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aux arrangemens qui avoient fait le sujet des engagemens pris entre les puissances 1.

Les ministres d'Autriche, de France et de Grande-Bretagne, ayant rendu compte à l'assemblée des plénipotentiaires des cinq puissances du peu de succès de leur négociation, il fut rédigé, le 12 mars, un procès-verbal dont, à cause de sa haute importance, nous devons insérer ici une partie.

Après la délibération qui a suivi cet exposé, MM. les plénipotentiaires sont convenus unanimement que S. M. le roi de Saxe méconnoît entièrement la situation dans laquelle il se trouve envers les puissances, en pensant, ainsi que l'insinue la note du comte d'Einsiedel, que, rendu à sa liberté, il peut attaquer la validité des dispositions irrévocablement arrêtées par elles sur la Saxe, et entamer une nouvelle négociation par un plénipotentiaire de sa part.

Ils conviennent en conséquence de nouveau que la partie de la Saxe qui est destinée à rester sous la domination de S. M. le roi de Saxe, ne pourra lui être remise que lorsque S. M. aura donné son adhésion pleine et entière aux articles qui lui ont été soumis à Presbourg; qu'il ne peut être question de négociation avec un plénipotentiaire de sa part, avant que cette condition n'ait été remplie, et que la négociation pour laquelle la cour d'Autriche a promis sa médiation ne peut avoir lieu que pour les arrangemens nécessaires spécifiés dans les articles 8, 9 et 10, et que sur les bases fixées par ces mêmes dispositions.

Ibid., p. 222.

Le

manque de consentement de la part de S. M. le roi de Saxe ne pouvant arrêter une marche exigée impérieusement par les droits respectifs des puissances et par le besoin qu'éprouve l'Europe de voir sa tranquillité assurée par le passage de différens pays sous les gouvernemens auxquels ils sont destinés, il a été arrêté :

1.° Qu'il sera procédé incessamment à la séparation des parties de la Saxe qui passent sous la domination prussienne, de celles qui restent à S. M. Saxonne;

2.° Que S. M. le roi de Prusse prendra définitivement possession de la partie de la Saxe qui lui a élé cédée par les arrangemens actuels;

3.o Et que celle qui reste à S. M. Saxonne, demeurera, en attendant, soumise au gouvernement provisoire de S. M. Prussienne.

MM. les plénipotentiaires ayant examiné ensuite plus en détail la note du comte d'Einsiedel, ont trouvé que, pour justifier la conduite du roi, on s'y est permis des réticences et des assertions contraires à la vérité des faits. Il y est dit :

« Qu'il n'avoit point dépendu de S. M. Saxonne ni lors du commencement de la grande lutte, ni. pendant son progrès, d'accéder à la cause des alliés, quelque sincère qu'en fût son désir, manifesté d'une manière non equivoque, et, en dernier lieu, par la demande formelle adressée aux souverains coalisés.»

Il est cependant de notoriété générale que si le roi de Saxe a été forcé d'entrer dans une alliance aussi contraire à tous ses devoirs et à tous ses intérêts, il y a persisté de sa propre volonté, ayant été sommé, 'de la manière la plus généreuse et la plus amicale, de

l'abandonner dans un temps où il étoit libre de sa personne, et où la Russie et la Prusse possédoient la plus grande partie de la Saxe; qu'il n'y a point persisté seulement, mais qu'il y est, pour ainsi dire, rentré de nouveau, en quittant, de propos délibéré, l'asile que la sagesse bienveillante d'une des puissances alliées, neutre alors, lui avoit préparé; que ce retour vers l'ennemi le plus cruel du pays auquel tant de considérations auroient dû l'arracher également, ne sauroit être nommé forcé, puisque la puissance qui protégeoit alors sa neutralité lui avoit garanti en même temps ses états; qu'il mit, par cette conduite, une forteresse importante entre les mains de l'ennemi, et prolongea, pour le malheur de ses propres états, de l'Allemagne et de l'Europe, la lutte la plus désastreuse, et qu'il n'offrit de s'allier aux puissances victorieuses qu'au moment où ses états: étoient conquis et lui-même fait prisonnier.

