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mande dudit Gillot, & en conféquence l'auroient condamné à rendre aux Chicoifneaux les deux avals ou cautionnemens qu'ils lui avoient donnés.

Ledit Gillot ayant interjetté appel de ladite Sentence au Parlement de Paris, feroit intervenu Arrêt le 21 Mars 1681, au Rapport de Monfieur Hervé Confeiller par lequel la Cour, fans s'arrêter aux Requêtes de Gillot, auroit mis l'appellation au néant; ordonné que ce dont avoit été appellé fortiroit fon effet, & feroient les Articles XXIII. XXIV. & XXV. du Titre V. de l'Ordonnance concernant les lettres & billets de change, exécutés : Fait défenses à toutes perfonnes d'y contrevenir, condamne ledit Gillot en une amende de 12 livres, & aux dépens: Et feroit à la diligence des Subftituts de Monfieur le Procureur Général du Roi aux Châtelets de Paris, l'Arrêt lû & publié aux Audiences des Préfidiaux defdits Châtelets & des Juge & Confuls de Paris, & affiché à la porte du Change de cette Ville de Paris.

Ainfi l'on voit que par cet Arrêt la Cour a jugé de rigueur fuivant le Texte de Ordonnance, quoique les ordres paffés au dos des deux lettres de change par lefdits veuve Coullard & Vanopftal portaffent valeur reçue dudit Gillot en argent comptant, étoient néanmoins nuls faute d'avoir été dattés fuivant l'Ordonnance, la nullité jugée fur le feul & unique défaut de la datte.

Il y a encore un Arrêt rendu au Parlement de Rennes, le 28 Novembre 1679 en pareil cas. Il eft auffi conftant que les Juge & Confuls de Paris, jugerent la queftion dont il s'agit, de même queles Juge & Confuls de Tours en femblables cas: car par une Sentence que lefdits Juge & Confuls de Paris rendirent le 28 Novembre 1679, ils déboutèrent les nommés Cortefea & Benfon Banquiers, porteurs de trois lettres de change, dont les ordres avoient été paffés à leur profit par le nommé Pelart, qui avoit fait faillite, lefquels ordres n'étoient point dattés. Lefdits Juge & Confuls, dis-je, les débouterent de leur demande; & faisant droit fur celle des nommés Senegard & Dun, créanciers de Pélart, déclarerent les faifies bonnes & valables, & les deniers dûs par ceux qui avoient accepté lesdites lettres de change, baillés & délivrés aufdits Senegard & Dun, en le faisant dire avec ledit Pelart.

Ces trois exemples fuffifent pour montrer que des ordres paffés fur des lettres de change n'étant point dattés, ne paffent que pour des endoffemens & non pour des ordres, fuivant l'Ordonnance, qu'ils font nuls, que les lettres de change font réputées appartenir à celui qui les a endoffées, & qu'elles peuvent être faifies par fes créanciers, & compenfées par fes redevables; ainfi l'on voit qu'il n'y a difficulté quelconque que les ordres paffés au dos des deux lettres de 3500 livres, & 3000 livres par Jacob Natan, au profit des fieurs de Meuves & Heuch, n'étant point dattés, quoiqu'ils portent valeur reçue comptant, font néanmoins nuls faute de datte, & par conféquent lefdites lettres appartiennent à Jacob Natan, & non audit de Meuves, Heuch, & Malchart. De forte que ledit fieur de Couftart eft bien fondé à demander la compenfation des 6500 livres mentionnées efdites deux lettres de change, avec les 8000 livres portées par les deux lettres que ledit Jacob Natan lui a fournies fur ledit fieur de Turgis, puifqu'elles ne lui ont point été payées par ledit de Turgis, & encore parce que lesdites lettres de change de 3500 livres, & 3000 livres, & celle de 1500 livres, tirées par ledir fieur de Couftart fur le fieur Monmarqué, auffi-bien que les deux Jettres que Jacob Natan a tirées fur ledit fieur de Turgis, font nulles pour tou

Tome 11.

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tes les raifons qui ont été ci-devant alleguées fur cette question, & par conféquent au fond ledit fieur de Couftart eft bien fondé en fon appel.

