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rectement par un délit. D'ailleurs, l'article 1460 a une nature toute pénale, et il n'y a pas de restitution contre la peine. Troplong, no 1567. Le divertissement et le recel ont encore d'autres conséquences. Voy. articles 1477 et 1485.

733. La loi ne prescrit aucun délai pour accepter la communauté. L'acceptation peut donc avoir lieu pendant le délai ordinaire pour l'exercice des droits, c'est-à-dire pendant trente ans depuis le jour de la dissolution de la communauté, et plus longtemps encore, si aucun autre ne s'en est mis en possession (art. 2262, 789).

Il y a exception pour la femme divorcée, ou séparée de corps, ou séparée de biens. Elle est censée avoir renoncé à la communauté, si elle ne l'a pas acceptée dans le délai de trois mois et quarante jours après le divorce ou le jugement de séparation passé en force de chose jugée. (Art. 1465; code de proc., art. 174.)

Pendant toute la durée du délai, la femme divorcée ou séparée reste sous le droit commun de l'article 1454; elle peut accepter expressément ou tacitement.

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DE LA RENONCIATION, DE SES FORMES ET CONDITIONS.

734. En principe, la renonciation à la communauté ne peut se faire qu'expressément, par une déclaration formelle (v. no 738). Exceptionnellement la renonciation est tacite ou présumée en cas de divorce et en cas de séparation de corps ou de biens. (Art. 1463 et infra, no 740.)

A. De la renonciation expresse.

755. D'après l'article 237 de la coutume de Paris, la femme, pour pouvoir renoncer à la communauté, était tenue de faire faire bonet loyal inventaire. L'article 1456 dit que « la femme survivante qui veut conserver la faculté de renoncer, etc.,» doit faire faire un inventaire; d'où les jurisconsultes ont conclu qu'elle peut renoncer à la communauté, dans les trois mois, sans faire inventaire, et qu'elle ne doit faire cet inventaire que lorsqu'elle veut conserver cette faculté au delà des trois mois.

Cette interprétation est conforme au texte de l'article 1456. Mais elle est controversée. Bruxelles, 4 février 1852 (B. J., x, 418; P. 1854, p. 48); Toullier, t. XV, no 150; Odier, no 458. — Pour l'opinion contraire, qui exige toujours un inventaire, voy. Bruxelles, 25 avril 1849 (B. J., vi, 1660 et la note; P. 1849, p. 312).

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736.- La femme qui veut conserver la faculté de renoncer à la communauté doit, dans les trois mois du jour du décès du mari, faire faire un inventaire fidèle et exact de tous les biens de la communauté, contradictoirement avec les héritiers du mari, ou eux dùment appelés. Cet inventaire doit être fait dans la forme ordinaire prescrite par les articles 941-944 du code de procédure; il doit être par la femme affirmé sincère et véritable, lors de sa clôture, devant l'officier public qui l'a reçu. (Art. 1456; 793, 794.)

Si elle n'a pas fait faire l'inventaire dans les trois mois, elle est irrévocablement déchue de la faculté de renoncer à la communauté. Elle est réputée commune et tenue de sa part des dettes de la communauté.

Si les circonstances rendent difficile le commencement ou l'achèvement de l'inventaire ou la délibération dans les délais prescrits, la veuve peut demander au tribunal de première instance une prorogation de ces délais pour sa renonciation. Cette prorogation est, s'il y a lieu, prononcée contradictoirement avec les héritiers du mari ou eux dûment appelés. (Art. 1458.)

757. La jurisprudence s'est quelquefois relâchée de la rigueur des délais prescrits par la loi, soit pour faire inventaire, soit pour délibérer. Ainsi, par exemple, il a été jugé que, lorsque l'état de la communauté ne pouvait être connu de la femme que par le compte rendu par le mari, le délai de trois mois et quarante jours ne devait courir que du jour de la reddition de compte de la part du mari. Cass. fr., 2 décembre 1834. De même, il a été admis que la femme peut encore renoncer à la communauté si l'inventaire a été fait peu de temps après l'expiration du délai légal. Ces décisions sont contraires à la loi. S'il y a des circonstances qui empêchent la femme de faire ou d'achever l'inventaire, elle peut demander une prorogation.

