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dotaux. Stimulé par sa détestable avarice, il chercha dans son âme artificieuse les moyens de s'approprier ce dépôt sacré. Sa scélératesse le porta à faire étrangler secrètement un de ses derniers esclaves, et à le jeter pendant la nuit dans une fosse profonde dont on referma l'entrée. Dès le lendemain matin, comme s'il avait ignoré le fait, il alla lui-même à la recherche de ce misérable; il fit mettre en prison et charger de chaînes tous les religieux, comme s'ils connaissaient la cause de la disparition de son esclave. Après avoir visité le monastère, il fit découvrir la fosse où gisait la victime. Alors ce tigre sanguinaire, poussant des rugissements, condamne tous ces saints hommes à la mort qu'il méritait; ensuite il instruit de la chose l'osdigan, qui ne put, à cause de la distance, s'assurer de l'exactitude du fait. C'est ainsi que l'innocence ayant été déclarée coupable, l'osdigan donna l'ordre de tuer tous ces religieux sans examen ni procès, et ce bourreau impitoyable fit passer au fil de l'épée plus de quarante personnes. S'emparant après cela de la totalité des richesses du couvent, il combla la mesure de sa méprisable avarice. Quelques religieux, qui avaient cherché un asile dans les cavernes des montagnes, trouvèrent à leur retour les cadavres de ces saints immolés par le glaive, et l'église de Dieu dépouillée de ses ornements. Au lieu de cantiques d'allégresse, ils firent entendre de lugubres lamentations, surtout parce qu'ils n'avaient pas été jugés dignes de leur fermer les yeux. A peine reçurentils les honneurs de la sépulture, ces hommes dont l'innocence, punie comme coupable, leur valut du moins la consolation d'être inscrits sur le livre de vie des martyrs (*).

Cependant les Arabes furent repoussés à plusieurs reprises, et le courage de quelques chefs vengeait le pays de tous les maux dont ils l'accablaient. Mais ces succès étaient incomplets; lorsqu'une tribu était détruite, d'autres tribus plus formidables accouraient

(*) Jean, pair., pag. 217.

du désert, aussi nombreuses que les nuées de sauterelles qui ravagent annuellement les rives de l'Euphrate. Plusieurs siècles se passèrent dans cette lutte incertaine et sanglante, jusqu'à ce que les Arabes fussent chassés à leur tour par les Mongols et les Turcs. Les Arméniens se trouvaient dans un état semblable à celui qui signala la durée de la domination des Perses: les Arabes les avaient remplacés. Contraints de se jeter dans les bras des Grecs, ils trouvaient en eux des oppresseurs plutôt que des auxiliaires. Si quelque émir leur offrait des proposi tions de paix, et si par lassitude ou découragement ils les acceptaient, les représailles des Grecs étaient terribles; comme aussi les musulmans tiraient une affreuse vengeance de la moindre défection qui ralliait les Arméniens à l'empire d'Orient.

Au milieu de ces désastres, la famille des Pagratides s'élevait sur les ruines de l'aristocratie, et jetait les fondements d'une puissance qui servit à défendre les derniers restes de la nationalité.

Si nous consultons les historiens de l'époque, et surtout Jean VI, nous verrons avec consolation que la foi religieuse ne cessait d'enfanter des actes héroïques de sacrifice et de dévouement. Boukai, dit-il, opprime de nouveau la province, où se répandent ses coureurs qui passent au fil de l'épée tous les hommes armés, et traînent attachés par des cordes le petit nombre de ceux qu'ils mènent au tyran. Ils sont réunis à ceux qu'on avait amenés de Daron et du Vasbouragan. Les plus beaux d'entre eux sont mis à part et enfermés, dans l'espoir qu'ils se soumettraient à la loi de Mahomet. Le reste périt par le fer.

