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tement, Transaction, Tutelle, Usage, Usufruit, Vente et Voirie.

CESSION DE BIENS.-1.-Suivant le code, la cession de biens est un mode de payement qui éteint les obligations. Toutefois, ce n'est point par elle-même qu'elle les éteint; elle est seulement un moyen de parvenir à l'extinction.

2. Cette cession est l'abandon qu'un débiteur insolvable fait de ses biens à ses créanciers, pour en éviter les poursuites. Cependant, si elle ne présente ni le caractère de contrat, ni celui de jugement, elle n'arrête point ces poursuites (C. civ. 1265). — Dur., 12. n. 241; 10 juin 1808, Turin.

3. On voit par là qu'il existe deux sortes de cession de biens l'une volontaire, l'autre judiciaire (1266, C. civ.).

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4.- La cession de biens volontaire est celle que les créanciers acceptent volontairement, et qui n'a d'effet que celui résultant des stipulations mêmes du contral passé entre eux et le débiteur (1267 C. civ.).

5.-Conditions.-Comme elle est une convention libre, tout débiteur peut la faire si ses créanciers y consentent; les conditions d'admission à la cession de biens judiciaire ne sont point applicables à la cession volontaire. Le cession volontaire est permise aux négociants comme aux non négociants, elle peut avoir lieu après faillite (V. Faillite).—Dur., 12, n. 244, et Tr. des contr., n. 845.

6. Mais elle doit être acceptée par tous les créanciers (C. comm. 522). Ainsi, à la différence du concordat, ceux des créanciers qui n'y ont point adhéré, peuvent la repousser, et poursuivre leur payement sur les biens abandonnés, et cela dans le cas même où la cession aurait les caractères d'une dation en payement (Arg. 1166 et 2093 C. civ.). — Toull., t. 7, n. 252, 255, 254; Dur., 12, n. 242, 243, et Tr. des contr., n. 848, 849; Delv., t. 3, p. 401.

7. Car la faculté de forcer un créancier à l'exécution des contrats passés avec les trois quarts en somme étant une faveur accordée par la loi du commerce au négociant malheureux et de bonne foi, et le code civil ne contenant, ni ne pouvant contenir aucune disposition semblable, il s'ensuit que la cession de biens consentie par la majorité des créanciers en faveur d'un individu non commerçant, ne lie pas les autres créanciers. —14 mai 1812, Paris; 6 déc. 1831, Req. Caen.

8. L'abandon, pour opérer une vraie cession de biens, doit comprendre tous les biens du débiteur, (1265), à l'exception toutefois des objets déclarés insaisissables par les art. 581 et 592, n. 2-8 C. pr. Autrement l'acte serait une dation en payement et, comme tel, translatif de propriété. Pour la même raison, il faut que l'abandon soit fait à tous les créanciers indistinctement. - Dur., 12, n. 246.

9.-Qu'arriverait-il dans le cas où le débiteur n'aurait pas déclaré tous ses biens? Alors, dit Duranton, 12, n. 246, « les créanciers pourraient, suivant les circonstances, faire prononcer la nullité du traité pour cause de fraude, surtout si les objets non déclarés et découverts ne leur étaient pas remis. »— 26 janvier 1857, Gand.

10.-Lorsqu'il y a plusieurs créanciers, il est né

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11.-Outre ces conditions particulières, la cession de biens volontaire est soumise aux conditions exigées pour la validité de toute convention.

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12. Effets. Les effets de la cession volontaire dépendent des stipulations contenues dans cette convention; si elle ne renferme qu'un abandon pur et simple, il importe d'en bien fixer le caractère et de distinguer la cession des autres contrats avec lesquels elle présente de l'analogie.

13.-La cession volontaire comprend une renonciation, de la part des créanciers, à faire des poursuites contre le débiteur, du moins quant à la personne et quant aux biens abandonnés ; de la part du débiteur, il y a mandat aux créanciers de faire procéder à la vente, et consentement à ce qu'ils se mettent en possession des choses cédées (Toull., t. 7, n. 258). Ce mandat diffère des autres mandats, en ce qu'il ne peut être révoqué par le débiteur qu'autant qu'il payerait sa dette. Les créanciers ne seraient pas admis à refuser ce payement qui donnerait au débiteur le droit de rentrer en possession de ses biens. -Toull., t. 7, n. 244; Dur., t. 12, n. 244.

