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variés de son bois pour la marine, à laquelle il fournit les pièces principales, telles que les étambots, les courbes de l'arrière, etc.; pour la charpente et le charronnage; pour faire des poteaux, des échalas et des perches à houblon qui ne se pourrissent pas en tcrre; des cercles qui durent plus long-temps que les autres, et supportent un plus grand degré d'étreinte ; des moulins et des meubles, et pour le chauffage où il produit un feu très-vif. Enfin, il rapporte qu'il a procuré une honnête fortune à des familles qui n'avoient d'autre héritage qu'un petit bois d'acacias. C'est dans le Mémoire même qu'il faut lire ces intéressans détails et les particularités que M. de Crevecœur a fournies sur cet arbre étonnant. Mais je n'en terminerai pas l'analyse sans faire connoître la méthode employée par les Américains pour former, dans une seule et même plantation, les différens arbres nécessaires à tous les usages. On les plante dans un terrain convenable, à six pieds de distance, en sortant de la pépinière. Au bout de trois ans, on en coupe alternativement quelques-uns dont on fait des cercles; deux ans après, on réitère cette coupe, on en fait des perches à houblon, et on, les fait servir à une infinité d'ouvrages propres à l'agriculture de ce pays. Cette double opération laisse enfin ceux qui restent, à vingt-quatre pieds de distance; alors, par le moyen d'une foible hart, on leur donne telle courbure que l'on veut. L'année suivante, on les blesse légèrement avec une hache, à cinq pieds de terre; la séve qui s'y porte avec abondance y forme bientôt une espèce de calus, et la partie inférieure augmente beaucoup. Alors l'acacia conservant cette nouvelle position, acquiert au bout de quelques années une double valeur, en devenant propre à former des courbes plus ou moins grosses pour la construction des vaisseaux.

M. le Sénateur François de Neufchateau recommande avec beaucoup de raison, la méthode que je viens de rapporter.

V. Extrait du Dictionnaire du Jardinier François, par M. FILASSIER.

Cet auteur établit la différence qui existe entre le véritable acacia qui croît en Egypte, et l'acacia d'Amérique que l'on a appelé faux acacia pseudoacacia. Jean ROBIN, démonstrateur du jardin du roi, à Paris, l'avoit rapporté du Nouveau Monde, avec beaucoup d'autres richesses botaniques, vers le commencement du dix-septième siècle. C'est de là que lui est venu so. nom de robinier, robinia.

Après avoir retracé les caractères botaniques de cet arbre, et les nombreux avantages de sa culture, il donne les préceptes suivans, sur la manière de le multiplier

«On peut, dit-il, multiplier le faux-acacia de deux manières, ou par ses graines ou par ses racines.

«Dans une planche de terre légère, mais substancielle, bien labourée, unie au râteau, exposée au levant ou au nord, et garantie du soleil du midi, on sème par rayons distans d'un pied 'l'un de l'autre, la graine, aussitôt qu'elle est mûre, c'est-à-dire, vers la fin de novembre (1).

«Après les semis, on couvre les rayons avec le râteau, et on met sur la terre une quantité de feuilles ou de litière sèches suffisante pour la garantir de la

(1) Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de semer en automne. Tous nos semis se font au printemps, et lèvent en peu de jours.

grande gelée, ou du moins pour en rendre l'effet moins sensible.

<«< Comme le gibier, le lapin surtout, est trèsfriand du jeune plant du faux acacia, venu de graines, et qu'il le dévore souvent, sans en laisser aucune trace, on ne doit le semer que dans un lieu

inaccessible à son avidité

« Dès le printemps suivant, la plupart des graines leveront, ce qu'elles ne feroient pas, si l'on attendoit cette saison pour les déposer dans la terre. Afin de favoriser et de hâter la germination, il sera bon de les arroser deux ou trois fois par semaine en mars et avril, si le temps est sec.

«Jusqu'à leur second printemps, il suffira de sarcler et de biner les élèves avec la serfouette à une dent; et la main de l'ouvrier, après avoir brisé la terre avec l'outil, la rapprochant de chaque rayon des plantes, pratiquera entre les deux rangs une petite rigole qui retiendra les eaux des mouillures, qu'il est utile de leur donner sept à huit fois par mois durant l'été, et celles des pluies, qui leur sont bien plus profitables.

