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IV. Bourse.

L'année 1856 a été laborieuse; d'autant plus laborieuse que le gouvernement français, dans d'excellentes intentions, mais au rebours des principes de la science économique, a cru devoir intervenir pour modérer les effets d'une crise qui serait passée depuis longtemps sans cet officieux concours, et réglementer le mouvement des capitaux. Le 8 mars 1856, le Moniteur contenait une note annonçant : « qu'aucune entreprise donnant lieu à une « émission de valeurs nouvelles ne serait autorisée pen<< dant le cours de cette année. » C'était convier les capitaux flottants à se jeter sur les valeurs étrangères que l'on émettrait durant cette interdiction. Pour corriger cet effet, on refusa la cote à toute nouvelle valeur, française ou étrangère, qui ne possédait pas cette faveur au moment de cette note, et on interdit administrativement les négociations sur lesdites valeurs. C'était pousser aux marchés clandestins, car on ne pouvait admettre que des mesures de police, qui n'interdisaient pas d'ailleurs la souscription de valeurs, pussent être jamais assez efficaces pour empêcher les négociations sur ces valeurs.

En 1793, sous le couteau de la guillotine, on échangeait les assignats contre de l'or; espérait-on en 1856 être plus heureux ? L'événement a montré l'inanité de ces décisions. Les valeurs défendues ont éprouvé des oscillations plus grandes, par suite il en est résulté des bénéfices ou pertes plus importants, et de là est né pour ces valeurs un attrait particulier pour la spéculation, ce qui, en dépit des exhortations du gouvernement,a facilité l'émission d'une foule de titres qui sans cela auraient rencontré des détenteurs de capitaux plus prudents et par suite plus modérés.

Ce qui distingue l'année 1856 des autres, c'est la tension des reports. Pour en juger, il suffira de jeter les yeux sur le tableau suivant des reports moyens à chaque liquidation de fin de mois du 3 pour 100 et du 4 1/2 pour 100 français. Nous y avons joint, pour que l'on pût apprécier ici l'importance réelle du report, le cours de compensation (importance de la somme avancée par le reporteur ou prêteur).

Tableau des cours moyens des reports sur le 3 p. 100

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Un premier coup d'œil attestera combien la spéculation peut déclasser une valeur. Les reports de 3 p. 100 étaient presque toujours comparativement plus chers que ceux du 4 1/2 p. 100. Or, le 4 1/2 p. 100 est actuellement en dehors de toute spéculation. C'est le 3 p. 100 qui est la valeur sur laquelle se fait la presque unanimité des affaires à terme.

La première quinzaine de janvier 1856 avait été mauvaise; on avait même exécuté des spéculateurs un peu plus ardents que prudents. C'est durant cette quinzaine que furent faits presque tous les plus bas cours de 1856, comme on s'en convaincra par le tableau qui termine cet article. La seconde quinzaine le tableau change; la Russie accepte l'ultimatum; les valeurs montent; mais les reports montent également, ce qui doit faire craindre que la hausse ne soit pas franche. En février, cours fermes et reports également élevés. En mars la paix se signe et le Prince Impérial naît; mais la rente, affaiblie par la mauvaise qualité de ses détenteurs, ne justifie pas l'importance de

ces événements par sa tenue. La Banque a beau diminuer son escompte le 1er avril, les fonds ne montent que lentement. Il est vrai que l'affaiblissement des reports semble témoigner que la rente a changé de mains. En mai on atteint à peu près, pour toutes les valeurs, les plus hauts cours de l'année. Les chemins de fer surtout se font remarquer par une hausse importante. Cette différence et la faveur qu'obtiennent les actions et les obligations de chemins de fer et la tiédeur que rencontre la rente frappent tout le monde, entre autres le Gouvernement, qui s'en alarme pour ses titres de crédit. En août des bruits transpirent sur des mesures que le Gouvernement prendra pour ramener le public vers ses fonds. On exagère bien ces bruits; mais en septembre la Banque, par ses mesures radicales contre les emprunteurs sur dépôts de titres de chemins de fer, ne justifie que trop la crainte du public. Les reports très-tendus en juin (dans la coulisse le report de 3 p. 100 monte jusqu'à 1 fr. 25 cent. en liquidation de fin juin) se détendent fin juillet et fin août.

