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les prostituées vénériennes ne sont envoyées ou retenues dans un hospice, ni pour délits, ni même pour contraventions aux règlements qui les concernent, mais uniquement pour y être traitées; qu'elles n'y sont pas détenues, mais simplement consignées jusqu'à guérison, comme cela se pratique dans d'autres hôpitaux, pour des maladies moins funestes à la société que celle dont il s'agit.

Si les arguments mis en avant par les hôpitaux étaient forts et basés sur les motifs les plus louables, il faut avouer que les réponses du préfet n'avaient pas moins d'énergie, et qu'il était difficile d'y faire des oppositions véritablement sérieuses aussi le conflit entre les deux administrations fut-il long et animé; enfin les hôpitaux l'emportèrent, ou pour mieux dire il se fit un accommodement; les prostituées sortirent de la Pitié, et l'on réserva cent lits dans l'hospice du Midi à celles que la police y envoyait.

Ce nombre de lits, bien insuffisant pour les besoins des prostituées, a forcé la Préfecture de police à diriger sur l'infirmerie de la prison de Saint-Lazare toutes celles qu'elle ne peut envoyer à l'hospice, et malheureusement le nombre en est considérable; c'est un inconvénient grave, auquel l'état des finances de la ville de Paris n'a pas encore permis de porter remède, et qui, malheureusement, n'a pas assez fixé l'attention de tous ceux qui, par leur position, se trouvent à la tête des affaires de notre cité. Puisse ce travail lest éclairer sur ce point, et leur prouver qu'il faut pour les prostituées un hôpital spécial comme une prison spéciale!

ARTICLE IV.

ÉTABLISSEMENTS ACTUELLEMENT CONSACRÉS AU TRAITEMENT DES MALADIES VENÉRIENNES. SAINT-LAZARE, LOURCINE, MIDI, ETC.

[La nécessité de séparer les femmes atteintes d'affections syphilitiques, des filles publiques envoyées dans les hôpitaux pour le traitement de cette maladie, était comprise par l'administration de la police tout aussi bien que par celle des hospices, et le vou exprimé par Parent a été réalisé en 1835.

Le traitement des maladies vénériennes est centralisé aujourd'hui dans des hôpitaux spéciaux qui sont : 1° Saint-Lazare pour les prostituées;

2° L'hôpital de Lourcine pour les femmes dites du civil;

3 L'hôpital du Midi pour les hommes;

4° Les maisons de santé et quelques autres établis

sements.

§ 1.- Maison de Saint-Lazare.

La maison de Saint-Lazare, située faubourg SaintDenis, est placée sous l'administration de la Préfecture de police. Elle renferme une population générale de mille trois cents détenues environ, divisée en trois sections principales.

La première contient les prévenues et condamnées; La seconde est à la fois un lieu de punition et un hôpital pour les prostituées;

La troisième est affectée aux jeunes filles renfermées soit par application des articles 66 et 67 du Code pénal, soit par voie de correction paternelle. Nous ne nous occuperons

Moyenne des malades.

3 EDIT., T. II.

3

ici que des infirmeries de la seconde section (1). Elles sont placées dans un grand corps de bâtiment auprès de la chapelle, et renferment, en moyenne, trois cents malades dans seize salles de vingt lits chacune, savoir:

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En 1850, alors que la maladie vénérienne avait éprouvé une recrudescence par suite des désordres qui suivirent la Révolution de février, le nombre des malades s'était élevé à cinq cents. Le tiers de ces malades était obligé de coucher sur des matelas étendus dans les couloirs.

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Médecins. Le personnel médical des infirmeries est composé de deux médecins qui visitent les malades deux fois par jour; de deux aides internes chargés de recueillir et d'exécuter les prescriptions des médecins; et enfin, d'un pharmacien.

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Contrôle de service. Le service du contrôle et d'inspection des infirmeries est fait par le médecin en chef du dispensaire.

Direction des infirmeries. Sous le rapport médical, les infirmeries sont dirigées comme celles des autres hôpitaux, mais la nature de l'établissement dans lequel elles se trouvent placées, a permis d'y introduire les

(1) Voyez, pour ce qui concerne les première et troisième sections le chapitre PRISON.

mêmes moyens de surveillance et de répression que ceux auxquels on a recours à l'égard des femmes détenues par voie judiciaire et dont la conduite est un objet de trouble et de scandale. Inutile de dire, par consé quent, que les refus de traitement n'y existent pas et que les actes d'insubordination y sont immédiatement et efficacement réprimés.

Huit religieuses de l'ordre de Marie-Joseph ont la direction et la surveillance des salles.

Classement des malades.

Les malades sont

classées par catégories; les jeunes filles non inscrites forment une division à part et ne sont pas en contact avec les vieilles prostituées qui ne pourraient qu'achever de les corrompre. Celles qui ont manifesté l'intention de rentrer dans leur famille sont même traitées séparément.

Durée du traitement.

La durée du traitement est en moyenne de quarante-cinq jours pour les filles publiques inscrites; elle est de trois mois pour les insou

mises.

Cette différence provient, d'une part, de ce que la maladie est prise à son début chez les filles publiques inscrites, tandis que chez les insoumises, au contraire, l'infection remonte généralement à une époque déjà ancienne quand commence le traitement, et d'autre part, de ce que les infections sont communément plus graves chez les insoumises que chez les filles publiques.

Sortie des infirmeries. Les filles traitées à SaintLazare sont ramenées à la Préfecture après guérison et subissent une contre-visite au Bureau médical du Dispensaire avant d'être mises en liberté.

a

Mouvement des entrées.-Le mouvement des entrées

été pour 1853 et 1854, savoir:

Filles de maisons de Paris, syphilis..

1853. 1854.

.....

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Banlieue, id..

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Pour ces trois classes, affections psoriques

et de l'utérus.

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Insoumises, syphilis.

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affections psoriques et de l'u-
térus....

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On ne saurait attribuer la totalité de ces décès à la maladie vénérienne; ils proviennent, pour la plupart, d'autres maladies dont les femmes portaient le germe en entrant dans les infirmeries.

Car, ainsi que l'a remarqué M. le docteur S. Rossignol, ancien interne de la maison de Saint-Lazare (1), «< chez les filles qui vivent dans l'oisiveté la plus absolue, dont les deux moitiés de la vie se passent, comme disait la Fontaine, l'une à boire, l'autre à ne rien faire, les fonctions assimilatrices présentent presque constamment des perturbations, un état morbide. Rien de plus fréquent que d'observer chez ces filles tous les degrés de la dyspepsie, de la gastralgie, l'anémie, la chloroanémie, et ces mille accidents que l'on appelle aujourd'hui, avec MM. Cerise, Trousseau et autres, la névropathie protéiforme, ce que Whytt et Louyer-Villermay

(1) Aperçu médical sur la maison de Saint-Lazare. Thèse, pag. 33. Paris, 1856.

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