On ne peut admettre une décision en ce sens que lorsque la femme avait des motifs légitimes de ne pas faire l'inventaire dans le délai voulu, par exemple, si elle a ignoré la mort de son mari. Zachariæ, § 517; cass. fr., 17 mai 1858 (D. P., 1858, I, 351); Bruxelles, 12 août 1859 (B. J., xvIII, 817).

758. La renonciation doit se faire au greffe du tribunal de première instance dans l'arrondissement duquel le mari avait son domicile; cet acte doit être inscrit sur le registre établi pour recevoir les renonciations à succession. (Art. 1457; 784.)

Cette forme est requise pour que la renonciation soit valable à l'égard des créanciers; mais entre la femme ou ses héritiers et le mari ou ses héritiers, la renonciation peut avoir lieu par toute espèce de convention. Cass fr., 6 novembre 1827.

739. Si la femme a fait l'inventaire prescrit par l'article 1456, saus avoir fait sa renonciation dans le délai voulu, elle conserve la faculté de renoncer pendant trente ans, pourvu qu'elle ne se soit point immiscée et qu'il n'existe pas contre elle de jugement passé en force de chose jugée, qui la déclare commune. Dans ce dernier cas, elle doit être considérée comme commune en biens à l'égard de tout le monde, si le jugement est contradictoire, parce que, en contestant, la femme a pris dans les actes de procédure la qualité de commune. (Art. 1453.) Mais si le jugement était rendu par défaut, ou s'il était intervenu dans une contestation ayant pour objet la qualité mème de la femme, il ne pourrait être invoqué que par celui qui l'aurait obtenu. (Art. 1351.)

Toutefois, si après l'expiration du délai de trois mois et quarante jours, ou de celui de quarante jours depuis la clôture de l'inventaire, s'il a été clos avant les trois mois, la femme ne prend pas qualité, elle peut être poursuivie comme commune jusqu'à ce qu'elle ait renoncé, et elle doit les frais faits contre elle jusqu'à sa renonciation. (Article 1459.)

B. De la renonciation tacite par la femme divorcée ou séparée.

740. La femme divorcée ou séparée de corps, qui n'a point, dans les trois mois et quarante jours après le divorce ou la séparation définitivement prononcés, accepté la communauté, est censée y avoir renoncé, à moins qu'étant encore dans le délai, elle n'en ait obtenu la prorogation en justice, contradictoirement avec le mari, ou lui dùment appelé. (Art. 1463.) Pour opérer ce te renonciation, il ne faut donc ni inventaire, ni déclaration au greffe. La femme peut faire inventaire pour s'éclairer sur la convenance d'accepter ou de renoncer; mais elle n'est pas tenue de le faire c'est parce que dans ce cas le mari, existant encore, est resté en possession de tous les effets de la communauté; il n'y a donc ni confusion possible ni crainte d'immixtion de la part de la femme, comme dans le cas de prédécès du mari. De plus la loi ne veut pas forcer le mari à faire un procès à sa femme pour l'obliger à prendre qualité. Enfin, si la communauté est mau

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vaise, il est plus juste d'établir une présomption favorable à la femme, qui n'a pas contracté les dettes.

L'article 1463 doit aussi être appliqué à la femme simplement séparée de biens, par identité de motifs. Troplong, n° 1582.

