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un mandat, une société, un louage de service, ou des soins à donner à la personne du créancier. (Art. 2003; 1865, 3°; 1795.)

45. On est aussi censé avoir stipulé pour ses ayants cause, c'est-à-dire, les droits que nous avons stipulés relativement à une chose qui nous appartient profitent aussi au successeur à titre particulier à cette chose, peu importe que la succession soit à titre onéreux ou à titre gratuit. Pothier, n° 67, 68.

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46. En vertu du principe énoncé au no 44, les obligations passent activement et passivement aux héritiers, à chacun en proportion de sa part héréditaire. Mais pourrait-on stipuler ou promettre pour un seul ou pour quelques-uns de ses héritiers? Les jurisconsultes romains semblent avoir été en désaccord sur cette question. D'après les fr. 56, § 1 et 137, § 8, D. de verborum obligationibus, 45, 1, on ne peut pas promettre pour un seul de ses héritiers, de manière à le charger seul de la dette; mais d'après le fr. 33, D. de pactis, 2, 14, on peut stipuler la libération au profit d'un seul de ses héritiers.

En principe, on ne peut stipuler ou promettre pour ses héritiers qu'en qualité d'héritiers. S'ils sont plusieurs, ils ne représentent le défunt que chacun pour une partie; pour le surplus, ils sont tiers. On ne peut donc stipuler ou promettre pour un seul et lui attribuer seul et à l'exclusion des autres, soit le profit de la stipulation soit la charge de la promesse. Pothier, no 64, 65; Marcadé, sur l'art. 1122.

II. A L'ÉGARD DES TIERS. (Art. 1119-1121; 1165.)

47. Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes; elles ne peuvent ni être opposées aux tiers, ni être invoquées par eux. (Art. 1165.) On ne peut contracter par son consentement que pour soi-même ; ma volonté ne peut pas lier un tiers, comme elle ne peut pas lui faire acquérir. (Art. 1119.) Donc, l'obligation contractée pour un tiers, sans mandat de sa part, ne lie ni ce tiers, ni celui qui a contracté, s'il ne s'est obligé pour autrui qu'en son propre nom.

48. Toutefois, la promesse faite pour un tiers a de l'effet, lorsqu'on s'est porté fort pour lui ou lorsqu'on s'est engagé à rapporter sa ratification. (Art. 1120.) Le tiers n'est pas lié par cette promesse, mais elle oblige le promettant à des dommages-intérêts, si le tiers refuse d'exécuter l'engagement. La question de savoir si celui qui a promis pour un tiers a eu l'intention de se porter fort pour lui, doit ètre décidée d'après les circonstances. Mais le fait seul de contracter

en son propre nom pour autrui n'a pas la signification que le promettant se porte fort; autrement la règle générale de l'article 1119, qui déclare un semblable engagement nul, ne serait plus qu'une exception. Demante, Programme du droit civil, n° 546. Il faut admettre que le promettant s'est porté fort pour le tiers, lorsqu'il a fait sa promesse sous une clause pénale.

Si le tiers pour lequel on s'est porté fort a ratifié l'engagement, le promettant est libéré, quand même ce tiers refuserait de l'exécuter; car le créancier a alors une action contre le tiers.

49. En règle générale, on ne peut pas stipuler en faveur d'un tiers; le tiers ne peut pas se prévaloir d'une semblable stipulation, parce que sa volonté n'y a pas concouru, et le stipulant ne peut pas en demander l'exécution, ni pour lui-même, parce que telle n'était pas l'intention des contractants, ni pour le tiers, parce que le stipulant n'y a aucun intérêt.

