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femmes galantes qui se distinguent des prostituées de bas étage par la recherche de leur mise, le soin de leur personne et le choix de leurs relations. Sans se faire illusion sur leur compte, ceux qui les recherchent échappent, près d'elles, à la repoussante banalité des filles de maisons.

En 1850, le nombre de ces établissements s'élevait à 22, dont 2 ont été fermés, sans l'intervention de l'autorité, l'un en 1853, l'autre en 1856. Il n'existe pas de maison de tolérance dans les faubourgs.

3° Provenance des filles publiques. - La plupart des filles publiques sont nées dans le Finistère, ou dans les Côtes-du-Nord. Quelques-unes proviennent des départements du Nord, de la Seine-Inférieure, du Morbihan, de l'Ille-et-Vilaine. Les maîtresses de maison s'approvisionnent en général dans les grandes villes voisines Nantes, le Havre, Rouen, Rennes, en première ligne ; Lorient, Quimper, Morlaix, en deuxième ligne. Celles qui sont nées à Brest y sont en minorité. Les filles isolées, au contraire, appartiennent, pour la plupart, à la ville ou à la banlieue.

4° Professions antérieures. Les professions qui en fournis sent le plus sont celles de servantes, couturières, blanchisseuses, repasseuses. Beaucoup d'entre elles n'ont jamais exercé de profession. Nées dans le libertinage, elles n'ont jamais cherché à se créer d'autres moyens d'existence.

5° Age des filles publiques. En ce qui a trait à leur âge, on peut établir les chiffres approximatifs suivants :

Filles publiques âgées de 16 à 21 ans.

de 21 à 30 ans.

au-dessus de 30 ans..

6 Mouvement de la prostitution.

30 à 35

250 environ. 50 à 60

A partir de 1852, les matricules du dispensaire ont cessé d'être tenues d'une manière assez régulière, pour permettre de suivre, année par année, le mouvement de la prostitution. D'après les renseignements fournis par la police, et, en s'en rapportant à des documents semi-officiels, le nombre des filles publiques s'est accru d'un quart depuis 1850. Il n'a pas varié depuis trois ans. Dans le compte moral présenté par M. le maire, au conseil municipal, à la session du mois de mai 1854, il est fixé à 345, et nous avons vu qu'il ne s'élève aujourd'hui qu'à 344. Depuis le mois de mars 1856, u tiers des filles inscrites a été renouvelé; 35 d'entre elles ont été

l'objet de poursuites et de condamnations judiciaires, un nombre à peu près égal a quitté la ville ou en a été expulsé, 10 ont été dispensées de la visite, en raison de leur âge, ou de leur conduite régulière, 8 ont succombé ou sont entrées au Refuge. Cet établissement, destiné à servir d'asile aux prostituées qui veulent rentrer dans la bonne voie, a été fondé par de pieuses femmes, aux dépens de leur patrimoine, et se maintient à l'aide des sacrifices qu'elles s'imposent. 50 filles, en moyenne, y sont renfermées. Soumises aux plus rudes privations par l'insuffisance des ressources dont le Refuge dispose, elles partagent leur existence entre le travail et la prière et vivent dans la séquestration la plus absolue.

7° Règlements. Les filles publiques et les maîtresses des maisons qui les recèlent sont soumises aux dispositions suivantes :

CHAPITRE Ier.

- Règlement du dispensaire de Brest.

Art. 1. Le dispensaire établi à Brest par ordonnance du roi, du 1er juillet 1829, dans l'intérêt de l'ordre et de la salubrité, pour les femmes publiques de la ville de Brest, et des communes de Saint-Marc, de Lambézellec et de Saint-Pierre Quilbignon, est dirigé par le maire de Brest, sous l'autorité du préfet du Finistère et la surveillance du sous-préfet de Brest.

Art. 2. Le personnel de cette administration se compose: d'un commissaire de police, directeur; d'un ou deux docteurs en médecine ou en chirurgie, d'un secrétaire ou commis aux entrées, de deux agents de police, d'un concierge, et d'une infirmière.

