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quelque connaissance de l'enseignement de ces malheureux, savent combien il est nécessaire que les élèves d'une classe ne soient pas trop nombreux. On estime que 15 élèves suffisent aux efforts d'un maître zélé.

Il est très-difficile d'assurer l'avenir des jeunes sourdes-muettes sorties de l'institut, quoiqu'elles soient instruites dans tous les travaux de leur sexe, si l'on ne cherche pas à leur assurer un sort. En supposant même qu'une jeune élève fût capable de pouvoir se créer, après la sortie de l'institut, une position par son habileté dans la couture, pourra-t-elle se procurer, surtout à la campagne, assez d'ouvrage? Est-il possible de remédier à cet inconvénient? Oui, cela est possible en élargissant les bâtiments de l'institution, et en multipliant les professions.

Première classe. Le langage par signes occupe une partie du temps entre le maître et les élèves, afin d'exercer ces derniers et d'éveiller leurs forces intellectuelles. On les habitue aussi à la lecture mécanique: ils écrivent, et on leur enseigne à comprendre en regardant ceux qui parlent. Après ces exercices, on développe leurs pensées : 1 par des descriptions; une école, une chambre, un homme, des habits, etc.; 2° par la forme et la qualité des choses, la couleur, la forme, le toucher, le goût, l'odorat; 3° par la conception; 4° par l'instruction morale; 5° par les sciences mathématiques; 6° par le dessin et l'écriture.

IF classe. 1° Instruction religieuse Explication de quelques prières. 2° His2° Histoire sainte Explication de quelques figures. 3° La langue; la différence par la vue; la matière de ces leçons est fournie par tout ce qui se présente à nos yeux; la grammaire; des mots variables. 4° Mathématiques L'addition et la soustraction. — 5 Ecriture, d'après les principes. -6° Dessin de tête et d'ornements, d'après Hessebbach.

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II classe. Instruction religieuse Attributs de Dieu; les prières avant et après les repas; au commencement et à la fin des classes. 2 Histoire sainte: Depuis la création jusqu'à Moïse. 3° Langue: Continua tion de ce qui a été fait l'année précédente d'après Nilbe; la grammaire; l'adjectif; l'adverbe. -4 Mathématiques: Multiplication et division des nombres entiers. 5° Géographie: Le royaume de Bavière, et l'histoire générale de ce royaume. -6° Ecritures. -7 Dessin d'ornements simples, d'après Hesselbacq et Maher.

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IV classe. 1 Instruction religieuse: Les attributs de Dieu explication des dix commandements de Dieu et des principaux points de notre religion; les sacrements et l'explication des sacrements du baptême et de la pénitence. Aux grandes fêtes, les élèves reçoivent une explication de ces fêtes. -2 L'histoire sainte La création du péché originel; Cain et Abel; le déluge. Dans Le Nouveau Testament: Zacharie et Elisabeth;

la résurrection du Christ. -3° Langue. Ins truction d'après Jager et Hill. Grammaire : déclinaison et conjugaison des mots variables. Emploi des verbes. Emploi des conjonctions.

La 1 classe contient 13 élèves, dont 7 garçons et 6 filles; la 2 division contient 12 élèves, dont 7 garçons et 3 filles; la 2 classe contient 14 élèves, dont 8 garçons et 6 filles: la 3 classe contient 15 élèves, dont 8 garçons et 7 filles; la 4 classe contient 12 élèves, dont 8 garçons et 4 filles.

Ouvrages confectionnés en 1853. - Ourrages de couture: 30 cheniises d'hommes; 20 chemises de femmes; 20 habits; 2 paletots; 2 corsets; 51 tabliers; 91 mouchoirs de cou; 61 mouchoirs de poche. Total 277 pièces. Tricot 95 paires de bas neufs; 70 paires arrangées à neuf; 6 paires de chaussettes; 36 aunes de dentelles; 1 bonnet d'enfant. Total 208 pièces. Broderie: 6 paires de bretelles; 1 bourse; 6 païres de jarretières. Total 13 pièces.

On a filé 6 livres de fil. On a fait 10 paires de pantoufles. Outre ces ouvrages mention nés, tous les habits des élèves ont été confertionnés et entretenus.