C. De la renonciation par les héritiers de la femme.

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1o La communauté s'est dissoute par le décès du mari, et sa veuve meurt pendant les délais pour faire l'inventaire et pour délibérer. Dans ce cas, il faut distinguer :

a. L'inventaire n'était pas commencé ou terminé à sa mort; les héritiers auront, pour faire ou pour terminer l'inventaire, un nouveau délai de trois mois, à compter du décès de la veuve, et de quarante jours pour délibérer, après la clôture de l'inventaire. (Art. 1461, al.1; 795.)

b. L'inventaire était terminé. Dans ce cas, dit l'article 1461, al. 2, les héritiers de la veuve auront, pour délibérer, un nouveau délai de quarante jours, à compter de son décès. Cette disposition suppose que tous les biens qui composent la succession de la veuve se trouvent compris dans l'inventaire qu'elle a fait de la communauté. Mais si elle a encore d'autres biens, l'art. 1461, al. 2 ne fait pas perdre aux héritiers le bénéfice de l'art. 795. Ils ont donc trois mois pour faire l'inventaire de toute la succession. Ils ne peuvent pas être forcés à prendre qualité avant l'expiration de ces trois mois et quarante jours; donc, avant l'expiration de ce nouveau délai, ils ne sont pas tenus d'accepter la communauté ou d'y renoncer. Car l'acceptation ou la répudiation de la communauté constituerait, de la part des héritiers de la femme, un acte d'acceptation de sa succession. Duranton, t. XIV, no 455; Odier, no 465.

742.- 2o La communauté se dissout par le prédécès de la femme; ses héritiers peuvent renoncer à la communauté dans les délais et dans les formes que la loi prescrit à la femme survivante. (Art. 1466.)

Ses héritiers sont-ils tenus, comme la femme elle-même, de faire inventaire dans les trois mois pour conserver la faculté de renoncer? D'après l'ancienne jurisprudence, non. Pothier, nos 561 et 562. Quelques jurisconsultes, par exemple, Merlin, Rép., vo Inventaire, § 5, no 3, sont encore de cet avis, mais à tort. Les travaux préparatoires du code civil, et notamment les observations du Tribunat, prou

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vent que les héritiers de la femme doivent aussi faire inventaire, s'ils veulent conserver la faculté de renoncer à la communauté. Le premier projet de l'article 1461 portait que les héritiers de la femme décédée pendant le délai pour faire inventaire pouvaient renoncer à la communauté, nonobstant le défaut d'inventaire, tant qu'ils ne s'étaient pas immiscés. Sur les observations du Tribunat « qu'il fallait toujours un inventaire pour éviter les fraudes à l'égard des tiers,» l'article 1461 fut adopté tel qu'il est et l'article 1466 fut ajouté. Observations du Tribunat, no 12 (Locré, XIII, 135, 251 et 252). Sans l'inventaire, il serait facile de frauder les créanciers par un concert entre le mari survivant et les héritiers de la femme, qui souvent sont les enfants communs. Troplong, n° 1605. En sens contraire, voy. Poitiers, 17 décembre 1851 (J. P., 1855, II, 88).

D. Du droit des créanciers d'attaquer la renonciation
à la communauté.

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743. Les créanciers de la femme ou de ses héritiers peuvent attaquer la renonciation qui aurait été faite par elle ou par ses héritiers en fraude de leurs créances, et accepter la communauté de leur chef. (Art. 1464, 1167). V. supra, nos 91, 83.

Les créanciers peuvent aussi attaquer la renonciation tacite qui a lieu en cas de divorce ou de séparation de corps ou de biéns. La loi ne distingue pas.

Le mari ou ses héritiers peuvent opposer aux créanciers le bénéfice de discussion; c'est-à-dire, ils peuvent exiger que les créanciers attaquent d'abord les biens personnels de la femme. Si ceux-là suffisent, ils n'ont plus d'intérêt à accepter la communauté.

744. Les créanciers peuvent-ils attaquer l'acceptation de la communauté? Quant aux créanciers personnels de la femme, ils ne peuvent pas attaquer l'acceptation contre les créanciers de la communauté, parce qu'ils ne peuvent pas l'empêcher de faire de nouvelles dettes. (Arg., art. 881.) Ils n'y ont d'ailleurs aucun intérêt, la femme acceptante n'étant tenue des dettes de la communauté que jusqu'à concurrence de son émolument (art.-1483).

Mais les créanciers peuvent faire tous les actes conservatoires du bénéfice d'émolument que l'article 1485 donne à la femme. Ainsi, ils peuvent requérir apposition des scellés, inventaire, etc. (art. 820, 1166); Toullier, XV, 203.

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