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4. DES SUCCESSIONS EN PARTIE MOBILIÈRES ET EN PARTIE IMMOBILIères.

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(Art. 1414, 1417.)

619. Lorsque la succession échue à l'un des époux est en partie mobilière et en partie immobilière, les dettes dont elle est grevée ne sont à la charge de la communauté que jusqu'à concurrence de la portion contributoire du mobilier dans les dettes, eu égard à la valeur de ce mobilier comparée à celle des immeubles. Cette portion contributoire se règle d'après l'inventaire auquel le mari doit faire procéder, soit de son chef, si la succession le concerne principalement, soit comme dirigeant et autorisant les actions de sa femme, s'il s'agit d'une succession à elle échue. (Art. 1414.)

Dans ce cas, il y a de fait deux successions l'une, composée d'effets mobiliers; elle tombe dans la communauté; l'autre, composée d'immeubles; elle demeure propre à l'époux auquel elle est échue. On fait une seule masse de toutes les dettes, mobilières ou immobilières, sans distinction de leur origine. L'époux et la communauté supportent, dans les dettes, chacun une part proportionnée à la valeur de l'actif qu'il reçoit. Cette valeur doit être constatée par inventaire. Il faut distinguer :

620.1° Un inventaire exact et fidèle a été fait. Que la succession soit échue au mari ou à la femme, lorsque celle-ci l'a acceptée du consentement de son mari, l'inventaire ne fait pas obstacle à ce que les créanciers de cette succession poursuivent leur payement, nonseulement sur les biens personnels de l'époux, à qui elle est échue, mais aussi sur les biens de la communauté, par dérogation à la règle de l'article 1413 expliquée au n° 618; le tout sauf les récompenses respectives (art. 1416, al. 1). Les dettes peuvent alors être poursuivies sur les biens de la communauté pour l'intégralité, et sans distinguer quelle est la portion contributoire du mobilier ou des immeubles. L'article 1414, qui prescrit cette répartition, ne règle que les rapports entre les époux, mais non pas les rapports entre les créanciers et la communauté ou l'un des époux. Il serait difficile et onéreux pour les créanciers de répartir leurs actions d'après la part contributoire fixée dans l'art. 1414; d'autant plus qu'ils ne doivent pas être appelés à assister à l'inventaire que le mari doit faire conformément à l'article 1414, al. 2.

Si la succession n'a été acceptée par la femme que comme autorisée en justice au refus du mari, les créanciers ne peuvent poursuivre leur payement que sur les biens tant mobiliers qu'immobiliers de ladite

succession, et en cas d'insuffisance, sur la nue propriété des autres biens personnels de la femme. (Art. 1417.) V. supra, no 614 4o. 621.- 2 Il n'y a pas eu d'inventaire. Il faut examiner les conséquences de cette omission sous deux points de vue.

A. Par rapport aux créanciers. Dans tous les cas, c'est-à-dire que la succession soit échue au mari ou à la femme, et que celle-ci l'ait acceptée avec le consentement du mari, ou seulement comme autorisée en justice, les créanciers de la succession peuvent poursuivre leur payement sur les biens personnels de la femme, sur ceux de la communauté et sur les propres du mari; car ce dernier est seul en faute d'avoir négligé de faire l'inventaire pour empêcher la confusion du mobilier avec celui de la communauté. N'ayant pris aucune précaution pour assurer les effets de son refus d'autorisation, il est censé l'avoir donnée, et doit en supporter les conséquences (art. 1416, al. 2; arg., art. 1417).

B. Par rapport à la femme. Dans tous les cas où le défaut d'inventaire préjudicie à la femme, elle ou ses héritiers peuvent, lors de la dissolution de la communauté, poursuivre les récompenses de droit, et même faire preuve, tant par titres et papiers domestiques, que par témoins, et au besoin par la commune renommée, de la consistance et valeur du mobilier non inventorié. Le mari n'est jamais recevable à faire cette preuve. (Art. 1415.) V. supra, no 380.

Exemple le mari a recueilli une succession comprenant pour 80,000 francs d'immeubles et pour 20,000 francs de valeurs mobilières et grevée en tout de 30,000 francs de dettes, que la communauté a payées. A la dissolution de la communauté, il prétend que celle-ci a recueilli 50,000 francs, qu'elle a donc dù supporter la moitié des dettes, soit 15,000 francs; la femme, ou ses héritiers peuvent prouver, par tous les moyens autorisés par l'art. 1415, que la portion des meubles ne s'élevait qu'à 20,000 francs; que la communauté ne doit done supporter que les deux dixièmes des dettes, soit 6,000 francs. 622. Si l'époux auquel une succession mixte est échue, était créancier ou débiteur personnel de cette succession, la confusion s'opérerait jusqu'à concurrence de la valeur des immeubles de cette succession, comparée à la valeur des meubles; elle ne s'opère pas jusqu'à concurrence de la valeur mobilière. V. no 616.

C. Des dettes contractées pendant le mariage. (Art. 1409, nos 2 et 3.)

625. La communauté se compose passivement des dettes, tant

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en capitaux qu'arrérages ou intérêts, contractées par le mari pendant la communauté, ou par la femme du consentement du mari, sauf la récompense dans les cas où elle a lieu. (Art. 1409, 2°.) Cette règle s'applique à toutes les dettes contractées pendant le mariage, n'importe que la communauté en ait profité ou non (et sauf récompense en ce dernier cas) et quelle que soit l'origine de la dette. Le mari, en sa qualité de maître et seigneur de la communauté, a le pouvoir de l'obliger et de grever les biens qui en dépendent.

