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pouvoir préserver les siens et leur descendance de la conséquence de ces fléaux;

Considérant que toutes les mesures de salubrité et d'assainissement prises dans ces derniers temps ont été décidées dans un intérêt social commun, qu'elles n'ont d'aucune manière été attentatoires aux libertés publiques, mais s'inspiraient au contraire de ce grand principe de vrai libéralisme que nul n'a le droit de faire tort à autrui;

Considérant que si le secret professionnel du médecin lui est imposé pour éviter qu'une divulgation puisse nuire à l'individualité qu'il soigne, il ne saurait être maintenu justement, dès lors que le silence du médecin devient un danger pour toute une famille, toute une descendance et toute la race française;

Considérant d'ailleurs qu'actuellement le médecin est dans l'obligation légale de rompre le secret professionnel pour déclarer aux mairies les personnes atteintes de maladies contagieuses qu'il est appelé à soigner, l'Administration se réservant de prendre d'office les mesures necessaire pour préserver les autres habitants;

Que par suite ce serait une contradiction injustifiable d'imposer à ce médecin le silence sur le cas bien autrement dangereux de maladies pouvant être communiquées, par le mariage, non seulement à un conjoint, mais à toute une génération et que la loi qui l'oblige au secret dans ce cas EST VÉRITABLEMENT COMPLICE D'UN CRIME,

Le Conseil municipal émet le vœu :

Que la Chambre des députés étudie et décide dans quelle mesure la loi sur le secret professionnel médical pourrait être amendée, afin de permettre aux médecins des deux futurs conjoints de donner à la famille de ceux-ci les renseignements nécessaires à assurer la salubrité de l'union projetée et la sécurité des générations à venir, comme elle le relève aujourd'hui du secret vis-à-vis de l'Administration, pour permettre à celle-ci de protéger la santé publique contre les maladies courantes.

La Chambre aura également à se préoccuper des peines nécessaires à édicter contre ceux qui abuseraient du bénéfice de cette mesure de protec tion de la famille française pour divulguer à leur tour le secret qui leur aurait été confié dans ces conditions.

(Présenté dans la séance du 18 mars 1904 et renvoyé

par le Conseil municipal à la 2o Commission.)

Une Œuvre de réhabilitation et de reclassement

des femmes tombées.

« L'Euvre libératrice » de Mme Avril de Sainte-Croix.

Il a été souvent, au cours des séances de la Commission du Régime des mœurs, question d'une œuvre d'une haute portée sociale fondée par un membre même de la Commission, Mme Avril de Sainte-Croix, secrétaire général de la Branche française de la Fédération abolitioniste. Cette fondation l'OEuvre libératrice d'un caractère entièrement nouveau, a pour objet de secourir, de recevoir, de ramener au travail et au bien les pauvres filles tombées par misère, maladie ou mauvais exemples dans la prostitution publique, et, cette première régénération accomplie, de les rendre à la vie normale.

Jusqu'ici les œuvres d'assistance privée ou publique avaient porté secours à l'orphelin, à l'enfance moralement abandonnée, aux vieillards, etc.; il n'est pas jusqu'aux prisonniers de droit commun « libérés » dont la détresse n'ait été prévue et assistée : une seule catégorie d'infortunes avait été systématiquement négligée. Tous les préjugés qui entourent la genèse de la prostitution des femmes du prolétariat et les prostituées elles-mêmes, avaient creusé la lacune, l'avaient maintenue profonde et béante. La femme de grand cœur et de haute intelligence qu'est Mme Avril de SainteCroix a voula la combler et elle y a réussi.

L'OEuvre libératrice, fondée le 1er mars 1901, a déjà secouru, soigné ou hospitalisé, placé et soutenu près d'un millier de malheureuses à qui faisait horreur la vie dégradante dans laquelle les avaient poussées les circonstances de misère, les conseils ou les exemples vicieux.

L'OEuvre libératrice, dont le siège social est avenue Malakoff, no 1 (XVI® arrondissement) possède son établissement principal à Auteuil, 94, rue Boileau.

L'exemple que Mme Avril de Sainte-Croix a donné, a été suivi en province et à l'étranger; il existe des fondations analogues à Marseille, à Nimes, à Genève, avec lesquelles les établissements de Paris sont en rapport suivi. Béziers est en train de constituer la sienne.

L'OEuvre libératrice a reçu deux médailles d'or, l'une à l'Exposition internationale de Saint-Louis (États-Unis) et l'autre à l'Exposition de Liège (1905).

Il est juste d'ajouter que M. le Préfet de police Lépine se prête avec l'empressement le plus humain à toutes les demandes de radiation et de libération que Mme Avril de Sainte-Croix lui adresse en faveur des malheureuses que l'institution de la prostitution réglementée fait ses justiciables.

Il ne conviendrait pas d'omettre non plus quelles collaboratrices et quel collaborateurs d'une générosité et d'une humanité inlassables, la fondatrice de l'OEuvre libératrice a trouvés en Mmes Eugène Simon, Jules Siegfried, Edmond de Rothschild, Kiefe, Albert Mirabaud; Mlle Brondgeest, Mines Robert Monod, Ed. Rist, Stapfer; MM. le Dr Marmottan, maire de l'arrondissement de l'OEuvre, Maurice Bernard, Gustave de Morsier, Tabouriech, le Dr Sicard de Plauzoles et le Dr L. Jullien, chirurgien de Saint-Lazare: nous nous excusons si nous faisons quelque oubli.