Presque toutes les écoles de sourds-muels d'Allemagne sont des externals. Les enfants les fréquentent, selon M. le docteur Blanchet, avec la même facilité, le même profit, que les parlants fréquentent nos écoles primaires. L'enfant qu'on y envole du fond des provinces est confié par ses parents ou par I'Etat, moyennant un prix convenu, à ue famille de la ville où siége école, et id sein de laquelle il est traité comme l'erin de la maison. L'enfant reçoit ainsi cette é cation domestique, qui féconde dans le les sentiments généreux et tendres.

VI. Europe du Nord. — Institut royal's sourds-muets de Stockolm (1854).-L'inst royal de Suède se compose de deur depar tements distincts: celui des sounds-Burts et celui des jeunes aveugles. La prea ere section compte 90 élèves, la secone 2: total 114. Les sexes sont ainsi proportiote 73 garçons, dont 62 sourds-muets et !! aveugles.-41 filles, dont 28 sourdes-mue.. et 13 aveugles. Le roi de Suède se pro de fonder une institution de sourds-a dans la partie méridionale de son roya Sa Majesté espère que les Etats de la vince s'empresseront de voter la so 40,000 fr. nécessaire à cet effet. Le gone th nement suédois a fait opérer, en 1850 dénombrement général de toute la p tion du royaume : ce travail a révé é z tence de 2,500 sourds-muets et de 27 aveugles. La Finlande contient une p tion de 1,500 sourds-muets, c'est-à-d in 14 sourd-muet par mille habitants. Une tution a été créée en Norwége, à Berg:

Bibliothèque des sourds-muets de leps hague. - Toutes les langues se sont rendez-vous en faveur des malheure vés du langage. L'intelligente administ de l'école danoise n'a pas borné ses reches aux publications nationales, aut

d'un intérêt actuel; elle a fait un appel au passé comme au présent, elle a colligé au dehors comme au dedans, elle a rassemblé à grands frais et catalogué avec beaucoup d'ordre les principaux ouvrages publiés en Europe sur les sourds-muets depuis trois siècles. Dix littératures se trouvent là en présence. Voici d'abord au premier rang la littérature latine. Trente-deux ouvrages latins de tous les formats, de toutes les dates sont arrivés de Lyon, d'Amsterdam, d'Erlingen, de Vittemberg, de Bâle, de Berlin, de Francfort, d'léna, de Halle, de Groningue, de Salzbach, de Londres, de Gottingue, de Tubingue, de Venise, de Leipsick, d'Oxone, de Magdebourg, de Paris. Les auteurs de ces ouvrages s'appellent Amman, Bech, Bergen, Berghaus, Burckard, Castberh, Eschke, Fritze, Fuchs, Gasser, Guyot, Helmont, Holder, Humly, Kerger, Korner, Michalorius, Murer, Neuss, Nieuwenhuys, Pealkamp, Strykius, Wallio, Wallis, Thier, Menagius, Majensie, Huven. La plus ancienne édition porte 1646, la plus moderne 1825. La majeure partie de ces ouvrages traitent de matières qui ont rapport à la médecine et à la jurisprudence des sourds-muets.

Institutions slaves.-On a parlé longtemps de ce grand dualisme qui semblait avoir partagé l'Europe, depuis un siècle, en deux courants d'idées contraires. On s'était habitué à leur donner le nom d'école française et d'école allemande. L'ardeur, le talent, le génie s'étendaient jusqu'au Danube; passé ce fleuve, il semblait que la vie du progrès était aussi glacée que la nature du climat; et c'était à peine si on daignait citer par commisération quelques écoles hyperboréen nes, que l'on supposait atteintes d'atrophie et incapables de s'élever à la hauteur des premières institutions du monde.

La splendeur de la grande école septentrionale ressortira, nous l'espérons du moins, de l'exposé des faits et de la discussion des principes. I importe d'établir que les nombreuses institutions du Nord, pour avoir fait moins de bruit, ne le cèdent en rien aux institutions du Midi; le panslavisme a contribué peut-être à leur imprimer même ce caractère, cet ensemble, cette grande et forte unité qui manque aux deux écoles allemande et française. En effet, chez les peuples méridionaux, les frontières territoriales qui séparent les nations séparent aussi les races et les sympathies, tandis que l'idée slave, englobant dans son orbe une foule de populauons et de tribus d'origine identique, imprime à leurs institutions de bienfaisance un développement uniforme, une physionomie semblable, un type unique.

