réprimait l'immoralité. La nouvelle loi soumet à des punitions correctionnelles le négociant qui a fait des dépenses excessives, qui, malgré la connaissance du danger de sa situation, a compromis la fortune de ses créanciers par des spéculations imprudentes: il sera même accusable de banqueroute s'il n'a tenu régulièrement ses livres et rempli les formalités que lui prescrit la loi. Le nom de banqueroutier que cette loi lui fait craindre, sera, n'en doutons point, un frein puissant, et, si elle n'épouvante pas ces hommes coupables, nés pour le crime et que rien n'arrête, elle préservera d'une chûte funeste les hommes faibles, et ils sont pourtant en majorité.

C'est donc avec une pleine confiance que nous vous proposons cette mesure qui, dans le fait, sera plus préservatrice que rigoureuse, et qui, livrée à la conscience de juges impartiaux et respectés, nous paraît un des moyens les plus efficaces pour rétablir l'ordre et ressusciter les

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