14. C'est par la mise en possession des créanciers que la cession ou l'abandonnement diffère de l'atermoiement, qui laisse le débiteur possesseur et administrateur de ses biens. L'abandonnement diffère de la dation en payement, en ce qu'il ne transfère pas la propriété aux créanciers, et n'éteint pas par lui-même l'obligation du cédant; il ne libère le débiteur que jusqu'à concurrence du produit que les créanciers auront tiré de la vente, à moins qu'ils n'aient fait remise du surplus. Il diffère de l'antichrèse en ce que ce dernier contrat ne donne pas au créancier le pouvoir de vendre.-Toull., t. 7, n. 240, 241, 242; Dur., 12, 247.

15. Si, depuis la cession volontaire, de nouveaux biens surviennent au débiteur, celui-ci est-il tenu de les abandonner à ses créanciers? L'affirmative est énoncée comme certaine par Toullier, t. 7, n. 243. C'était aussi l'avis de Denisart, vo Abandon. Duranton, t. 12, n. 247, est d'une opinion contraire; il la fonde sur ce que l'obligation d'abandonner les biens survenus depuis la cession n'est établie par la loi que pour la cession judiciaire, et que la cession volontaire n'a que les effets résultant des stipulations portées au contrat. Ce dernier sentiment, dit Dalloz, paraît préférable. L'art. 1267 est conçu en termes restrictifs il s'ensuit que l'acte de cession ne s'applique qu'aux objets qu'il désigne d'une manière spéciale. Quant aux biens futurs, si les créanciers entendaient qu'ils leur fussent aussi abandonnés, ils devaient le stipuler expressément.

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16. D'après ces motifs, Duranton pense aussi, t. 12, n. 248 et 249, « que, à la différence du cas où il s'agirait d'un concordat, les codébiteurs solidaires (et les cautions) sont libérés par le traité, si les créanciers n'ont point réservé leurs droits contre eux. » (Arg. des art. 1285 et 1287, C. civ.).

17. Le débiteur qui fait cession volontaire conserve la propriété des biens abandonnés. Il s'ensuit que la cession n'est point sujette à un droit proportionnel de mutation, mais à un simple droit fixe. Il en serait autrement d'un abandon absolu ayant les caractères d'une dation en payement.-Toull., t. 7, n. 249; Dur., Tr. des contrats, n. 845, 846.

18. Du principe que le débiteur qui cède volontairement ne perd point la propriété des biens aban

donnés, on tire ces conséquences: 10 Il peut, en payant ce qu'il doit et les frais faits par les créanciers, rentrer en possession et jouissance de ses biens; 20 si le produit de la vente excède la dette, les créanciers doivent en tenir compte au débiteur; 30 les biens abandonnés font partie de la succession du débiteur, s'il meurt rebus integris; 4o ce sont les créanciers possédant qui doivent payer le droit de mutation ouvert par le décès du débiteur avant la vente de ses biens; 5o les créanciers des créanciers qui ont accepté la cession, même ceux qui ont une hypothèque générale, n'ont aucun droit sur les biens cédés ils ne peuvent venir que par opposition sur le prix de la vente; 6o les créanciers ne peuvent point prescrire la propriété contre le débiteur qui a fait la cession.-Toull., t. 7, n. 244 à 249.

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ART. 2. De la cession de biens judiciaire.

19. L'art. 1268 définit la cession judiciaire << un bénéfice que la loi accorde au débiteur malheureux et de bonne foi, auquel il est permis, pour avoir la liberté de sa personne, de faire en justice l'abandon de tous ses biens à ses créanciers, nonobstant toute stipulation contraire. »—Dur., 12, n. 250.

1er.-Caractères de cette cession, et personnes qui peuvent l'obtenir.

2.-Formes auxquelles elle est soumise. $5.-Effets de la cession judiciaire.

§ler. Caractères de la cession judiciaire, et personnes qui peuvent l'obtenir.

20. Cette cession est assez rare en matière civile, parce que la contrainte par corps n'est prononcée contre les non commerçants que dans un très-petit nombre de cas (2059 et s.), et qu'en outre, dans la plupart de ces cas, le bénéfice de cession leur est refusé (905 C. pr.); mais elle est très-fréquente parmi les commerçants (V. Faillite).-Dur., 10, n. 251.

21.-En général, toute personne non exceptée par la loi peut obtenir la cession les créanciers n'ont pas le droit de la refuser (1270 C. civ.).— Dur., 12, n. 252. Voyons dans quels cas on n'est point admis à ce bénéfice.

