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tion, mais que, si la caution a payé, elle ne peut pas répéter. Si la dette peut être annulée par une exception, la caution peut l'opposer. Toutefois, si la dette a le caractère d'une obligation naturelle, et qu'elle ne puisse être annulée que par une exception purement personnelle à l'obligé, par exemple lorsqu'elle a été contractée par un mineur ou une femme mariée, la caution ne peut pas opposer cette exception (art. 2012, 2056, al. 2, et supra, no 158);

d. Que l'on ne peut pas cautionner une dette radicalement nulle, par exemple une dette sans cause, ou ayant un objet illicite; ou bien une dette réprouvée par la loi, par exemple une dette de jeu;

e. Que le cautionnement ne peut excéder ce qui est dù par le débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses (in duriorem causam). Il peut être contracté pour une partie de la dette seulement, et sous des conditions moins onéreuses. Le cautionnement qui excède la dette, ou qui est contracté sous des conditions plus onéreuses, n'est point nul il est seulement réductible à la mesuré de l'obligation principale (art. 2015). Car l'obligation accessoire ne peut pas être plus forte que la dette principale.

:

On peut dire avec les Romains que l'obligation de la caution peut être plus onéreuse de quatre manières : re, si une chose plus précieuse ou une somme plus forte a été cautionnée; tempore, si la caution a promis de payer plus tôt ; loco, si elle a promis de payer dans un lieu plus défavorable que celui de l'obligation principale; causa, si les modalités de la dette sont plus onéreuses, par exemple si la caution s'est engagée purement et simplement, le débiteur principal conditionnellement; ou bien, si elle a contracté une dette alternative au choix du créancier, alors que la dette principale était pure et simple, ou si elle a contracté, sous deux conditions alternatives, une dette subordonnée à une seule condition.

En droit romain, le cautionnement contracté au mépris de la règle qui précède était entièrement nul. Maynz, Éléments de droit romain, S 344, note 8. Sous l'ancienne jurisprudence, sa validité était controversée; le code, par l'article 2015, a décidé cette controverse. Treilhard dans l'exposé de motifs, no 5 (Locré, XV, 523).

Si la caution ne peut pas s'engager sous des conditions plus onereuses (durius) que le débiteur principal, elle peut s'engager plus strictement (arctius), par exemple sous une hypothèque, ou civilement pour une obligation naturelle (art. 2012, al. 2). Toutefois, elle ne peut pas s'obliger sous contrainte par corps, si la dette principale ne

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l'entraine pas. Séance du conseil d'État du 16 frimaire an xi, no 4 (Locré, XV, 288).

1496. 2o Il faut le consentement du créancier et de la caution. Celui du débiteur n'est pas nécessaire; on peut se rendre caution même à son insu (art. 2014, al. 1). Aucune forme n'est requise. C'est un contrat consensuel.

Le cautionnement ne se présume pas; il doit être exprès, et on ne peut pas l'étendre au delà des limites dans lesquelles il a été contracté (art. 2015). Dans le doute, il faut donc interpréter contre le cautionnement; par exemple l'invitation de prêter de l'argent ou de fournir des marchandises à un tiers, même en le recommandant et en certifiant sa solvabilité, n'est pas un cautionnement; le mari, qui autorise sa femme à emprunter, lorsqu'il n'y a pas communauté entre les époux, n'est pas censé se porter personnellement débiteur de l'emprunt.

1497. — 3o Il faut un engagement personnel de la part de la caution; la constitution d'une hypothèque ou d'un gage n'est pas un cautionnement. V. no 1489, 5o.

1498. 4° Il faut une personne capable. Toute personne capable de s'obliger est capable de se porter caution; mais toute personne capable de se porter caution n'est pas par cela seul susceptible d'être présentée comme caution par un débiteur qui doit fournir caution.

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1499. Le débiteur est tenu de remplir ses engagements sur tous ses biens présents et à venir (art. 2092). Mais ses propres biens peuvent ne pas offrir une garantie suffisante de l'exécution de ses engagements, et, pour suppléer à cette garantie, il peut être dans la nécessité de fournir une caution ou un fidejusseur. Cette nécessité peut procéder de trois causes, de la loi, d'un jugement, ou d'une convention entre le créancier et le débiteur principal, par laquelle ce dernier s'est engagé à fournir une caution.

1500. — 1o La caution est légale, lorsqu'elle est prescrite par la loi. Ainsi par exemple le code prescrit une caution par les art. 16, 120, 123, 601, 626, 771, 807, 1518, 1613, 1653, 2185 (loi hypothécaire de 1851, art. 115, al. 2).

