Page images
PDF
EPUB

nomination de son arbitre, et laisse prononcer contre lui un jugement par défaut portant nomination d'office d'un arbitre, peut y former oppo sition. Car la loi permet l'opposition à tout jugement par défaut, sans aucune distinction, et il n'y a nulle raison de l'interdire contre celui qui porte nomination d'arbitre.

4. Quand bien même ce jugement serait contradictoire, le tribunal arbitral n'a pas le pouvoir de se constituer, si l'associé, pour lequel un arbitre est nommé, a interjeté appel du jugement, nonobstant la règle posée par l'article 439 du Code de procédure civile, que les tribunaux de commerce peuvent ordonner l'exécution de leurs jugemens par provision. On conçoit sans peine le motif de cette dérogation. En effet l'article 439, comme tous ceux qui prononcent l'exécution d'un jugement par provision, ne l'ordonne raisonnablement que pour les cas où le jugement sera exécuté sans préjudice des droits de l'appelant. Autrement l'appel serait inutile, puisque l'appelant qui ferait infirmer la sentence qui le condamme, ne pourrait pas empêcher qu'un acte préjudiciable pour ses intérêts n'eût été consommé. En un mot, l'exécution provisoire ne doit jamais avoir lieu que lorsque le dommage causé est appréciable à prix d'argent et que l'appelant qui a gain de cause peut demander des dommages-intérêts qui l'indemnisent de tout ce qu'il a perdu par suite de

l'exxécution provisoire. Pour le jugement, portant nomination d'un arbitre, il n'est pas possible qu'il en soit ainsi, puisque le dommage causé consisterait dans la perte de temps, perte qui d'ailleurs seraient partagée par toutes les parties et que l'appelant ne trouverait personne à qui il pût réclamer des dommages-intérêts.

Enfin, ne serait-il pas ridicule que les arbitres se constituassent, se missent à même de juger l'affaire, prononçassent même leur sentence, pour plus tard entendre déclarer leur travail inutile, parce qu'un d'entre eux, par suite de l'arrêt infirmatif du jugement portant nomination, était incapable de connaître des contestations? Il faut donc dire, avec la Cour royale de Paris, qu'il n'appartient pas aux arbitres de statuer jusqu'à ce que l'appel ait été vidé.

Instruction devant les arbitres.

ART. 56. Les parties remettent leurs pièces et mémoires aux arbitres, sans aucune formalité de justice.

1. Le législateur a voulu que tous ces débats entre associés fussent regardés comme de véritables comptes de famille, et qu'ils se terminassent avec le moins de frais possible. S'il avait exigé toutes les formalités de justice, onéreuses tant par les frais qu'elles entraînent que par le

temps qu'elles coûtent, l'institution des arbitrages forcés ne serait plus elle-même qu'une formalité judiciaire défavorable au commerce.

2. Si les parties veulent connaître les pièces et les mémoires déposés, elles peuvent en prendre connaissance auprès des arbitres. Leur signification serait inutilement coûteuse aux parties, aussi les co-associés sont-ils dispensés de les signifier.

ART. 57. L'associé en retard de remettre les pièces et mémoires, est sommé de le faire dans les dix jours.

ART. 58. Les arbitres

peuvent, suivant l'exigence des cas, proroger le délai pour la

production des pièces.

Jugement des arbitres.

ART. 59. S'il n'y a renouvellement de délai, ou si le nouveau délai est expiré, les arbitres jugent sur les seules pièces et mémoires remis.

1. Les arbitres, d'après l'article 1019 du Code de procédure civile, sont tenus de décider d'après les règles du droit, à moins qu'ils n'aient reçu des parties le pouvoir de prononcer comme amiables compositeurs.

Les dispositions de cet article s'appliquent à

plus forte raison aux arbitres forcés, qui, dans l'esprit du législateur, sont de véritables juges, tiennent leur mission de la loi, et constituent un tribunal suppléant, pour certaines matières, le tribunal de commerce.

2. Si les arbitres ne trouvaient pas les pièces et mémoires remis suffisans pour arrêter leur opi nion, et qu'ils crussent de leur devoir de consulter des témoins pour éclairer leur religion, auraient-ils le droit de forcer ces témoins à venir déposer? Non car ils n'ont aucune puissance publique. Ils ne peuvent même les faire assigner à comparaître devant eux, parce qu'ils n'ont sur eux aucun droit de juridiction. Ils sont juges, il est vrai, ils constituent un tribunal, mais seulement pour l'affaire soumise à leur décision. Hors de cette mission bornée, leur qualité n'est autre que celle de simples particuliers. Il faut alors recourir à l'autorité des juges ordinaires qui sauront bien contraindre les témoins de déposer.

3. Les arbitres ne sont pas tenus de statuer par un seul et même jugement sur toutes les contestations soumises à leur décision, ils peuvent, en prononçant définitivement sur plusieurs points litigieux, interloquer sur les autres. En effet, comme les juges ordinaires, ils procèdent dans les formes établies par la loi: comme eux donc, ils ont le droit de statuer sur les points qu'ils trouvent en état d'être dé

cidés, et ordonner sur les autres une plus ample instruction.

Dira-t-on qu'en rendant plusieurs sentences ils excèdent leur pouvoir, et font ce que leur acte de nomination ne leur donnait pas le droit de faire ?

La réponse est facile. L'acte fixait les points sur lesquels devait porter la sentence arbitrale: il fixait aussi le délai dans lequel la sentence serait rendue. Si les arbitres se conforment à ces deux clauses importantes, leur sentence est irréprochable. Il ne peut y avoir excès de pouvoir dans la division de leur jugement, puisque les articles jugés leur sont soumis comme les autres, et rendraient-ils autant de jugemens qu'il y a de points litigieux, on ne pourrait pas les attaquer, s'ils avaient prononcé sur toutes les contestations dans le délai fixé. (Arrêt de la Cour royale de Paris, Journal du Palais, 1815; t, 1, p. 111... Voir Merlin, verbo Arbitrage.)

4. Les arbitres ont le droit de faire, pour arriver à la découverte de la vérité, tous les actes d'instruction qu'ils jugent convenable de faire. Ils peuvent ordonner des expertises, des enquêtes, visiter les lieux, déférer le serment, entendre des témoins.

5. Tous les actes d'instructions, auxquels se livrent les arbitres, se font simultanément. Le plus jeune des arbitres rédige les procès-verbaux :

« PreviousContinue »