22. Observons d'abord que l'art. 905 C. pr., qui énumère ces cas, est limitatif. Delvincourt dit qu'il ne fait que donner des exemples: les autres auteurs s'accordent à dire que, hors les cas prévus, la cession de biens ne peut être refusée, et c'est ce que porte l'article 1270. Ainsi des créanciers ne pourraient s'opposer à la cession, sous prétexte que le débiteur se livre à la contrebande. Mais les art. 1270 C. civ. et 905 C. pr. ne sont pas entièrement limitatifs, en ce sens qu'il faut les rapprocher de l'art. 1268 qui n'accorde le bénéfice de cession qu'à celui qui est de bonne foi, le débiteur convaincu d'un fait entraînant mauvaise foi, mais non prévu dans la nomenclature de l'article 905, n'en serait pas moins déchu du bénéfice de cession. C'est ainsi que Toullier, t. 7, n. 262, et la jurisprudence ont interprété la loi.

23. Car ceux qui demandent à être admis au bénéfice de cession de biens étant tenus de déposer au greffe leur bilan, leurs livres s'ils en ont, ainsi que leurs titres actifs, et cela non-seulement pour faire connaître leur véritable position, mais encore pour qu'on puisse s'assurer qu'ils ne se sont pas rendus indignes du bénéfice qu'ils réclament, il s'ensuit que hors les cas d'exécution littéralement prévus par la

loi, les juges doivent encore examiner s'il y a malheur et bonne foi (C. pr. 905).-30 déc. 1817, Aix; 30 août 1821, Bordeaux.

24.- Un débiteur ne justifie ni de ses malheurs ni de sa bonne foi en présentant un bilan, où il ne donne que cette explication vague : pertes dans mon commerce, sans indication des causes qui les ont produites, où il n'énonce nullement l'emploi de ses marchandises, où il attribue aussi, sans un détail quelconque, son insolvabilité à sa nombreuse famille, alors surtout qu'au moment des premières poursuites de ses créanciers, qui lui avaient accordé un crédit assez fort, il a subitement changé de domicile.— 30 déc. 1817, Aix.

25. Les effets qu'il aurait souscrits ou endossés pour d'autres doivent être considérés moins comine des malheurs que comme des imprudences graves.— 13 mai 1821, Colmar.

26. La première condition, pour être admis à la cession de biens, est donc d'être malheureux et de boune foi (1268). Le malheur et la bonne foi doivent être prouvés par le débiteur; c'est par là seulement qu'il montre qu'il est digne du bénéfice de la loi (Delv., t. 3, p. 401; Dur., t. 12, n. 260, et Tr. des contrals, n. 853). Les tribunaux sont appréciateurs de la négligence, des torts du débiteur, des preuves de ses pertes, et de sa bonne foi.-Dalloz, n. 41.

27. On ne doit y admettre un débiteur que lorsqu'il a prouvé sa bonne foi et ses malheurs; la preuve de la mauvaise foi ne saurait être à la charge des créanciers. -17 janvier 1809, Liége; 22 nov. 1809, Riom; 19 nov. 1810, Bruxel.es.

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28.-En second lieu, l'art. 905, C. pr., exclut du bénéfice de cession :

10 Les étrangers; sauf l'application des art. 11 et 13 C. civ. Ce bénéfice, en effet, est une institution du droit civil.-Dur., 12, n. 270.

29.- Le refus, fait par un créancier belge, d'adhérer à une cession de biens volontaire faite à l'étranger et par un failli étranger, a pour effet de changer cette cession en cession de biens judiciaire et, par conséquent, de rendre le failli inadmissible à la faire devant les tribunaux belges.-25 fév. 1825, Paris.

30. Mais peut être admis au bénéfice de cession de biens, l'étranger qui est domicilié en Belgique, qui y a un établissement de commerce et des propriétés immobilières, qui est inscrit sur le rôle des patentes d'une de nos villes, et y acquitte les contributions publiques (C. civ. 11, 13; C. comm. 575, n. 2).— 24 fév. 1808, Trèves.

31.Au surplus, il n'existe pas de loi qui interdise aux naturels belges le bénéfice de cession visà-vis des étrangers.-19 fév. 1806, Civ. r. Bordeaux.