Boukai les interrogea, en les priant de renier le Christ et de se convertir à sa foi. Par une folie belle et toute chrétienne, ils persistent dans leur croyance, aimant mieux aller se réunir au Christ que de jouir ici-bas dans le péché. Ils montrèrent clairement que les misères du temps ne peuvent être mises en parallèle avec les gloires

de la vie future. Le tyran a recours aux supplices; il les charge de fers et les presse par ses discours, par les coups et par la faim, espérant que la frayeur des tortures les ferait consentir à ses désirs. Mais ils supportent avec courage les tourments, la question et les coups. Tout leur corps est mis en lambeaux, et cependant, comme s'ils ne comptaient pour rien ces épreuves, ils marchent fermement à la mort, car ils étaient fortifiés par l'eau vivifiante qui jaillit des flancs du Christ, et qui les arrosait. Quand le tyran vit leur constante résolution de mourir pour le Christ, il fit peser sur eux tout le poids de sa colère, comme une bête féroce. Il ordonne de les livrer au feu, non pas soudainement, mais il les tourmente avec lenteur comme une brebis que l'on traîne à l'abattoir. Contre son attente, remplis d'une espérance divine, ils ne passent point du bien au mal, mais du mal au bien; et, après avoir souffert patiemment leurs tortures, ils deviennent participants des biens des confesseurs du Christ qui les couronne dans leur mort.

Il y avait parmi eux six compagnons dont le chef portait le nom d'Adam, du district d'Alpag, du bourg d'Orsi ran. Comme ils étaient d'une belle figure, habiles à manier les armes, on ne les tua point avec les autres, dans l'espoir de les faire tomber dans quelque déception. On leur offrit de riches présents, et des trésors d'or et d'argent, avec la promesse de leur donner des villages et d'autres propriétés, puis des dignités à la cour de l'émirabied. Mais ils se montrèrent insensibles à ces offres; et, comme de généreux martyrs, ils raniment leur foi dans le Christ, préférant la mort à la vie.

La rage du tyran redouble, et il commande de leur infliger les plus cruelles tortures, et d'épuiser sur eux les plus affreuses atrocités, que la langue ne peut raconter, ni la plume décrire. Leur espérance surnaturelle, leur amour du Christ, et la joie des honneurs du martyre adoucissent l'amertume de leurs tourments. Il les

fait suspendre à un poteau, où ils demeurent attachés comme à une croix. Adam, par ses vives exhortations, relevait le courage de ses frères: Ne redoutez point, disait-il, la mort temporelle; si nous sommes tourmentés à cause du Christ, nous participerons aussi à sa vie. Puis, élevant au ciel ses pensées, au lieu de ses yeux, car sa position douloureuse inclinait sa tête vers la terre: Nous espérons dans le Christ, disait-il; aujourd'hui, fête annuelle de saint Georges, j'avais coutume d'offrir pour sacrifice un bélier, eh bien, à cette heure je m'offre moimême pour la gloire de son nom, à la place de cette victime. O Christ, accepte l'offrande de ma personne; reçois mon sacrifice, et réunis-moi au nombre de tes saints martyrs, qui ont aimé le jour éclatant de ta venue. C'est ainsi que, résistant avec patience à ce long combat, ils en sortent vainqueurs, et reçoivent du Christ la couronne d'immortalité. La foule des chrétiens, témoin de leur supplice, se répandit en actions de grâces.

Le nombre des martyrs, qui précède et qui suit la trois cent deuxième année de l'ère arménienne, s'élève à plus de cent cinquante, sans y comprendre tous ceux qui périrent dans les autres provinces ou dans les villes, et dont les noms sont inscrits sur le livre de vie. Le patriarche Jean institua, en l'honneur de ces saints martyrs, une fête annuelle que l'on célébrait le vingtcing du mois de Meheg, à la grande gloire de Dieu.

Quelques-uns d'entre eux ne purent résister à cette lutte, ni en supporter les assauts. Ils se soumirent à l'abominable loi des musulmans, et renièrent la foi du Christ pour ce culte diabolique. On eut dit qu'ils s'étaient couverts de la cendre de la pénitence, tant ils étaient tristes, abattus, flétris. Sans même acquérir les biens terrestres, ils perdirent la gloire du martyre et la vie céleste, plus belle, plus précieuse que tous les honneurs, ne recevant en partage que les flammes de la géhenne éternelle.