En dehors des écoles françaises et des institutions germaniques, les établissements du Nord constituent donc une grande école distincte école qui, comme ses deux sœurs rivales, possède son berceau et ses défenseurs, sa méthode et ses principes.

Son histoire, on le reconnaîtra sans peine, présente un intérêt vif et dramatique. La Civilisation des sourds-muets et des aveugles

en Orient revêt un tout autre caractère que celle qui s'est accomplie dans l'Occident. En Orient les institutions appartiennent aux Etats, et elles acquièrent rapidement une stabilité puissante qui est une sûre garantie de leur avenir. A Brünn, Prague, Sleswig, Stockolm, Copenhague, Varsovie, Saint-Pétersbourg, l'Etat gouverne et administre; il est le tuteur absolu des institutions.

Le caractère administratif des établissements participe de la forme absolue des gouvernements; il centralise le mouvement progressif et en limite l'impulsion.

Il résulte de là que l'école septentrionale est essentiellement éclectique. La majorité des écoles françaises est demeurée fidèle à l'enseignement des signes; et malgré les nombreuses importations faites en allemagne, la parole articulée domine encore en Souveraine dans la plupart des classes régies par les disciples du célèbre Heinicke.

L'éclectisme est le caractère doctrinal de l'école slave. Toutefois, dit M. Borg de Stockolm, nous l'avouons sans peine, malgré les motifs qui nous poussent à favoriser chez nous les tendances germaniques, nous nous prononçons chaque jour davantage en faveur de la méthode française, non par suite d'un jugement définitif, mais par suite de cet entraînement sympathique qui pousse les sourds-muets vers le langage naturel des signes.

L'école slave embrasse les institutions de la Russie, de la Pologne, de la Bohême, de la Hongrie, de la Suède et du Danemark ; comme appendix naturel, nous y rattachons les quelques écoles de la Turquie et de la Grèce. Une vingtaine d'établissements pour les sourds-muets, et une dizaine pour les aveugles, se sont élevés dans ces huit royaumes depuis trois quarts de siècle.

(1789) Kiel et Sleswig. Un élève de l'abbé de l'Epée, M. le professeur Pfingsten, après avoir créé, en 1787, une école à Lubeck, la transféra d'abord à Hambourg, puis à Kiel en 1799, d'où elle fut transportée à Sleswig en 1810. Le gouvernement danois a toujours favorisé cette institution d'une protection particulière. Destinée aux provinces allemandes de la monarchie, on y à réuni la grande imprimerie stéréotype de la même ville. D'abord placée sous la direction suprême de M. de Spiers, chancelier de la cour royale, et de M. Adler, surintendant ecclésiastique, cette institution prospéra bien vite. En mariant sa fille à M. Hensen, le fondateur s'assura un habile successeur. En 1829, cette école instruisait déjà 70 élèves, soumis à la surveillance de quatre professeurs; une maîtresse dirigeait les jeunes filles. Cette même année, M. Gremer, instituteur en second, consacra une année entière à visiter, aux frais de son pays, les institutions de l'Allemagne, de la France, de la Belgique et de la Hollande. Tous les enfants sourds-muets des provinces alleInandes sont entretenus à l'institution de Sleswig sur les fonds publics; le ministre des finances, à la fin de chaque année, ré

partit la dépense générale en impositions additionnelles sur toutes les propriétés foncières. En 1832, l'institution possédait déjà un capital de 270,000 francs, qui provenait de divers bienfaiteurs.

Aujourd'hui l'institution de Sleswig compte 95 élèves; elle est plus forte que celle de Copenhague, qui ne possède que 92 sourdsmuets. La direction est confiée à M. le docteur Paulsen; parmi les professeurs qui l'aident de leur concours, il faut placer au premier rang le cèlèbre Kruse, sourd-muet, qui s'est acquis, par son talent et ses belles Publications une renommée européenne.

