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le juge de la situation des objets saisis, je pense que la dénonciation peut être faite valablement, au domicile élu; mais qu'il n'en peut résulter aucun changement relativement au Tribunal devant lequel la saisie doit être portée. L'on voit d'après cela que je n'adopterais pas la doctrine consacrée par deux arrêts, l'un de la Cour d'Agen, en date du 6 février 1810, rapporté par SIREY, 1814; 2° partie, pag. 193, et l'autre de la Cour de Cassation, en date du 29 août 1815 (ibid., 1815; 1re partie, pag. 430), qui ont jugé que toutes les significations relatives à l'exécution du jugement obtenu en vertu de l'acte contenant élection de domicile, devaient être faites au domicile réel.

Nota. On a agité, devant la cour de Turin, la question de savoir, si le jugement ou l'appel pouvait être signifié au domicile élu pour le paiement d'une lettre de change. L'affirmative a été jugée, quant à l'appel, à la 1re chambre de cette Cour, le 8 janvier 1810; et la négative, quant à la signification du jugement, à la seconde chambre, le 29 novembre 1809. (SIREY, 1814; 2° partie, page 392.) D'après les principes que je viens d'établir ici, il est évident que je n'adopterais pas la décision de ce dernier arrêt.

Quid, si la partie qui a élu domicile vient à décéder? On pensait généralement que l'élection n'en demeurait pas moins irrévocable, et que l'on pouvait assigner les héritiers, chacun pour leur part, au domicile élu. (BACQUET, des droits de justice, chap. VIII, no 16; ROUSSEAU-DE-LACOMBE, 2°, Domicile n° 14.) Je pense qu'il en serait de même encore aujourd'hui. (Argument tiré de l'article 2156.) On peut regarder l'élection de domicile comme une condition du contrat, sans laquelle il n'aurait pas eu lieu. Or les héritiers profitant de la stipulation, doivent en accomplir toutes les charges.

Quid, en cas de décès de la personne chez laquelle le domicile est élu? BACQUET, ibid., pense également que cela ne doit rien changer à l'effet de la convention, attendu, ditil, que le domicile, dans ce cas, est plutôt réel que personnel: c'est-à-dire est plutôt attaché au lieu qu'à la personne. RODIER, sur l'art. 3 du Titre II de l'Ordonnance de 1667,

partage cette opinion, sauf, ajoute-t-il, le droit accordé à la partie d'élire un autre domicile dans le même lieu. Cette opinion me paraît fondée. (Argument tiré du même art. 2156.) L'élection de domicile est censée, comme nous venons de le dire, faire partie des conventions respectives des contractans ; et très-souvent celui en faveur de qui l'élection a été faite, n'eût pas autrement consenti à contracter. Quant à la modification apportée par RODIER, elle ne peut faire aucun tort à l'autre partie; elle serait donc non recevable à la contester. (Argument tiré de l'art. 2162, et d'un arrêt de Cassation du 19 janvier 1814. (Bulletin, 1814, no 8.)

Lorsque l'assignation est donnée au domicile élu, faut-il augmenter le délai en raison de la distance du domicile élu au domicile réel de l'assigné? Je ne le pense pas; et ce, d'après ce qui a été établi ci-dessus, que le domicile élu est censé, en tout point, le domicile réel de celui qui l'a élu; et il a été ainsi jugé à Paris, le 2 juin 1812. (SIREY, 1812; 2° partie, pag. 345.) On oppose à cette décision l'art. 2185 du Code Civil, qui, en matière de surenchère, augmente le délai de deux jours par cinq myriamètres de distance du domicile élu par les créanciers dans leur inscription, à leur domicile réel. Mais on peut répondre que c'est précisément parce que la loi a cru devoir le dire formellement dans ce cas, qu'on doit en conclure que cette disposition ne doit pas avoir lieu, dans tous les autres cas où elle ne s'en est pas exprimée : que cette raison est d'autant meilleure dans l'espèce, qu'il y a un motif particulier à donner pour justifier la disposition de l'art. 2185; c'est que d'abord il s'agit d'une élection de domicile que le créancier est obligé de faire, dans un lieu où il arrivera le plus souvent qu'il ne connaît personne, et où par conséquent il n'a pas choisi un individu en qui il pût mettre sa confiance, et à qui il pût donner d'avance les instructions nécessaires. En second lieu, dans le cas de surenchère, il est en général difficile de déterminer d'avance la marche à tenir, puisque cela dépend du prix de la vente, comparé au prix réel de l'immeuble, du nombre et du montant des inscriptions. Il faut donc que le créancier puisse être instruit de tous ces détails, pour qu'il puisse se décider à faire, ou

non, une surenchère. Or il ne les connaît que par la notification; il faut donc que l'on ait le temps de la lui faire parvenir : mais ces raisons ne s'appliquent nullement au cas où l'élection de domicile a été purement volontaire, et où conséquemment la partie a pu choisir son mandataire, et lui donner d'avance les instructions convenables. On peut même citer à l'appui de cette opinion un arrêt de Cassation du 12 février 1817, rapporté dans SIREY, 1817; 1° part., p. 309, qui a jugé qu'il n'était pas nécessaire de faire mention du domicile réel dans les significations faites au domicile élu.

