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n'est donc pas un congé dans le sens de l'art. 1736, mais plutôt un acte de protestation contre l'interprétation de l'intention du bailleur, pour le cas où le preneur continuerait la jouissance de la chose louée. Cet acte peut être fait sans que l'on observe le délai fixé par l'usage des lieux. Ainsi, par exemple, si le locataire n'était pas sorti au jour ⚫ de l'expiration du bail, ou même quelques jours après, le bailleur pourrait lui signifier un congé en ce sens.

Quant au point de savoir combien de temps la continuation de la jouissance doit avoir duré pour faire présumer la tacite réconduction, il est abandonné à l'appréciation du juge.

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1168. La relocation est censée faite pour le même prix et aux mêmes conditions que le premier bail, toutefois sans préjudice aux droits des tiers; ainsi, la caution ne s'étend pas à la prolongation (article 1740).

En droit romain, il y avait controverse sur la question de savoir pour quel temps la relocation a lieu. Aujourd'hui il faut distinguer :

1o Le bail a pour objet une maison ou un appartement. La durée de la réconduction est fixée par l'usage des lieux. La réconduction est alors un bail sans écrit ; et bien que sa durée soit fixée par l'usage des lieux, il ne cesse pas de plein droit à l'expiration de ce terme. Il ne cesse que lorsque le bailleur aura donné congé dans le délai fixé par l'usage des lieux. Car, aussi longtemps que le congé n'a pas été donné, on peut croire que l'intention des parties a été de continuer le bail (art. 1759).

2o Le bail a pour objet un fonds rural. Il est censé fait pour le temps qui est nécessaire, afin que le preneur recueille tous les fruits de l'héritage affermé. Ainsi le bail à ferme d'un pré, d'une vigne, et de tout autre fonds dont les fruits se recueillent en entier dans le cours de l'année, est censé fait pour un an. Le bail des terres labourables, lorsqu'elles se divisent par soles ou saisons, est censé fait pour autant d'années qu'il y a de soles (art. 1774).

Ce terme expiré, le bail cesse de plein droit, sans congé (art. 1775).

SECTION II.

DES RÈGLES PARTICULIÈRES AUX BAUX A LOYER (art. 1752-1762).

1169.

I. OBSERVATIONS GÉNÉRALES.

On appelle bail à loyer, le louage des maisons et celui des meubles (art. 1711, àl. 2).

Il importe de savoir si un bail est à loyer ou à ferme. Lorsqu'un bail comprend des bâtiments, des usines et des terres, il faut examiner quelle est la chose principale. Les règles applicables à la chose principale s'appliquent aussi à ce qui est accessoire par rapport à cette chose. Bruxelles, 29 novembre 1809.

II. DES EFFETS PARTICULIERS DES BAUX A LOYER.

1170.1o Le locataire doit garnir la maison de meubles suffisants pour répondre du payement des loyers; sinon, il peut être expulsé, à moins qu'il ne donne d'autres sûretés capables de répondre du loyer (art. 1752). Cette disposition a son origine dans le droit coutumier; elle a pour but de donner au privilége du bailleur, déjà admis en droit romain, une assiette réelle (art. 2102, n° 1); Loysel, no 476; loi hyp., art. 20, no 1.

Le locataire qui fait disparaître les meubles est assimilé à celui qui ne garnit pas la maison. Pour pouvoir expulser le locataire qui ne satisfait pas à cette obligation, il faut que le bailleur demande la résiliation du contrat (art. 1741).

L'obligation imposée au locataire par cet article se modifie par la destination de la chose : par exemple, si on loue une salle d'escrime.

