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L'Eau,

de fa nature, n'es

CHAPITRE TROISIE’ME.

Effets de la chaleur & du froid fur l'Eau.

Utre la fluidité, l'eau a encore ceci

de commun avec l'air, que d'elle

ni froide même elle n'eft ni froide ni chaude, nichaude mais qu'elle peut être refroidie par des particules nitreufes, & échauffée par des particules ignées; & qu'à proportion qu'elle eft plus ou moins remplie des unes ou des autres par l'influence de quelque force étrangere, elle peut prendre une infinité de degrés différens de froid & de chaleur (1), & les perdre de même, ce qui eft journellement d'une utilité incroyable pour notre vie.

Les philofophes qui ont donné l'eau & l'air pour le premier froid (2), ou

pour

() Voyez le calcul de ces degrés rédigés en Tables dans les Philofophical Tranfactions A. 1701. n. 270. A. 1724. n. 381. & par Mr Amontons dans les Memoires de l'Académie des Sciences A. 1703. P. 233. & fuiv.

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(2) Empedocles & Strabon dans Plutarque de primo frigido p. 948.

pour l'origine du froid, n'ont rien pú avancer pour rendre leur fentiment probable. Au contraire il eft manifeste que l'eau & l'air font propres à recevoir également le froid & le chaud'; que Fun peut, auffi-bien que l'autre, les pénétrer entierement, & les changer, en y mettant une différence auffi grande que celle qu'il y a entre le plus haut * degré de chaleur, & le plus haut degré de froid; deux extrémités qui nous font auffi infupportables l'une que l'autre puifque le plus grand froid brûle auffi-bien que la plus grande chaleur, ainfi que le ** mouvement le plus rapide paroît peu différent du repos, & qué la rondeur du plus grand cercle approche le plus d'une ligne droite.

Mais nous avons fujet de reconnoître un grand bienfait du Créateur, en ce qu'il

* Le plus haut degré de chaleur. Cette expreffion eft bien hyperbolique, & peu conforme aux expe¬ riences & au langage des Phyficiens.

** Le mouvement le plus rapide paroit peu different du repos. Si on fe reprefente la circonférence d'une roue, qui tourne autour de fon axe auffi vite que notre imagination le peut concevoir, il eft sûr, qu'elle nous paroîtra être en repos, parce que tous les points reviendront au même endroit où ils étoient avant le mouvement, dans un inftant, de forte que notre ame ne fauroit diftinguer & appercevoir le changement qui y fera arrivé N. c. a. T.

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La cha

te l'Eau.

qu'il a donné à l'eau une fraîcheur natutelle, propre à ranimer les hommes & les bêtes; & qu'au contraire, quand on la veut échauffer, ou quand elle eft gelée en hyver, nous ne manquons pas de moyens pour refifter au froid. Nous devons auffi avoir obligation à la Providence, de ce qu'elle nous a donné tant de bains chauds, qui, outre la commodité de la chaleur, contribuent à notre fanté en tant de manieres.

Tout le monde fçait que l'eau a, enleurdila tr'autres proprietés, celle de se gonfler par la chaleur auffi bien que d'autres corps; de forte que, fi elle eft dans quelque vafe, elle s'y dilate & fe répand. Un pot, fous lequel on n'a pas affez menagé le feu, peut en fournir à chacun une experience journaliere. On remarque la même chofe dans l'huile, le vin, & tous les autres liquides, de quelque nom qu'on les appelle. Mr Affeman (3) rapporte même, qu'il eft arrivé à un vafe de faint chrême, ou d'huile d'onction, d'être échauffé par les encenfoirs & les bougies à un tel point, que la liqueur regorgea,

La

(3) Jofeph Simon Affeman Biblioth. Oriental. Tom. II. p. 250.

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La force de la chaleur s'étend plus Elle la loin; elle amenuife l'eau, la réduit en fait évaquelque maniere en pouffiere, & la porer. fait évaporer peu à peu dans l'air comme une fumée, quelquefois fi fubtile qu'elle eft imperceptible. Nous pouvons nous aflurer de ce fait tous les

jours, non-feulement par le moyen de l'eau que l'on fait bouillir fur le feu, mais encore en confiderant l'effet du foleil, qui, comme on parle ordinairement attire l'eau : c'est-à-dire, qui

par

fa chaleur fait fortir tant de vapeurs des mers, des lacs, des fleuves, & des autres eaux, dont une bonne partie du globe terreftre eft couverte, qu'elles fuffifent pour fournir toute l'année la pluye néceffaire, & qu'elles produisent par ce moyen de grands avantages aux créatures. C'est un fait prouvé par les naturalistes & particulierement par le fçavant Edmond Halley (4), que la quantité de ces vapeurs eft fi confiderable, qu'en un jour d'été il s'éleve de la feule mer mediterranée pour le moins 5280 millions de tonnes d'eau & au de-là. Ces vapeurs, fe mêlant dans l'air,

ne

(4) An estimate of the quantity of vapours raised out of the Sea, derived from experiment, together with an account of the circulation of

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Sageffe

ne fervent

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pas feulement à le rafraichir mais en s'y réuniffant dans la fuite comme dans un alambic, elles en retombent par gouttes, & forment ainfi la pluye; ou bien elles font portées par les vents fur les montagnes, pour entretenir les fleuves, qui, après avoir humecté la terre, retournent dans la mer, & y remplacent le déchet que cette évaporation y avoit caufée.

Le bienfait qui nous revient de cette de Dieu évaporation des eaux, la circulation dans cet continuelle qu'elle y entretient pour chaleur. nourrir les créatures, les animer & les

effet de la

rendre fécondes nous fournit une preuve bien fenfible de la fage puiffance du Créateur. Et plus nous y faisons attention, plus nous y trouvons de nouveaux fujets d'admiration. C'eft la raifon pourquoi le Prophete Jérémie loue particulierement cet effet de la puiffance du Très-Haut, Chap. X. vf. 13. » Au feul bruit de fa voix, il fait tomber du Ciel un déluge d'eaux; il éle» ve les nuées des extrémités de la terre, "il fait fuivre de la pluye les foudres » & les éclairs, & il fait fortir les vents

du

the watry vapours of the Sea, and of the cause of fprings, by Edmond Halley in the mifcellanea curiofa, Tom. I. Lond. 1705. in 8. au comm.

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