Mais pour donner lieu à cette compenfation, il eft néceffaire que le fieur de Couftart faffe protefter les deux lettres de change fur le fieur de Turgis, premiérement faute d'acceptation, & après les deux jours de vûe portés par lefdites deux lettres, à compter du lendemain du proteft faute d'acceptation, il faut qu'il les faffe protefter faute de payement, parce que c'eft l'Acte du proteft qui lui donnel'action d'en demander compenfation, fans quoi il y feroit non-recevable pour les raifons ci-devant déduites fur cette question

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I. Si un Négociant qui s'eft rendu garant d'une fomme fixe, pour un autre Négociant, envers un troisième, n'eft pas tenu de rembourfer au dernier la fomme dont il eft caution, en cas que celui pour lequel il eft garant ne la lui paye pas ?

II. Si le premier Négociant, ou fes héritiers, pour fe défendre du remboursement de cette fomme, font bien fondés d'objecter à celui envers lequel ils en font garants, qu'ayanı. avancé de plus grandes fommes à celui qu'il ont cautionné, que celle portée par leur. garantie, & que le cautionné lui a payées, ils prétendent l'imputation de la fomme dont ils font garants fur celles que lui a payées le cautionné pour les avances à lui faites. par le troifiéme Négociant, envers lequel ils font garants de cette fomme fixe ?

E fouffigné qui a pris lecture & mûrement examiné le contenu au Mémoire

Lqui lui a été communiqué, eftime, que Guillaume s'étant obligé par fa lettre.

millive du 8 Août 1684 d'être garant envers Jacob de Paris, jufqu'à la fomme de 15000 livres pour les traites que Jean de Bayonne feroit fur lui, ou qu'il lui feroit compter jufqu'à la concurrence de ladite fomme; il eft certain que Jean fe trouvant débiteur de Jacob de 15980 livres 12 fols 10 deniers pour la folde da compte mentionné audit Mémoire de traites & remifes, & autres affaires qu'ils ont faites enfemble depuis le 8 Août 1684, jufques & compris le 6 Novembre fuivant, que ledit Guillaume ou fes héritiers, font tenus de payer audit Jacob lafomme de 15000 livres feulement, jufqu'à la concurrence de laquelle ledit Guillaume s'étoit engagé & obligé pour Jean envers ledit Jacob, fuivant fadite lettre miffive, & non les 980 livres 12 fols 10 deniers que Jean doit audit Jacob, aude'à defdites 15000 livres, par ledit compte envoyé par Jacob à Jean fous couverture de lettre par lui écrite à Guillaume, ne fervant à rien aux héritiers dudir Guillaume de dire qu'il ne s'eft engagé pour Jean envers Jacob, que de la fomme de 15000 livres, & que cette. fomme eft remplacée par Jean, au moyen de ce. que les 36152 livres 3 fols. 11 deniers qu'il a payés à Jacob, comme il paroît

