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puissans empires. Il est de mon devoir de déclarer que dans ce moment la Prusse fournissoit plus de deux cent mille hommes. Je dois en même temps rendre justice aux talens et aux services signalés du général Scharnhorst, qui a été tué dans la bataille de Lutzen. C'est à ses efforts infatigables qu'on doit en grande partie le réveil de l'énergie prussienne. Après sa mort, sa place a été supérieurement remplie par le général Gneisenau (1); l'un et l'autre ont prouvé ce que eurpays pouvoit effectuer, et le dernier a fait voi rqu'on n'a pas négligé de mettre à profit le temps de l'armistice. Pendant sa durée il a formé soixante-dix bataillons, dont cinquante ont combattu glorieusement sous le général Blücher. Je puis affirmer que, même dans les plus beaux temps du grand Frédéric, l'armée prussienne n'a jamais été plus

(1) Nous devons rectifier ici une erreur que nous avons commise, tome 11, page 289 de ce Recueil, en attribuant à M. de Gneisenau le Précis de la campagne de 1813 jusqu'à l'époque de l'armistice, que nous y avons inséré. Nous l'avons fait d'après l'opinion qui nous avoit paru généralement adoptée; mais nous avons été détrompés par M. le général de Gneisenau lui-même, qui nous a déclaré que ce Précis est de M. de Clausewitz, colonel dans la légion russe-germanique, et que ce général appelle un officier très-distingué.

nombreuse, mieux disciplinée et mieux dressée à des opérations militaires que dans le moment actuel. En effet, l'armée prussienne, proprement dite, n'a jamais été si forte; quoique nouvellement levée, elle a combattu et vaincu les troupes exercées de la France. Je suis très convaincu qu'on voudra soutenir de tels efforts.

Quant à la réunion de l'Autriche à la cause de la liberté, il ne peut régner à cet égard qu'une seule opinion. On croit peut-être que les subsides que nous lui avons payés ont été proportionnés à la grandeur du service qu'elle a rendu en se déclarant pour la cause commune; mais les efforts que nous avions faits ne nous ont pas permis de rendre toute la justice à l'importance de la démarche de l'Autriche. La somme par laquelle cette puissance doit être soutenue est d'un million avec cent mille fusils et différentes munitions; si la guerre se prolongeoit au-delà du 1er mars 1814, une nouvelle convention sera arrêtée.

No CVII.

Déclaration du Grand-Duc de B de, du 23 novembre 1813.

CONFORMÉMENT à l'exemple de mon illustre aïeul qui m'a précédé dans le gouvernement, je

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me suis fait un devoir obligatoire de procurer le bien-être et le bonheur de mes sujets, et d'assurer la conservation de l'état de Bade. Les obligations contractées par le feu Grand-Duc envers la France lors de son accession à la Confédération du Rhin, et qui à son décès m'ont été dévolues, m'ont été sacrées, parce que j'espérois en les remplissant rigoureusement fonder la tranquillite de mon peuple et la conservation de mon pays; et quoique le fardeau d'une longue guerre, dans laquelle, conformément aux liaisons existantes avec la France, je devois fournirà l'armée françoise un corps considérable de troupes, ainsi que la cessation de tout commerce, causât des blessures graves à la patrie, je me consolois par l'espérance qu'enfin la paix m'offriroit l'occasion de dédommager par ma sollicitude paternelle mon peuple de tout ce qu'il auroit souffert. La toute-puissante Providence qui dispose du sort des peuples a arraché l'étendard de la victoire aux armes françoises, et l'a donné aux armées alliées qui combattent pour la cause de l'Allemagne, parce qu'elle a jugé nécessaire de mettre un terme à la prépondérance françoise. Des bords de l'Elbe à ceux du Rhin, les armées alliées ont marché sans discontinuer de victoire en victoire. J'essayai une dernière tentative pour garantir le

repos et la sûreté de la patrie, menacée par l'approche du théâtre de la guerre. Je cherchai à obtenir de l'Empereur des François la neutralité pour le pays de Bade, espérant que de leur côté les hautes puissances alliées y donneroient leur consentement; mais les suites ne répondirent pas à cet espoir. Ne pouvant fonder de cette manière la paix du pays de Bade, je me trouve porté à me joindre aux puissances en guerre avec la France et liguées contre elles, et à unir ainsi la cause de la patrie à la leur. La conservation de l'état de Bade, la lutte pour la liberté et l'indépendance de l'Allemagne sont maintenant les deux objets que nous devons nous efforcer d'acquérir, et que, de concert avec les illustres alliés, nous nous flattons de l'espoir d'obtenir. Je ne puis vous cacher que notre position géographique, comme état limitrophe de la France, nous rend, comparativement aux autres états allemands alliés, un des plus importans, et réclame, par conséquent, tous les sacrifices exigés par la nécessité de défendre votre patrie, vos foyers, vos familles; que par conséquent il est indispensable que nous fassions des efforts pour contribuer de notre part au rétablissement d'une paix générale, à la fondation d'un équilibre politique qui en assure la durée, et protégeant

la liberté du commerce, anime l'industrie nationale et relève la prospérité du pays depuis longtemps languissante. Habitans du pays de Bade, confiez-vous à votre Prince; que ces grands objets, la défense de la patrie et la liberté de l'Allemagne, remplissent vos cœurs d'un enthousiasme religieux pour le bien public, et vous pénétrent du zèle glorieux de vous ranger volontairement à ma voix, et d'après les mesures que j'aurai prises, sous les drapeaux de la patrie, et vous rendent dignes d'imiter le bel exemple que depuis de longues années vos frères d'armes Badois vous donnent sans partage sur le champ de l'honneur. Ami de mon peuple, je partagerai le danger avec lui partout où il le menacera, jusqu'à ce qu'ayant après les combats atteint le but, une paix durable me garantisse le bonheur de fonder votre prospérité pour l'avenir, et d'assurer contre tous les orages la tranquillité de la patrie.

Donné à Carlsruhe, le 20 novembre 1813.
Signé CHARLES.

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