Par la même raison, et à titre de dettes contractées pendant le mariage, la communauté supporte les arrérages et intérêts seulement des rentes ou dettes passives qui sont personnelles aux deux époux. (Art. 1409, 5°.) Cette règle est corrélative à celle de l'art. 1401, n° 2, qui fait entrer dans la communauté les fruits, revenus et intérêts des biens propres aux deux époux.

D. Des charges de jouissance des biens propres.

624. La communauté doit supporter les réparations usufructuaires des immeubles qui n'entrent point en communauté. (Article 1409, 4o) Cette règle est aussi corrélative à celle de l'article 1401, no 2 (supra, no 559), qui attribue à la communauté la jouissance des propres; cujus est commodum, ejus est incommodum. La rédaction du n° 4 de l'article 1409 n'exprime qu'incomplétement la pensée du législateur; car la communauté est aussi tenue des autres charges qui, dans l'usage, sont censées charges des fruits, et non-seulement des réparations usufruitières (art. 605-609).

E. Des charges du mariage. (Art. 1409, no 5.)

625. La communauté doit supporter les aliments des époux, les frais d'éducation et d'entretien des enfants communs et toute autre charge du mariage.

Les frais d'entretien et d'éducation des enfants que l'un des époux a eus d'un précédent mariage ou de ses enfants naturels reconnus, sont aussi à la charge de la communauté, non pas parce qu'ils constituent une charge du mariage dans le sens du no 5 de l'article 1409, mais parce qu'ils forment une dette mobilière contractée avant le mariage. Si ces enfants ont des biens personnels, la dette de la communauté n'est que subsidiaire, et les frais d'entretien doivent être prélevés sur les revenus de leurs biens personnels.

626. La communauté est aussi tenue des aliments que l'un ou l'autre des époux doit à son père, à sa mère, ou à un autre ascendant, ainsi qu'à leur beau-père ou belle-mère. C'est une obligation qui, quant au gendre et à la belle-fille, naît du mariage (art. 205, 206).

F. Autres dettes de la communauté.

627. Aux cinq catégories des dettes de la communauté, mentionnées aux no 608-626, on doit en ajouter deux autres : 1o les frais de partage et de liquidation de la communauté (art. 1482); 2° les dettes qui procèdent de ce que la communauté a tiré un profit des biens personnels à l'un des époux, ou du prix de ces biens (art. 1433, arg., art. 1437). La communauté doit alors récompense.

II. DES DETTES PERSONNELLES OU PROPRES AUX ÉPOUX.

628. Les dettes propres et personnelles à chacun des époux, bien que le payement de la plupart de ces dettes puisse être poursuivi sur les biens de la communauté, sont : 1° les dettes immobilières dont chacun des époux était grevé au jour de la célébration du mariage (arg., art. 1409, no 1); 2o les dettes mobilières relatives aux immeubles propres à l'un ou à l'autre des époux (art. 1409, no 1 et supra, n° 613); 3° les dettes des successions immobilières échues à l'un des époux pendant le mariage (art. 1412-1417); 4° les dettes des successions ou donations mobilières exclues de la communauté (art. 1401, no 1); 5o les charges sous lesquelles le père, la mère ou un autre ascendant a cédé un immeuble à l'un des époux (art. 1406); 6° les obligations résultant d'un acte d'aliénation d'un propre de l'un des époux (art. 1452); 7° la dot fournie sur les biens de la communauté par l'un des époux aux enfants qu'il avait d'un précédent mariage (arg., article 1422); 8° les amendes et autres condamnatious criminelles encourues par l'un des époux (art. 1424-1425); 9° quant à la femme particulièrement, elle doit supporter personnellement les dettes qu'elle avait contractées avant le mariage et qui ne sont pas constatées de la manière prescrite à l'art. 1410, et toutes les dettes qu'elle a contractées pendant le mariage, comme autorisée en justice au refus du mari de l'autoriser, à moins qu'elle ne contracte comme marchande publique et pour le fait de son commerce (art. 1426).

III. SUR QUELS BIENS LES DETTES DE LA COMMUNAUTÉ
PEUVENT ÊTRE POURSUIVIES.

629. Il est évident que toutes les dettes de la communauté peuvent toujours être poursuivies sur tous les biens de la communauté ; mais, en outre, elles peuvent être poursuivies sur les biens propres et personnels des époux, selon la distinction suivante :

1o Les obligations résultant des actes du mari sont, relativement à son patrimoine propre, les mêmes que s'il n'existait pas de communauté. Toutes les dettes de la communauté, même celles qui y sont entrées du chef de la femme, peuvent, pendant le mariage, être poursuivies tant sur les biens propres au mari que sur les biens dépendants de la communauté. (Art. 1484.)

2o Les biens propres de la femme, tant pour le capital que pour les revenus, sont tenus des dettes de la communauté dans ces deux cas : a) des dettes que la femme avait avant le mariage, et dont la date est prouvée conformément à l'art. 1410; b) des dettes que la femme a contractées pendant le mariage, avec l'autorisation de son mari, soit comme obligée principale, soit comme caution, ou solidairement avec son mari (art. 1419, 1431).

SECTION II.

DE L'ADMINISTRATION DE LA COMMUNAUTÉ ET DE L'EFFET DES ACTES DE L'UN OU DE L'AUTRE ÉPOUX RELATIVEMENT A LA SOCIÉTÉ CONJUGALE.

630. Cette section ne traite pas seulement de l'administration de la communauté et de l'effet des actes des époux pour la société coujugale, mais aussi de l'administration des biens personnels de la femme et des indemnités et récompenses. Il faut donc la diviser en trois parties, dont la première a pour objet l'administration de la communauté ; la deuxième, l'administration des biens personnels de la femme; la troisième, les indemnités et récompenses.

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631. La règle que le mari est chef de la communauté et qu'il en a seul l'administration, est un principe d'ordre public auquel les époux

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