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UNE société d'entreprise de manufactures estelle dissoute par la mort d'un des associés, s'il est dit que l'aîné de ses fils le représentera ?

Peut-il étre valablement stipulé qu'un associé ne pourra se retirer qu'autant que sa retraite sera consentie par la majorité des membres ?

Le i février 1805, contrat de société entre les sieurs Vandenbroucke, Huysmans et Vaneerzel.

Ce contrat avait pour objet l'établissement de deux raffineries de sucre.

Par une première clause, il est stipulé que la société se continuera jusqu'à ce que sa résolution sera déterminée, ce qui ne pourra avoir lieu qu'a

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près le terme de quatre ans, à moins que les raffineries ne fussent incendiées ou mises hors d'état d'etre activées.

Il est arrêté que, dans les trois premiers mois de chaque année, il sera fait un bilan ou compte général pour apprécier le bénéfice ou la perte.

Les fonctions que chaque membre doit remplir sont reparties avec les traitemens particuliers qui s'y trouvaient respectivement attachés.

En cas de décès du sieur Vaneerzel, déjà fort avancé en âge, il sera remplacé par l'aîné de ses fils, sans que ses autres enfans puissent être reconnus ou avoir voix délibérative dans la société.

Par une clause subséquente, et c'est celle qui fait la matière principale de la contestation, il est stipulé qu'aucun des trois associés ne pourra se retirer de la société que du consentement et approbation de la majorité, et que, si dans ce cas les deux autres veulent continuer, celui dont la retraite aura été agréée sera tenu de se contenter du dernier bilan, sans participer au bénéfice, et sans supporter les charges de l'année courante; il ne pourra demander sa part et portion qu'un an après sa retraite, et il sera tenu de céder ses droits aux deux autres, dans ce qui constitue l'établissement.

Vaneerzel décéda au mois d'avril 1809.

Les choses restèrent dans leur état jusqu'au mois de mai 1812.

A cette époque les enfans de Vaneersel s'adres

sent au tribunal de commerce d'Anvers, et y demandent qu'il soit procédé au partage et liquidation de la société par tiers.

Ils avaient fait apposer les scellés sur les bureaux et sur les effets des établissemens communs.

Ils alléguent que la société n'existe plus depuis long temps; qu'elle a cessé ses opérations; qu'elle a été dissoute depuis la mort de leur père, et qu'il n'entendent plus rester en communauté.

Vandenbroucke et Huysmans soutiennent que la société n'est pas disscute.

Après divers incidens, la contestation est renvoyée pardevant des arbitres que les parties nomment.

Le procès s'instruit pardevant ces arbitres, qui adjugent aux enfans Vaneersel leurs conclusions.

Ainsi décidé que la société était dissoute, et parconséquent que la clause par laquelle il était convenu, indéfiniment, qu'aucun des trois associés ne serait reçu à se retirer, sans l'agrément des deux autres, n'était pas obligatoire, et n'empêchait pas la liberté de la retraite de l'un d'eux, malgré les deux

autres.

Vandenbroucke et Huysmans interjettent appel.

Il faut, disent-ils, considérer la nature et l'objet de la société contractée entre les parties.

Ce n'est ni une communauté de biens, ni une société en nom collectif, ayant pour objet un com

merce général, ni une société relative à une opération passagère de commerce.

Il s'agit de l'entreprise d'un établissement qui par sa nature, et dans l'intention des parties, ne devait finir que par l'extinction de la chose; c'est-à-dire, par la destruction des édifices, ou l'impossibilité de se procurer les alimens nécessaires pour remplir le but de l'entreprise.

Une semblable association exige, non seulement d'énormes avances, mais elle demande l'industrie et les connaissances particulières des associés. Elle exclut toute idée de renonciation et de retraite de la part des associés sans l'aveu de ses contractans, parce que les établissemens, qui forment l'objet essentiel de la société, seraient nuls, si la défection d'un associé faisait manquer les moyens de continuer la fabrication.

C'est dans cette vue que les parties ont prévu :

1°. Que la mort du sieur Vaneersel n'opérerait pas la dissolution de la société, et qu'il y serait représenté par un de ses fils;

2o. Qu'aucun des trois membres ne pourrait se retirer sans le consentement des deux autres, parceque les associés ne voulaient pas commettre leur fortune au caprice de l'un d'eux.

La disposition du premier cas prévu est autorisée par l'article 1868 du code civil, et elle manifeste l'intention des parties sur la durée illimitée de la société.

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