Page images
PDF
EPUB

clercs de n'être jugés que par le tribunal ecclésiastique, même en matière profane, civile ou criminelle; et par conséquent la distinction du délit commun et du cas privilégié, le droit qu'ont eu les juges ecclésiastiques à l'amende honorable ou pécuniaire, ou à la satisfaction secrète, et celui qu'ils ont encore de faire arrêter et retenir en prison.

Dans les autres pays où la juridiction ecclésiastique est plus étendue, ceux qui en sont en possession peuvent et doivent la conserver comme leurs biens temporels et les autres priviléges; mais ils ne doivent pas confondre les accessoires avec l'essentiel de la juridiction ecclésiastique.

Si les ecclésiastiques voulaient étendre trop loin leurs priviléges, ce serait une entreprise sur la puissance temporelle; comme si étant officiers du roi, ils prétendaient se soustraire à sa juridiction, même dans le cas qui regarde l'exercice de leur charge, ou s'ils voulaient faire des assemblées sans la permission du roi. Il est donc raisonnable d'obtenir cette permission pour les assemblées générales, et pour celles qui regardent le temporel. On tient même à présent qu'aucuns conciles provinciaux (1) ne peuvent être assemblés dans le royaume sans la permission du roi.

(1) En France, le prince seul a droit de convoquer les évêques, et les évêques ne peuvent s'y assembler sans la permission du roi. Tous les conciles qui s'y sont tenus n'ont été assemblés que par les ordres et du consentement exprès du prince. Vers l'an 660, l'évêque de Cahors ayant été in–

On ne doit assembler les conciles nationaux que dans des occasions extraordinaires, à proportion comme les conciles généraux. Alors c'est au roi à les convoquer, parce qu'il n'y a que lui qui réunisse sous sa puissance tous les évêques de son royaume. Si on examine les exemples des conciles convoqués par les princes temporels, on trouvera qu'ils se rapportent tous à ce genre.

le

Les évêques, à cause du rang qu'ils tiennent dans

royaume, ne peuvent en sortir sans la permission du roi, quand même ils seraient mandés par le pape, parce que, comme prince étranger, il peut avoir des intérêts temporels opposés à ceux de la France.

Le roi a droit aussi d'empêcher les ecclésiastiques,

vité à un concile avec ses comprovinciaux, par son métropolitain, qui n'avait point obtenu du roi la permission d'assembler les évêques de sa province, Sigebert lui écrivit pour lui défendre de s'y trouver; parce qu'il ne convient point, dit ce prince, qu'il se tienne dans notre royaume aucun concile sans notre consentement. En 1612, l'archevêque d'Aix ayant convoqué dans la ville de Brignoles, le clergé de sa province, pour y tenir une assemblée, le parlement d'Aix s'y opposa, et l'assemblée fut sursise jusqu'à ce que le roi cût permis de la tenir. Les évêques de France du neuvième siècle étaient si pleinement convaincus que les conciles ne pouvaient se tenir sans la permission du roi, que, dans un concile de presque tous les évêques du royaume assemblés à Meaux, ils demandèrent au roi Charles-le-Chauve de permettre de tenir tous les ans deux, ou tout au moins, un concile provincial.

(Edit.)

comme les autres, de sortir du royaume (1) pour aller à Rome.

(1) La qualité de sujets et de citoyens que conservent les ministres de l'Eglise, ne leur permet point de sortir du royaume sans le commandement ou la permission du souverain. Hincmar, archevêque de Reims, dans sa lettre à Nicolas I, et dans celle à Adrien II, leur déclare qu'en France les métropolitains ou leurs suffragans n'ont point la liberté d'aller à Rome, ni en d'autres villes, sans l'ordre ou le consentement du prince. Boniface VIII ayant invité les prélats de France à un concile qu'il prétendait tenir, Philippe-leBel fit saisir les biens de tous les ecclésiastiques qui étaient sortis du royaume sans sa permission. Un des articles proposés au roi à Saint-Germain-en-Laye, et accordé en 1585, porte qu'un prélat ne peut s'absenter du royaume sans congé par écrit de Sa Majesté, sur peine de saisie de son temporel, et de perte des fruits de son bénéfice pendant son absence. Cette règle est si précise, que les évêques même qui ont une partie de leur diocèse hors du royaume, ne peuvent sortir sans avoir obtenu la permission du roi. En 1613, l'archevêque de Lyon ayant dessein de visiter son diocèse, dont une portion est située dans le comté de Bourgogne, dépendant alors de l'Espagne, la reine régente du royaume, mère de Louis XIII, lui accorda, par sa lettre du 26 juillet, la permission de sortir. La règle exposée dans cet article s'étend aux régaliens, qui ne peuvent sortir du royaume pour aller à Rome, sous prétexte même d'assister à leurs chapitres généraux, saus la permission du roi. Le second concile de Châlons reconnaissait aussi qu'il appartenait au roi de régler les pélerinages, non pour décider si Dieu a plus agréable d'être prié dans un lieu que dans un autre, ce qui serait superstitieux, mais pour l'intérêt de l'Etat, à cause des assemblées.