Né le 29 mars 1801, dans la ville d'Altona, le jeune Kruse devint élève de Sleswig, depuis 1808 jusqu'en 1817. Son éducation fut tellement brillante, qu'à sa sortie du cours. il obtint du gouvernement le brevet de pro fesseur. En 1825, il fonda lui-même une institution de sourds-muets dans sa patrie, située au milieu du Holstein. Cette école subsista jusqu'en 1838, époque à laquelle il s'associa avec M. Ortgies pour créer l'institut des souds-muets de Brême. Des motifs de santé le forcèrent à rentrer dans la vie privée. Ce fut alors qu'il publia son premier ouvrage sur les sourds-muets, ouvrage qui fit sensation dans toute l'Allemagne. Pendant cette période de sa vie, Kruse occupait ses loisirs à instruire les sourdsmuets de Brême, d'Altona et de la banlieue. Rappelé par le gouvernement en 1834, il accepta de nouveau une des chaires vacantes de l'institut de Sleswig. - Marié depuis seize ans, M. Kruse est père de deux enfants. En 1853, le gouvernement danois fixa les yeux sur lui, et le choisit pour l'accomplissement d'une de ces missions scientifiques si fréquentes dans les habitudes des Etats du Nord. L'illustre voyageur sourd-muet explora successivement l'Autriche, la Prusse, la Suisse et la France, se faisant ouvrir les portes des établissements, pénétrant dans les classes, et recueillant dans des notes fidèles toutes les observations susceptibles d'éclairer le gouvernement du Danemark dans la conduite à suivre pour perfectionner cet enseignement si difficile des sourdsmuets. Lorsqu'il fut de retour dans sa patrie, Kruse fit imprimer la relation de son voyage; il publia son journal. Le 5 janvier 1854, il transmit le tout à son souverain, et il en reçut une lettre qui le nommait chevalier de l'ordre royal de Dannebrog. Maintenant Kruse publie deux nouveaux ouvrages. Le premier contient les principes pour cominencer l'éducation méthodique des sourdsmuets dans la maison paternelle, jusqu'à l'âge de huit ans. Le second présente des instructions sur la manière de traiter les sourds-muets sortis des établissements ce second volume est destiné aux maîtres chez lesquels les sourds-muets sont en condition. L'année prochaine, M. Kruse visitera les écoles suédoises et norwégiennes, et il complétera de la sorte la plus grande somme d'expériences qu'une telle infortune ait pu jusqu'ici rassembler.

VII. Russie. Une école de sourdsmuets a été fondée à Saint-Pétersbourg par l'impératrice Marie, pour 24 élèves; elle s'est accrue depuis. La pension y varie de 650 à 450 roubles. On y enseigne le catéchisme, le russe et le français, l'histoire, la géographie, l'arithmétique, l'écriture et le dessin.

Il existe à Moscou, depuis 1832, une institution privée sous la direction de M. Korsi, de Goritz dans le Frioul. Cet instituteur a professé quelque temps en qualité d'insfituteur dans l'institut impérial des sourdsmuets de Saint-Pétersbourg. D'après Schmalz, M. Korsi, dans son enseignement, se sert de la langue des signes. M. Schmalz est de l'école allemande. En 1842 cette école contenait 14 élèves; 11 d'entre eux étaient exterues, 3 seulement vivaient dans l'institu tion.

VIII. Turquie (1775.) Constantinople. La première mention des sourds-muets s'est faite en Orient à Constantinople. Dans un ouvrage rempli d'érudition, publié à Halle en 1775 par Stephen Schultz, et intitulé Voyage en Europe, en Asie et en Afrique, il est question du muet Aga, et d'une école de muets à Constantinople. On ignore quel était cet enseignement. De nos jours, une école s'est formée à Smyrme par les sous de M. l'abbé de Gérondi.

IX. Etats-Unis.-On comptait, en 1810, aux Etats-Unis, 6,685 sourds-muets sur une population de 17 millions d'habitants. Nous trouvons, en 1852, le chiffre de 10,103.