A dater de septembre les affaires diminuent, et, par suite, les mouvements ont moins de portée. C'est en octobre que la Banque réduit à 60 jours le maximum des effets présentés. L'escompte était revenu à 6 p. 100 depuis le 16 septembre. La rente se ressent de ces difficultés financières et baisse jusqu'en janvier 1857. Les cours de décembre sont remarquablement bas; ils atteignent presque le minimum de janvier 1856.

En janvier 1857, projets financiers contre la spéculation et la Bourse. La Bourse s'en alarme et les valeurs baissent. En faisant un abandon de ces idées anti-économiques, on les remplace par un impôt de timbre annuel un peu élevé, mais qui n'offre plus, comme les premiers projets, le caractère d'une mesure préventive contre les opérations de bourse. Une foule de valeurs, que l'esprit de la note du 9 mars avait tenues éloignées du parquet, arrivent à la cote et régularisent ce que l'on n'avait pu empêcher.

Depuis cette époque, les rentes ont repris leur allure en baisse, tandis que les reports se sont tendus de nou

veau.

Parmi les valeurs qui sont venues à la bourse dans le

courant de 1856 et le commencement de l'année 1857, il faut citer :

L'emprunt espagnol, de 75 millions de francs, émis par MM. J. Mirès et compagnie (Caisse générale des chemins de fer);

L'emprunt de la Seine, de 50 millions, émis par MM. Saint-Paul et compagnie (Union financière et industrielle);

La caisse générale des chemins de fer (J. Mirès et compagnie);

L'Union financière et industrielle (Saint-Paul et compagnie).

Ces deux institutions ont un objet analogue à celui du Crédit mobilier.

Les chemins de fer suivants :
Lombards-vénitiens;
Linz-Elisabeth;

Est-bavarois;

(Par le Crédit mobilier autrichien); François-Joseph;

Russes;

(Par le Crédit mobilier français);

Madrid à Saragosse;

(Par le Crédit mobilier espagnol Weisweiler); Romains;

(Par la Caisse générale des chemins de fer); Toscans;

(Par la Banque générale suisse); Guillaume-Luxembourg;

(Par la Compagnie générale des caisses d'escompte, - A. Prost et compagnie);

Nassau;

(Par MM. Ch. Stokes et compagnie);

Franco-suisse;

(Par la compagnie du chemin de fer de Paris à Lyon). La compagnie des chemins de fer français du Midi a émis 116,000 nouvelles actions.

Plusieurs chemins de fer français ont émis des obligations, entre autres l'Est (Paris à Strasbourg).

Enfin, les ports de Marseille (créés par la caisse gé

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nérale des chemins de fer. J. Mirès et compagnie). Les houillères et chemins de fer de Carmeaux-Toulouse et la compagnie centrale d'assurances maritimes ont paru également en 1856.

On voit que l'année 1856 n'a été guère moins féconde que son aînée 1855. Entirera-t-on cette conséquence que la mobilisation des valeurs est un fait accompli, qu'il faut reconnaître et non combattre, protéger et non détruire? TABLEAU DES FLUCTUATIONS MENSUELLES AU COMPTANT

des rentes 4 1/1⁄2 p. 100 et 3 p. 100

PENDANT L'ANNÉE 1856 ET LES QUATRE PREMIERS MOIS DE 1857. 4 1/2 p. 100 (1852)

3 p. 100.

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TABLEAU DES PLUS HAUTS ET PLUS BAS COURS AU COMPTANT

des principales valeurs cotées à la Bourse de Paris

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Voir les Annuaires de 1849, p. 405; 1850, p. 446; 1851, p. 451; 1852, p. 470; 1853, p. 490; 1854, p. 490; 1855, p. 582; 1856, p. 475.

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