L'OEuvre libératrice offre ainsi à de pauvres jeunes filles et femmes jusqu'ici abandonnées à la Police des mœurs et aux souteneurs, une halte, un repos prolongés sans distinction de culte et de nationalité : toute cette aide est entièrement gratuite. L'OEuvre recherche et procure aux ouvrières du travail, aux domestiques, des places; si un passé trop douloureusement difficile, une situation particulière rendent à l'hospitalisée le séjour à Paris impossible, l'OEuvre recherche le débouché en province et même à l'étranger. L'hospitalisée est d'ailleurs entièrement libre: elle reçoit intégralement le bénéfice de son travail, et, à son départ, il lui est remis, si besoin est (comme c'est généralement le cas), un trousseau complet.

Il n'est pas inutile d'ajouter que l'OEuvre pousse la sollicitude jusqu'à s'occuper de marier ses protégées, si faire se peut, et nombre de cas heureux sont à enregistrer.

Il existe à Paris une institution similaire l'Ouvre de Clamart, près Paris, dont s'occupe particulièrement l'honorable sénateur M. Bérenger.

La « Société générale des prisons

à propos de ses débats sur la Police des mœurs

La Société générale des prisons étant moins connue que le Conseil municipal de Paris, et ses rapports et débats sur les questions de droit présentant souvent, en raison de la qualité de ses membres, un très sérieux intérêt, nous croyons être utile au lecteur en donnant sur cette Société savante quelques indications complémentaires.

Cette Société a été fondée en 1877: elle a pour but, dit son principal statut, l'amélioration du système pénitentiaire en France; elle est divisée en trois sections; les deux premières étudient les questions pénales et pénitentiaires en France et à l'étranger; la troisième a pour objet particulier les questions de patronage et de mesures de protection préventive. A Paris seulement, la Société compte plus de 300 membres et environ 100 dans les départements; ses membres étrangers appartiennent aux nationalités diverses de l'Europe et des autres pays de l'Ancien et du Nouveau Monde, Japon compris naturellement. Nous ne voyons guère que la Chine qui n'ait point fourni de membres correspondants.

Pour notre seul pays, les hommes éminents et particulièrement compétents y abondent sans distinction d'opinions politiques ou confessionnelles; l'Institut, la Faculté de droit, la Magistrature, le Conseil d'État, le Barreau, le Parlement, le Collège de France, le Corps médical des asiles d'aliénés et des prisons, les Corps religieux même y sont représentés. Quand la Société veut s'éclairer sur un sujet technique, elle fait appel à telles personnalités connues, correspondants non nationaux ou même individualités à elle étrangères, et leur demande des éclaircissements sous forme de communications écrites ou de conférences. C'est ainsi que, dans le débat sur la Police des mœurs, elle a entendu l'illustre M. Jules Lejeune, Ministre d'État de Belgique; c'est ainsi qu'elle a convié avec beaucoup d'à-propos le Professeur A. Fournier, MM. les conseillers municipaux Armand Grébauval, Maurice Quentin; qu'en l'absence de M. le Professeur Augagneur, elle a de même entendu de la bouche de M. Albert Gigot, l'ancien préfet de police, l'exposé des opinions du maître lyonnais.

Parmi les membres effectifs et laborieux de la Société, nous remarquons MM. le Sénateur Bérenger, G. Picot, H. Joly, Oth. d'Haussonville, Alf. Guillot, Th. Roussel, Cheysson, de l'Institut; les professeurs de facultés de droit Glasson, Lyon-Caen (de l'Institut), Léveillé, Alf. Le Poittevin, Saleilles, Larnaude, R. Jay (de Paris); de Folleville, Lévy-Ulman, E. Pilou (de Lille); E. Lévy (de Lyon); Laborde et R. Marget (de Montpellier); Chauveau et P. Lerebours-Pigeonnière (de Rennes): J.-A. Roux,

G. Vidal (de Toulouse); Lederlin, E. Gardeil, Ed. Gaukler (de Nancy); M. Bernard et Paul Cuche (de Grenoble); J. Hémard (d'Aix); Louis Perceron (de Dijon), H. Taudière (de la Faculté libre de Paris) etc.; des magistrats, MM. Tanon, Low, Hua, Feuilloley, Baudoin, P. Joly, Albanel, Brégeault, P. Flandrin, Alb. Rivière; des conseillers d'État ou administrateurs, MM. Aucoc, Herbette, Griolet, Charles Brunot, Brueyre; des bâtonniers et avocats, MM. Pouillet, Bétolaud, Danet, Barboux, Bourdillon, Henri Robert; des parlementaires, MM. Ribot, de Marcère, Maurice Lebon, J. Cruppi, L. Barthou, Paul Strauss, Klotz; ou anciens députés, M. Ferdinand-Dreyfus; de hauts magistrats de police, MM. Albert Gigot et Félix Voisin, anciens préfets, G. Honnorat, chef de la première division de la préfecture; des médecins, MM. Magnan, Motet, Dubuisson, Garnier, Thulié, Charpentier; des personnalités appartenant aux diverses confessions, M. le cardinal Richard, MM. Zadoc- Kahn, pasteur Robin, Raphaël Lévy, Vernes; des sociologues indépendants connus pour le goût des hautes études, MM. Delagrave, Lucien Nottin, Morel d'Arleux. L. Rivière; enfin les femmes éminentes comme Me Sarah Monod, sans oublier des savants étrangers comme le professeur Wolfgang, Mittermaier de Giessen).

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