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et Président du conseil des ministres de Sa Majesté, relative à la mission qui lui est confiée.

Le soussigné, se rendant aux désirs de M. Mazarredo, lui fait part que le mercredi 30 courant, à une heure de l'après-midi, il le recevra dans le salon de son ministère.

Le soussigné profite de cette occasion pour se dire, de M. Salazar y Mazarredo, le dévoué serviteur.

Signé: JUAN ANTONIO RIBEYRO.

Note du premier secrétaire d'État d'Espagne, remise par M. de Salazar à M. Ribeyro dans son entrevue du 30 mars.

Madrid, le 18 janvier 1864.

Excellence, considérant qu'il est utile pour les intérêts de l'Espagne, dans ses relations avec le Pérou, d'envoyer dans cette République un commissaire spécial qui, par ses connaissances et ses qualités personnelles, puisse contribuer à resserrer les liens qui doivent unir les deux États, et ce qui est stipulé plus haut se trouvant réuni dans la personne de M. Eusebio de Salazar y Mazarredo, député aux Cortès, et qui a été sous-directeur de la politique au ministère d'État, je prie Votre Excellence de vouloir bien le recevoir en qualité de Commissaire spécial, et de vouloir bien l'entendre pour tout ce qui se rapporte à sa mission.

Je vous prie, en même temps, de vouloir bien accueillir M. de Salazar y Mazarredo, saisissant cette occasion de renouveler à Votre Excellence l'assurance de ma très-haute considération.

LORENZO ARRAZOLA.

Réponse de M. Ribeyro à la communication du 30 mars
de M. de Salazar.

Lima, le 1er avril 1864.

Le Gouvernement du Pérou, interprète fidèle du sentiment public, désire toujours se distinguer dans ses relations internationales par des actes de bienveillance et de loyauté. Guidé par les principes de cette politique franche et loyale, il recevra M. de Salazar y Mazarredo, chargé d'une mission par S. E. M. le Président du conseil et premier Secrétaire d'État de S. M. Catholique auprès de ce ministère, avec la plus sincère cordialité, lui donnant toutes les facilités et lui accordant

ARCH. DIPL. 1865-I

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tous les droits reconnus et qui sont nécessaires pour remplir une mission aussi délicate.

Comme la communication du 18 janvier accrédite M. de Salazar avec un caractère purement confidentiel, à en juger du moins par les termes de la Note reçue, le soussigné s'empresse d'accepter, comme tel, l'agent du cabinet de Madrid, parce que la dénomination de Commissaire, non-seulement n'est pas conforme aux règles et aux usages diplomatiques, mais pourrait entraîner des embarras dans le cours des négociations qui, dans l'intérêt de l'un et de l'autre Gouvernement, doivent être menées à bien. Si M. de Salazar accepte, comme il y a tout lieu de l'espérer, cette première et nécessaire explication, il peut, lorsqu'il le jugera convenable, commencer sa mission, certain de rencontrer, de la part du Pérou et de son administration, les dispositions les plus grandes à s'entendre avec le représentant de l'illustre nation espagnole.

Le soussigné a l'honneur d'être, de M. de Salazar, le très-dévoué serviteur. Signé: JUAN ANTONIO RIBEYRO.

Note de M. de Salazar à M. Ribeyro.

Lima, le 12 avril 1864.

Le soussigné, Commissaire spécial extraordinaire de S. M. Catholique, a eu l'honneur de recevoir la Note que S. E. M. le Ministre des affaires étrangères du Pérou lui a adressée à la date du 1er avril. Dans cette Note, le Gouvernement péruvien récuse le titre de Commissaire spécial, comme n'étant pas conforme aux règles et usages diplomatiques.

Le mémorandum que le soussigné a adressé aux représentants des nations alliées et dont ci-joint une copie1, expliquera à S. E. M. le Ministre des affaires étrangères la signification que le Gouvernement de Sa Majesté donnera au procédé de la République dans ces circonstances critiques.

Dans une des dernières sessions de la Commission permanente du Congrès, l'on a fait connaître que l'administration actuelle nourrissait le projet de contracter un emprunt de soixante-dix millions de pesos, qui, dépassant de beaucoup les besoins du Trésor, devait servir, d'après l'opinion d'hommes politiques influents, à se procurer les moyens de s'opposer aux justes exigences de l'Espagne.