Il n'est permis aux étrangers ni de posséder des bénéfices en France, ni d'être supérieurs de monastères, ni de quelqu'autre communauté que ce soit; et parce que les généraux de quelques ordres religieux, comme des mendians, résident à Rome ou en d'autres pays étrangers, ils sont obligés d'avoir en France chacun un vicaire-général qui soit naturel français; mais il ne laisse pas d'y avoir un commerce continuel de lettres entre les réguliers de chaque ordre, en quelque pays qu'ils soient; ce qui est nécessaire pour entretenir entre eux l'union et la subordination.

Le prince a intérêt de conserver les biens temporels; c'est pourquoi les gens du roi doivent veiller à ce que les bénéficiers fassent les réparations nécessaires, et ne dissipent point les biens dont ils n'ont que l'usufruit; c'est pourquoi on ne souffre point que le pape fasse aucune levée de deniers sur le clergé, soit comme emprunt, ou autrement, si ce n'est de l'autorité du roi et du consentement du clergé (1); encore moins qu'il permette ou qu'il or

illicites qui peuvent se faire sous ce prétexte dans le royaume, et de l'occasion que ces voyages peuvent donner de le desservir, ou d'entretenir commerce avec des royaumes suspects. Par cette raison, Charles VI défendit les pélerinages à Rome pendant la soustraction de l'obéissance. (Edit.)

(1) On voit, par une lettre de Philippe - Auguste aux églises de la métropole de Sens, datée du mois de mars 1210, qu'il accorda une aide sur le clergé de France à Innocent III,

donne l'aliénation des biens ecclésiastiques, sinon du consentement du roi et du clergé, et avec les conditions requises par les lois du royaume. On ne souffrirait pas non plus que le pape levât des deniers sur le peuple, sous prétexte d'aumônes pour des indulgences; mais cela n'est guère à craindre depuis le concile de Trente, qui veut que toutes les indulgences s'accordent gratuitement.

Nous ne croyons pas non plus que le pape puisse accorder aucune grâce qui s'étende aux droits temporels; comme de légitimer des bâtards (1), ou resti

pour la guerre que celui-ci avait contre l'empereur Othon IV. Boniface VIII imposa en 1295, sur les Eglises de France, une décime centième, et voulut s'approprier certains legs; il avait déjà commis deux personnes pour en faire la perception, mais Philippe-le-Bel ne le voulut pas souffrir. Le pape ayant consenti que cet argent demeurât en séquestre, le roi défendit à ceux qui en étaient dépositaires d'en rien donner que par ses ordres. Pendant que le saint Siége fut à Avignon, les papes, traitant de guerres saintes celles qu'ils avaient contre leurs compétiteurs, tentèrent plusieurs fois de lever des décimes en France; mais ce fut souvent sans succès, ou, s'ils en obtinrent quelqu'une, ce ne fut que par permission du roi. (Edit.)

(1) Un nommé Jean Navarre, que le pape avait créé comte palatin, ayant entrepris, en vertu de la commission du pape, d'instituer des notaires et de légitimer des bátards dans la province de Languedoc, le parlement de Toulouse, sur la requête du procureur-général, rendit un arrêt le 22 mai de l'an 1641, par lequel il déclara les créations des notaires et les légitimations nulles, contraires aux droits du roi, et attentatoires

« PreviousContinue »