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habitans. Bonaparte ordonna au consul fran

1796. çais à Livourne, de saisir, dans le port (1),

(1) Le consul de la république Française à Livourne fera mettre les scellés sur les magasins appartenant aux Anglais, à l'Empereur, à l'Impératrice de Russie, et généralement à tous les princes ou sujets avec lesquels nous sommes en guerre, et en fera l'inventaire. Il fera toutes les démarches, prendra toutes les mesures et emploiera tous les moyens pour découvrir les marchandises qui pourraient avoir été déposées chez les différens négocians de Livourne, et s'en mettra en posses

sion.

En exécution de cet ordre du général, le consul de la république française invite tous les habitans de Livourne et des environs,de quelque nation et qualité qu'ils soient, qui pourraient posséder, à titre de dépôt ou autrement, des effets, marchandises, argent, bijoux, chevaux, meubles, etc. appartenant aux sujets de la Grande-Bretagne, de l'Empereur, de la Russie, ou aux autres ennemis de la république, à remettre, dans la journée de demain 12 messidor, au consul lui-même, un état détaillé et une déclaration au vrai des effets et sommes d'argent qui appartiennent aux ennemis de la république.

Ceux qui auront contracté avec les ennemis de la république, de quelque manière et en quelque forme que ce puisse être, doivent également en faire leur déclaration au consul de la république, ce qui servira simplement pour en faire l'examen.

Le consul invite particuliérement les Français à lui indiquer les effets cachés, déposés ou aliénés par ventes simulées, ou de toute autre manière. Aucun motif pour les retenir ne sera admissiblę, parce qu'il est prouvé

tous les effets appartenant aux Anglais, aux Autrichiens, aux Russes et aux sujets des au- AN 4. tres états avec lesquels la France était en guerre; laissa dans la place une bonne garnison, commandée par le général Vaubois, et revint à son armée en passant par Florence,

que les citoyens français ont été en différens tems dépouillés ou lézés par des mesures sourdes des ennemis de la république dans le port de Livourne, et que même la violence a été employée. C'est donc le droit le plus légitime de la représaille que la république française exerce, et une restitution de ses propriétés, également juste, qu'elle réclame, cònformément aux droits de toutes les nations.

Aussitôt les déclarations faites, on prendra des mesures pour constater leur exactitude et assurer le séquestre des effets. Ceux qui négligeraient de faire les déclarations, ou qui les feraient incomplettes, s'exposeraient à des recherches sévères et à des conséquences fâcheuses qu'il est de leur intérêt de prévenir.

L'intention du général en chef est que toutes les propriétés ennemies soient remises dans les mains de la république, comme prises faites en mer. En conséquence, et par cette considération, toutes recherches, tous jugemens, toutes condamnations, sont attribués à la juridiction consulaire..

Les négocians de Livourne, et sur-tout les Juifs, ayant proposé aux Français de se désister de toutes leurs prétentions, moyennant une somme dont on conviendrait, Bonaparte y consentit; on lai paya six millions de livres monnaie de France. En conséquence, toutes mesures inquisitoriales furent abandonnées. Les Français observèrent dans Livourne la plus exacte discipline.

où le grand-duc lui fit l'accueil le plus dis1796. tingué.

Pendant qu'il dînait avec ce prince, un courrier vint lui apporter la nouvelle de la conquête du château de Milan. La tranchée avait été ouverte devant cette place pendant la nuit du vingt-neuf au trente prairial; elle se rendit le onze messidor. La garnison fut faite prisonnière de guerre; on trouva dans le château de Milan cent cinquante bouches à feu, deux cent milliers de poudre, et cinq mille fusils.

Le général francais était alors la seule puissance qui dominait en Italie. L'armée était entretenue aux dépens des pays vaincus. J'ai entendu les clameurs s'élever contre Bonaparte; des soulévemens excités dans quelques cantons en étaient le vain prétexte. Mais ceux qui s'appitoyaient ainsi sur le sort des Italiens, n'auraient-ils pas censuré plus amérement la conduite du général, si les frais incalculables entraînés par l'expédition italienne, augmentant l'ambarras des finances de la république, avaient arrêté la suite des succès qui, seuls, pouvaient amener une paix solide et glorieuse ?

Le chevalier Folard, un des hommes les plus instruits de son siècle, et qui avait fait long-tems la guerre en Italie, repoussant, dans ses commentaires sur Polybe, le reproche

d'avarice fait à Annibal par Tite-Live, observe avec raison que, si par cette avarice l'histo- AN 4. rien romain entendait les contributions levées

sur les villes et sur les campagnes, vait rien dire de moins raisonnable.

il ne pou

« Annibal était-il entré en Italie pour faire la guerre aux dépens de la république de Carthage, plutôt qu'aux frais de ses ennemis? Un habile général fournit aux dépenses de la guerre par la guerre elle-même. Le Carthaginois s'en acquitta fort bien. Tout autre qui fait le contraire, s'en acquitte fort mal. C'est une leçon pour les Français, s'il leur arrive jamais de rentrer en Italie. Tous les peuples et tous les souverains de ce pays n'étaient pas inoins nos ennemis en secret, qu'ils l'étaient ouvertement d'Annibal. Nous eûmes tort de ne pas leur faire payer les frais de la guerre. Les Italiens méprisent les étrangers ; ils s'imaginent qu'on les craint, lorsqu'on les ménage. La politique du prince Eugène doit servir d'exemple aux généraux français ; il retira de l'Italie tout l'or que nous y avions laissé. Cè prince fit en cela le trait d'un grand capitaine ; aussi l'était-il plus qu'aucun autre de son tems. »

1796.

LIVRE VINGTIEME.

CHAPITRE PREMIER.

Rupture de l'armistice entre les Autrichiens et les Français sur les bords du Rhin. Etat des armées respectives.

MALGRÉ la bonté des fortifications de Man

toue, telles étaient l'audace et l'activité des Français, que cette place pouvait être enlevée de vive force, par l'intermède des bateaux plats construits sur le lac. Ce danger serait devenu plus imminent, si le gouvernement français, envoyant en Italie une partie des troupes que l'armistice subsistant entre l'Empereur et la France, laissait reposer sur les bords du Rhin, avait procuré à Bonaparte la facilité de garder exactement toute les rivières et tous les canaux dont Mantoue est à la distance de quelques lieues, et d'empêcher ainsi qu'il n'entrât dans la forteresse des subsistances pour les hommes et pour les chevaux.

L'empereur avait les mêmes moyens de fortifier son armée du Tyrol, en affaiblissant

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