Le Gouvernement péruvien fera ce qu'il jugera le plus convenable;

ir page 248.

mais le soussigné espère que, pendant son absence de Lima, les sujets de la Reine résidant sur le territoire de la République seront respectés, quelles que soient les éventualités de l'avenir. La modération de son Gouvernement, de ses autorités et du pays en général, indiquera au Gouvernement de Sa Majesté la ligne de conduite qu'il aura à suivre dans la suite; et si malheureusement des excès étaient commis, les représailles seront promptes, énergiques et décisives; l'Espagne moderne est décidée à ce que ses enfants ne soient pas maltraités ni son drapeau méconnu.

Le soussigné réitère à S. E. M. Ribeyro l'assurance de sa considération la plus distinguée.

Signė: EUSEBIO DE SALAZAR Y MAZARREDO.

Note de M. Ribeyro à M. Pacheco, ministre d'État de S. M. Catho lique, touchant les événements qui ont eu lieu au Pérou depuis l'arrivée de M. de Salazar et de l'amiral Pinzon.

Lima, 13 avril 1864.

Le Pérou a éprouvé depuis longtemps déjà le vif désir de rétablir ses relations avec l'Espagne, nation à laquelle il est lié par des sentiments et des affinités connues; mais ce désir, exprimé plus d'une fois, n'a pu malheureusement se réaliser, grâce à des difficultés qu'on n'a pu surmonter facilement. L'occasion s'est offerte où le Gouvernement, interprète loyal des vœux du peuple qu'il dirige, put s'entendre avec le Cabinet de Madrid pour détruire tous les embarras qui jusqu'à ce jour avaient empêché la réconciliation et la paix entre deux États appelés, par leur origine et leurs intérêts réciproques, à vivre dans une union parfaite et une cordiale amitié.

A peine la guerre fut-elle terminée en Amérique, qu'il se forma des nationalités indépendantes, qui cherchèrent dans l'exercice de leurs droits les moyens de prospérer et de s'initier à tous les progrès de l'industrie et du commerce. Le Pérou ne demeura pas en arrière dans cette politique civilisatrice. Ses ports, ses champs et ses cités, sans exception aucune, furent ouverts aux étrangers laborieux, et les Espagnols, sans traité aucun, mais comme membres d'une même association, jouissent et ont joui des mêmes libertés que les nationaux. De ces faits, qui sont à la connaissance de toutes les personnes compétentes et impartiales qui ont visité notre territoire, l'on pourrait faire, si l'occasion le permettait, une énumération qui les confirmât d'une manière aussi certaine que concluante; mais le Gouvernement de S. M. Catholique, qui connaît la douceur proverbiale du caractère

péruvien, la bonté de ses lois et la mansuétude de son administration, excusera certainement un travail qui n'augmentera en rien les connaissances qu'il a sur toutes les parties du continent.

La bienveillance de la nation péruvienne et de son Gouvernement a été quelquefois faussement interprétée par des fonctionnaires injustes; d'autres fois, elle a été calomniée par des particuliers, qui, trompés dans leurs espérances, sont devenus gratuitement les ennemis du pays qui leur donnait l'hospitalité; mais jamais l'on n'a pu croire que des témoignages de ce genre aient pu briser les liens qui unissaient instinctivement les deux peuples, et devaient leur procurer un bien-être réciproque. Afin de prévenir de nouveaux ennuis qui pourraient troubler les relations existant déjà et empêcher une paix définitive, le soussigné Ministre des affaires étrangères du Pérou, a l'honneur de s'adresser à S. E. M. le Ministre d'État en Espagne, pour lui donner quelques explications qui, par leur sincérité et leur franchise, ne peuvent faire moins que d'amener les deux Gouvernements à s'entendre et traiter entre eux d'une manière définitive.

