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regrette de ne pas avoir pu lire publiquement les lettres que lui a communiquées M. Brieux.

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M. Hennequin. Ce n'est pas la carte de visite, c'est la publicité permanente qu'il s'agit d'atteindre.

M. Augagneur dit que, sur 100 vénériens, il y en a 80 qui passent par les mains des charlatans.

M. le Président Bérenger prie MM. les membres de la Commission de vouloir bien laisser M. Brunot terminer ses observations.

M. Brunot répète que l'application d'un texte législatif concernant l'objet de la discussion présente de si grandes difficultés pratiques que personne dans la Commission n'a pu apporter un texte formel. Quand il y aura un texte, on s'empressera de le tourner.

M. le Poittevin. Le texte proposé ne sera pas facile à tourner, comme le pense M. Brunot d'abord, pour revenir à la carte de visite, on n'ira pas poursuivre pour l'envoi d'une carte au jour de l'an. (Exclamations.)

M. Brunot demande à combien de cartes de visites le parquet poursuivra?

En admettant que les affiches dont on poursuit la suppression soient aussi dangereuses qu'on le dit, il faut bien reconnaître que le public réagit contre elles et qu'il en fait justice.

Pour s'en convaincre, il suffit d'entrer dans un édicule quelconque où l'on ne saurait manquer de lire les épithètes de voleur, menteur, charlatan, accolées par le public au nom du médecin.

M. Augagneur. Les injures trahissent suffisamment les désil

lusions.

M. Bruman constate que deux courants d'idées très nets se sont dessinés au cours de la discussion d'aujourd'hui.

qu'à

Il n'y a plus, semble-t-il, en raison de l'heure très avancée renvoyer le vote au début de la prochaine séance : le grief d'escroquerie est, au demeurant, le meilleur qui puisse être retenu.

M. le Professeur Le Poittevin ne demande que des amendements au texte qu'il a formulé.

M. le Président déclare que, puisqu'on est en présence d'un texte, ceux qui ont apporté des critiques à ce texte devraient lui opposer des amendements.

En ce qui le concerne, M. le Président est frappé de ce fait anormal que la proposition présentée par M. Le Poittevin ne se réfère à aucune loi et ne mentionne aucune peine.

M. Bulot fait observer que M. Le Poittevin en a donné la raison au début de la séance, c'est-à-dire avant l'arrivée de M. Bérenger.

M. le Président n'insiste pas, mais il répète que si aucun amendement n'est déposé, le texte de M. Le Poittevin devra être mis aux voix. M. Bulot informe la Commission qu'en collaboration avec M. SaintAubin, il doit élaborer un texte qui sera prochainement soumis à l'examen de la Commission.

AJOURNEMENT DE LA DISCUSSION ET DU VOTE

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M. Le Poittevin exprime le vœu que la prochaine séance soit consacrée à la discussion des propositions que M. Bérenger et lui-même ont élaborées en ce qui concerne la protection des filles mineures. M. le Président consulte la Commission.

A l'unanimité, l'Assemblée décide de consacrer sa prochaine réunion à l'examen des propositions de MM. Bérenger et Le Poittevin sur les mineures et la fixe à huitaine, c'est-à-dire au 23 juin 1905, à l'heure habituelle, malgré quelques observations de M. le Secrétaire général qui réclame l'ajournement à quinzaine.

La séance est levée à midi cinq minutes.

Présents: Mme AVRIL DE SAINTE-CROIX; MM. AUGagneur, Balzer, Bérenger, BRUMAN, BRUNOT, BULOT, BUTTE, FIAUX, FIQUET, FOURNIER, LE POITTEVIN, LUCAS, MEUNIER, MONOD, PAILLOT, SAINT-AUBIN, TUROT, YVES GUYOT, HENNEQUIN, Secrétaire général; BRANSOULIÉ, DOLLÉANS ET JOLY, Secrétaires.

Excusés: MM. AUBERT, AUFFRET, Beauchet, BESNIER, BORNE, BRIEUX, BRISSAUD, BROUARDEL, CATTEAU, CAVARD, COLIN, COMTE, CRUPPI, DANEY, DAUZON, DENIS, DESPLAS, DISLÈRE, DUBIEF, FABRE, FEUILLOLEY, FLACHON, FLOURENS, FOSSE, GAUcher, Gide, d'IrIART D'ETCHEPARE, JEANNENEY, KERMORGANT, LANDE, LANDOUZY, LANGLET, LAURENT-ATTHALIN, LÉNARD, LÉPINE, MAILLART, MASCLE, MASTIER, Meslier, MilliÈS-LACROIX, MORLOT, MUTEAU, NOULENS, OPPORTUN, PÉDEBIDOU, DE PRESSENSÉ, DE SAL, SAUVAN, SERRES, STRAUSS, VINCENT; RENAULT, Secrétaire.

CHAPITRE XXIX

Vingt-quatrième séance: 23 juin 1905.

ORDRE DU JOUR :

Proposition de M. Bérenger. Amendement de M. le Professeur Le Poitevin. Protection des mineurs des deux sexes (1) en état de prostitution publique. Adoption par la Commission du principe d'intervention légale proposé par M. Bérenger

et vote du texte de l'amendement du Professeur Le Poittevin.

