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dit: toute personne. Dès lors, quiconque a intérêt à connaître l'état civil d'une personne, son âge, si elle est mariée et avec qui, à reconstituer au besoin des rapports de parenté, peut demander et obtenir tous extraits des registres. Il n'est pas nécessaire de justifier d'un intérêt quelconque; il suffit de payer les droits minimes fixés par le décret du 12 juillet 1807. Les extraits sont délivrés par les dépositaires des registres, qui sont normalement les officiers de l'état civil et les greffiers des tribunaux de première instance.

Donc les registres sont à la disposition de tous au moyen des extraits. En cela, les actes de l'état civil diffèrent des autres actes authentiques, notamment des actes notariés, dont les parties seules peuvent obtenir copie. La loi du 25 ventôse an XI (article 23) interdit formellement de délivrer des expéditions, sauf aux parties, à leurs héritiers et à leurs représentants. La différence tient à ce que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties, tandis que tout le monde peut avoir intérêt à connaître l'état civil.

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L'article 45 ajoute: «Les extraits délivrés conformes aux registres et légalisés par le président du tribunal de première << instance ou par le juge qui le remplacera feront foi jusqu'à inscription de faux. » C'est dire que les extraits ont la même valeur que les actes qui sont inscrits sur les registres, toujours bien entendu sous réserve de la question d'identité. Pour qu'ils aient cette autorité, trois conditions doivent être remplies, qui toutes trois sont indiquées par l'article 45.

1° Il faut que l'extrait ait été délivré par le dépositaire légal des registres. Pour les actes de l'année courante, c'est l'officier de l'état civil, car les deux doubles sont à la mairie 1. Pour les actes des années écoulées, les extraits peuvent être demandés soit au maire, soit au greffier du tribunal de première instance, qui détiennent chacun des doubles. Depuis la loi du 8 juin 1893, les ministres de la guerre, de la marine et des affaires étrangères sont dépositaires de registres de l'état civil dans des cas spéciaux 2.

1. L'usage a été quelque temps de considérer les secrétaires de mairie comme des dépositaires. C'était contraire à l'article 45; les secrétaires, en effet, ne sont que des employés. Un avis du Conseil d'Etat du 2 juillet 1807 a mis fin à cette pratique. Ce n'est pas le maire qui fait la copie, mais il doit la signer; c'est lui qui est le dépositaire légal. L'avis de 1807 déclare valables les extraits délivrés dans le passé conformément à l'usage; il ajoute que les extraits délivrés à l'avenir ne seront valables que s'ils ont été signés par le maire.

2. Nous supposons résolue affirmativement la question de savoir si les mi

2o Il faut que l'extrait ait été délivré conforme, c'est-à-dire qu'il soit certifié conforme au registre par le dépositaire légal; cela implique que le dépositaire l'a collationné, ce qui est une garantie d'exactitude.

C'est une question de savoir si l'allégation que l'extrait, quoique certifié conforme, n'est pas conforme au registre, ne peut se produire que par l'inscription de faux. Strictement, on n'en peut pas douter, car, en contestant la conformité, on attaque la véracité du dépositaire qui certifie. Cependant la solution contraire a prévalu, par suite de considérations de fait. Celui qui prétend que l'extrait produit n'est pas conforme n'a qu'à produire un autre extrait. Le rapprochement des deux extraits non conformes suffit pour que le juge ordonne la vérification et on saura à quoi s'en tenir. Il n'est donc pas nécessaire de recourir à l'inscription de faux.

3o Il faut enfin que l'extrait soit légalisé. La légalisation. ici comme toujours, est l'attestation donnée par qui de droit que la signature apposée sur un acte est véritable, c'est-àdire qu'elle émane bien de celui dont elle reproduit le nom. Quand il s'agit des extraits des registres, la légalisation est l'attestation que la signature est bien celle du dépositaire. La légalisation est une garantie contre la possibilité de supercheries. A cet effet, le fonctionnaire chargé de légaliser doit avoir et il a en fait un registre portant, comme moyen de comparaison et de contrôle, la signature des dépositaires de registres.

