Page images
PDF
EPUB

tuels et temporels de l'Église d'Allemagne. Nous nous abstiendrons de vous entretenir plus longuement de cet objet ; il vous sera facile d'en prendre une connaissance exacte sur la copie de la protestation et de la note, qui sera mise sous vos yeux.

"Après avoir terminé définitivement ce qui regardait notre personne, et assuré les droits du Saint-Siége, les princes, après avoir pacifié l'Europe, convaincus, comme nous n'en doutons pas, de l'importance de cette affaire, et combien ils y sont intéressés eux-mêmes, consacreront tous leurs soins aux intérêts de l'Église, et se mettront en mesure de régler toutes les affaires ecclésiastiques de l'Allemagne. Nous l'espérons avec d'autant plus de confiance, que nous venons d'apprendre que, dans un nouveau congrès qui doit bientôt s'ouvrir, on réglera les affaires de l'Allemagne elle-même sur des bases invariables. Nous espérons que, dans ce congrès, on donnera un soin particulier aux affaires de l'Église. La religion étant la base la plus solide des empires, et le plus ferme soutien de la félicité publique, les souverains et tous les gouvernements sont essentiellement intéressés à la défendre et à la protéger.

"Pour ne point paraître manquer à notre devoir, aux droits de l'Eglise et à ceux du Saint-Siége apostolique, que nous devons conserver dans toute leur intégrité, nous confirmons de notre pleine autorité apostolique les deux protestations faites par notre légat relativement aux droits et intérêts, tant du Saint-Siége que de l'Église d'Allemagne, ainsi qu'il est statué par la bulle apostolique que nous avons déjà expédiée.

"Nous ne terminerons pas notre discours sans témoigner toute notre satisfaction à notre légat pour avoir rempli si dignement les fonctions dont nous l'avons chargé. Quoique sa modestie repousse la louange, nous croyons que c'est un hommage à rendre à la vérité, que de lui manifester les sentiments de notre cœur. Sa justice, sa probité, ses talents lui ont à juste titre mérité toute notre bienveillance depuis le commencement de notre pontificat, époque où nous l'appelâmes dans notre conseil et dans notre administration; et rien n'a pu nous affecter plus douloureusement que de nous voir contraints d'en être séparés.

"Nous ayant depuis donné en France, dans le temps que nous étions prisonniers, de nouvelles preuves de sa constance et de sa fidélité, nous lui avons confié une léga

tion pleine de difficultés et de fatigues, dans laquelle il a répondu parfaitement à ce que nous attendions de ses talents et de son dévouement à notre personne et aux intérêts de l'Église romaine, en se conformant à nos ordres avec la plus grande exactitude et avec un zele au-dessus de tout éloge. C'est ainsi qu'il a terminé, avec le plus heureux succès, la mission dont nous l'avions chargé. Nous pensons donc qu'il a bien mérité du Saint-Siége, et nous croirions manquer à la justice que nous lui devons, si nous ne faisions publiquement son éloge.

"Nous devons maintenant, ô vénérables freres, réunir nos prieres pour rendre à Dieu, l'auteur de tout bien, et dont nous venons de recevoir une protection spéciale, le juste tribut d'actions de grâces que nous lui devons; et puisque nous sommes persuadés qu'il nous a accordé tant de faveurs par l'intercession et les mérites de la très-glorieuse Vierge Marie, et des bienheureux apôtres Saint-Pierre et Saint-Paul, dans le jour consacré à la Nativité de la même Vierge, mere de Dieu, après la messe solennelle célébrée en notre présence dans la basilique du Prince des Apôtres, nous adresserons à Dieu nos actions de grâces, avec des cantiques, des hymnes, et nous offrirons le tribut de nos hommages à sa très-sainte Mere, et aux glorieux apôtres Saint-Pierre et Saint-Paul, afin que, par leur puissante intercession, Dieu, avec les plus amples dons, et les bienfaits dont il nous a gratifiés, accorde une parfaite tranquillité à l'Église, dont nous sommes le chef visible, et donne à tous les princes dont nous et le Saint-Siége avons éprouvé la bienveillance, une extension de gloire et de félicité.”

AFFAIRE DES FRERES FAUCHER, DE LA RÉOLE.

Conseil de Guerre de la XIe. division militaire.

Bordeaux, 25 Septembre.

César et Constantin Faucher, de la Réole, freres jumeaux, ont depuis long-temps acquis une malheureuse célébrité dans nos contrées, par l'influence qu'ils ont exercée aux époques désastreuses de notre révolution, sur une certaine classe de la population de la ville de la Réole et des environs.

:

La seconde apparition du fléau de l'Europe devait réveiller les espérances de tous ces esprits turbulents, tourmentés de la soif de l'intrigue, et lassés d'un oubli dans lequel ils eussent dû se croire heureux d'être laissés aussi les freres Faucher reparurent-ils aussitôt sur la scene, s'empressant d'offrir leurs services à l'homme qui venait de faire un appel à tout ce qu'il y avait de vicieux en France.

César Faucher fut d'abord nommé député à ce club politique qu'on a appelé Chambre des représentants, et, bientôt après, chargé d'un commandement dans la lle. division, Constantin se fit élire maire de la Réole.

