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à titre onéreux et en partie à titre gratuit. Autrement il serait trop facile d'éluder la loi, et la clause de donation partielle deviendrait de style dans les actes de transport.

1108. Le retrait peut être exercé tant que le procès n'a pas été terminé. Il peut donc être proposé pour la première fois en appel. Cependant, il faut admettre que, l'introduction du retrait ayant aussi pour but d'éteindre le procès, les juges peuvent en rejeter la demande, lorsqu'elle n'a été faite qu'au moment où le procès était sur le point d'être jugé, et où le débiteur en prévoyait le résultat. Car autrement le procès n'aurait pas été éteint par le retrait, le cessionnaire aurait fait toutes les diligences pour prouver la légitimité de sa créance, et le débiteur aurait eu le double avantage de soutenir la lutte jusqu'au dernier moment et de pouvoir encore exercer le retrait. Pothier, no 598; Troplong, n° 999.

1109.

D. Des cas où le retrait litigieux cesse.

Le retrait litigieux cesse :

1o Dans le cas où la cession a été faite à un cohéritier ou copropriétaire du droit cédé. Cette exception a lieu pour faciliter le partage d'une communauté; et il était même nécessaire d'admettre la cession de droits litigieux, si l'on ne voulait pas rendre le partage impossible. C'est pourquoi les Romains permettaient, dans cette hypothèse, l'aliénation et la cession des droits litigieux; 1. 4, C. de litigiosis, 8, 37; 2o Lorsque la cession a été faite à un créancier en payement de ce qui lui est dù;

3o Lorsqu'elle a été faite au possesseur de l'héritage sujet au droit litigieux; par exemple: Paul vend un fonds à Pierre. Jean, créancier hypothécaire du vendeur, poursuit l'acquéreur en délaissement. Le vendeur, appelé en garantie, conteste la créance de Jean, laquelle devient litigieuse. Pierre, pour éviter les poursuites hypothécaires et la vente de son fonds, se rend cessionnaire de la créance pour un prix inférieur à sa valeur nominale. Paul, le vendeur, ne peut pas en exercer le retrait.

Dans ces deux derniers cas, la créance a été acquise par le cessionnaire plutôt pour conserver ses intérêts ou ses droits, que pour porter atteinte aux intérêts d'autrui.

Ces trois exceptions se trouvent déjà dans la loi 22, C. Mandati, 4, 35. Les circonstances prouvent que la cession n'a pas eu lieu dans

un esprit de cupidité, et que le motif de la loi ne s'y applique pas (art. 1701).

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1110. L'art. 1701 n'est pas limitatif. Il faut encore ajouter comme exception le cas où la cession du droit litigieux a été faite àt titre gratuit, car il n'y a pas de prix et le motif du retrait n'existe pas; 1. 22, C., Mandati, 4, 35; Troplong, n° 1009. Il n'a pas lieu non plus lorsqu'une universalité a été cédée, et qu'il s'y trouve des créances litigieuses; par exemple une hérédité a été vendue, ou un commerce a été cédé avec tout son actif et son passif, ou une terre a été vendue avec toutes les créances de l'ancien propriétaire contre les fermiers, et ces ventes comprennent aussi des créances litigieuses. Pothier, n° 595; Troplong, no 1011.

TITRE VII.

DE L'ÉCHANGE. (CODE CIVIL, ART. 1702-1707.)

1111.

1. NOTION. (Art. 1702-1703.)

En droit romain, l'échange est un contrat réel, qui n'est parfait que par l'exécution (do ut des). La convention de faire un échange (pactum de permutando) n'est qu'un simple pacte, qui ne produit aucune action. La définition du code est celle du droit romain; on dirait que l'échange est encore un contrat réel. L'échange est un contrat par lequel les parties se donuent respectivement une chose pour une autre, dit l'article 1702. Mais cette définition est détruite par l'article suivant, portant que l'échange s'opère par le seul consentement, de la même manière que la vente. Pour être plus exact, le législateur aurait dù dire l'échange est un contrat par lequel les parties s'engagent à donner, au lieu de dire par lequel les parties se donnent. Car, aujourd'hui, l'échange est un véritable contrat consensuel. C'est une conséquence du principe explique supra, no 7.

1112.- L'échange diffère de la vente en ce qu'il n'y a pas de prix en argent; chaque partie s'oblige à donner à l'autre une chose.

Au reste, la question de savoir si un contrat est une vente ou un

échange, a perdu aujourd'hui son importance, parce que presque toutes les règles prescrites pour le contrat de vente s'appliquent à l'échange (art. 1707).

L'échange d'une chose contre de l'or ou de l'argent, même monnayé, ne constitue pas toujours une vente; le contrat aurait la nature d'un véritable échange, si par exemple l'or ou l'argent n'avait pas été donné comme monnaie, mais au poids, ou pour sa valeur métallique.

Sur le cas où le prix consiste en partie en argent, en partie en une autre chose, voy. supra, no 959.

Le contrat d'échange ne perd pas sa nature propre, lorsque l'un des contractants s'engage à payer à l'autre une soulte ou un retour en argent, pour combler la différence qui existe entre la valeur des deux choses.

1113.

