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l'on pouvait étendre le concordat à ces deux provinces. Le Mémoire fut envoyé à l'évêque de Mâcon, ambassadeur du roi à Rome : il représenta au pape que la Provence ayant été réunie à la France du temps de Louis XI, elle en faisait partie lorsque le concordat fut conclu; qu'elle était donc comprise sous le terme de royaume, si souvent répété dans ce traité; que suivant les mêmes principes, la Bretagne étant devenue française, elle devait être aussi régie par le concordat.

Le pape crut aplanir ces difficultés en offrant au roi un indult: l'ambassadeur répondit, d'après Brulart, qui avait prévu cette offre, que le roi, en l'acceptant, reconnaîtrait la Provence et la Bretagne ne seraient point de son royaume; ce qui serait contraire à sa souveraineté sur ces deux provinces.

que

Cependant Henri II, successeur de François I, fit un édit qui conservait au saint Siége, dans la Bretagne et la Provence, la disposition des bénéfices dont il jouissait avant la réunion de ces deux provinces à la couronne de France. Les Etats de Bretagne voulurent mettre des modifications à cet édit; mais les lettres de jussion, dit M. d'Héricourt, rendirent inutiles toutes les résolutions qu'on avait prises dans ce duché (1).

Les rois de France ont nommé depuis aux évêchés et aux abbayes de ces deux provinces, en vertu d'un indult qui se renouvelle à la succession de chaque

(1) D'Héricourt, Lois eccl.

souverain (1). Cet indult passe aujourd'hui pour être de droit commun, et l'on croit en France que le pape ne peut le refuser. Henri IV ne le crut pas nécessaire, puisqu'avant de l'avoir reçu il nomma le cardinal d'Ossat à l'évêché de Rennes, et le pape fut obligé de dissimuler en faveur d'un prince dont il connaissait le mérite (2).

Henri II, fils et successeur de François Ier, fit observer le concordat comme étant une ordonnance du royaume. Par son édit du 23 de juillet 1527, il attribua au grand - conseil la connaissance des procès des bénéfices qui sont à la nomination, à la collation et à la présentation du roi et de son grand-aumônier; il excepta néanmoins de cette attribution les bénéfices

(1) Roussel, de Jurisp. pont., 1. 2, c. 7, n. 45.

(2) M. Pinson, dans son Traité des régales, t. 1, assure que Léon X étendit par un indult l'exécution du concordat au duché de Bretagne et au comté de Provence ; que Henri Il s'étant rendu maître des Etats de Savoie et de Piémont, Jules III accorda au roi un indult pour nommer aux bénéfices consistoriaux de ces deux provinces; que la France les ayant rendus au duc de Savoie, ce prince a joui de cet indult, comme le roi de France en jouit dans les comtés de Bresse, de Bugey, de Valromey et le pays de Gex, qui furent cédés en 1601 à la France, par le duc de Savoie, pour le marquisat de Saluces.

Les papes ont aussi accordé des indults au roi Louis XIV, pour les bénéfices situés dans les Etats qui lui ont été cédés par les traités de Munster, des Pyrénées, d'Aix-la-Chapelle et de Nimègue.

en régale, dont les procès ont toujours été jugés par les parlemens.

La bulle de Clément VII qui suspendait tous les priviléges d'élire fut confirmée : cette suspension a passé ensuite pour une abrogation, contre laquelle les chapitres et les abbayes n'ont pu revenir (1).

François II fit un édit qui renvoyait les causes de religion aux juges d'Eglise. Le Parlement l'ayant examiné, ordonna qu'il serait fait au roi des remontrances, dont voici la substance. On y supplie le roi d'observer que le plus sûr moyen d'extirper les hérésies qui infectaient le royaume, était de pourvoir les prélatures de personnes de mérite et capables de les remplir; que depuis le concordat, la religion était beaucoup diminuée; que le clergé avait besoin d'être réformé; et que pour y réussir, il fallait remettre les choses dans l'état où elles étaient sous la pragmatique sanction; que la nomination aux monastères des filles n'était point comprise dans le concordat; que les peuples étaient sans pasteurs, les abbayes sans supérieurs réguliers, les fondations abolies, les hôpitaux mal entretenus; que Rome, en un mot, recevait plus d'argent de la France qu'il n'en revenait au roi, les charges ordinaires acquittées; qu'enfin le roi étant le véritable protecteur de l'Eglise de son royaume, il était chargé de veiller à son gouvernement et d'en réformer les abus.

(1) Maximes du droit canon, par M. du Bois, p. 408, édit. 1681.

Le Parlement dit, dans ses remontrances, que les monastères des religieuses n'étaient point compris dans le concordat; et il l'assure, parce qu'il n'y est fait mention que des monastères, et que dans les matières odieuses, comme le prétendait du Moulin, le masculin ne comprend point le féminin. D'ailleurs, ajoutèrent les jurisconsultes du seizième et du dix-septième siècle, le roi n'a, aux termes du concordat, que la nomination des abbayes où l'on observe, pour l'élection des supérieurs, la forme du chapitre quia propter. Or, ce n'est point ce chapitre qui sert de règle dans l'élection des abbesses, c'est le chapitre indemnitatibus du Sexte.

Quand François Ir voulut nommer aux abbayes de filles, le Parlement jugea contre les religieuses qui avaient obtenu du roi des lettres de nomination; cependant on reçut à Rome la nomination faite par le roi, et il y eut des bulles expédiées avec la clause : Pro quá rex christianissimus scripsit. Paul III, au lieu de cette clause, fit mettre celle-ci : Du consentement de la plus grande partie des religieuses du monastère; ensuite on l'a insérée dans toutes les bulles: c'est un style qui n'empêche point l'exécution des brevets du roi. Henri III fit sur ce sujet une déclaration verbale, qui fut enregistrée au grandconseil en vertu de cette déclaration, on a jugé en faveur d'une religieuse qui avait obtenu la nomination du roi.

Les officiers de la cour de Rome se contentèrent de la clause de Paul III, jusqu'au pontificat d'Alexan

dre VII. Ils l'augmentèrent alors de l'addition suivante: Dummodò dicti monasterii moniales capitulariter congregatæ prò duabus saltem ex tribus partibus, et per secreta suffragia in personam personam N......... spontè et liberè nullis exterorum favoribus seu officiis inducta consentiant (1).

On a même ajouté, sous quelques papes : Quodque in dicto monasterio non adsint moniales habiles ad regendum dicti abbatissatus officium. Cette clause et les précédentes sont regardées par les Français comme un style de la cour romaine, auquel on n'a point d'égard : Pro non scriptis habentur, vitiantur et non vitiant. Le roi, pour entretenir la paix avec le saint Siége, tolère ce style; et s'il veut bien y déférer, ce n'est point une marque de sujétion, mais un témoignage de sa piété.

Plus de quarante-quatre années écoulées depuis l'abrogation de la pragmatique, n'avaient pas ralenti l'ardeur des Français pour l'observation de cette ordonnance: leur zèle éclata avec de nouvelles forces dans les états-généraux assemblés à Orléans en 1560. Le clergé, la noblesse et le tiers - état demandèrent que l'on pourvût aux bénéfices selon les anciens canons; que les élections fussent rétablies, et que l'on abolît les annates (2).

(1) Tome 6 des nouveaux Mémoires du Clergé, col. 1006, 1007.

(2) Quoique le concordat n'exprime pas l'obligation de payer l'annate, cependant le titre de mandatis apostolicis a

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