Ésaïe, prince des Albaniens, tombe

L'UNIVERS.

en son pouvoir, avec toute sa famille, par l'effet d'une ruse. Les autres seigneurs du pays subissent le même sort, ce qui ne put se faire sans effusion de sang. Captifs et enchaînés, ils sont conduits à la cour de l'émirabied par Sempad, qui espérait qu'on lui donnerait à régir une grande partie de l'Arménie, ou qu'on le congédierait avec beaucoup d'honneurs et de présents. Mais, lorsqu'il fut en présence de l'émirabied, on lui fait partager les mêmes chaînes, et il est jeté en prison, sans égard pour les bons procédés de son ancienne alliance. Après quelque temps, les princes arméniens et albaniens, qui étaient prisonniers, sont soumis à l'épreuve d'embrasser le musulmanisme, en reniant la foi du Christ, de recevoir des présents et des honneurs, et de retourner dans leur patrie, au sein de leur famille, ou bien de terminer leur vie dans les supplices et des tortures inouïes. Comme on les effrayait chaque jour par des menaces, et qu'on prolongeait leur détention quelques-uns, sur la foi des promesses de l'émirabied, abjurent, et d'autres, sans se soumettre à la circoncision, faisaient cependant espérer que, dans un temps opportun, ils condescendraient aussi à ses désirs.

Le sbarabied Sempad oppose courageusement au mensonge un amour de la vérité digne de ses cheveux blancs. D'une foi parfaite, et confiant dans les promesses de la vie éternelle, il ne prête l'oreille à aucune de leurs propositions, aimant mieux mourir pour le Christ, que de jouir de la vie dans le péché. Il se contenta de cette réponse: Je ne puis abandonner la religion chrétienne, don baptême m'a accordé, pour me souque la grâce du mettre à votre culte impie. Lorsqu'on connut sa volonté inébranlable, on songea à le faire périr dans les tourments. La grâce céleste lui permit de se racheter, par la mort du corps, de la mort éternelle de l'âme; et, en évitant de tomber dans l'apostasie, il s'assura l'honneur du martyre. Tous les ordres des chrétiens enlevèrent son corps en récitant des psaumes, au mi

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lieu des bénédictions et des chants spirituels; et ils le transférèrent dans la chapelle de Saint-Daniel le prophète, à l'endroit même où il avait été précipité dans la fosse aux lions.

En 859, Achod le Pagratide recevait par son habileté, il sut si bien se conle titre de prince des princes, et, cilier les bonnes grâces de l'empereur grec et du calife arabe, qu'il fut reconnu plus tard roi par l'un et par l'autre. La Kars ou Garouts, située sur le fleuve ville qu'il avait pour capitale était Gars, Akhouréan, dans le pays de Vanant(*). Sempad, fils d'Achod, fut moins heuenfermé avec ses trésors, il resta à la reux; pris dans Tovin, où il s'était fortune lui devint ensuite plus favoramerci du général arabe Afschin. La ble, et sans la jalousie des grands, qui craignaient toujours l'élévation de quel qu'un d'entre eux, il aurait pu délivrer l'esprit d'individualisme et de rivalité son pays du joug des étrangers. Mais qui a toujours perdu la nation arménienne, se réveilla plus fortement dans les esprits; les seigneurs prêtèrent leur Sempad fut vaincu. Après un an de assistance au général Youssouf, et captivité, il mourut misérablement à Tovin. Son fils Achod, Bras de fer, essaya de le venger. A la tête de braves nant les bandes arabes, qu'il taillait déterminés, il courait le pays, surpretoujours en pièces. Les secours qu'il reçut de Constantinople lui permirent de livrer une bataille rangée dans laquelle Youssouf eut le dessous, et Achod se vit paisible souverain du royauroi des rois, ce qui, dans la réalité, me; il reçut même le titre fastueux de désignait simplenient sa prééminence ou sa suzeraineté sur les autres petits princes ses vassaux.