32. Mais la cession de biens faite par un Belge et agréée en pays étranger, où il y avait formé un établissement de commerce, ne pouvant pas priver les créanciers belges du droit qu'ils ont d'exercer toutes leurs actions contre le débiteur, il s'ensuit que si ce dernier veut, à leur égard, jouir du bénéfice de cession, il est tenu de se conformer aux lois du royaume, tant pour la forme que pour les effets que produisent en Belgique les cessions judiciaires de biens.-8 mai 1810, Bruxelles.

53.-2o Les stellionataires. « Le stellionat, enseigne Duraton, loc. cit., est un genre de fraude; celui qui le commet n'est donc pas de bonne foi; cette fraude se pratique en vendant ou hypothéquant un immeuble dont on sait n'être pas propriétaire, ou lorsqu'on présente comme libres des biens hypothéqués, ou que l'on déclare des hypothèques moindres que celles dont ces biens sont chargés. » (2059 C. civ.)

34.—-3o Les banqueroutiers frauduleux. Ainsi, le

banquerou ́ier simple peut être admis à faire cession. - Dur., loc. cit.

35.-4o Les personnes condamnées pour cause de vol ou d'escroquerie. Tout individu qui a la contrainte à exercer contre ces personnes, lors même que ce ne serait pas pour cause de vol ou d'escroquerie, peut s'opposer à la cession judiciaire. « Car, dit Duranton, t. 12, n. 272, le fait de vol ou d'escroquerie est exclusif de la qualité de débiteur de bonne foi. Il en serait de même à l'égard d'un dépositaire infidèle et d'un stellionataire. »

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37.-80 Enfin les dépositaires.-Observons ici que la loi (2061 C. civ.) prononce bien la contrainte par corps en matière de dépôt, mais seulement quand il s'agit d'un dépôt nécessaire, et que, hors les cas déterminés par elle, le juge ne peut la prononcer (2063). D'un autre côté, l'art. 1945 suppose évidemment que le dépositaire volontaire est contraignable par corps, s'il est infidèle. Comment concilier ces articles. D'abord, le code pénal autorise la contrainte contre les condamnés à des restitutions et à des dommagesintérêts pour crimes ou délits; or l'abus de confiance en matière de dépôt est un délit. Ainsi l'art. 1945 recevrait ici son application. Ensuite le code de procédure (126-1o) autorise les juges à prononcer la contrainte, en matière civile, pour dommages-intérêts, au-dessus de 300 fr.: or le dépositaire volontaire infidèle peut se trouver dans ce cas, et l'art. 1945 devient encore applicable. L'art. 905 C. proc. s'applique donc à l'un et à l'autre dépositaire, et le dépositaire nécessaire ne peut non plus être condamné par corps pour une somme moindre de 500 fr. Mais si le dépositaire volontaire n'a point commis d'infidélité, s'il n'y a eu de sa part que négligence ou faute, les juges, lors même qu'ils le condamneraient à des dommagesintérêts excédant 300 fr. ne devraient pas prononcer la contrainte par corps, puisque la loi a évidemment voulu établir une différence entre le dépositaire ordinaire non infidèle, et le dépositaire nécessaire.Dur., 12, n. 271.-V. Dalloz, n. 59.

38. Remarquez que parmi les personnes auxquelles la loi refuse cette faveur, il en est qui sont déchues d'une manière absolue du bénéfice de cession, par exemple, les condamnés pour vol ou escroquerie; d'autres qui n'en sont privées que relativement à ceux envers lesquels elles ont été condamnées par corps tels sont les comptables. Duranton, Tr. des contrats, n. 852, établit cette distinction, qui, quoique n'étant fondée sur aucun texte précis, semble reposer sur la nature des choses, et mériter l'accueil que demandent toutes les opinions favorables à la liberté individuelle. Delvincourt dit, t. 5, p. 403, d'une manière générale, que les tuteurs comptables ne sont jamais admis au bénéfice de cession, parce que la contrainte par corps n'est prononcée contre eux que quand ils sont coupables de dol ou de fautes graves équivalant au dol, ce qui semblerait exclure la distinction de Duranton.-Au reste, l'un et l'autre auteur pensent que le stellionataire est privé du bénéfice de cession à l'égard de tous, et pas seulement à l'égard de ceux qui l'ont fait déclarer stellionataire. Cette opinion, dit Dalloz, semble conforme à l'esprit de la loi: car le stellionat suppose toujours là mauvaise foi; et celui qui a sciemment trompé ne cesse-t-il pas de

mériter la faveur de la loi? Toutefois cette opinion. a contre elle un arrêt de la cour de Turin, dont l'autorité est diminuée par l'admission du pourvoi qui avait été formé; et le sentiment de Merlin, Rép., yo Cession de biens; Carré, t. 3. p. 279 et 280; Perrin, Tr. des nullités, p. 84.-Quant aux étrangers, V. Faillite, et l'opinion de Delv., t. 3, p. 404; Toull., t. 7, n. 263; Dur., Tr. des contrats, n. 851. Dalloz, n. 60.

