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CHAPITRE III

QUELS SONT LES EFFETS DE LA RÈGLE DU PARTAGE DÉCLARATIF? A QUELLES PERSONNES EST-ELLE APPLICABLE ?

Nous étudierons dans des paragraphes spéciaux les ques

tions suivantes :

1° Quels sont les effets de notre règle ?

2o A quelles personnes est-elle applicable?

Des difficultés que son application soulève en cas de tage d'une communauté conjugale et d'une société.

par

3o La règle s'applique-t-elle (a) aux rapports de chaque héritier avec ses propres ayants-cause?

4° (b) aux rapports entre les ayants-cause d'un même héritier?

5° (c) aux rapports de chaque cohéritier avec des tiers non ayants-cause des autres ?

S1°r. Quels sont les effets de la règle du partage

déclaratif?

Pendant l'indivision, les copropriétaires peuvent consentir des droits réels sur la chose qui leur appartient indivisément, mais la validité de ces droits réels est subordonnée au partage.

Si l'immeuble tombe au lot du constituant, la constitution est valable, tandis qu'elle est nulle si l'immeuble tombe au lot d'un héritier censé n'y avoir jamais eu de droits. Nous savons que l'effet déclaratif du partage commença par s'appliquer aux hypothèques.

Quand l'immeuble hypothéqué tombe au lot du constituant, l'hypothèque porte-t-elle sur tout l'immeuble?

Un arrêt de la Cour de Paris du 26 janvier 1824 l'a ainsi décidé, en se fondant sur l'article 883. La Cour de cassation (6 décembre 1826. Sirey. 1827, 1, 171) a avec raison cassé cet arrêt.

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La solution de la question dépendait uniquement de l'interprétation de la volonté des parties. Si leur intention avait été d'hypoquer l'immeuble en entier, l'hypothèque devait frapper l'immeuble en entier, s'ils avaient voulu la restreindre à la moitié, elle ne pouvait s'étendre à la totalité. Attendu, dit la Cour suprême, que si le copropriétaire d'un immeuble indivis qui, aux termes de l'article 883, a un droit éventuel sur la totalité de cet immeuble peut, en vertu de ce droit, hypothéquer éventuellement cette totalité, rien néanmoins ne s'oppose à ce qu'il borne et restreigne l'hypothèque qu'ils consent à la seule portion qu'il possède dans l'immeuble au moment de son obligation, que cette faculté rentre même naturellement dans le système de la spécialité des hypothèques, qui est une des bases les plus essentielles du nouveau régime hypothécaire.

C'est également l'intention des parties qu'il faut interroger dans tous les cas analogues à celui que la Cour de cas

sation a eu à juger. - La jurisprudence a étendu, et rien n'est plus conforme à l'esprit de l'article 883, la maxime du partage déclaratif à tous les droits réels constitués pendant l'indivision (Colmar, 22 juillet 1864. Dev. 65, II, 106. Limoges, 23 juin 1838. Dalloz au mot succession, n° 2088).

L'aliénation, tout le monde en convient aujourd'hui, d'un immeuble consentie pendant l'indivision par un des copropriétaires est subordonnée au résultat du partage. La loi 54 f. f. fam. erc. et la loi 3, C. comm. div. ont été abrogées par l'article 883 qui nous conduit à décider que l'acquéreur est un ayant cause du vendeur et ne peut avoir sur l'immeuble indivis plus de droits que lui.

Un arrêt de la Cour de Bastia du 18 avril 1855 (D. 55, 2, 305) a annulé une vente faite par un héritier pendant l'indivision comme vente de la chose d'autrui. Cela est singulier; pendant l'indivision le vendeur n'est pas propriétaire unique, ses droits sont restreints par ceux de ses cohéritiers, mais il est copropriétaire et peut-être deviendra-t-il par le partage propriétaire unique de l'ımmeuble vendu. Comment pourrait-on lui appliquer l'article 1599 C. C.?

La Cour de Nancy a consacré notre doctrine dans un cas où elle pouvait donner lieu à quelques difficultés (8 février 1853, D. 55, 5, 464). Un des héritiers avait reçu, pendant l'indivision, une part en deniers plus considérable que sa part dans la succession. Les cohéritiers soutenaient qu'il avait perdu absolument le droit de disposer des im

meubles héréditaires. Néanmoins, la Cour de Nancy decida la vente devait sortir tous ses effets.

que

Les cohéritiers ne peuvent revendiquer l'immeuble vendu pendant l'indivision. La vente sera nulle si le vendeur est déclaré n'avoir jamais eu de droits sur l'immeuble, mais le partage auquel la validité de la vente est subordonnée peut aussi la confirmer.

Nous croyons que l'article 2205 ne défend pas aux créanciers des héritiers de saisir pendant l'indivision et si la loi ne défend pas la saisie, il faut l'admettre dans l'intérêt des créanciers qui peuvent ainsi sauvegarder leurs droits dans le cas où l'immeuble viendrait à être attribué à leur débiteur. La Cour de cassation (Req. 14 décembre 1819. V. Dalloz, au mot Vente publique d'immeubles, n° 114 en note) a d'abord admis le droit de saisie qu'elle refuse maintenant. Il est évident que le saisissant devra surseoir à la vente par adjudication jusqu'après le partage, et que la saisie ne sera valable que si l'immeuble est mis au lot du débiteur (consulter un arrêt de la Cour de Lyon (20 mai 1854. D. 56, 2, 271 qui dans un cas particulier, consacre notre doctrine).

La purge ne se comprend pas pendant l'indivision. Le titre de l'acquéreur sera peut-être consolidé, peut-être anėanti par le partage. Comment rayer des inscriptions, alors que l'on ne sait pas si l'acquéreur gardera l'immeuble ou non (Cass. 13 février 1838, Dev. 38, I, 230)? La portion du prix de l'adjudication revenant à l'héritier qui a hyqothéqué sa part indivise dans un immeuble dont un de

ses cohéritiers s'est rendu adjudicataire pour le tout, peutelle être considérée comme subrogée à l'immeuble et assignée aux créanciers hypothécaires par préférence aux créanciers chirographaires?

La Cour d'Aix (23 janvier 1835. Dev. 35. 2, 267) l'a ainsi jugé, et d'éminents auteurs partagent son avis (Consulter Aubry et Rau, l. VI, p. 563, n° 24. Folleville. Revue générale de droit, 1877, p. 404. Contra. Demolombe, t. XVII, p. 379).

:

La règle de l'article 883, dit M. de Folleville, a surtout été édictée pour prévenir les troubles et évictions entre les divers cohéritiers. Mais les intérêts mutuels et réciproques des différents cohéritiers ne se trouvent pas engagés. Il s'agit simplement de régler les droits appartenant aux créanciers d'un même cohéritier,

Eh bien, ces créanciers se trouvent tous dans la même situation. Une hypothèque avait été consentie au profit de quelques-uns d'entre eux, cette constitution d'hypothèque ne pouvait être validée que si l'immeuble tombait dans le lot d'un constituant. Cet événement ne s'étant pas produit, il n'y a jamais eu d'hypothèque. Décider autrement serait violer à la fois l'article 883 et l'article 2125 C. civ.). On ne voit pas sur quoi serait fondé le droit de préférence que l'on veut accorder à certains créanciers.

L'opinion que nous comballons a été consacrée par la loi belge du 15 août 1854, article 2 (Voir Laurent. t. X, p. 440). Elle est contraire aux principes, mais conforme à l'équité.

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