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ment d'objets saisis sera puni, suivaut les cas, des peines portées en l'article 406, c'est-à-dire de celles de l'abus de confiance, quand l'objet était resté aux mains du saisi, ou des peines portées en l'article 401, c'est-à-dire de celles du vol ordinaire, quand il avait été remis à un tiers. Cela étant, il faut éviter de dénaturer la pensée de la loi et de mettre un autre délit à la place de celui qu'elle a voulu atteindre. Votre jurisprudence s'en est toujours gardée. Il est exact, comme le dit le pourvoi, que vous avez dit plusieurs fois, et avec raison, que l'article 400 a pour objet d'assurer le respect dû aux actes de l'autorité publique. Vous l'avez répété l'année dernière, à notre rapport, dans une affaire où il s'agissait d'objets dont le séquestre avait été ordonné par le juge, sans avoir encore été réalisé par la remise des objets au gardien (8 nov. 94, B. 271, p. 421). Mais dans ce cas, comme dans celui de la saisie-arrêt et comme dans tous les cas de saisie prévus par la loi civile, il s'agit d'un acte de l'autorité publique destiné à sauvegarder les droits qu'un tiers peut avoir à la chose saisie, et le détournement est le fait de soustraire la chose saisie à l'exercice légitime de ce droit d'autrui.

« L'arrêt attaqué approche donc beaucoup de la vérité lorsqu'il dit que les dispositions de l'art. 400 ne peuvent s'appliquer qu'à « des actes par lesquels des objets sont mis légalement sous la main de l'autorité publique soit pour forcer à exécuter certaines obligations, soit pour protéger l'intérêt des tiers pouvant avoir des droits à exercer sur ces objets ou le produit de leur vente ». Nous sommes d'accord avec l'arrêt sur ce point que le délit de détournement d'objets saisis ne peut exister qu'autant qu'un tiers (que ce soit l'État ou un particulier), armé d'un acte de l'autorité publique, avait acquis des droits positifs (pour parler comme votre arrêt de 1842) sur la chose qui a été reprise ou détournée par son propriétaire. Il faut seulement tirer de ce principe les conséquences qu'il comporte.

«Par exemple en matière de douanes et de contributions indirectes, il est évident qu'entre le délinquant et l'Etat, il s'agit avant tout d'un débat pécuniaire; les objets saisis représentent (comme les animaux mis en fourrière) une partie de la répara

tion due à la partie lésée; la saisie est une garantie contre un préjudice éventuel, et le propriétaire qui détourne les objets saisis les soustrait au fisc. Il commet donc le délit de l'arti cle 400.

<«< Au contraire, nous hésiterions à reconnaître ce délit si dans une prévention ordinaire, une chose étant saisie uniquement pour servir à la manifestation de la vérité en vertu des articles 36 et suiv. du Code d'instruction criminelle, le propriétaire de cette chose venait à la reprendre. Ce serait probablement un autre délit, suivant que la chose serait encore aux mains du magistrat ou qu'elle aurait été déposée au greffe, mais ce ne serait point un délit contre la propriété, parce qu'ici la saisie a un objet provisoire qui est l'instruction, elle ne tend pas à l'acquisition d'un droit positif sur la chose et à l'expropriation du propriétaire.

« L'espèce actuelle tient un peu de l'une et l'autre hypothèse que nous venons d'envisager et c'est ce qui en fait la difficulté.

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<«< La confiscation n'est pas ici une mesure de réparation civile, c'est une peine, expressément qualifiée ainsi par l'article 11 du Code pénal. Elle a pour objet de frapper le condamné et non de sauvegarder les intérêts de l'Etat. Elle est répressive plutôt que fiscale et cela est surtout manifeste en ce qui touche les autres saisies prévues par le même article 477, puisque les boissons falsifiées seront répandues, les écrits contraires aux mœurs seront mis sous le pilon et les comestibles corrompus seront détruits. Dans tous ces cas, l'Etat ne gagne rien à la saisie, qui est à la fois un acte d'instruction et un moyen d'assurer l'exécution de la peine.