La légalisation, pour les extraits des registres de l'état civil, est toujours nécessaire. En cela, l'article 45 se montre plus exigeant pour les actes de l'état civil que la loi de ventôse an XI pour les actes notariés. Aux termes de cette loi (article 28), la légalisation n'est nécessaire que quand l'acte est produit hors du ressort de la compétence du notaire. Ici, la légalisation est toujours nécessaire. Cela tient à des motifs de fait la signature des notaires, dans le monde des af faires, est plus connue que celle des maires et la vérification est plus facile.

Aux termes de l'article 45, c'était le président du tribunal du ressort ou un juge délégué par lui qui seul pouvait léga

nistres de la guerre et de la marine peuvent délivrer des extraits des registres dont la loi de 1893 les constitue dépositaires. Voy. suprà, p. 200 et 202. La question ne peut faire l'objet d'un doute sérieux.

liser. On a ultérieurement reconnu que la nécessité d'aller au chef-lieu de l'arrondissement, où siège le tribunal et où se trouve par là même le président, pour obtenir la légalisation, entraînait des pertes de temps et des frais parfois onéreux. Aussi la loi du 2 mai 1861 a modifié l'article 45 en conférant le droit de légaliser les extraits aux juges de paix dans les cantons autres que ceux où siègent les tribunaux de première instance. Le juge de paix siège au chef-lieu du canton; on le trouve plus vite et plus facilement.

En résumé, trois conditions doivent être remplies pour que les extraits des registres aient la même force probante que les registres eux-mêmes: il faut que les extraits soient délivrés par les dépositaires, certifiés conformes et que la signature soit légalisée 1. A ces trois conditions, les extraits font foi jusqu'à inscription de faux, c'est-à-dire qu'ils valent autant que l'acte inscrit sur le registre et ont la même force probante sous les mêmes distinctions.

140. C'est là, il importe de le remarquer, une règle spéciale aux actes de l'état civil. D'ordinaire, les reproductions d'un acte, ce qu'on appelle les copies ou expéditions, n'ont pas la même force que l'acte lui-même, au moins quand cet acte existe; elles ne l'ont qu'à charge pour celui qui s'en prévaut de prouver la conformité, si l'adversaire l'exige, c'est-à-dire au besoin de représenter l'original (article 1334). Cela s'explique par les chances d'erreur ou les possibilités de fraude qu'amène la reproduction. Il en est autrement aux termes de l'article 45; les copies, sous le nom d'extraits, ont une force propre, sans que celui à qui on les oppose puisse exiger la représentation de l'original. La raison de cette particularité tient à ce que les registres de l'état civil ne pourraient pas être déplacés sans inconvénient grave. D'une part, à les faire voyager, on risquerait de les égarer; d'autre part, à les soustraire à la surveillance dont il est bon qu'ils

1. Ces dispositions de l'article 45 sont certainement applicables aux extraits délivrés par les officiers de l'état civil et par les greffiers, qui sont les dépositaires de droit commun des registres de l'état civil. Le sont-elles également aux extraits délivrés en exécution de la loi du 8 juin 1893 par les ministres des affaires étrangères, de la guerre et de la marine, pour les actes dont ils sont constitués les dépositaires ? Aucune indication n'est fournie à cet égard soit par la loi de 1893 soit par les travaux préparatoires de cette loi. C'est manifestement une question à laquelle on n'a pas pensé. Il n'y a pas encore d'usage formé et on ne peut que signaler la question, Cpr. suprà, p. 221, note 2.

soient constamment l'objet, on s'exposerait aux altérations; enfin il faut qu'ils restent au dépôt pour recevoir les actes qui seraient requis, pour faciliter la délivrance des extraits demandés. Alors on entoure la délivrance des extraits de garanties spéciales. Si les prescriptions de la loi ont été observées, l'extrait, contrairement au droit commun, a une autorité propre. C'est là ce que signifie l'article 45.