Sommaire. PREMIÈRE PARTIE: Exposé de la proposition de M. Bérenger et de l'amendement de M. le Professeur Le Poittevin. L'accord sur le principe; divergences sur la compétence du juge et la procédure: Juge de paix ou Tribunal civil; chambre du Conseil.

-

DEUXIÈME PARTIE. - Débats sur la protection des mineurs en matière sexuelle. — Discours de M. Bérenger historique de la question. Les mineures en état habituel de prostitution. Théophile Roussel et la loi du 24 juillet 1889. Inscription, comme prostituées, de fillettes de 14 ans. Nécessité de statuer rapidement; juridiction du juge de paix; complications et lenteur de la procédure de la loi du 24 juillet 1889.*— Discours de M. le Professeur Le Poitte vin; approbation du principe de la proposition de M. Bérenger; réserves sur la compétence du juge (le juge de paix et la procédure); la proposition de M. Bérenger est en contradiction avec le droit public (liberté individuelle et puissance paternelle menacées); elle ne conserve pas la juridiction d'appel de la Cour; elle crée un délit de droit civil contre la mineure; concession à M. Bérenger en cas d'urgence: l'action devra être intentée et les mesures provisoires du juge de paix devront être prises dans les huit jours. Dépôt d'un projet en 44 articles par le Professeur Le Poittevin sur la protection des mineurs. Observations de M. Feuilloley sur la question de la garde du mineur; du provisoire en la matière. Réponse du Professeur Le Poittevin: l'article 11 et dernier de son projet traite de la sortie provisoire et révocable du mineur et de sa sortie définitive de l'établissement avant la majorité. Réplique de M. Bérenger : nouvelle critique de la lenteur de la procédure, dans l'amendement de M. Le Poittevin. - Observations de M. Hennequin sur les charges financières à prévoir; évaluation à ce sujet selon la durée du séjour des mineurs dans les établissements de réforme; statistiques d'arrestations et d'inscriptions de mineures en province pour l'année 1904. Le service de réformation morale service d'Etat. - Observations de Mme Avril de Sainte-Croix : nécessité d'une surveillance rigoureuse dans les établissements de bienfaisance privés; abus, exploitation des jeunes filles internées. M. Bulot se rattache au système de M. Le Poitevin. - M. Augagneur appuie le système de M. Le Poit

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(1) V. ci-après, première partie, le texte de M. Bérenger visant tout mineur » et celui de M. Le Poittevin « la fille mineure» seule.

tevin; nécessité d'un service-modèle institué par l'État; préférence pour le service d'État. Discussion sur la limite de l'âge d'entrée et de l'âge de sortie de la mineure dans l'établissement de réforme MM. Augagneur, Lucas, Bérenger, Hennequin, Le Poittevin, Bulot, Fosse, M. Avril de Sainte-Croix. Vote de l'âge de 18 ans comme limite de l'age d'entrée. Vote de la première partie de la proposition du Professeur Le Poittevin. Ajournement de la discussion de la question des mineurs à la prochaine séance.

PREMIÈRE PARTIE

Exposé de la proposition de M. Bérenger et de l'amendement de M. le Professeur Le Poittevin sur la protection des mineurs.

De la compétence du juge et de la procédure ;
divergences.

A la fin de la onzième séance de la Commission, M. le Sénateur Bérenger déposait nombre de propositions (1) parmi lesquelles figurait une disposition législative nouvelle destinée à protéger les mineurs trouvés en état habituel de prostitution.

L'ordre du jour appelant la discussion de cet intéressant projet, M. Bérenger rédigea un rapport à l'appui, où il faisait à la fois un historique de la question et un exposé des motifs (2).

Jusqu'ici la loi s'était seulement occupée de l'enfance coupable au point de vue du droit commun : l'incarcération dans les prisons, l'isolement dans les maisons de correction puis dans les colonies pénitentiaires étaient jusqu'à la vingtième année la réponse de la Société à des actes délictueux visés au Code pénal. La protection de la jeunesse, sa réformation, sa rééducation étaient à peu près ignorées quand la seule morale avait été offensée ou quand il ne s'agissait que de dangers éventuels.

La loi du 5 août 1850 était assurément un progrès notable sur la législation antérieure, en ce sens qu'elle marquait l'intérêt pris désormais par la législation pénale à la moralisation du mineur alors même qu'il était déclaré avoir agi sans discernement, et absous quoique coupable: mais encore une fois il ne s'agissait que de mineurs coupables de délits ou de crimes de droit commun.

La loi du 24 juillet 1889 sur la protection des enfants maltraités

(1) Sur le maintien des maisons de tolérance, le traitement coercitif (avec police des mœurs) et le délit pénal: on a vu que les deux premiers ont été repoussés par la Commission.

(2) Rapport de M. Bérenger sur les mesures à prendre à l'égard des mineurs se livrant à la prostitution (in 8o de 8 pages. Imprimerie administrative, Melun 1905).

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