Les puissances ne pouvant point, d'après cet exposé succinct, dans lequel on ne s'est arrêté qu'aux faits les plus marquans, en passant sous silence tous les autres, permettre qu'une justification du roi de Saxe jette un faux jour sur leurs actions et leurs intentions, il a été résolu de faire rédiger une réponse à cette note, dans laquelle la conduite politique de S. M. Saxonné sera exposée d'après toute la vérité des faits et des transactions, pour empêcher que l'opinion de l'Europe ne soit égarée.

avec le roi de

Saxe.

On a tenu secrète la réponse qui fut faite au Négociation roi en conséquence de ce protocole : le public sait cependant qu'on y déclara à Frédéric-Auguste qu'il ne pouvoit exister aucune négocia

tion sur les cessions territoriales dont les alliés étoient convenus, et que le roi ne seroit rétabli dans la possession de ses états qu'on vouloit lui laisser, qu'après avoir dégagé ses sujets de la Saxe et de Varsovie du serment de fidélité qu'ils lui avoient prêté, et avoir accédé à l'alliance qui, sur ces entrefaites, avoit été conclue contre Buonaparte revenu de l'île d'Elbe.

Malgré cette sommation pressante et le refus réitéré d'admettre son plénipotentiaire à des négociations ultérieures, Frédéric-Auguste ne perdit pas d'abord l'espoir que la crise où l'Europe se trouvoit à cette époque feroit naître quelque circonstance favorable à sa cause. Enfin les représentations des monarques, et probablement les conseils des ministres qu'il avoit appelés auprès de lui, le portèrent à se soumettre à sa destinée. Le 6 avril, le comte d'Einsiedel déclara, par deux notes adressées aux plénipotentiaires des cinq cours, que son maître étoit disposé à adhérer aux cessions territoriales sous certaines conditions détaillées dans ces notes; ces conditions étant ensuite devenues l'objet d'une discussion régulière, ont été en partie insérées dans le traité à l'occasion duquel nous en parlerons 1.·

On ne jugea pas cette déclaration suffisante. Les cinq puissances y répondirent le 14 avril :

Voy. ces deux notes, Congrès de Vienne; Recueil de pièces officielles, Vol. VI, p. 233.

elles exigèrent l'acceptation préalable des points qui avoient été communiqués au roi; après quoi seulement les objets exprimés comme conditions pourroient devenir la matière d'une négociation. Le roi ayant tardé à se prononcer, et l'état de l'Europe exigeant la prompte dissolution du congrès, on fixa à ce monarque, le 27 avril, un dernier délai de cinq jours, pendant lesquels il auroit à nommer des plénipotentiaires pour conclure les traités d'accession, à défaut de quoi les propositions qui lui avoient été faites devoient être censées annullées, et l'on disposeroit autrement de la partie de ses états qu'on avoit voulu lui rendre 1.

Cette note et les représentations de la cour de Vienne firent leur effet. Invité par l'empereur à se rapprocher du lieu du congrès, Frédéric-Auguste se rendit, le 2 mai, à Laxenbourg, et nomma des plénipotentiaires * pour traiter, sous la médiation de l'Autriche, avec les cours de Berlin et de Saint-Pétersbourg. Les conférences commencèrent le 3 mai; le 18, la paix fut conclue entre le roi de Saxe, d'une part, l'Autriche, la Prusse et la Russie, de l'autre, et l'on dressa trois instrumens parfaitement uniformes. En voici les dispositions:

Par l'art. 2 de ce traité, le roi de Saxe re nonce à perpétuité, pour lui et tous ses descen

*Ces deux déclarations n'ont pas été publiées. Voy. leurs noms, p. 20.

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