1171. -Les auteurs sont en désaccord sur la question de savoir combien de termes du loyer le mobilier du locataire doit garantir. Suivant Duranton, n° 157, et Duvergier, IV, n° 16, il suffit que la valeur des meubles réponde du loyer pendant le terme courant et le terme prochain, avec les frais de saisie et de vente. Troplong, no 531, est aussi de cet avis, conformément à la coutume d'Orléans (art. 417), qui fixait chaque terme à six mois, et à l'usage qui régnait à Paris, d'après lequel il fallait donner des sûretés pour un an. On peut citer encore en faveur de cette opinion l'art. 1760. Toutefois, la loi ne

prescrit pas ici le nombre des termes pour lesquels il faut des suretés. On ne peut pas exiger des sûretés pour toute la durée du bail (arg., art. 1760). Il faut donc dire avec Zachariæ, § 370, que le législateur s'en est remis aux tribunaux pour l'appréciation de la question de savoir si le locataire a suffisamment garni les lieux.

1172.-2o Le locataire est tenu des réparations locatives ou de menu entretien. Les réparations locatives ou de menu entretien dont le locataire est tenu, s'il n'y a clause contraire, sont celles désignées comme telles par l'usage des lieux, et entre autres, les réparations à faire aux àtres, contre-cœurs, chambranles et tablettes des cheminées; au recrépiment du bas des murailles des appartements et autres lieux d'habitation, à la hauteur d'un mètre; aux pavés et carreaux des chambres, lorsqu'il y en a seulement quelques-uns de cassés; aux vitres, à moins qu'elles ne soient cassées par la grèle, ou autres accidents extraordinaires et de force majeure, dont le locataire ne peut être tenu; aux portes, croisées, planches de cloison ou de fermeture de boutique, gonds, targettes et serrures (art. 1754). L'énumération de cet article n'est pas restrictive; elle est complétée par l'usage des lieux ou par l'appréciation des tribunaux. Troplong, Dos 550-584.

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Le caractère particulier de cette disposition consiste en ce que le locataire est aussi tenu des réparations locatives qui sont nécessitées par l'usage même de la chose. En règle générale, le locataire doit rendre la chose telle qu'il l'a reçue, sauf les dégradations de toute espèce arrivées par vétusté ou par force majeure (art. 1750, 1755). Ainsi, les réparations locatives nécessitées par force majeure, ou par vétusté ne sont pas à la charge du locataire. Le locataire ne répond pas non plus des pertes et dégradations arrivées pendant la jouissance sans sa faute, donc par l'usage même de la chose, à moins que ces dégradations ne soient de simples réparations locatives. Elles sont à la charge du locataire quand même elles seraient arrivées par suite de l'usage de la chose, pourvu que ce ne soit pas par force majeure ou par vétusté; alors elles seront à la charge du bailleur.

Le motif de cette exception de la règle de l'art. 1732, c'est que le plus souvent il est difficile de constater si ces dégradations sont le résultat naturel de l'usage de la chose, ou le résultat de la faute du preneur, et qu'il importe de prévenir le grand nombre de petites contestations qui pourraient naître de cette difficulté.

1173. Lorsque la maison est occupée par plusieurs locataires,

ou lorsque quelques parties du bâtiment sont destinées à l'usage de plusieurs, par exemple une cour, un corridor, les réparations des parties dont l'usage est commun, sont toutes à la charge du bailleur; car, la présomption que le locataire, qui occupe exclusivement un bâtiment, est l'auteur des dégradations, ne peut pas avoir lieu dans ce cas. Le bailleur ne peut donc, sauf stipulation contraire, s'en tenir qu'à l'auteur prouvé des dégradations. Merlin, Rép., vo Bail, § 8 ; Troplong, no 590.

1174.

Le curement des puits et celui des fosses d'aisances sont à la charge du bailleur, s'il n'y a clause contraire (art. 1756). C'est une application de l'art. 1719, al. 1 et 20.

III. COMMENT LE BAIL A LOYER PREND FIN.

1175.1° Par l'expiration du terme. Voy. supra, n° 1158. Si le terme n'est pas fixé par la convention, il le sera par l'usage des lieux, soit que le bail ait pour objet une maison (art. 1759) ou un appartement meublé. Toutefois le bail d'un appartement meublé est censé fait à l'année, quand il a été fait à tant par an; au mois, quand il a été fait à tant par mois ; au jour, s'il a été fait à tant par jour (art.1758).