59. Dans tous les cas, la cession judiciaire doit comprendre l'abandon de tous les biens du débiteur (art. 1268). Si le débiteur retenait un usufruit, une rente, les créanciers ne pourraient être forcés de l'admettre au bénéfice de cession. Mais tous les auleurs conviennent qu'il peut se réserver les objets insaisissables par l'art. 592, C. pr. (Toull., t. 7, n. 256; Delv., t. 5, p. 402; Dur., t. 12, n. 258, et Tr. des contrats, n. 854). Duranton pense que les objets compris dans l'art. 581 peuvent aussi être réservés.

40.- Un débiteur, pour être admis au bénéfice de cession, doit donc faire abandon de tous ses biens, et, par conséquent, s'il est marié sous le régime de la communauté, des revenus des propres de sa femme. -4 sept. 1819, Bruxelles.

41.-Le débiteur peut-il obtenir une somme à titre de secours, d'aliments? L'affirmative était constante sous l'ancienne jurisprudence (Dalloz, n. 66); la loi nouvelle ne répète cette disposition que pour le failli (art. 530 C. comm.); il y a une inspiration d'équité tellement puissante dans cet article que l'on résiste difficilement au désir de l'étendre à tous les cas de cession de biens. C'est l'opinion de Duranton, t. 12, n. 259. Mais Toullier, t. 7, n. 257, 258, est d'un avis contraire; suivant lui, les créanciers ne doivent des aliments à leur débiteur que lorsqu'ils l'ont fait incarcérer; la disposition de l'art. 530 C. comm. est dictée par l'humanité, mais contraire au droit rigoureux; le droit nouveau n'a pas reproduit la loi romaine et l'ancienne jurisprudence qui permettaient d'accorder un secours au débiteur faisant cession judiciaire; dès lors les juges ne peuvent lui donner ce secours sans excéder leurs pouvoirs. -Il est à regretter que la loi reste obscure sur un point aussi délicat.

§ 2.-Formes de la cession judiciaire en matières civiles et commerciales.

42. Matières civiles.-Avant tout, le débiteur qui réclame la cession judiciaire, doit déposer au greffe du tribunal où la demande est portée, son bilan, ses livres s'il en a, et ses titres actifs (898 C. pr.). Ce dépôt est fait par avoué (arg. de l'art. 92 T.)."

43. Le débiteur qui ne remettrait pas les titres actifs qu'il a en sa possession se rendrait à jamais indigne du bénéfice de cession.—30 avril 1821, Toulouse.

44.. La demande en cession se porte devant le tribunal civil du domicile du débiteur (899 C. p.). Et cela, lors même qu'il s'agirait de dettes commerciales, si toutefois la contrainte n'a pas été prononcée par un tribunal de commerce. Cette conséquence résulte des art. 900, 901, C. pr., et 635 C. comm.Dur., 12, n. 262 et 265; Roll. de Vill., Rép., t. 2, p. 102, n. 93 et 94; Carré sur l'art. 899 C. pr. 45. - La demande doit-elle ê.re formée par requête? Non le code de procédure et le tarif gardent le silence à cet égard. C'est seulement lorsque le débiteur veut assigner à bref délai pour demander la suspension des poursuites dirigées contre lui, qu'il doit présenter requête au président. — Demiau,

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p. 606; Carré, sur l'art. 900 C. pr.; Roll., n. 99. 46. En principe, cette demande ne suspend l'effet d'aucune poursuite (900). Il ne peut dépendre du débiteur de changer sa condition et le droit des tiers. De là, il résulte qu'il n'est pas permis aux tribunaux d'anéantir l'effet des poursuites déjà exercées. · Carré, sur l'art. 900 C. pr.; Dur., 12, n. 265.