dans fon crédit dudit compte. Premiérement, parce que l'engagement de Guillau me a duré tout le tems de la négociation qui s'eft faite entre Jacob & Jean, pendant près de trois mois : & fuppofé même que leur négociation eût duté dix ans, l'engagement de Guillaume envers Jacob auroit toujours duré tant qu'il n'auroit point révoqué fon crédit de 15000 livres pour Jean envers Jacob. Secondement, parce que le crédit qu'a donné Guillaume à Jean envers Jacob, jufqu'à la concurrence de la fomme de 15000 livres n'empêchoit pas Jacob de faire crédit à Jean au-delà defdites 15000 livres, voulant bien courir le rifque du furplus qu'il lui prêteroit. De forte que y ayant eu compte ouvert entre Jacob & Jean, pour raifon des traites & remifes, & autres affaires qu'ils faifoient enfemble, & s'étant trouvé que pendant trois mois de négociation Jacob a payé pour Jean 52132 livres 16 fols 9 deniers, comme il paroît au débit dudit compte de Jean, fur laquelle fomme Jean n'a payé à Jacob, ou pour lui, que la fomme de 36152 livres 3 fols 11 deniers, comme il paroît auffi à fon crédit audit compte ; & qu'ainfi il fe trouve débiteur pour la folde d'icelui, de la fomme de 15980 livres 12 fols 6 deniers. Il n'y a difficulté quelconque que Guillaume ou fes héritiers, après fon décès, font tenus de rendre & payer à Jacob 15000 livres feulement, d'autant que Guillaume ne s'étoit engagé envers Jacob pour Jean, que jufqu'à la concurrence de cette fomme, lefdits héritiers ne pouvant point imputer les 36152 livres 3 fols 11 deniers contenus au crédit de Jean: premiérement, fur lesdites 15000 livres de crédit que Guillaume a donné pour Jean à Jacob, & le furplus fur celui qu'a bien voulu donner Jacob à Jean au-delà des 15000 livres; parce que y ayant compte ouvert entre Jacob & Jean, ledit Guillaume, ou fes héritiers, font tenus & obligés de payer à Jacob la folde dudit compte, jufqu'à la concurrence de ladite fomme de 15000 livres, étant une chofe qui n'a jamais été révoquée en doute en femblables fortes d'affaires parmi les Marchands, Négocians, & Banquiers. Mais il y a une troifiéme raifon qui ne reçoit point de replique, qui eft que Guillaume s'eft reconnu débiteur de 15000 livres de Jacob, faifant partie de 15980 livres 15 fols 10 deniers, qui font la balance dudit compte, dont Jean demeure débiteur envers Jacob pour la folde. d'icelui, en ce qu'il paroît par ce qui eft écrit enfuite dudit compte, que Guillaume a payé à Jacob 1500 livres fur ladite fomme de 15000 livres. De forte que dès le moment qu'il a payé cette fomme de 1500 liv. à Jacob, il s'eft reconnu fon débiteur de ladite fomme de 15000 livres, parce qu'autrement il ne lui auroit pas payé cette fomme de 1500 livres, à compte defdites 15000 livres. Or Guillaume s'étant reconnu débiteur de Jacob de cette fomme de 15000 livres, par le payement qu'il a fait de 1500 livres fur icelle fomme, il eft certain que s'il vivoit, qu'il feroir non-recevable d'alleguer les raifons dont fe fervent aujourd'hui fes héritiers, pour s'empêcher de payer les 13500 livres reftans defdites 15000 livres, & par conféquent fes héritiers n'ayant pas plus de droit & d'action que lui, ils font non-recevables en leurs défenfes; & fans avoir égard à icelles, ils doivent être condamnés à payer à Jacob ladite fomme de 13500 livres reftante à payer par Guillaume, de ladite fomme de I 5000 livres.

Déliberé à Paris le 16 Mai 1688.

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I. Si un billet payable à un mois du jour de la datte, portant valeur reçue, fans dire en quoi cette valeur a été payée, doit être réputé billet de Change?:

II. Si un billet eft négociable fix mois après fon échéance?

III. Si un ordre mis au dos d'un billet, fans exprimer aucune valeur reçue de celui au profit duquel il a été passé, lui tranfmet la propriété du billet?

IV. Si un Négociant, au préjudice de fes créanciers peut paffer fon ordre au dos d'un billet fept jours avant que de faire banqueroute? Et fi celui au profit duquel l'ordre eft paffe n'eft pas tenu de rapporter le billet à la maffe des effets du banqueroutier, pour être partagé au fol la livre entre tous les créanciers, ou de le rendre à celui d'eux qui le revendique, & en prétend la compenfation, en cas qu'il foit bien fondé en fa de

mande?

MÉMOIRE POUR CONSULTER.

Nous payerons à Natan Jacob, ou ordre, dans un mois de la datte de la préfente la fomme de 6000. livres, valeur reçue. Fait à Nancy le 12 Aout 1687. URIEL,, DUBOIS.

Et au dos eft écrit ce qui fuit :

Pour moi payez à Meffieurs Malchart, c'eft mon ordre. A Nancy le 22. Mars 26883. N. JACOB, Juif de Hambourg.

Je confeffe avoir reçu de Meffieurs Dubois & Uriel un billet figné d'eux de la fomme de 6000. livres que je promets leur rendre dans deux ou trois jours, ou la valeur Fait à Nancy le 12 Aout 1687. N. JACOB, Juif de Hambourg.