Art. 3. Le commissaire directeur a dans ses attributions : les rapports journaliers au maire de Brest et au sous-préfet sur les filles conduites au dépôt; les relations avec les autres commissaires de police de la ville de Brest; l'enregistrement et la radiation des filles publiques sous l'approbation des maires compétents et le visa du sous-préfet; la délivrance des cartes de sûreté; la recherche des filles retardataires à la visite; l'admission à l'hospice pour traitement, d'après le certificat du médecin constatant l'infection; la proposition d'établissement ou de suppression des maisons de tolérance; l'expédition des pièces comptables, signées par le maire de Brest et visées par le sous-préfet; la tenue des écritures. Le commissaire directeur porte à la connaissance des maires de Brest et communes intéressées, du sous-préfet et du procureur du roi, s'il y a lieu, les abus de nature à compromettre la salubrité et la morale, qu'il parviendrait à découvrir au moyen des rapports fréquents que ses fonctions l'obligent à entretenir avec les filles publiques; enfin il est spécialement chargé, sous l'autorité des maires et du sous-préfet, de la police intérieure et extérieure des maisons de prostitution ainsi que de l'exécution du présent règlement, sans préjudice des obligations des autres commissaires de police de Brest, qui n'en sont pas dispensés.

Art. 4. Les attributions particulières des médecins consistent à visiter régulièrement les filles publiques aux heures, aux jours et dans l'ordre arrêtés par le maire, à constater leur état de santé ou de maladie; ils délivrent, après visite, les certificats de santé aux femmes qui demandent leur inscription ou leur radiation; ils rédigent les rapports demandés par l'autorité, sur les différents points du service de santé.

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Art. 5. Les filles publiques sont divisées en deux classes, suivant qu'elles vivent séparément ou en commun. Les premières, dites isolécs, ne sont pas tenues à fournir un répondant; les secondes, dites en maison, sont sous la responsabilité de la maîtresse de la maison.

Art. 6. La réunion des filles publiques rendant la surveillance plus facile, tant sous le rapport de l'ordre que sous celui de la salubrité, les maisons de filles publiques sont tolérées, à charge aux maîtresses de maison qui existent déjà, comme à celles qui voudraient en établir à l'avenir, de se conformer strictement aux dispositions suivantes : 1° D'obtenir un livre de tolérance dont la demande est adressée directement au commissaire de police directeur, qui recueille les renseignements nécessaires et les transmet, avec son avis, au maire de la commune où l'établissement doit avoir lieu. Le maire les soumet, avec ses observations, au sous-préfet, qui renvoie le tout, avec sa décision, au directeur chargé de notifier à la pétitionnaire le refus ou l'autorisation de tenir maison, et, dans ce dernier cas, de lui faire connaître, en lui délivrant le livre de tolérance, les obligations auxquelles elle s'assujettit. 2o De tenir registre des noms, prénoms, lieu de naissance et âge des filles, avec la date d'entrée et de sortie. Ce registre, coté et paraphé par le maire, est vérifié et arrêté tous les mois par le directeur. 3o De faire connaître, dans les vingt-quatre heures, au directeur, les mutations survenues. 4° De conduire à la visite que le médecin de service fait au dépôt, tous les jours le matin, les filles dont la santé deviendrait suspecte dans l'intervalle des visites hebdomadaires (1). — 5o De prévenir le désordre et le scandale à l'extérieur comme à l'intérieur de sa maison, et de ne pas recevoir de filles mineures. 6° Il est interdit aux maîtres ou maîtresses de maisons de tolérance de tenir débit de boissons. (Décision ministérielle du 6 octobre 1837.)

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Art. 7. L'inexécution d'une seule de ces dispositions donne lieu à la suspension et même à la suppression du livre de tolérance, qui sera prononcée par le maire et le sous-préfet, sur la proposition du direc

teur.

Art. 8. Les filles isolées font connaitre au directeur du dispensaire leur changement de domicile, par la présentation d'un certificat du commissaire de police de l'arrondissement qu'elles viennent habiter. Art. 9. Les filles isolées, dites entretenues, qui ont des moyens d'existence connus, peuvent obtenir la faveur de n'être pas appelées

(1) Les visites ont lieu les mardi, mercredi, vendredi de chaque semaine, Cependant le médecin de service passe au dispensaire tous les jours,

au dispensaire, et de ne pas être tenues à exhiber leurs cartes hors de chez elles. La carte de sûreté leur est délivrée sur le certificat de santé d'un médecin de leur choix, agréé par le directeur. Ce certificat est renouvelé tous les mois. (L'abus reconnu de cette tolérance l'a fait cesser immédiatement.) Le directeur adresse aux autres commissaires de police l'état nominatif des filles jouissant des exceptions précitées, afin qu'ils concourent à exercer sur ces filles la surveillance la plus active.

CHAPITRE III. Inscription volontaire ou d'office.

Art. 10. Toute femme qui veut faire métier de la prostitution est tenue d'en faire elle-même la déclaration au directeur, qui, en vertu de cette déclaration et de la présentation d'un certificat de santé, signé par un médecin du dispensaire, l'inscrit sur une matricule générale.

