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en a fait l'expérience. « Nos eaux, dit»il, graces au Seigneur, fe conferve» rent; elles avoient déja changé plu» fieurs fois, & revenant à leur pre» mier état, il ne leur reftoit qu'une » puanteur dégoûtante, qui se diffipoit » en les expofant quelque tems à l'air : » leur couleur verte, qu'elles acque»roient dans leurs changemens, étoit

conftante, & malgré toute la repu» gnance, qu'elles donnoient en les » voyant, il falloit en boire ». On dit même, qu'elle devient enfin une liqueur (41) fpiritueuse, plus legere que les autres eaux, & qu'on la peut prefque allumer comme de l'eau de vie. Il ne faut pas oublier non plus qu'entre les eaux douces même, il y en a qui font moins fujettes à la corruption que d'autres, comme l'on dit de celle de ( 42 ) Bristol, qu'elle fe conferve fort longtems fans fe gâter. Je reserve le cinquième livre ce que j'ai encore à dire fur les fleurs de l'eau, fur ce que l'une eft dure, l'autre molle, & des au

pour

tres

(41) Mémoires litteraires de Trevoux 1730 pag.

417.

(42) Extrait de quelques Lettres de Penfilvanie, qui a paru en Allemand 1730, in quarto. pag. 7.

tres differentes qualités, qui fe trouvent dans les eaux douces.

pour

tés de

1

C'est un plaifir de confidérer chaque Sageffe créature en particulier & d'examiner bonie chacune de fes proprietés. Il n'y en a de Dieu puiffance point qui ne fourniffe une nouvelle ma- dans les tiere d'admirer la grandeur des ouvra-proprie ges du Seigneur, &, comme dit David, l'Eau. de reffentir de la volupté, quand on les contemple. Nous avons trouvé dans l'eau feule quantité de belles qualités & de proprietés admirables dont chacune en particulier fuffit rejouir un œil raifonnable, & remplir le cœur d'une fatisfaction, qui le porte à admirer Dieu & à le bénir. Mais rien ne doit tant y engager l'homme, que les proprietés de l'eau, que nous avons expofées dans les chapitres précedens, prises ensemble & confiderées à l'égard des autres créatures. Quelle impreffion ne doit pas faire fur un efprit raifonnable ce merveilleux rapport, cette liaison admirable, qui fait qu'en même tems que l'eau procure l'avantage des autres créatures, elle en tire de quoi fubfifter & se rendre utile? Plus nous y reflechiffons, plus nous trouvons qu'à tous égards, on peut comparer le monde entier à un horloge travaillé avec tout le foin imaginable, que le grand

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ouvrier a fait pour les vues les plus fages. Le feu en eft le grand reffort, l'eau, l'air & la terre en font les grands rouages formés avec tant d'art & engagés avec tant de jufteffe les uns dans les autres, que leurs opérations continuelles & le frein, que chacun met à l'impetuofité des autres, produifent les effets les plus falutaires & entretiennent le mouvement le plus utile. Tous ces élemens contribuent en tant de manieres à la formation & à l'accroiffement des autres créatures, de même qu'à l'entretien & à la fatisfaction des animaux, particuliérement de l'homme, que de toutes les proprietés de l'eau il n'y en a pas une dont les autres élemens & le refte des créatures n'ayent befoin dans certaines occafions, & dont ils ne tirent quelque avantage. De forte qu'il n'y a rien d'inutile dans l'eau, rien qui n'ait fes vues & fon ufage particulier. Il n'y a aucune de fes qualités, dont l'utilité ne foit auffi grande qu'elle eft variée. L'efs fentiel d'une bonne Phyfique eft de nous faire remarquer cette utilité, dont la confidération doit produire en nous la plus vive reconnoiffance. Ce n'eft que par-là que l'étude des proprietés de l'eau devient une Hidro-Théologie, une fcience, qui éleve nos penfées jufques à Dieu.

Car

Car nous y voyons que toutes chofes ont un maître & un créateur, qui nous a formé nous & tout ce qui nous environne, de façon que nous ne pouvons nous paffer de l'eau, & que nous avons befoin de fon fecours dans tant d'occafions & de tant de manieres differentes: Que c'eft ce même créateur, qui a donné à l'eau fes propietés & la vertu, qu'elle a de fatisfaire nos defirs & nos befoins, de remédier efficacement aux incommodités, que nous aurions à souffrir du feu, de l'air & de la terre même, en tempérant ces élemens: en un mot, de nous procurer en tant de rencontres & en tant de manieres les avantages, que nous en recevons tous les jours.

Je n'ai pas deffein de parler d'une En quai qualité affez connue des eaux mêlées de l'Eau je réfoud particules groffieres de terre, dont cha-par la dicun fçait, que, quand elles viennent à s'é- ftillation. vaporer, il reste au fond un fédiment de terre. C'est ainfi que les inondations du Nil & d'autres fleuves laiffent après elles, quand les eaux fe retirent, un limon & une matiere terreftre. Mais je me fuis propofé de rapporter ici comme quelque chofe de particulier, que l'eau, quelque pure & claire qu'on la prenne, donne toûjours quelque peu de terre, quand on

la

la fait diftiller, comme M. (43) Boyle & après lui M. (44) Robert Hook l'ont éprouvé par des expériences réiterées. Et quand on la diftille plufieurs fois, elle fe change enfin en une terre * ferme & compacte, en une fubftance blanchâtre, infipide, qui ne peut plus fe fondre ní fe changer en eau; fans parler de l'eau de mer, qui, quelque foin que l'on prenne de la clarifier & de l'épurer, même en la faifant paffer à travers huit doubles de toile d'Hollande, au point qu'on n'y apperçoive plus la moindre apparence de fable, ne laiffe pas d'en être encore fi bien chargée,qu'après l'avoir fait bouillir dans les falines, outre le fel, on y trouve encore un (45) monceau de fable.

Jen'oferois cependant foutenir ce que le fçavant (46) Nieuwentyt donne com

me

(43) Rob. Boyle, approuvé par Mr. Newton Optices Lib. III. quæft. 30.

(44) Rob. Hook poflhumous Works, A&a Eruditorum 1707. pag. 154.

* Elle fe change enfin en une terre ferme & compacte... Cela ne paroit nullement vraisemblable, & ne s'accorde point avec l'experience, que Mr. Boerhave a faite. Voyez fa Chym. Tom. I. vol. II. de Aqua N. c. a. T..

(45) Bernard Nieuwentyt. XX. Confideration. (46) Idem ibid.

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