Ecole de Tallmadge. Dans cette partie des Etats-Unis comprise entre la Pensylvania et l'Indiana, se trouve une grande et belle contrée baignée par ces lacs immenses qui ressemblent à des mers intérieures; celle contrée, renfermant un million d'habitants, a reçu le nom d'Etat de l'Ohio. Jusqu'ici, les statistiques ne nous avaient fait connaitre dans cet Etat que l'école de Columbas. M. Collins-Stone, directeur actuel de cet élablissement, donne, dans une lettre du 28 octobre, plusieurs renseignements précis sur l'école fondée à Tallmadge, et la société fordée à Cincinnati en faveur des sourds-muets. Tallmadge, est situé dans le petit comte ut Summit; la création d'une école dans cette ville paraît avoir eu pour motif la nécessité de satisfaire un besoin immédiat, plutôt que d'établir un établissement permanent. Deus la famille de M. Justus Bradley se trouvaient trois jeunes demoiselles sourdes-macties; la sympathie des citoyens ayant été invojure en leur faveur, ou résolut de fonder e école pour les instruire, et pour instru en même temps les sourds-muets des vi voisines. Pour atteindre ce but, une co mission administrative fut organisée. Le fut ouverte le 1" mai 1827, Sous la dire de de M. Colonel-Smith, qui avait étué si ans à l'école d'Hartford, et qui, après les ration du cours, avait continué son éducktion pendant deux années. L'école eat bu tot onze élèves entretenus par la charité vée; la législature lui accorda, en 187.

subside de cent dollars pour les honoraires de l'instituteur. Tel fut le berceau de la florissante école de Columbus.

Association de Cincinnati. Les premiers efforts en faveur d'un établissement de sourds-muets dans l'Ohio datent de 1821, et ont été faits dans la cité de Cincinnati. Au printemps de 1821, plusieurs gentilshommes s'associèrent pour fonder une école dans rette partie occidentale de la contrée. M. James Chute fut choisi pour directeur, et envoyé à l'institut d'Hartford pour étudier la méthode. M. Chute entra dans l'école d'Hartford le 17 juillet. Il fut cordialement accueilli par les directeurs de l'asile d'Hartford, qui lui offrirent toutes les facilités possibles pour accomplir sa mission.

L'Etat d'Illinois a élevé aux sourds-muets de la contrée un édifice monumental qui fait la gloire et l'ornement de Jacksonville L'institut compte 110 élèves. Les Etats-Unis ont ouvert, comme l'Angleterre, un congrès pour la discussion des questions relatives aux sourds-muets. Nous parlerons du troisième congrès tenu en 1853. Des mesures furent prises près de l'administration des chemins de fer pour transporter les membres du congrès, auxquels MM. Wilson, Sparrow et Greenleaf, administrateurs de l'Institution de Columbus, offraient une noble et généreuse hospitalité. Nous relevons dans les séances ce qui nous a frappé à un titre quel

conque.

Toutes les commissions font leurs rapports par écrit. Chaque motion est for mulée par écrit, signée de son auteur et déposée sur le bureau. Dans toutes les séances, on se conforme, pour les débats, au règlement contenu dans le manuel de Jeffer

son.

M. Brown, de la commission des travaux donne le titre des mémoires présentés au congrès. Ces mémoires sont: Difficultés que

rencontre le sourd-muet dans l'étude du tangage, par M. Collins-Stone; Bienfaits départis aux sourds-muets par un bon cours usuel d'instruction, par M. Chittenden; De la hase philosophique du langage. par M. Luzorne Rae; De la meilleure méthode pour enseigner la langue aux sourds-muets des classes supérieures, par John Keep.

M. Willard propose la résolution suivante: Lorsqu'une question grave, telle que celle de la meilleure méthode d'instruction, ou de l'organisation de l'enseignement, sera mise en délibération, tous les membres du congrès seront respectivement priés de communiquer leur mémoire par le moyen du langage des signes, exécutés aussi convenablement qu'il sera possible de le faire; les interprètes exprimeront la signification des signes de vive voix, pour ceux des membres du congrès qui ne seraient pas familiarisés avec ce langage. » M. Peet se lève et propose cet amendement : « Dans toute délibération, un interprète sera nommé d'office en faveur des membres sourds-muets; quant Bur discussions, elles seront faites de vive

voix. » Sur la proposition de M. Hubbell, la motion de M. Willard et l'amendement de M. Peet sont renvoyés à l'examen de la commission des travaux.

