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donner aux juges qui ont voté la mort de Louis XVI; mais le roi regarde comme une chose différente le pardon accordé à ceux qui, ayant commis ce crime, rendraient de si grands services, que ce serait à leurs actions que serait dû le rétablissement de la monarchie. Je ne suis nullement étonné que Cambacérès soit du nombre de ceux qui voudraient le rétablissement de la royauté. C'est un homme de beaucoup d'esprit ; et si quelque chose m'a étonné en lui, ç'a été de le voir s'asservir à obéir à des gens qu'en tout autre tems que celui où les passions aveuglent, il eût commandés. Mais en même tems que le roi desire que vous écoutiez les propositions qui peuvent vous être faites, sa majesté croit qu'il ne doit pas échapper à votre sagacité que ces négociations peuvent avoir pour objet de faire languir les efforts qu'on va faire. Le roi a recommandé à Monsieur de n'entendre à aucune négociation; la conduite de Tallien à Quiberon, a prouvé quelle foi on pouvait leur accorder. Ainsi l'effet de toute négociation ne sera jamais de ralentir un seul moment ce qui se passe dans la Vendée. Le roi l'enjoint expressément et impéricusement. >>

Il n'était pas difficile à Cambacérés de repousser cette imputation. Si on l'avait admise, il eût dépendu de tous les ennemis de la révolution de feindre des correspondances avec les

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amis de la liberté, non-seulement pour leur 1795. ravir la confiance du peuple, mais pour les perdre entiérement. Cette lettre a les rapports les plus intimes avec la conspiration de Brottier et de Lavilleurnoy, dont je parlerai dans la suite. Lemaître et quelques uns de ses complices furent condamnés à la peine de mort, par sentence du 18 brumaire. Quelques autres, sur le compte desquels les preuves n'étaient pas claires, furent acquittés (1).

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(1) Le conseil militaire, après avoir pris la communication des pièces, et avoir entendu les témoins, tant à charge qu'à décharge, a trouvé Pierre-Jacques Lemaître convaincu d'être le principal agent de la conspiration qui a existé, en entretenant des correspondances en pays étrangers, avec les émigrés et les ennemis de la république, tendant à rétablir la royauté et renverser le gouvernement républicain; laquelle correspondance prouve qu'il a cherché à seconder les mouvemens rebelles des sections, en entretenant dans l'intérieur, et principalement à Magny, une correspondance tendant à fomenter la rebellion à Dreux, Orléans et Rouen, d'y avoir répandu des écrits contre révolutionnaires, et en les colportant chez différens libraires;

Charles Perrin, convaincu d'être l'agent passif de Lemaître, tant en recevant des lettres pour lui, qu'en lui procurant des prête-noms pour recevoir celles qui lui venaient de l'étranger, lesquelles étaient écrites en encre sympathique; en répandant des écrits contrerévolutionnaires, et en les colportant chez différens libraires ;

Antoine Huquet, dit Desforges, atteint et convainou

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CHAPITRE VI.

Evénemens militaires en Allemagne et en
Italie. Bataille de Loano.

OURDAN et Pichegru, après avoir achevé de chasser les Allemands et les Anglais de la Belgique et de la Hollande, pénétraient, à la droite du Rhin, dans le cœur de l'Allemagne.

d'être complice de Lemaître, par les liaisons et entrevues qu'il a ques avec lui, en recevant en présent une paire de pistolets, et en ne révélant pas les desseins,suspects de Lemaître ;

Theodore André, atteint et convaincu de la même Complicité, en ne révélant pas les desseins suspects de Lemaite, qui étaient plus que démontrés dans les dif férentes entrevues qu'il a eues avec lui;

Jacques-François Brière, atteint et convaincu d'être l'agent direct dudit Lemaître, ce qui est prouvé par la correspondance qu'il a entretenue de Magny, laquelle correspondan, e est écrite en encre sympathique, et dans les interlignes d'un texte insignifiant écrit en eucre noire, tendant à provoquer des mouvemens de rebellion à Dreux, Orléans et Rouen, en indiquant dans la scconde de ces villes une adresse pour y faire passer les écrits contre révolutionnaires;

Nicolas-Laurent Favier, atteint et convaincu d'être complice de Lemaître, à la conspiration duquel il n'a pas pris une part très-active et suivie;

En vain le général Wurmser, annonçant clai1795. rement le projet formé par les puissances coalisées de démembrer la France, avait répandu en Alsace une proclamation impériale, dans laquelle il engageait les habitans de l'Alsace, de la Lorraine et des Trois-Evêchés à rentrer sous la domination de la maison d'Autriche; chassé, par les républicains, de toutes les positions occupées par lui à la gauche du Rhin, le seul résultat de son expédition infructueuse fut de convaincre les émigrés que ces princes

Jean Langevin, atteint et convaincu d'être propagateur d'écrits incendiaires, d'avoir correspondu avec des émigrés et des prêtres fanatiques, ce qui est prouvé, tant par les écrits trouvés chez lui, que par les notes écrites de sa main;

Le nommé Ratel, absent, prêtre et ci-devant secrétaire de la municipalité de Mantes, convaincu d'être auteur d'un des mouvemens qui ont eu lieu à Dreux, et d'être complice de Lemaître :

Pour réparation des délits exposés, le conseil militaire a condamné Pierre - Jacques Lemaître à la peine de mort; Jacques Perrin à deux ans de détention; Antoine Huguet dit Desforges, à une année de détention: Théodore André à six mois de détention; Jacques - François Briere à six années de détention; Jean Langevin et le nommé Ratel, absent, à la peine de déportation; Nicolas - Laurent Favier à six mois de détention.

François Supery, André- Charles Brottier et JeanDenis de la Riberette, n'ayant aucunes charges contre eux, dans le cours de la procédure, sont acquittés, et seront remis sur - le - champ en liberté.

paraissant armés en faveur de la maison royale et de la noblesse de France, ne songeaient An 4. réellement qu'à leurs avantages particuliers.

Les Impériaux conservaient à la gauche du Rhin, la seule ville de Mayence, étroitement bloquée; mais en échange, les Français s'étaient rendus maîtres, à la droite de ce fleuve, de la forteresse de Dusseldorf et de la ville de Manheim. Ils envahissaient tout le Brisgaw, tandis qu'en Italie, le général Schérer, par deux victoires remportées sur les troupes autrichiennes et sardes dans les gorges de la rivière du Ponent, préludait aux superbes campagnes de Bonaparte.

Depuis que Schérer commandait l'armée d'Italie, les Français préparaient une campagne d'hiver; elle pouvait être décisive. La conclusion de la paix avec l'Espagne conduisait, dans les Apennis, les soldats victorieux qui avaient franchi les Pyrénées. Kellermann était maître de toutes les sommités des Alpes, depuis les bords du lac de Genève, jusqu'au comté de Nice.

Les Français et les Autrichiens se fortifiaient respectivement; les premiers, à Borgheto et à Albenga; les seconds, à Dego. Le général Dewins étendait ses redoutes sur le mont Balin, qui domine Savone et Vado, soit que dès-lors il calculait la nécessité d'une retraite , ou que son projet fût seulement

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