Natan. Jacob a fait banqueroure le 18 Mars 1688, les fieurs Malchart, Ban

quiers. de Metz, demandent aux fieurs Dubois & Uriel le payement du billet de 6000 livres, dont copie eft ci-deffus tranferite.

Les fieurs Dubois & Uriel refufent de payer ledit billet, & prétendent le compenfer avec le billet d'indemnité de N. Jacob, auffi ci-deffus tranfcrit, fur ce que le biller de Gooo livres étant à jour certain échû le 12 Septembre 1687, les fieurs Malchart n'ont point dû le recevoir le 11 Mars 1688, puifque c'étoit un effet hors de tems de fa valeur, outre que depuis le jour de l'endoffement qui eft le 11 Mars jufqu'au 26 dudit mois, qui font huit jours après la banqueroute de N. Jacob, ils n'ont fait aucune diligence.

L'on demande avis à Monfieur Savary fur cette affaire, fi les fieurs Dubois:

& Uriel font bien fondés à demander la compenfation du billet d'indemnité de N. Jacob, avec le leur.

Le fouffigné qui a pris lecture, & mûrement examiné le Mémoire ci-dessus,› eftime qu'il y a quatre queftions en cette affaire qui en font la décifion.

La premiere, fi le billet des fieurs Dubois & Úriel, de la maniere qu'il eft con-çû, eft bon & valable..

La feconde, fi ledit billet étoit négociable fix mois après fon échéance.

La troifiéme, fi de la maniere que l'ordre eft conçu au dos dudit billet par N. Jacob, il en peut tranfmettre la propriété aux fieurs Malchart.

Et la quatrième, fi Natan Jacob a pû ceder fept jours avant fa faillite le billet de 6000 livres, par le moyen de fon ordre aufdits fieurs Malchart, au préjudice des fieurs Dubois & Uriel, & de tous les autres créanciers, & fi ledit billet doit être compenfé avec celui de Natan Jacob, duquel lefdits fieurs Dubois & Uriel font porteurs, ou fi les fieurs Malchart doivent rapporter ledit billet à la maffe com-mune des effets dudit Natan Jacob, pour être partagé entre fes créanciers au fol la livre.

Le fouffigné eft d'avis, fçavoir:

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Sur la premiere Question:

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Que les fieurs Dubois & Uriel n'ayant point exprimé dans leur billet la va-leur qu'ils ont reçue pour les 6ooo livres qu'ils promettoient payer par icelui, ni de qui ils l'ont reçue, que ledit biller eft nul & fans effet. Partant qu'il n'étoit point négociable dans le Public, parce que pour le rendre bon, valable & négociable, il falloit que lesdits fieurs Dubois & Uriel exprimaffent la valeur, foit en argent, marchandifes, ou autres effets, & qu'ils déclaraffent fi c'étoit de Natan Jacob, ou de quelqu'autre perfonne qu'ils avoient reçu cette valeur de 6000 livres mentionnée dans leur billet. Tout ce qui vient d'être dit eft conforme aux Articles I. XXIII. & XXXI,, du Titre V. de l'Or donnance du mois de Mars 1673, fur la forme & maniere que les lettres & billets de change, & les ordres qui fe mettent au dos d'iceux doivent être conçûs.p

:

Il eft certain, & c'eft une maxime établie de tout tems dans le Commerce. des lettres & billets de change, & de ceux payables à ordre, que quand la valeur n'eft point exprimée dans iceux, que cette valeur n'eft qu'une valeur entendue entre celui qui fait la lettre de change ou le billet, & celui en faveur duquel il a tiré la lettre de change ou fait le billet. Or comme cette valeur entendue entre les Cambiftes troubloit extrêmement le Commerce, & caufoit beaucoup de conteftations entre les Négocians, Marchands & Banquiers, c'est la raifon pour laquelle Sa Majesté a réprimé ces défordres par la fufdire Or donnance.

L'on ne peut douter que la valeur que les fieurs Dubois & Uriel ont mis dans leur billet, ne foit une valeur entendue entr'eux & ledit Natan Jacob. Et, en effet, l'on voit que lesdits Dubois & Uriel n'ont donné leur billet de 6000* livres à Natan Jacob que pour le négocier, & en recevoir de lui l'argent après La négociation qu'il en auroit faite. Ce fait eft juftifié par le biller que Natan

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