<< Peut-être néanmoins vous paraîtrait-il grave de refuser à la saisie de l'officier de police opérée dans ces conditions la protection de l'article 400. Peu importe en effet ce que l'on fera des choses confisquées; peu importe la raison pour laquelle l'Etat s'en empare. Si c'est uniquement dans un but d'ordre public, cette considération n'est pas de moindre importance que s'il n'y a en jeu qu'un intérêt fiscal, et l'acte de l'autorité publique ne s'impose pas moins au respect de tous. Ce qu'il y a d'essentiel dans la saisie qui nous occupe, c'est qu'elle tend à la

confiscation. Elle est formellement ordonnée par l'article 477 qui dit : « Seront saisis et confisqués.....». Donc l'officier de police judiciaire, en saisissant, assure à l'Etat un droit positif qui doit entraîner, si le délit est reconnu, une expropriation complète au profit du fisc. Souvent cette expropriation n'enrichira pas le fisc, mais elle lui donnera tout au moins le droit de procéder aux destructions ordonnées par la loi; elle semble même juridiquement et pratiquement indispensable à ce point de vue. D'ailleurs, en ce qui concerne les divers délits et contraventions relatifs aux jeux de hasard, le produit des confiscations peut n'être pas négligeable, et même, à ce titre, l'intérêt de l'Etat doit être défendu comme le serait celui d'un créancier ordinaire ».

La Cour d'appel de Douai avait, à l'appui de sa décision, invoqué un argument tiré de ce que l'art. 400 prévoit que la garde. des objets saisis est confiée soit au saisi lui-même soit à un tiers ; elle paraissait en tirer cette conséquence que l'hypothèse de la loi exclut le genre de saisie qui nous occupe. M. le conseiller Bard a répondu à cette objection, il a fait remarquer que «<le législateur de 1832, en introduisant un nouveau délit dans le Code, devait équitablement distinguer suivant que le saisi détourne une chose dont il a conservé la détention, ou qu'il va la reprendre entre les mains d'autrui, parce que dans ce dernier cas le fait est analogue au vol, tandis que dans le premier il ne peut avoir que la gravité d'un abus de confiance, et ce sont effectivement les peines de ces deux délits que prononce la loi. Mais l'hypothèse alternative qu'a dû nécessairement faire le législateur, n'autorise pas à donner à l'institution d'un gardien des objets saisis une importance telle que le délit ne se puisse concevoir, s'il n'y a eu accomplissement des formalités prévues par les articles 596 et suiv. du Code de procédure ou par des dispositions équivalentes. Ce qui caractérise essentiellement la saisie, c'est l'acte de l'officier public porté à la connaissance du saisi et plaçant les objets sous la main de la justice ».—Quant à la solution de la question de savoir à qui dans l'espèce était confiée la garde de la table saisie, elle n'était pas douteuse; il était établi en fait qu'elle avait été confiée au commissaire de police.

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La Cour s'inspirant des conclusions de ce savant rapport, a, sur les réquisitions conformes de M. l'avocat général Chenest, admis le pourvoi, et a limité la portée de son arrêt, en se fondant exclusivement sur ce que l'officier de police avait exécuté une saisie prescrite expressément par la loi et tendant à la confiscation des choses saisies.

TROISIÈME PARTIE

LOIS

DÉCRETS & INSTRUCTIONS

ART. 724.

CIRCULAIRE DU PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE PRÈS LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DE LA SEINE AUX JUGES DE PAIX DU DÉPARTEMENT. (27 janvier 1894).

Nationalité.

Application des lois du 26 juin 1889
et 22 juillet 1893 (1).

Monsieur le Juge de paix,

L'expérience m'a démontré que la loi du 22 juillet 1893, modifiant la loi du 26 juin 1889, donnait lieu dans la pratique, à des difficultés auxquelles il importe de mettre fin.

Les déclarations souscrites devant vous, soit pour réclamer, soit pour répudier la nationalité française, ont augmenté depuis quelques mois dans une proportion notable; et la plupart d'entre elles doivent vous être renvoyées par mon Parquet ou par la Chancellerie, à la suite d'un examen qui fait apparaître des lacunes ou des erreurs trop nombreuses. Il en résulte un échange de correspondances et une perte de temps préjudiciables aux intéressés eux-mêmes, autant qu'au fonctionnement régulier de l'administration de la justice Afin d'obvier à ces inconvénients, j'ai dressé un certain nombre de modèles comprenant tous les cas de déclarations qui doivent être souscrites devant vous; ces modèles sont renfermés dans une table générale qu'il vous suffira de consulter pour retrouver, suivant l'occasion, chaque espèce qui vous sera soumise.

Le sommaire est précédé d'un numéro d'ordre qui vous renvoie

(1) La 4 section du parquet de la Seine, dirigée par M. le substitut Rome, a préparé cette importante circulaire qui a été approuvée par la Chancellerie.

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3o PARTIE. 10° ANNÉE.

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