L'on remarque avec une peine profonde que la presse en Espagne publie depuis quelques années, dans des journaux sérieux, des attaques contre le Pérou, qu'une personne de là-bas, en correspondance avec une autre personne, résidant dans cette ville, a le soin de rédiger. Il n'y a pas d'imposture qui ne soit affirmée, il n'y a pas de fait qui ne soit travesti, représentant la nation comme une nation sans lois, sans coutumes et sans moralité; tous les habitants comme livrés aux excès d'une honteuse débauche, et le Gouvernement comme l'instrument de tous ces excès et de tous ces attentats. Placé plus bas qu'un pays barbare, le Pérou est considéré comme une réunion de malfaiteurs où l'on ne respecte aucun droit et où l'existence individuelle est constamment en péril, étant constamment menacée. Ces calomnies publiées systématiquement, ont pu produire dans certains esprits d'injustes suppositions; et c'est de là, sans aucun doute, que sont venues toutes les préventions contre les autorités de la République, préventions qui ont été un obstacle à une prompte entente entre les deux nations.

Et, qu'il me soit permis de le dire, dans ce moment de révélations importantes le mobile de cette conduite n'est autre qu'un parti pris ignoble, d'autant plus méprisable qu'il n'est justifié par rien.

Lorsque l'escadre espagnole, à destination du Pacifique, arriva dans le port du Callao, le Gouvernement lui offrit cette hospitalité généreuse que l'on accorde toujours à des amis, et malgré les alarmes qui essayèrent de se faire jour à propos de cette expédition navale, le bon sens triompha de tous les dires imprudents. Ni les règles de la plus rigoureuse étiquette, ni les politesses de tout genre prodiguées aux

marins de la Péninsule, ni les actes d'une déférence marquée n'ont été oubliés à l'arrivée des hôtes avec lesquels les fils du Pérou étaient liés depuis si longtemps. Eh bien!... l'on n'a pas répondu à cette courtoisie, et la plus petite démonstration n'est pas venue donner à notre société la réciprocité à laquelle elle devait s'attendre. M. l'amiral chef de l'escadre, auquel, depuis le Gouvernement jusqu'au plus simple particulier, il a été fait toutes sortes de politesses, a employé, dès le principe, un ton dédaigneux, tant avec les autorités qu'avec les particuliers, et, au lieu d'étudier nos populations et nos hommes politiques, afin de se rendre bien compte des intentions du Gouvernement, il s'en est éloigné en les accusant sans que leur conduite ait jamais mérité des procédés semblables; puis, s'entourant de mécontents et de prétentions injustes, il a formé autour de lui un entourage à part qui rendait sa présence plus difficile au milieu de nous. Tels sont les faits qui, partout ailleurs, eussent produit de fatals désaccords. Par bonheur, au milieu de ces malheureuses circonstances, l'on a trouvé la sagesse nécessaire pour éloigner les troubles qui auraient retardé bien davantage la bonne intelligence existant entre le Pérou et l'Espagne.

Un événement inespéré, mais très-commun dans tous les pays de la terre, vint donner un prétexte de plus aux prétentions déjà bien avancées de l'amiral et de ceux qui cherchaient prétexte à un conflit. Dans une hacienda de la côte, appelée TALAMBO, il s'éleva un conflit entre quelques colons espagnols et certains Péruviens attachés à l'hacienda; un Espagnol et un Péruvien furent tués, et il en résulta encore des accidents moins graves. Dès que l'administration supérieure apprit ce qui s'était passé, sans pour cela abandonner ses travaux quotidiens, elle pria les autorités locales et les fonctionnaires judiciaires, chacun dans la sphère de ses attributions, de remplir ses devoirs en s'emparant des coupables, instruisant leur procès avec la plus grande diligence, jusqu'à ce que l'on arrivât à leur punition rigoureuse. Et cet ordre fut donné, non pas sous l'impulsion de recommandations ou pressions étrangères, mais avec le désir de laisser à la justice le soin d'obtenir une vengeance éclatante.

Le procès a été instruit, et quoique tout ne soit pas terminé définitivement, l'on continue à chercher, avec le soin le plus scrupuleux, la vérité des faits qui se sont passés et leurs véritables auteurs. Il n'y a pas eu et il n'y a, jusqu'à présent, de la part de la justice, ni déni ni retard, cas uniques dans lesquels le droit international prescrit et autorise la réclamation diplomatique. L'on a dépeint, et l'on dépeint encore la catastrophe de Talambo, de telle sorte qu'à en juger par les rapports exagérés que l'on en fait, le Pérou serait la dernière nation dans l'échelle des sociétés humaines. Mais, heureusement, plus d'un témoi

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