47. Le débiteur doit-il, à peine de nullité du jugement, mettre en cause ses créanciers? Pour la négative, on dit le code n'exige pas la présence des créanciers, et ils n'ont aucun intérêt à être en cause, puisque la demande ne suspend pas l'effet de leurs poursuites. D'ailleurs, ils pourront s'opposer à l'admission de la cession, lorsque le débiteur la réitérera en personne à l'audience. A cela, on répond que la nécessité de mettre les créanciers en cause se tire des principes généraux : elle résulte aussi de l'obligation de déposer le bilan et les titres au greffe, dépôt dont le but est de mettre les créanciers, véritables contradicteurs, à portée de discuter la bonne foi et les malheurs du débiteur.-Dict. de pr., p. 510, n. 15.

48. La demande est sujette à communication au ministère public (900 C. pr.). Suivant Carré, sur l'art. 900, l'affaire doit être jugée à la première audience, sans remise, ni tour de rôle.

49. Aussi, un tribunal civil ne peut-il être tenu de surseoir à prononcer sur une demande en cession de biens, formée par un négociant, jusqu'à ce que le tribunal de commerce ait prononcé sur sa faillite, lorsque surtout ses créanciers n'ont point fait déclarer cette faillite, quoique, depuis longtemps, leur débiteur eût cessé ses payements. 27 nov. 1828, Paris.

50. Si la demande est admise, le débiteur est tenu de réitérer sa cession en personne et non par procureur, ses créanciers appelés à l'audience du tribunal de commerce de son domicile, et s'il n'y en a pas, à la maison commune, un jour de séance. Dans ce dernier cas, la déclaration du débiteur est constatée par procès-verbal de l'huissier, signée du bourgmestre (901 C. pr.). Cet article s'applique aux débiteurs non commerçants, comme aux commerçants. Toull.,

t. 7, n. 264; Carré, sur l'art. 901.

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52. Si le débiteur est détenu, le jugement ordonne son extraction avec les précautions en tel cas requises et accoutumées, à l'effet de faire sa déclaration (902 C. pr.). En conséquence, on ordonne que le débiteur sera mis sous la garde d'un huissier, pour être conduit au lieu où il doit réitérer sa déclaration, et n'être mis en liberté qu'après avoir rempli cette formalité. Le tout est constaté par procès-verbal de l'huissier (65, T.). — Roll. de Vill., 2, 102, n. 104 et 105.

53. L'huissier doit être commis par le tribunal : il offre alors plus de garantie (arg. 65, T.).— Dict. de pr., vo Cession de biens, p. 512, n. 25.

54. Le débiteur en retard de réitérer sa cession peut-il être emprisonné par ses créanciers nonobstant le jugement? D'après le Dict. de pr., eod. vo, le bénéfice du contrat judiciaire ne peut lui être enlevé que par un nouveau jugement. Les créanciers devraient donc le sommer de faire sa réitération dans un certain délai, et l'attaquer devant le tribunal pour

voir dire qu'il a perdu le bénéfice du jugement qui admettait la cession.-Contrà, Demiau.

55. Enfin, pour rendre la cession publique, et empêcher qu'on ne se porte avec la même confiance à traiter avec le débiteur, l'art. 903 C. pr. exige que les nom, prénoms, profession et demeure du débifeur soient insérés dans un tableau public à ce destiné, placé dans l'auditoire du tribunal de commerce de son domicile, ou du tribunal de première instance qui en fait les fonctions, et dans le lieu des séances de la maison commune. La même insertion doit être faite dans un journal (92, T.). — Dur., 12, n. 267; Roll., 2, 103, n. 106 et 108.

56.-Combien de temps doit durer cette insertion? La loi ne s'explique point à ce sujet; mais elle peut être retirée au bout d'un an (arg. 872 C. pr.). - Pigeau, Carré, sur l'art. 903; Roll., n. 107. 57.- Matière commerciale. En cette matière, on suit, sauf quelques exceptions, les mêmes formes qu'en matière civile. Et d'abord, le débiteur négociant peut recourir à la cession de biens sans être tenu de justifier qu'il a préalablement rempli les formalités prescrites par la loi en cas de faillite. — 4 nov. 1823, Civ. c. Bourges.

58. En conséquence, le négociant qui veut se faire admettre au bénéfice de cession, n'est pas tenu de faire, au préalable, une déclaration de cessation de payements, et de remplir toutes les autres formalités prescrites en cas de faillite, sauf à ses créanciers à contester sa bonne foi, et au tribunal à prendre, dans l'intérêt public, telles mesures qu'il jugera nécessaires, relativement à la déclaration de la faillite. 7 fév. 1810, Bruxelles.