L'arrivée des deux freres dans le pays, fut le signal de toutes sortes de désordres : les bons citoyens furent menacés, poursuivis par des furieux, sûrs d'être protégés par leurs chefs; la Réole fut le théâtre des scenes les plus scandaleuses et des plus affreuses orgies; des outrages furent prodigués aux images du Roi; des concussions, des réquisitions, des vexations de toutes especes peserent sur les habitants paisibles; des soldats égarés, mêlés à des hommes de la fie du peuple, se répandirent dans les environs, multipliant les excès les plus coupables, les violences les plus actives contre toutes les personnes connues par la pureté de leurs principes et leur attachement au Roi.

Cet état déplorable aurait dû naturellement avoir un terme, quand la cause de l'usurpateur fut perdue, quand les espérances de ses partisans furent anéanties; mais

non, la province qui, en 1814, avait été l'avant-garde des royalistes en France, fut, en 1815, la derniere à jouir des bienfaits de la restauration. Pendant que le drapeau blanc flottait dans tout le royaume, on proclamait encore un souverain qui n'avait que des soldats de carton; et la Réole, comprimée par les freres Faucher, semblait se déclarer le dernier boulevard de ce parti odieux qui, non content d'avoir appelé sur la France les maux de la guerre étrangere, cherchait à la déchirer aussi par le fléau plus funeste de la guerre civile,

Mais une force majeure marcha pour réduire ces deux hommes, qui avaient transformé leur maison en une forteresse; et, contraints de céder, ils furent transférés à Bordeaux, dans les prisons du château du Hâ.

Depuis leur arrestation, on s'est occupé d'instruire leur procédure, et ils ont enfin été appelés devant le conseil de guerre permanent, convoqué par M. le lieutenant général comte de Viomenil, commandant de la lle. division militaire, pour y être jugés conformément aux lois.

La premiere séance de ce conseil a eu lieu Vendredi dernier, 22 du courant. Au nombre des pieces de cette procédure importante, se trouvent une proclamation des freres Faucher, ordonnant l'organisation de la fédération la Réolaise, imprimée à Bordeaux chez le sieur Coudert, propriétaire de l'Indicateur, et une lettre adressée par les deux Faucher au général Clausel, en date du 27 Juillet. L'acte d'accusation lu par le greffier du conseil, déclara César et Constantin Faucher prévenus: 1°. d'avoir retenu contre la volonté du gouvernement, le commandement qui leur avait été retiré; 2o d'avoir commis un attentat dont le but était d'exciter la guerre civile, et d'armer les citoyens les uns contre les autres, en réunissant dans leur domicile des gens armés qui y faisaient un service militaire, et qui criaient qui vive, sur les patrouilles de la garde nationale; 3°. d'avoir comprimé, par la force des armes et par la violence, l'élan de fidélité des sujets de Sa Majesté; 4°. d'avoir embauché pour les rebelles, et détourné les soldats du Roi en les engageant à joindre la bande d'un chef de partisans nommé Florian.

Le président ayant fait apporter par le greffier et déposer devant lui, sur le bureau, un exemplaire de la loi du 13 brumaire an V, demanda au rapporteur la

lecture du procès-verbal d'information, et de toutes les pieces, tant à charge qu'à décharge, envers les accusés.

Cette lecture terminée, le président ordonna à la garde d'amener les accusés, lesquels furent introduits libres et sans fers devant le conseil; ils n'étaient point accompagnés d'un défenseur officieux.

Celui qu'ils avaient choisi dans leurs interrogatoires des 18 et 19, n'ayant point voulu se charger de leur défense, ils avaient désigné, pour le remplacer, M. Gergeres ; mais le refus ou l'absence de ce dernier obligea le rapporteur de nommer d'office, sur la demande des freres Faucher, M. Degrange Bonnet, qui refusa, comme M. Gergeres, de prendre communication des pieces.

Le conseil, considérant que le refus de ces trois défenseurs et l'impossibilité d'en trouver un avant sa réunion, ne pouvaient retarder la convocation ni la tenue de sa séance, en conformité de l'article 20 de la loi du 11 brumaire an V, qui veut que dans aucun cas le défenseur ne puisse retarder la convocation du conseil de guerre, il fut procédé ainsi qu'il suit à l'interrogatoire des accusés.

Interrogés de leur nom, prénom, âge, profession, lieu de naissance et domicile.

Le premier a répondu : Je m'appelle César Faucher, âgé de 56 ans, citoyen français, natif et domicilié de la Réole; ne renonçant point au bénéfice légitime résultant des grades et qualités que m'ont valu mes services et mes blessures reçues à la défense de la patrie; mais déclarant que je prends habituellement le titre de citoyen français, ne regardant les autres que comme désignation des fonctions dont on quitte les décorations dès qu'on cesse de les

exercer.

Le second accusé a répondu : je me nomme Constantin Faucher, âgé de 56 ans, ajoutant, comme son frere César, qu'il prend le titre de citoyen français, etc.

L'audition des témoins a duré depuis le Vendredi 22, au matin, jusqu'au Samedi 23, à sept heures du soir.

Le nombre des témoins à charge était de quarante ; ceux à décharge, au nombre de treize. Tous se sont accordés dans les dépositions qu'ils avaient faites précédemment dans leurs interrogations particulieres. Les accusés se sont défendus eux-mêmes, et ont montré dans le cours des débats une grande facilité à s'exprimer, et une pré

VOL. LI.

E

« PreviousContinue »