Il y a bien quelques cas dans lesquels on ne peut éviter le déplacement des registres. Par exemple, quand un extrait est attaqué comme faux, il est nécessaire que le tribunal, pour juger, rapproche l'extrait de la minute, c'est-à-dire du registre et se fasse par conséquent présenter ce dernier. Le cas est prévu; l'ordonnance du 18 août 1819 règle comment il doit alors être procédé. Cela est évidemment exceptionnel et ne peut se faire tous les jours.

SECTION III.

Comment il peut être suppléé aux registres de l'état civil.

141. Les naissances, mariages et décès ne peuvent en général être prouvés qu'à l'aide des actes inscrits sur les registres, ou, plus exactement, à l'aide des extraits. C'est le mode de preuve normal et habituel. L'article 194 le dit spécialement pour le mariage et il en est de même pour les autres faits de l'état civil.

Tant que les registres existent, quiconque a intérêt à prouver un fait de l'état civil, relatif soit à lui-même soit à d'autres personnes, peut se procurer un extrait des registres (article 45). Si les registres n'existent plus, les extraits antérieurement délivrés sont suffisants, puisque, comme on l'a vu. ils ont force probante par eux-mêmes. Mais comment s'y prendre si les registres n'existent pas ou n'existent plus et qu'on n'ait pas d'extraits antérieurs à la perte ? Comment l'état civil peut-il être prouvé? C'est une question très pratique et incomplètement réglée. Il semble que la loi, ayant pris tant de soins pour assurer l'exacte et régulière tenue des registres, ait compté que cela suffirait et qu'il n'y avait pas à prévoir autre chose. Or elle s'est méprise.

142. L'article 46 prévoit deux cas possibles :

1o Le cas où les registres n'ont pas été tenus, où il est

prouvé qu'ils ne l'ont pas été. Le cas est rare, étant donné la régularité actuelle et de plus en plus assurée des services administratifs. Il faut assimiler à l'absence de registres l'interruption, les lacunes dans la tenue. Pour les actes se rapportant à la période pendant laquelle les registres n'ont pas été tenus, il est clair que l'interruption équivaut à l'absence de registres. C'est ce qui a été formellement reconnu dans un cas spécial par la loi du 13 janvier 1817, relative aux militaires absents (article 5). Ce n'est qu'une application d'une idée générale qui doit être toujours admise.

2o Le cas où les registres sont perdus, égarés ou détruits. Il faut, bien entendu, qu'il en soit ainsi des deux doubles; tant que l'un d'eux existe, celui-ci suffit pour reconstituer l'autre. Il a été jugé que, quand un des doubles a été détruit, le tribunal doit, à la requête du dépositaire (maire ou greffier), ordonner qu'il sera procédé à la confection d'un nouveau registre au moyen de l'autre double '. En prévoyant le cas de destruction, l'article 46 suppose donc la destruction des deux doubles, ce qui peut se produire par suite d'accident (inondation, incendie) ou par suite de crime, de destruction volontaire.

Ici encore, il faut assimiler à la perte totale la perte partielle, par exemple la destruction ou la soustraction d'une ou de plusieurs feuilles ; pour les actes se rapportant à la période dont les actes sont perdus ou détruits, il est clair que la perte partielle équivaut à la perte totale. C'est encore ce qu'admet la loi du 13 janvier 1817 (article 5) pour les militaires et cette loi ne fait en cela qu'appliquer le droit commun.

Dans ces cas (non-tenue des registres, perte ou destruction des deux registres), l'article 46 indique comment l'état civil peut être prouvé: « Lorsqu'il n'aura pas existé de registres «ou qu'ils seront perdus, la preuve en scra reçue tant par << titres que par témoins; et dans ces cas, les mariages, nais«sances et décès pourront être prouvés tant par les registres «<et papiers émanés des pères et mères décédés que par té<< moins. » On peut donc recourir aux registres et papiers domestiques, aux témoignages ou à toutes autres preuves, même aux présomptions, puisque l'article 1353 les admet dans les cas où la preuve testimoniale est admise. Au moyen de ces

1. Trib. de la Seine 30 juin 1858, D. P. 1870. III. 114.

II. - 15

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