Toutefois, d'après l'ancienne jurisprudence française, conforme au droit romain de Justinien, on pouvait stipuler au profit d'un tiers dans deux cas 1° indirectement, en faisant une stipulation pour soimême sous la condition (pour le cas) que le promettant ne ferait pas une prestation au profit d'un tiers; par exemple, me promettez-vous dix, si vous ne donnez pas telle chose à Pierre ? § 19, J. de inutilibus stipulationibus, 5, 19; dans ce cas, le tiers n'avait pas d'action, let stipulant pouvait demander l'exécution de l'obligation contractée par le débiteur pour le cas d'inaccomplissement de la condition; 2° directement, lorsqu'on faisait une donation en imposant au donataire une prestation au profit d'un tiers (donatio sub modo); en ce cas le tiers avait contre le donataire une action utile en exécution de la prestation. L. 3, C. de donationibus quæ sub modo, 8, 55. Pothier, nos 70-72.

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Le code a maintenu ces deux cas de validité d'une stipulation au profit d'un tiers, en disant dans l'article 1121 qu'on peut stipuler au profit d'un tiers, lorsque telle est la condition d'une stipulation que l'on fait pour soi-même ou d'une donation que l'on fait à un

autre. »

50. Dans l'ancienne jurisprudence, il y avait controverse sur la question de savoir si celui qui avait fait une donation à la charge de faire une prestation à un tiers, pouvait libérer le donataire de cette charge, et ainsi en enlever le bénéfice au tiers, sans son intervention. Pothier, n° 73. Le code a résolu la question dans l'art. 1121, al. 2;

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Celui qui a fait cette stipulation, ne peut plus la révoquer, si le tiers a déclaré vouloir en profiter. Dans ce cas, le contrat est lié entre les trois parties par le concours des trois volontés. Discours du tribun Mouricault au corps législatif, no 8 (Locré, XII, 554-555). Par la même raison, le tiers a alors une action directe en exécution contre le promettant.

CHAPITRE III.

DE L'EFFET DES OBLIGATIONS.

SECTION PREMIÈRE.

DISPOSITIONS GÉNÉRALES.

51. Dans cette section (art. 1134-1135), le code ne parle que de l'effet des conventions; dont il a été traité aux no 42-50. Mais les règles suivantes (art. 1156-1155) s'occupent de l'effet des obligations, sans distinguer si elles proviennent d'une convention ou d'une autre

cause.

52. Le débiteur doit exécuter l'obligation; il doit prester l'objet dù au lieu et au temps convenus. L'inexécution totale ou partielle, ou l'exécution tardive de l'obligation peut avoir des effets différents, suivant les causes dont l'une ou l'autre provient. Ces effets sont les conséquences accidentelles (appelées aussi accessoires par quelques jurisconsultes) des obligations.

Avant de déterminer les effets de l'inexécution des obligations en général, le code donne quelques règles particulières sur les obligations de donner, de faire ou de ne pas faire.

SECTION II.

DE L'OBLIGATION DE DONNER. (Art. 1136-1144.)

53. --Le mot donner doit être pris ici dans son sens le plus général; il est synonyme de délivrer. Ainsi, l'obligation de donner dont il s'agit ici comprend, non-seulement l'obligation de transférer à une personne la propriété (donner en sens restreint), ou l'usage ou la pos

session d'une chose, mais aussi celle de restituer la chose à son propriétaire, par exemple, l'obligation du locataire à la fin du bail.

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54. — L'obligation de donner peut avoir pour objet un corps certain et déterminé (species), ou une chose déterminée seulement quant à son espèce (chose fongible, genus). L'obligation de donner comprend l'obligation de livrer, c'est-à-dire de faire ce qui est nécessaire pour la mettre en la puissance et possession du créancier, et de veiller, jusqu'à ce qu'elle soit livrée, à la conservation de la chose, en soumettant celui qui en est chargé à y apporter tous les soins d'un bon père de famille. (Art. 1156, 1137.) .