Sous le règne d'Apas, son frère, les émirs arabes et kurdes du Diarbekre dépendance que quelques-uns n'ont pas se révoltèrent pour conquérir une inperdue depuis cette époque. Achod III, fils d'Apas, commit la faute impardonnable de diviser son pouvoir, en nommant son frère roi de Kars. Cette

(*) Voy. les figures 24 et 29.

nouvelle dynastie, ainsi que celle des Corigéans dans l'Albanie arménienne, et la maison des Ardzrouniens dans le Vasbouragan, ne firent que détruire le lien d'unité formé par la restauration de la monarchie. Les princes musulmans profitaient habilement des rivalités produites par la diversité des intérêts de tous ces rois. Toutefois Sempad II, fils d'Achod II, eut un règne brillant, et ayant fixé sa résidence, il y bâtit, suivant la tradition, mille et une églises, par lesquelles le peuple arménien jurait proverbialement dans ses serments (*).

Au commencement du onzième siècle, les Turcs seldjoukides se montrent sur les frontières d'Arménie, s'enhardissent à passer l'Araxe, et ne se retirent que devant le sbarabied Vasag, qui les défait heureusement. La terreur causée par l'irruption de ces barbares

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Dep. J. C. 748. Achod, fils de Vasag, créé patrice et gouverneur de l'Arménie par Merwan II, dernier calife de la race des Omniades.

758. Sempad, fils d'Achod, tué en combattant contre les Arabes.

781. Achod, surnommé Mesager carnivore, son fils.

820. Sempad, surnommé le Confesseur, son fils. Il souffrit le martyre à Bagdad.

859. Achod, surnommé le Grand. 890. Sempad Ier, dit le Martyr, son fils.

914. Achod II, Bras de fer, son fils.

921. Achod, frère de Sempad Ier, se fait, avec l'appui des Arabes, déclarer roi à Tovin.

928. Apas succède à son frère Achod II. 952. Achod 111, dit le Miséricordieux. 977. Sempad II, dit le Dominateur. 989. Kakig Ier, surnommé Roi des rois, frère de Sempad II.

1020. Jean, noinmé aussi Sempad, fils de Kakig Ier.

1040. Interrègne.

1042. Kakig II, fils d'Achod IV.

1079. Il est assassiné par les Grecs dans la forteresse de Cybistra, et la monarchie des Pagratides en Arménie fut entièrement éteinte.

inspira au roi du Vasbouragan l'idée de céder ses États à l'empereur des Grecs, Basile, à condition qu'il lui donnerait en échange la ville de Sébaste.

Cette concession fut fatale aux Arméniens, parce qu'elle attira près d'eux des voisins dont l'ambition tendait sans cesse à accroître leur domaine; aussi détachaient-ils chaque jour du royaume des Pagratides une portion de leur domaine. Le roi de Géorgie, se coalisant avec le roi Jean, essaya de résister aux tentatives de Basile II, mais sans aucun succès; car l'empereur grec ne lui pardonna qu'à condition qu'il se reconnaîtrait son vassal. A la mort de Jean, les princes arméniens voulurent secouer le joug, et ils furent assez heureux pour faire lever le siége d'Ani, bloquée par les Grecs. Constantin Monomaque soutint les droits de son prédécesseur Basile, et, après avoir pris de vive force Tovin et Ani, il se vit possesseur tranquille de toute l'Arménie. Cette conquête était mal assurée, et elle obligeait les Grecs à entretenir dans le pays un corps de troupes considérable, pour la protéger contre les attaques continuelles des Seldjoukides. Tant qu'ils eurent affaire à ThogrilBegh ou à ses généraux, ils se défendirent avec avantage; mais quand vint le belliqueux Alp-Arslan ou le Lion, les Seldjoukides chassèrent devant eux les Grecs et les Arméniens, et même s'emparèrent de la majeure partie de la Géorgie. Ainsi les empereurs de Constantinople perdirent à jamais leur autorité sur l'Arménie.

La plus grande difficulté qu'éprouvent les conquérants, c'est de conserver leurs conquêtes : les princes seldjoukides en sont un nouvel exemple. nie, il s'éleva parmi eux des rivalités Dès qu'ils furent maîtres de l'Arméet des querelles interminables. L'illustre maison des Orpélians, originaire de la Chine et occupant le trône de Géorgie, profita de l'occasion pour chasser du pays les Turcs, et pour dé livrer en même temps les Arméniens. David II, à qui ses victoires ont valu le nom de Réparateur, commença le

premier cette tâche. La tranquillité fut rétablie jusqu'à l'apparition des Mongols, qui, sous Djinghiz-Khan et son successeur Oktay, firent des irruptions dans les différentes parties de l'Arménie et de la Géorgie. Les Orpélians, s'étant attachés à leur fortune, furent ménagés et conservèrent une certaine puissance.