«Au commencement d'avril, de l'année qui suivra celle des semis, dans un terrain substanciel et bien défoncé, on plantera les sujets en pépinière, par rayons écartés de deux pieds les uns des autres, et l'on donnera dix-huit pouces de distance à chaque jeune arbre. On arrosera une seule fois, mais abondamment, au moment de la plantation; et, après avoir uni le terrain avec le râteau, on le couvrira, avec de la litière sèche ou du feuillage à demi-consommé, pour le garantir du hâle. Toute la culture se bornera à biner tous les deux mois avec la serfouette à crochet, et l'on abandonne le reste à la

nature.

« Vers la fin de février, troisième année de leur végétation, après avoir labouré d'un demi- fer de bêche, la pépinière, il faut herbotter tous les plants à un pouce de la superficie du sol; ensuite on enlève les tiges amputées; on unit le terrain, et on le couvre avec une quantité suffisante de feuilles ou de litière sèches, , pour le préserver du hâle.

« A la fin de juin, on ne laisse subsister que la plus vigoureuse et la plus droite des branches qui ont poussé du tronc, et on ne lui retranche aucun de ses rameaux. Elle acquiert souvent dix à douze pieds de hauteur avant la fin de l'automne. On ne la dépouille de ses branches inférieures que durant l'hiver; on lui laisse les trois ou quatre qui forment sa tête; on se contente de les rogner à moitié, à la fin de février.

«

L'année suivante, qui est la quatrième de leur végétation, les sujets peuvent être plantés à demeure, en mars, dans les terrains frais et humides; à la chute de leur quatrième feuille, dans les terrains secs et médiocrement substanciels (1).

<«<< Il faut arrroser une seule fois, mais abondamment, en plantant chaque arbre, et suivre les procédés prescrits pour la plantation.

«Comme le faux acacia est très-cassant, si l'on est curieux qu'il garde sa forme, il faut chaque année diminuer de moitié les longs rameaux qu'il pousse. On doit retrancher tout-à-fait les inférieurs, si l'on veut lui faire acquérir de la hauteur (2).

« Le robinier fera bien partout où on voudra le placer; il parfumera les bosquets printanniers; il

(1) Quelle que soit la saison où on les plante, on doit préfére es terrains légers', et éviter les fonds humides. (2, Le précepte est très bon.

embellira le massif des grands arbres; isolé, il élèvera sa tête comme un souverain, au milieu des arbrisseaux à fleurs; et en alignement, il formera des allées qui flatteront plus d'un sens à-la-fois.

«On peut s'y prendre de deux manières pour le multiplier par les racines :

«Si l'arbre, que l'on veut soumettre à cette multiplication, a dix à douze ans, et qu'il soit sans voisins, on fait, vers la fin de mars, une tranchée circulaire à trois pieds au plus du tronc, et l'on creuse jusqu'à ce que l'on aperçoive les racines: la tranchée reste ouverte, et on laisse à l'air l'extrémité des racines, qui, dans l'année même, poussent des scions plus ou moins longs, que l'on soutient avec des tuteurs. Au commencement de septembre, on comble la tranchée, qui reste fermée jusqu'à la fin de mars. A cette époque, on détache les scions avec toutes les racines qui leur sont propres, sans offenser celles de l'arbre qui les a produits;. on les plante en pépinière, et on les traite comme les sujets en venus de semis; c'est-à-dire, qu'on les herbotte la seconde année de leur plantation, et qu'on ne les met en place qu'après leur quatrième feuille.

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« Si le terrain est bon, le robinier dont on cernera ainsi les racines, pourra, durant plusieurs années, donner de cette première manière un trèsgrand nombre d'élèves.

« L'autre manière consiste, lorsqu'on lève un robinier un peu fort, à laisser dans la terre un tiers de la longueur de ses racines, sans combler le trou de façon que les sommités des racines ne soient pas couvertes de plus d'un pouce ou deux : il en naît autant de sujets que l'on conduit comme les précédens.

Quoique le faux acacia ne soit pas difficile sur

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