59. Le défaut de tenue de livres de commerce n'est pas non plus une cause d'inadmissibilité du négociant failli au bénéfice de cession, si d'ailleurs il n'existe aucun jugement qui, pour ce fait, ou pour tout autre, l'ait déclaré banqueroutier frauduleux. - 15 mai 1816, Req. Aix.

60. De même la circonstance, que le failli n'a pas tenu de livres, et que son bilan renferme des omissions, n'est pas suffisante pour le faire exclure du bénéfice de cession, lorsque ce failli est un ouvrier presque illétré, qu'aucun autre fait de fraude n'est allégué contre lui, et que tout tend au contraire à prouver sa bonne foi. 21 nov. 1817, Angers.

61. Au contraire, le failli ne saurait être admis au bénéfice de cession de biens, s'il n'a pas tenu, et déposé à l'appui de sa demande, les livres et registres que les lois de commerce lui faisaient l'obligation de tenir. - 11 août 1807, Paris.

62.-Le débiteur commerçant, comme le non-commerçant doit porter sa demande en cession devant le tribunal civil de son domicile (Carré, sur l'art. 899 C. pr.; Pard., n. 2803).— Ces auteurs se fondent sur l'art. 571 C. comm., qui semble supposer que le jugement a été rendu par un autre tribunal que le tribunal de commerce (Dict. de pr., p. 513, n. 40). — Duranton, t. 12, n. 264, est d'un sentiment contraire: il cite à l'appui de son opinion les art, 655-1o, et 569 C. comm.

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§ 3. Effets de la cession judiciaire.

66.-Son principal effet est la décharge de la contrainte par corps. A cet égard elle couvre les torts du passé. - Dur., t. 12, n. 255.

67.-Ainsi un débiteur ne peut plus être poursuivi par corps comme stellionataire, après qu'il a été admis au bénéfice de cession, sans opposition de la part du créancier au préjudice duquel le stellionat a été commis. — 15 avril 1819, Req. Rouen; 23 janv. 1822, Req. Amiens.

68. La cession de biens volontaire et même judiciaire ne fait point obstacle à la déclaration de faillite (C. civ. 1265; C. pr. 898; C. comm. 440, 566). 30 mars 1835, Metz.

69. La cession judiciaire, comme la cession volontaire, ne confère point la propriété des biens abandonnés; elle donne seulement aux créanciers la perception des revenus et le droit de faire vendre (art. 1269). D'où il suit qu'en payant ses dettes le débiteur fait cesser la mise en possession, et empêche la continuation des ventes. Quant aux formalités de la vente, elles sont les mêmes que celles prescrites aux héritiers bénéficiaires (Dict. de proc., p. 511, n. 21). - Dur., 12, 253.

70.-Avant de procéder à la vente des biens compris dans la cession, le créancier doit-il faire nommer un curateur contre lequel il dirige ses poursuites? Le débiteur qui a fait cession est-il recevable à se plaindre de ce que cette formalité n'a pas été remplie?

71.- Non, puisque la cession vaut pouvoir aux créanciers de faire vendre les biens abandonnés, et que la loi n'autorise pas, comme sous l'ancienne jurisprudence, la nomination d'un semblable curateur. ---Toull., 7, n. 268; Carré, t. 3, p. 279; Roll. de Vill., 2, 103, n. 118.

72.

-

Du reste, la cession ne libère pas le débiteur complétement, mais seulement jusqu'à concurrence des biens abandonnés; et même le débiteur est obligé d'abandonner, jusqu'à parfait payement, tous ceux qui lui surviendraient après la cession.

Mais les créanciers non intégralement payés, qui auraient fait remise du surplus au débiteur cédant, ne pourraient plus agir contre lui, à moins qu'il n'y ait eu dol ou fraude de la part du débiteur.-Toull., t. 7, n. 267; Dur., 12, n. 254; Roll. de Vill., 2, 103, n. 120, 121 et 122.

73. Dans la cession judiciaire aussi, le débiteur n'est point obligé d'abandonner les objets indispensables à son existence. Les tribunaux pourraient inême lui accorder quelque chose à titre de secours. Cette disposition d'humanité, prise en faveur des commerçants faillis par l'art. 550 C. comm., il est juste de l'admettre également en matière civile. Dur., 12, n. 258 et 259; Roll. de Vill., n. 113, 114, 115.- Contrà, Toull., 7, n. 257.-V. n. 41.