1176. Le bail des meubles fournis pour garnir une maison entière, un corps de logis entier, une boutique, ou tous autres appartements, est censé fait pour la durée ordinaire des baux des maisons, corps de logis, boutiques ou autres appartements, selon l'usage des lieux (art. 1757).

Quelques auteurs prétendent que, dans le cas où les meubles ont été fournis pour garnir une maison ou partie de maison louée par écrit pour un terme fixe, ils sont aussi censés loués pour toute la durée du bail de la maison, si ce bail a été montré au bailleur des meubles. Cette opinion n'est fondée sur rien; la loi ne distingue pas; il faut donc admettre pour les meubles seulement la durée ordinaire du bail des maisons, selon l'usage des lieux.

1177. Si le terme du bail a été fixé par la convention ou par une présomption de la loi, comme dans le cas de l'art. 1758 (u° 1175), il expire de plein droit, sans congé (supra, no 1158). Mais si la durée du bail n'est fixée que par l'usage des lieux, le preneur ne peut plus sortir ni être expulsé qu'après un congé donné suivant le délai fixé par l'usage des lieux (art. 1759). Cette règle s'applique aussi au bail de meubles (art. 1757). La raison de cette différence est que chacun doit

connaître ses propres conventions, et que tout le monde est censé connaitre la loi, tandis qu'il peut ignorer l'usage des lieux, dont l'existence est moins patente et souvent plus contestée.

1178.2o Par la résiliation pour défaut respectif des parties de remplir leurs engagements (supra, n° 1156 2°). En cas de résiliation par la faute du locataire, celui-ci est tenu de payer le prix du bail pendant le temps nécessaire à la relocation, sans préjudice des dommages et intérêts qui ont pu résulter de l'abus (art. 1760).

Par le temps nécessaire à la relocation, il faut entendre le temps ordinairement laissé au propriétaire pour s'assurer d'un nouveau locataire, suivant l'usage des lieux ; c'est-à-dire pour le délai du congé tel qu'il est fixé par l'usage des lieux; de sorte que si le propriétaire relouait sur-le-champ, le locataire ne devrait que les loyers échus. Troplong, nos 621, 622; Duranton, no 172; Rapport au Tribunat, n° 13 (Locré, XIV, 435).

1179.5° D'après une loi romaine, 1. Aede, 3, C. de locato et conducto, 4, 65, le propriétaire d'un bâtiment avait la faculté de rompre le bail et d'expulser son locataire, s'il eh avait lui-même besoin. Cette règle, d'ailleurs contraire au principe sur la force obligatoire des conventions, était suivie dans l'ancienne jurisprudence et était une source d'abus. Le code l'a formellement abolie par l'article 1761, portant: « Le bailleur ne peut résoudre la location, encore qu'il déclare vouloir occuper par lui-même la maison louée, s'il n'y a eu convention contraire, et, si le bailleur s'est réservé ce droit, il ne peut l'exercer qu'en signifiant d'avance un congé aux époques déterminées par l'usage des lieux (art. 1762). ›

Le bailleur n'est pas tenu de payer, dans ce cas, des dommagesintérêts au locataire, à moins qu'il n'en ait été convenu autrement dans le contrat. Mais les dommages-intérêts n'ont pas lieu de plein droit comme dans le cas de l'art. 1744 et suiv. (supra, no 1163). La position du bailleur qui veut occuper sa maison est plus favorable que celle du bailleur qui veut vendre; car, ce dernier est censé avoir tenu compte, dans la fixation du prix de la vente, de l'indemnité qu'il doit au locataire, en cas d'expulsion. Pothier, no 337; Rapport au Tribunat, no 14 (Locré, XIV, 435).

Si le bailleur faisait abus du droit qu'il s'était réservé, en louant la maison à une autre personne, il serait tenu aux dommages-intérêts. Séance du conseil d'État du 9 nivôse an xi, no 44 (Locré, XIV, 348).

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