Les Arméniens étaient moins heureux que leurs voisins les Géorgiens. Les invasions des barbares avaient effacé les derniers vestiges de l'ancienne puissance nationale, à l'exception de la petite principauté qu'un certain Rhoupen, lors de l'extinction de la race des Pagratides, s'était conservée dans les gorges du mont Taurus. Vers l'an 1100, à l'époque où les croisés affluaient d'Europe en Asie pour la défense des saints lieux, les princes de cette maison s'allièrent aux chefs latins, et les secoururent autant qu'il était en leur puissance. La maison des Rhoupéniens subsista quatre siècles environ. Écoutons le savant SaintMartin nous raconter comment s'éteignit leur royauté (*).

« Le règne de Léon IV fut court; ce prince périt en 1308 avec son oncle Héthoum, par la perfidie d'un général mongol, nommé Bilarghou, qui les fit assassiner. Le frère d'Héthoum, Oschin, connétable et prince de Gant choï, se mit aussitôt à la tête des troupes pour venger la mort de son neveu, vainquit Bilarghou, le chassa de la Cilicie et fut proclamé roi. Il mourut en 1320, après un règne de douze ans et quelques mois, ne laissant qu'un jeune enfant âgé de dix ans, nommé Léon, qu'il avait eu d'une fille du roi de Chypre, de la maison de Lusignan. Les discordes civiles, les invasions des Mamelouks, des Tartares et des Turkomans, achevèrent de réduire à la dernière extrémité le royaume d'Arménie déjà considérablement affaibli; c'étaient des dévastations et des ravages perpétuels.»

« A la mort de Léon V, les grands

(*) Mémoires sur l'Arménie, tom. I, pag. 400.

d'Arménie choisirent alors pour leur roi un certain Jean de Lusignan, neveu du roi de Chypre et allié de la race royale; ils lui donnèrent le nom de Constantin III, et le couronnèrent dans la ville de Sis. Ce prince ne régna qu'un an il se conduisit si mal et se fit tellement mépriser par sa lâcheté, que les nobles se révoltèrent contre lui, le tuèrent, et appelèrent au trône son frère Guy, célèbre dans l'empire grec par son courage. En 1345, ils choisirent un autre prince de la maison de Lusignan, qui régna sous le nom de Constantin IV.

« A sa mort, on choisit, d'après l'avis du pape Urbain V, un prince de la maison de Lusignan, qui porta le nom de Léon VI et fut le dernier roi d'Arménie. A peine était-il sur le trône que les Égyptiens entrèrent en Cilicie. Pour s'opposer à leur marche, il envoya à leur rencontre son connétable Libarid, qui fut vaincu et tué après des prodiges de valeur. Léon alors de manda en suppliant la paix au sultan des Mamelouks, qui la lui accorda, en exigeant de lui de fortes sommes d'argent. Mais ensuite, informé que le roi d'Arménie avait envoyé des ambassadeurs en Europe pour exciter les princes chrétiens contre lui, le sultan d'Égypte résolut d'anéantir le royaume d'Arménie; il donna en conséquence à son général Schahar Oghli l'ordre d'entrer dans la Cilicie avec une nombreuse armée, et lui enjoignit de poursuivre le roi à toute outrance. Les Égyptiens pénétrèrent sans difficulté dans la Cilicie, prirent et brûlèrent, en l'an 1371, la ville de Sis, vainquirent le roi Léon et son général Schahan, prince de Gorigos, qui étaient venus les combattre. Le roi fut blessé dans cette bataille, et contraint de se réfugier dans des montagnes inaccessibles où il se tint longtemps caché, et on le crut mort; mais, en 1373, il revint dans la ville de Tarse, dans le temps que sa femme Marie allait épouser Othon, duc de Brunswick, qui devait être couronné roi d'Arménie. Léon chercha à entamer encore des négociations avec le sultan, qui, sûr du résultat de cette

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