74. Au surplus, la cession de biens n'empêche pas un créancier de poursuivre les codébiteurs solidaires pour toute la dette, tant qu'il n'est pas réellement payé pour une partie (arg. 1204 C. civ.). Les cautions demeurent aussi obligées envers le créancier, tant que le débiteur n'est pas libéré de toute la dette, sauf pour celles-ci l'exercice du bénéfice de discussion, s'il y a lieu.-Dur., 12, n. 256 et 257. 75. Aucune disposition législative ne dépouille

LÉG. US.

le cessionnaire de biens de ses droits civils, et spécialement de celui de pouvoir ester en jugement sans avoir besoin d'un curateur, soit en demandant, soit en défendant. 25 mai 1822, Bruxelles.

76.- Quant aux droits politiques, celui qui, après faillite, fait cession de biens, est inhabile à les exercer; il n'en récupère la jouissance que par sa réhabilitation (Constit. de l'an vIII, art. 5; C. comm. 604). Mais un particulier non commerçant qui a fait abandon judiciaire, qui se trouve en déconfiture, est-il privé de tout droit politique? Toullier, t. 7, n. 266; Duranton, Tr. des contr., n. 856, ne font point de distinction; ne peut-on pas concevoir quelque doute, et ne doit-on pas craindre d'étendre hors du cercle tracé par la loi les incapacités dont elle n'a frappé par son texte que le négociant failli, ou d'autres personnes qu'elle énumère avec soin? - Dalloz, n. 117.

77. Nous terminerons en faisant observer qu'il résulte de ces termes de l'art. 1268, nonobstant toute stipulation contraire, que le débiteur ne peut d'avance renoncer à la cession de biens : c'était une maxime reçue dans l'ancienne jurisprudence. Toull., n. 269; Delv, t. 3, p. 402.

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-V. Faillite. V. aussi Action, Agent de change, Communauté, Dot, Droits civils, Enregistrement, Faillite, Hypothèque, Liberté provisoire, Louage, Ministère public, Payement.

CESSION DE DROITS LITIGIEUX. — V. Vente.
CESSION DE DROITS SUCCESSIFS. V. Partage,
Rapport, Retrait successoral, Succession bénéfi-
ciaire.

CHABLIS. - V. Forêts, Usufruit.
CHAISE. V. Fabrique, Théâtre.

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CHAISE DE POSTE.-V. Voitures publiques. CHAMBRE. V. Agent de change, Avocat, Avoué, Discipline, Elections, Enregistrement, Huissier, Notaire, Organisation politique et judiciaire, Tribunaux.

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CHAMBRE D'ACCUSATION. V. Instruction. — V.
aussi Action civile, Compétence, Escroquerie,
Faux, Homicide, Presse, Tribunaux.
CHAMBRE CORRECTIONNELLE. V. Instruction,
Tribunaux. - V. aussi Amende, Compétence.
CHAMBRE DU CONSEIL.-V. Actes de l'état civil,
Action civile, Appel correctionnel, Autorisation
de femme, Compétence, Contributions indirectes,
Domaines, Enregistrement, Faux incident, Minis-
tère public, Presse, Tribunaux.
CHAMBRE DÉS REPRÉSENTANTS. — V. Élections,
Organisation politique.

CHAMBRE DE DISCIPLINE.-V. Discipline.-V. aussi Avocat, Avoué, Honoraires, Huissier, Notaire. CHAMBRE DES VACATIONS. - V. Tribunaux.

V. aussi Ordre, Référé, Vacances. CHAMBRE D'INSTRUCTION.-V. Instruction, Juges, Tribunaux.

CHAMBRE GARNIE.-V. Pouvoir communal, Lieux publics, Patente.

CHAMBRE DES NOTAIRES. — V. Notaire.-- V. aussi Euregistrement, Honoraires.

CHAMBRES RÉUNIES.-V. Audience solennelle, Cassation, Ministère public, Tribunaux. — V. Örga- . nisation politique.

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CHAMBRE SYNDICALE. - V. Agent de change.
CHAMBRE TEMPORAIRE. V. Tribunaux.
CHAMP. — V. Actions possessoires, Chasse, Compé-
tence, Délit rural, Peine, Vol.

CHAMPART.-V. Actions possessoires, Choses, Communauté, Féodalité.

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