55. — L'obligation de donner diffère de l'obligation de faire ou de ne pas faire, en ce qu'elle ne se résout pas simplement en dommagesintérêts en cas d'inexécution, mais que le créancier peut toujours demander l'exécution même de l'obligation et la mise en possession de la chose, lorsqu'elle est certaine et déterminée. Si elle n'est déterminée que quant à son espèce, le créancier peut se faire autoriser à se procurer la chose aux frais du débiteur. (Arg. art. 1144 )

Si l'obligation de délivrer procède d'un titre translatif de propriété, elle s'accomplit de la manière prescrite aux art. 1604 et suiv. du C. civ.; dans les autres cas, de la manière déterminée par les règles spéciales à la convention que les parties ont conclue.

56. L'obligation de livrer une chose est parfaite par le seul consentement des parties contractantes. (Art. 1138.) Lorsque l'obligation de livrer procède d'une convention translative de propriété et qu'elle a pour objet un corps certain et déterminé, la propriété est transmise au créancier par le seul effet du contrat, sans tradition ou mise en possession. (Art. 711, 1138, 1583.) Ce principe est une innovation du code civil, qui a été introduite d'une manière presque inaperçue et sans discussion. Sous l'ancien droit, la propriété ne se transmettait que par la tradition, comme en droit romain. V. titre XVIII.

Si la chose, qui fait l'objet de l'obligation, n'est déterminée que par son espèce, la propriété n'en est transmise au créancier qu'au moment de la livraison, ou lorsque les parties sont d'accord sur l'individualité de la chose.

La règle que la propriété est transmise par le seul effet des conventions, souffre des modifications à l'égard des tiers lorsque l'objet du contrat est un immeuble. (Art. 1140.) Loi du 16 décembre 1851, art. 1; infra, titre XVIII.

Si l'objet du contrat est un meuble corporel, la propriété en est

transmise par le seul effet de la convention, mais le premier acquéreur ne peut pas le revendiquer contre un second acquéreur de bonne foi, mis en possession. (Art. 1141.) C'est là une conséquence de la règle qu'en fait de meubles, la possession vaut titre. (Art. 2279.) « On a dû considérer l'intérêt du tiers, quand même son titre serait postérieur en date; la bonne foi de cet acquéreur, la nécessité de maintenir la circulation libre des objets mobiliers, la difficulté de les suivre et de les reconnaître dans la main de tierces personnes, ont dù faire donner la préférence à celui qui est en possession, quoiqu'il y ait un titre antérieur au sien. Bigot-Préameneu dans l'Exposé de motifs, no 36 (Locré, XII, 328).

»

La disposition de l'art. 1141 ne s'applique pas seulement à la vente, mais à toutes les conventions par lesquelles on transmet des droits sur des objets mobiliers.

57. Lorsque l'objet de l'obligation est un corps certain et déterminé, il est aux risques du créancier dès le moment où l'obligation a été contractée, comme en droit romain. En droit français, la chose est aux risques du créancier par une raison de plus, c'est parce que le créancier en est déjà propriétaire (casum sentit dominus). L'article 1158, qui énonce ce principe, n'est pas exact, en disant que la chose est aux risques du créancier, « dès l'instant où elle a dû être livrée. » Elle est aux risques du créancier, dès que le contrat a été fait ou dès que la chose a été déterminée, quand même elle ne devrait être livrée qu'après un délai.

SECTION III.,

DE L'OBLIGATION DE FAIRE OU DE NE PAS FAIRE. (Art. 1142-1145.)

58. Nul ne peut être contraint à faire quelque chose; c'est une loi de la nature autant qu'un précepte juridique. (Nemo ad actum cogi potest.) La contrainte à cet effet ne peut être directe ni indirecte; ainsi le juge, en règle générale, ne peut pas prononcer la contrainte par corps ou des condamnations pécuniaires excédant les dommagesintérêts légalement dus, pour forcer indirectement le débiteur à l'accomplissement d'une obligation de faire ou de ne pas faire. Une semblable obligation se réduit, en cas d'inexécution, à des dommagesintérêts, c'est-à-dire, dans ce cas, le créancier n'a que le droit de réclamer la réparation du dommage qu'il a souffert. (Art. 1142.)

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