M. Van Nostrand dépose la motion suivante: « Les séances du congrès seront ouvertes par l'explication d'un passage de l'Ecriture, et par la prière en signes; cette explication et cette prière seront déférées à la personne qui sera désignée par M. le président. M. Peet considère l'exposition d'un passage de l'Ecriture fait par signes, et la prière exécutée de même, comine étant de la dernière importance. Le langage des signes est la seule poésie que connaisse le sourd-muet; c'est aussi celle qui est la plus susceptible de faire impression sur son cœur: la pautomime est le langage propre de la dévotion; et comme le congrès se compose spécialement d'instituteurs de sourds-muets, il croit devoir seconder cordialement la mo

tion de M. Van Nostrand. — Adopté à l'una

nimité.

M. Van Nostrand dépose la motion suivante: « Les séances du congrès seront ouvertes au public; les organes de la presse publique obtiendront les facilités désirables pour reproduire les procès-verbaux de chaAdopté. que séance. »

M. Van Nostrand rappelle que dans les congrès antérieurs, c'était la coutume de fixer l'ordre et l'étendue que réclamait chaque discussion.

M. Van Nostrand examine la nature du

pouvoir que peut s'arroger le congrès sur les questions qui lui sont déférées, ainsi que la part d'action que ses membres peuvent être tentés de revendiquer; il pense qu'aucune action collective pour influencer l'opinion en faveur de telle ou telle méthode ne doit être autorisée; comme individus, les membres ont le droit d'adhérer ou de ne pas adhérer à une proposition, mais ce droit le congrès ne l'a pas. M. Brown se lève et proteste contre une telle assertion; il revendique énergiquement en faveur du congrès le droit légitime d'approuver ou de blâmer les vues et les théories volontairement et librement. soumises à son appréciation. La discussion est fermée sur ce sujet. M. Porter présente le tableau des délégués dont les droits sont reconnus, et qui peuvent siéger dans l'assemblée.

Le fond du débat n'est rien moins que la détermination des lois selon lesquelles on devra se servir du langage des signes dans l'instruction du sourd-muet. L'éminent directeur de New-York se proclame partisan déclaré du langage des signes. Pendant une heure sa parole ardente captive tout l'auditoire. M. Brown de la Louisane répond, que les sourds-muets font beaucoup trop de signes; de quoi s'agit-il dans l'enseignement des sourds-muets? il s'agit de les conduire à l'emploi correct de la langue écrite or le meilleur moyen pour réussir dans cette entreprise, ce n'est point d'employer le jargon connu sous le nom de langage naturel, qui pousse fatalement le sourd-uet à la barba

rie. M. Brown déclare qu'il votera contre les signes naturels. M. Jenkins, de l'Ohio, propose de donner aux signes tout l'emploi et toute l'extension dont ils sont susceptibles. Enseigner aux sourds-muets la langue anglaise, en thèse générale, c'est impossible: pourquoi? parce que le sourd-muet possède un idiome qui lui est propre; la seule chose rationnelle et possible, c'est d'élever la mimique au rang des langues prépondérantes, et de la conduire à un degré d'excellence et de perfection telle, qu'elle puisse exprimer les plus délicates nuances de la pensée. M. Rae de l'école d'Hartford expose sa théorie sur les signes. Le grand ouvrage qu'il s'agit d'accomplir à l'égard des sourds-muets, c'est de leur donner une bonne connaissance du langage écrit, c'est de les rendre habiles à le comprendre, et aptes à s'en servir correctement. Qu'il y ait des sourds-muets qui conservent toute leur vie le langage des signes parce qu'ils ne sont pas capables d'en apprendre un autre, cela se conçoit : mais là n'est pas la question. Le sourd-muet qui ne sait faire que des signes sera toujours le paria de la société, il sera prisonnier dans l'univers. Les instituteurs n'ont qu'une voix chez tous les peuples pour déplorer l'imperfection du langage écrit des sourds-muets. Souvent la rougeur de la honte est montée au visage de l'orateur, en voyant les fautes que contenaient des lettres d'élèves qui avaient plusieurs années d'instruction. If a la ferme conviction, et cette conviction l'institeur d'Hartford est prêt à la justifier par l'expérience, que tant qu'on laissera les sourds- muets livrés à l'anarchie des signes, ils continueront de végéter dans l'ignorance des mots, et dans l'impuissance de pouvoir écrire une langue ou de s'en servir. Souvent, des élèves intelligents ont fait plus de progrès en quelques semaines de vacances dans Te langage écrit, que pendant un temps beaucoup plus considérable passé dans l'institution. M. Rae professe qu'il n'est pas un ultra; il est éclectique; sa doctrine est de choisir ce que les systèmes lui offrent de meilleur. Les signes, dans la plupart des cas, doivent être employés avec plus ou moins d'extension c'est donc une simple question de quantité qu'il faut laisser au jugement de chaque professeur : personnellement, il est convaincu que les instituteurs américains font un emploi trop exagéré de la mimique. M. Ayres a la parole. La difficulté de s'exprimer clairement à l'aide des signes, dit-il, repose autant dans la description des signes de celui qui parle, que dans la compréhension de ceux auxquels ces signes s'adressent voilà ce qui jette le trouble dans les deux camps. C'est à tort qu'on établit un duel à mort entre les signes méthodiques et les signes naturels; une alliance est possible; l'orateur a visité récemment l'école de Kentucky, où le signe méthodique règne en souverain. Les signes sont faits par les élèves d'après les mots. La mimique est l'esclave de la langue; elle marche après elle; elle interprète le sens des expressions; elle