On a jugé en Cassation le 24 juin 1806 (SIREY, 1814; ire partie, pag. 39), que, par cela seul que la procuration donnée à une personne, contenait pouvoir d'élire domicile pour le mandant, les assignations données au mandant avaient pu être valablement données au domicile du mandataire, quoiqu'il n'y eût eu d'ailleurs aucun autre acte contenant élection de domicile. Je ne puis adopter cette doctrine.Jamais on n'a pu dire que le pouvoir d'élire domicile emportait élection. C'est comme si l'on disait que le pouvoir de vendre emporte vente ; que le pouvoir de prêter emporte prêt, etc. On opposera peut-être à cette opinion, celle que nous émettrons ci-après, Titre des Enfans naturels, que le pouvoir de reconnaître un enfant naturel vaut reconnaissance. Mais je pense qu'il faut bien distinguer les reconnaissances, de tous les autres actes. La reconnaissance ne constitue pas l'obligation. Elle la suppose, au contraire, déjà existante, et elle en fournit la preuve. Il suffit donc d'une manifestation quelconque de la volonté de celui qui reconnaît. Or, que cette manifestation ait lieu par tel ou tel acte, cela est absolument indifférent, pourvu que la volonté soit constante, et que les formes exigées par la loi aient d'ailleurs été observées. Il n'en est pas de même de l'acte qui constitue l'obligation conventionnelle. Cet acte exigeant le concours exprès ou tacite de la volonté des deux parties, il est évident que, tant qu'une d'elles seulement s'est expliquée, il n'y a qu'un simple projet qui peut être révoqué ad libitum; et si ce projet, au lieu de contenir un consentement direct à l'obligation, ne contient que le pouvoir donné à une personne de

la contracter au nom du mandant, il est encore évident que, tant que cette personne ne s'est pas expliquée, il n'y a pas encore d'obligation. Autrement il faudrait dire que si Pierre, par exemple, a donné pouvoir à Jacques de vendre sa maison à Paul, à telles et telles conditions, Paul peut acquérir la propriété de la maison par un simple acte de sa volonté, et sans aucun concours de la part de Jacques; ce qui est absurde. Donc, etc.

On a jugé également en cassation que le domicile ad litem pouvait être distinct du domicile réel, et résulter d'une série d'actes judiciaires non contestés, et supposant ce domicile. (Arrêt du 28 décembre 1815, rapporté par SIREY, 1816; 1re partie, pag. 109.)]

REMARQUES SUR LE TITRE IV,
Relatif au domicile.

C'est le titre 3 du nouveau code civil faisant partie de la deuxième loi, du 14 juin 1822, qui correspond à celui sur lequel nous venons d'exposer la doctrine de M. Delvincourt.

En voici le texte :

ART. 1er. Le domicile de toute personne est au lieu où elle a son principal établissement.

A défaut de domicile, la résidence en tiendra lieu.

2. Le changement de domicile s'opérera par le fait d'une habitation réelle dans un autre lieu, joint à l'intention d'y fixer son principal établissement.

3. La preuve de l'intention résultera d'une déclaration, faite tant à l'administration communale du lieu que l'on quittera, qu'à celle du lieu où on aura transféré son domicile.

A défaut de déclaration, la preuve de l'intention dépendra des circonstances. 4. Ceux qui seront appelés à des fonctions publiques, conserveront leur domicile, s'ils n'ont pas manifesté d'intention contraire. Le Code de procédure civile déterminera le juge qui devra connaître des actions personnelles intentées contre ces fonctionnaires.

5. La femme mariée et non séparée de corps et de biens, n'a point d'autre domicile que celui de son mari.

Le domicile des mineurs non émancipés, sera chez leurs pères et mères,

ou chez leurs tuteurs.

Celui des majeurs interdits sera chez leurs curateurs.

6. Les majeurs qui servent ou travaillent chez autrui, auront leur domicile dans la maison de la personne qu'ils servent, ou chez laquelle ils travaillent, lorsqu'ils y demeureront.

7. Le lieu où une succession s'ouvrira, sera celui où le défunt avait son domicile.

8. Les parties ou l'une d'elles, pourront dans un acte, et pour un objet déterminé, faire élection de domicile, dans un autre lieu que celui du domicile réel; dans ce cas, les significations, demandes et poursuites relatives à cet objet, jusqu'au jugement définitif inclusivement, pourront être faites au domicile élu et devant le juge de ce domicile.

9. Le domicile élu pourra être changé, pourvu que le nouveau domicile soit dans la même commune, et que le changement ait été notifié à l'autre partie.

Néanmoins ce changement ne pourra avoir lieu, si l'élection d'un domicile déterminé a été l'objet d'une stipulation expresse.

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Une loi du 28 novembre 1818, faisant partie de la législation intermédiaire, contient des dispositions importantes à l'égard du domicile de secours, c'està-dire des lieux où les indigens ont droit d'être secourus. En voici le texte :

ART. 1er. La commune où un indigent peut participer aux secours publies, est le lieu de sa naissance.

2. La commune dans laquelle un enfant est né fortuitement, ne devient point de ce chef son domicile de secours. Il a ce domicile dans le lieu qu'habitait son père au moment de sa naissance, et dans celui qu'habitait sa mère, si elle est veuve ou l'enfant illégitime.

3. Lorsqu'une personne pendant quatre années consécutives a été établie dans une commune qui n'est pas celle de sa naissance, et qu'elle y a payé pendant le même temps toutes les contributions qui lui ont été imposées, cette commune remplace le lieu de naissance comme domicile de secours.

4. Ce nouveau domicile de secours est de même remplacé par toute autre commune où, depuis, la même personne aurait été établie pendant le temps, et de la manière déterminée à l'article qui précède.

5. Les individus qui actuellement participent dans une commune aux secours publics, ont cette commune pour domicile de secours.

6. Les étrangers admis à établir leur domicile dans le royaume, qui l'auront conservé dans une commune de la manière déterminée à l'article 3,

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