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dans les

un vehi

boiffons de bon goût l'art des braffeurs Ensinnous fournit par le mélange de l'eaufinuant avec les vertus qu'elle tire de toutes for- pores tes de malt & de grains, & comment l'Eau eft les apothicaires fçavent donner à l'eau cule & le goût, l'odeur, les effets, & les vertus un diffol de tant d'herbes & de minéraux. J'a- vant. jouterai feulement ici un mot touchant l'avantage confidérable, qui nous revient de la proprieté, que l'eau a d'amollir plufieurs corps en s'y attachant & en pénétrant par fa fluidité au-travers de leurs pores, pour s'unir avec eux, comme cela fe voit au pain fec & aux biscuits; qu'elle gonfle (8) les corps poreux en s'infinuant dans leurs plus grands pores, comme on fçait que cela arrive, non-feulement à l'éponge, mais encore aux biscuits, au pain fec, aux grains, aux féves, au bois, aux cordes, aux étoffes, & à bien d'autres corps; mais ce qu'il y a de plus remarquable, eft par-la l'eau eft propre à diffoudre plufieurs corps ; c'eft-à-dire, à en tirer la force en s'infinuant dans leurs particules les plus intérieures, & en les féparant

que

car l'eau devient non - feulement le meilleur vehicule des fels, mais en

core

(8) Jacobus Ode, principia philofophia naturalis

Es

avec la

terre,

core (9) le diffolvant le plus propre. De là vient que dans les hommes & les bêtes elle contribue le plus à la préparation & à la digestion des viandes, qui fervent à former le chyle, & par conféquent à entretenir la vie. Il eft certain que l'eau eft ce qui approche le plus de l'aqua fapientia, ou aqua cæleftis, du menftruum univerfale, & du mercuriale philofophorum, que les chymiftes cherchent

avec tant de foin.

En fe La fluidité & l'humidité de l'eau mémelant ritent une confidération particuliere à l'égard de notre terre, pour nous faire l'Eau la connoître la fageffe infinie du Créateur rend pro- & fa bonté envers nous. La proportion pre à être habitée une fois établie entre ces deux corps eft cultivée. telle, que la terre s'affermit à cause de Sage, fon poids, & que, quand il y auroit fur Sageffe de Dieu, elle une beaucoup plus grande quanti

bonté

té d'eau, & qu'elle y refteroit encore plus long-tems, elle ne lui ôteroit pourtant pas cette fermeté qu'elle trouve toujours au fond, comme cela paroît manifeftement par les lits des fleuves & le fond de la mer. Or comme cela prouve d'un côté, que les vûes infiniment fages du Créateur n'ont pas été que la terre fût

entie

(9) Jo. Keil, in Benjamin Motte abridgement Tom. I. p. 61.

entierement amollie à un point qu'elle ne pût pas nous porter (10), & que nous y aurions enfoncé, d'un autre côté, ce n'eft pas un moindre bienfait de fa part que la terre ne foit pas une pouffiere feche & ftérile & un fable mouvant, ni auffi dure & impénétrable que le fer, comme Dieu a menacé de la rendre pour punir les péchés des hommes, Deu teron. XXVIII, vf. 23. mais de ce que, par le moyen de l'eau qui tombe du Ciel, & qui pénétre dans la terre auffi avant qu'il eft néceffaire, d'un côté elle devient plus molle & plus propre à être remuée, pour y planter & femer; de l'autre la pouffiere & le fable s'y raffoient & s'affermiffent, de forte qu'on s'y peut tenir, y marcher, aller à cheval ou en chariot, felon que chacun le trouve à propos pour fes affaires ou fon plaisir.

avec

Ce que je viens d'observer de l'effet Son me que produit l'eau fur le corps de la ter- inge re, me fournit une occafion naturelle de d'autres confidérer comment la vifcofité, qui corps eft jointe à fon humidité & à fa fluidité, n'eft pas outre qu'elle unit & affermit le fable, utile. eft encore capable de lier ensemble bien

(10) Fénelon de l'Existence de Dieu Ch. XI.

des

2, moins

des petits corps, de façon qu'ils forment un corps ferme. C'est ainsi qu'en liant ensemble les plus petites parties terreftres, elle forme une matiere graffe & gluante, qúi, fechée à l'air, devient de l'argille, & fournit aux tuiliers ( 11 ) &, aux potiers de terre abondamment de matiere pour leur travail. Il n'eft pas néceffaire de chercher des preuves pour montrer la néceffité & l'utilité des ouvrages que l'on fait de cette matiere, dont l'ufage eft fort ancien, comme on peut le voir dans l'Ecriture-Sainte, Ge-.. nefe XI. vf. 3. Levitique VI. vf. 28. & dans d'autres auteurs de l'antiquité. Mais fans parler davantage de ces ouvrages, & fans m'arrêter à la porcelaine ni aux pipes, qui eft-ce qui n'admireroit cette proprieté de l'eau, ou plûtôt la fagesse du grand ouvrier qui l'a faite, en confidérant que c'eft par ce moyen qu'on pétrit la farine, & qu'on la réduit en une pâte, d'où on fait enfuite le pain dont nous vivons, les gâteaux, les bignets, & toutes fortes d'ouvrages de boulangerie. Quand nous réfléchiffons encore que c'eft cette proprieté de l'eau qui lie la chaux & le gyps, & les rend

propres

(11) Joh. Jac. Scheuchzers Kupfer-Bibel, ader Phyfica facra Planche XVIII.

propres à l'ufage qu'on en veut faire, nous trouvons que nous ne fommes pas moins redevables de la folidité & de la beauté de nos maifons, que de notre nourriture, à l'eau, ou au grand bienfaiteur de qui nous l'avons reçûe. J'omets à deffein ce que quelques auteurs ont écrit de différentes eaux, auxquelles ils attribuent la vertu de pétrifier le bois & d'autres matieres; car, ne m'étant propofe d'examiner ici que les proprietés de l'eau en général, ce n'eft pas le lieu de traiter des qualités de quelques efpeces particulieres, ce que je me referve de faire dans le quatrième livre. Mais voici un effet, qui paroît commun à toutes les eaux, c'eft que les pierres, fe formant en bonne partie d'une matiere molle & humide, qui fe durcit dans la fuite, l'eau contribue beaucoup à faire lier le fable, & à lui donner la confistance de la pierre. C'est ainfi que j'entens ce que rapporte M. du Mont (12): que l'eau de la mer Méditerranée pétrifie prefque toute la terre argilleufe qu'elle peut laver, ce qu'il a, ditil, remarqué en divers lieux de l'Archipel & du Golphe de Venise, où il assure

avoir

(12) Voyages de Mr. Dumont Tom. IV. pag.

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