:

n'est méthodique qu'en ce sens; et les gestes dont elle se sert pour exprimer les mots, sont bien les gestes les plus naturels qu'i soit possible d'imaginer. M. Ayres a été l'ennemi le plus radical des signes méthodiques et de leur emploi; mais, depuis un an, il s'est trouvé en relation avec des sourdsmuets instruits par ce système, et l'aisance avec laquelle ils maniaient la langue en conversant avec d'autres personnes, lui inspire la pensée de demander s'il ne serait pas possible de régulariser une langue de signes méthodiques, qui exclurait l'emploi des signes arbitraires. Il reconnaît que les signes arbitraires ont une tendance manifeste à dé grader le langage, il ignore si l'adoption. d'un vaste système de signes méthodiques applicables à tous les mots de la langue est réalisable, mais le débat public auquel il assiste lui donne le plus puissant espoir. Les instituteurs de l'Amérique se sont constitués en assemblée délibérante, pour se consulter et non pour dogmatiser. Ils doivent être jaloux de se montrer les bienfaiteurs de l'humanité, plus encore que les législateurs de l'art.

M. Turner succède à M. Ayres. Il exprime son étonnement, de ce que le congrès laisse la discussion prendre d'aussi immenses proportions. De quoi s'agit-il? De savoir si l'emploi des signes ne doit pas être exclu de l'enseignement à une certaine période avancée du cours complet. Voilà ce que l'on de mande. Au lieu de se constituer les examinateurs et les juges de cet unique point, ses honorables collègues ont envahi tout le su jet, au point que tout le cours d'instruction se trouve examiné, commenté, critiqué. Une discussion aussi générale ferait perdre us temps précieux, et au lieu de laisser le de bat s'étendre sur toute la matière des signes, il vaut mieux faire briller la lumière sur un point spécial. L'orateur se livrant largement à l'humour de sa nation originelle, dit que son honorable ami, le savant directeur de New-York, se fatigue à la besogne depus trente ans, qu'il s'épuise comme un rameur, et que néanmoins il n'a pas encore achevé son apprentissage. Que conclure? que nos ne sommes pas encore mûrs; que l'art n'est pas sorti, comme Minerve de la tête de Ja le temps les systèmes. Ceux qui combatta ef piter, tout armé. Le temps a marché, et art il y a deux ans, sous la bannière des signes méthodiques sont passés dans le camp of posé, tandis que ceux qui levaient tres-hat l'étendard du système de la langue érte caressent aujourd'hui les signes méthod ques; tous les éléments susceptibles de c duire à une conclusion uniforme sont ear çà et là, et ne concordent pas. Un vist champ est encore à explorer et un inmest horizon reste découvert; personne n'es sez téméraire ou assez sûr de lui, pour treprendre de le franchir au pas de curs et la plupart d'entre nous payeront leur but à la nature avant d'atteindre heures ment le rivage. M. Turner pense avec estimable ami de New-York, que pour a☛

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