II. EFFETS DU CONTRAT D'échange.

En principe, les obligations du vendeur incombent à chacun des échangistes. Ainsi, chaque échangiste est tenu à la délivrance et à la garantie, et doit transférer à l'autre la propriété de la chose qu'il échange; on ne peut donc pas donner en échange la chose d'autrui. De là il suit que si l'un des copermutants a déjà reçu la chose à lui donnée en échange, et qu'il prouve ensuite que l'autre contractant n'est pas propriétaire de cette chose, il ne peut pas être forcé à livrer celle qu'il a promise en contre-échange, mais seulement · à rendre celle qu'il a reçue (art. 1704, 1184, 1599, 1655).

1114. Il résulte de l'obligation de garantie que le copermutant qui est évincé de la chose qu'il a reçue en échange, peut demander des dommages et intérêts ou répéter sa chose. Conformément aux principes généraux, il peut aussi demander des dommages et intérêts dans le cas où il répète sa chose (art. 1705, 1147, 1184 et supra, n° 106); Duranton, no 545.

1115. Si la chose donnée par le copermutant qui a été évincé de celle qu'il a reçue est un immeuble, il peut intenter la demande en restitution aussi contre le tiers acquéreur. Quelques auteurs se prononcent pour l'opinion contraire, en se fondant sur la 1. 4, C., de rerum permutatione, 4, 64. Leur opinion est juste en droit romain; car l'échangiste, étant devenu légitime propriétaire de la chose qu'il a reçue, en a légitimement transmis la propriété au tiers. La condictio caussa data caussa non secuta, que peut intenter celui qui a à sé plaindre de l'inexécution de l'obligation à son égard, est une action

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purement personnelle. Mais en droit français, la clause commissoire, toujours sous-entendue dans les contrats bilatéraux, exerce tous les effets de la condition résolutoire et opère révocation de la propriété même. Duranton, no 546; Troplong, Échange, no 25.

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1116. La rescision pour cause de lésion n'a pas lieu dans le contrat d'échange (art. 1706). Le motif qui a fait admettre la rescision en faveur du vendeur n'est pas applicable aux échangistes. L'échange n'est pas le résultat de la détresse, puisque l'échangiste ne reçoit pas d'argent. D'ailleurs chacun des deux contractants est à la fois vendeur et acheteur, et par cela même que l'acheteur n'a pas l'action rescisoire, le copermutant ne peut pas l'avoir non plus. Rapport au Tribunat, no 6 (Locré, XIV, 273).

Les parties peuvent stipuler le réméré pour un terme n'excédant pas cinq ans. Duranton, no 548.

TITRE VIII.

DU CONTRAT DE LOUAGE (ART. 1708-1851).

1117.

SOURCES DE CE TITRE.

Ce titre a pour source le droit romain et le Traité du contrat de louage de Pothier, à l'exception des règles sur le bail à choptel, qui ont été puisées dans le droit coutumier.

CHAPITRE PREMIER.

DISPOSITIONS GÉNÉRALES (ART. 1708-1712).

NOTION ET DIVERSES ESPÈCES DE LOUAGE.

1118. Le louage (locatio conductio) est un contrat par lequel l'un des contractants (le bailleur ou locateur, locator) s'oblige à faire jouir l'autre (le locataire ou preneur, conductor) de l'usage d'une chose pendant un certain temps ou à faire quelque chose pour l'autre,

moyennant un prix que ce dernier s'oblige à lui payer (art. 1709, 1710).

Par dérogation au droit romain, le code exige que la jouissance ne dure qu'un certain temps. La durée même de ce temps peut être fixée d'une manière certaine ou incertaine, par exemple pour la vie d'un homme, ou même au delà; mais elle ne peut jamais être perpétuelle; ce serait une aliénation. Toutefois, il est défendu de contracter un bail de choses pour un terme excédant.99 ans. Décr. des 18-29 décembre 1790; loi du 10 janvier 1824, art. 2. Le bail contracté pour un terme plus long est réductible; aucun des contractants n'est obligé de l'exécuter après 99 ans.

1119.

Il y a deux sortes de contrats de louage: celui des choses, et celui d'ouvrage.

Ces deux genres de louage se subdivisent encore en plusieurs espèces particulières. On appelle bail à loyer, le louage des maisons et celui des meubles; bail à ferme, celui des héritages ruraux; loyer, le louage du travail ou du service; bail à cheptel, celui des animaux dont le profit se partage entre le propriétaire et celui à qui il les confie. Les devis, marché ou prix fait, pour l'entreprise d'un ouvrage moyennant un prix déterminé, sont aussi un louage d'ouvrage, lorsque la matière est fournie par celui pour qui l'ouvrage se fait (art. 1708-1711).

CHAPITRE II.

DU LOUAGE DES CHOSES (ART. 1713-1778).

SECTION PREMIÈRE.

REGLES COMMUNES AUX BAUX DES MAISONS ET DES BIENS RURAUX.

1. CONDITIONS REQUISES.

A. Quant à la chose et au prix.

1120. On peut louer toutes sortes de biens meubles ou immeubles (art. 1713, et supra, no 32). Le contrat de louage a pour objet l'usage de la chose; on peut dire que c'est la vente de l'usage de la

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