Art. 14. L'inscription comprend les nom, prénoms, âge, lieu de naissance, profession, domicile et signalement de la femme, ainsi que sa soumission aux mesures de surveillance et de salubrité en vigueur. Lecture lui est faite de sa déclaration, qu'elle doit signer; si elle ne sait pas écrire, il en est fait mention.

Art. 42. Indépendamment de l'inscription sur la matricule générale, les nom, prénoms et demeure de la personne sont portés sur un répertoire particulier, destiné à faciliter les recherches pour cause de désordre, de scandale, de retard de visites, etc.

Art. 43. Le directeur suspend l'inscription, lorsqu'il le juge nécessaire dans l'intérêt des mœurs et des familles, en faisant connaître surle-champ les motifs de cette suspension au maire, qui, s'il faut prendre des renseignements près des parents ou de quelque autorité, traite l'affaire administrativement, et qui, suivant l'occurrence, prononce en définitive l'inscription ou le renvoi au lieu de naissance ou à la famille. Art. 14. A défaut de déclaration volontaire, toute fille convaincue de se prostituer, peut être inscrite d'office sur la matricule générale et assujettie au règlement du dispensaire.

Art. 15. La conviction de la prostitution clandestine résulte d'une enquête faite par le directeur, constatant jusqu'à la dernière évidence une des circonstances suivantes: 4° La fréquentation publique des femmes reconnues pour se livrer à la prostitution; -- 2o la rencontre en récidive, par des agents différents, chez des filles isolées ou dans une maison de prostitution; 3° l'arrestation en récidive, sur la voie publique, pour conduite contraire aux mœurs, comme provocation, propos et actes licencieux; 4° La plainte directe ou indirecte, de communication de mal vénérien, admise par le directeur; soumise d'abord au maire et justifiée ultérieurement par le rapport d'un médecin du dispensaire (Décision ministérielle du 6 octobre 1837); -5° l'état de domesticité dans une maison de prostitution.

Art. 16. Le directeur, dans le cas de doute sur l'infection d'une fille non inscrite, après avoir pris les ordres du maire, notifie à la personne prévenue qu'elle ait à se présenter au dépôt, aux heure et jour fixés par le médecin, jusqu'à décision positive. Il prononce l'admission à l'hôpi

tal, si la maladie est confirmée, et, à défaut de place, le maintien au dépôt.

Art. 17. Dans tous les cas, les parents de l'inculpée (s'ils sont bien famés d'ailleurs, et s'ils ont une existence bien connue) peuvent, sur leur déclaration écrite, ou devant témoins agréés par le maire, obtenir la faculté (4) de la faire traiter chez eux, toujours sous la surveillance du directeur et du médecin du service.

Art. 48. L'inscription d'office n'a jamais lieu que sur un rapport fait au maire, et une autorisation écrite de ce magistrat, approuvée par le sous-préfet.

Art. 19. Il est délivré, à toute fille inscrite au dispensaire, une carte de sûreté conforme au modèle. Toute fille est tenue de représenter sa carte lorsqu'elle en est requise, soit chez elle, soit au dehors. Cette carte est renouvelée tous les trois mois.

Art. 20. La matricule générale d'inscription, certifiée par le directeur et visée par le maire, est arrêtée par le sous-préfet tous les trois mois.

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Art. 21. Toute fille publique, inscrite sur la matricule générale, ne peut rentrer dans la vie privée, qu'après avoir obtenu sa radiation.

Art. 22. Toute demande en radiation est adressée directement au maire, qui charge le directeur de prendre les renseignements nécessaires.

Art. 23. Sur le rapport du directeur, le maire, dans sa conviction intime que la demanderesse, indépendamment de son retour aux bonnes mœurs, est ou n'est pas en état de fournir aux besoins ordinaires de la vie, par un mariage légitime, un héritage, l'exercice d'une profession honnête, l'occupation d'une place fixe, etc., propose au souspréfet de refuser ou d'accorder la radiation.

Art. 24. Le sous-préfet adresse sa décision au maire, qui la transmet au directeur, pour être inscrite en entier, sur un registre particulier et mentionné seulement sur la matricule générale.

Art. 25. Le directeur délivre à la pétitionnaire, une copie certifiée de cette décision.

Art. 26. Le registre des radiations, certifié par le directeur, est visé par le maire et arrêté par le sous-préfet, sous trois mois.

CHAPITRE V. Police morale.

Art. 27. Les filles publiques, nonobstant les attributions du commissaire spécial les concernant, sont encore placées sous la surveillance des autres commissaires de police, qui correspondent avec le directeur pour tout ce qui relève de l'attribution des mœurs.

Art. 28. Les commissaires de police signalent les filles qui se livrent

(1) Le traitement à domicile est rarement accordé. Il est toujours fait par un médecin du dispensaire.

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