1501. 2o Le cautionnement est judiciaire, lorsque le juge l'a imposé de son autorité à une des parties litigantes, par exemple, lorsqu'il a ordonné l'exécution provisoire d'un jugement avec caution (C. de proc., art. 135 et 439; loi belge du 25 mars 1841, art. 20).

Le cautionnement conserve sa nature primitive, et ne devient pas judiciaire, alors même qu'il a été ordonné par jugement en vertu de l'obligation de fournir caution. Le cautionnement n'est pas judiciaire par cela seul que la caution a dû être reçue par jugement ou qu'elle doit faire sa soumission au greffe (C. de proc., art. 517-522).

La caution judiciaire est soumise à deux règles spéciales : d'abord elle ne peut point demander la discussion du débiteur principal, et puis elle doit non-seulement réunir les conditions dont il sera parlé au numéro suivant, mais, en outre, être susceptible de contrainte par corps (art. 2042, 2040, al. 2). Cette dernière disposition est implicitement abolie par la loi belge sur la contrainte par corps du 21 mars 1859, art. 4, 17 et 18. V. l'exposé des motifs fait au Sénat.

Celui qui a spécialement cautionné la caution judiciaire ne peut demander la discussion du débiteur principal et de la caution (article 2043).

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1502. La caution légale et la caution judiciaire sont régies par les règles suivantes.

A. Celui qui ne peut pas trouver une caution, est reçu à donner à sa place un gage en nantissement suffisant (art. 2041).

B. Le débiteur obligé à fournir une caution doit en présenter une qui ait la capacité de contracter, qui ait un bien suffisant pour répondre de l'objet de l'obligation, et dont le domicile soit dans le ressort de la cour d'appel où elle doit être donnée (art. 2018).

C. La solvabilité d'une caution ne s'estime qu'eu égard à ses propriétés foncières, excepté en matière de commerce, ou lorsque la dette est modique. On n'a point égard aux immeubles litigieux, ou dont la discussion deviendrait trop difficile par l'éloignement de leur situation (art. 2019). Car la caution doit être d'une solvabilité constante et assurée par des propriétés immobilières non litigieuses, et la facilité de poursuivre un débiteur fait partie de sa solvabilité, et une discussion du débiteur, qu'il faudrait poursuivre de loin, pourrait souvent être plus ruineuse qu'utile. Exposé de motifs, n° 7 (Locré, p. 324). 1503. 3o La nécessité de fournir caution peut être fondée sur une convention antérieure entre le débiteur et le créancier. On se demande si dans ce cas la caution que le débiteur offre au créancier doit réunir

les conditions mentionnées sous les lettres B et C du numéro précédent? Il faut distinguer :

A. Le créancier a exigé pour caution une telle personne déterminée. Puisque c'est son choix, il doit s'en contenter telle qu'elle est, et il ne peut pas en demander une autre, quand même celle qu'il a exigée serait devenue insolvable.

B. On n'est pas convenu d'une personne déterminée. Le créancier peut pourvoir à ses intérêts comme il le trouve convenable et exiger les conditions qu'il lui plaît de fixer. Mais si les parties ne tombent pas d'accord, le débiteur doit fournir et le créancier accepter une caution qui réunit les qualités prescrites par les articles 2018 et 2019 (n° 1502).

Lorsque la caution reçue par le créancier, volontairement ou en justice, est ensuite devenue insolvable, il doit en être donné une autre (art. 2020).

Cette dernière disposition a donné lieu à de longs débats au conseil d'État. Suivant le droit romain, fr. 3, i. f., D., de fidejussoribus, 46, 1, lorsque la caution acceptée par le créancier était devenue insolvable, le débiteur n'était pas tenu d'en donner une autre. Pothier, Obligations, no 391, n'admet pas indistinctement cette décision; il fait la distinction, que nous venons de faire, que les auteurs du projet du code civil avaient adoptée, et qui a passé dans l'article 2020. La section de législation du conseil d'État avait proposé de conserver indistinctement la solution romaine pour tous les cas où le débiteur avait volontairement donné une caution, sans y être tenu par la loi ni par une condamnation. Le conseil d'État a rejeté ce changement et admis l'opinion de Pothier, comme plus conforme à la nature et l'objet du cautionnement et à l'intention des parties. Séance du conseil d'État du 16 frimaire an xu, n° 8; exposé de motifs, n° 9; rapport au tribunat, no 11; discours au corps législatif, n° 15 (Locré, XV, 289-295; 324; 341; 380).

CHAPITRE II.

DES EFFETS DU CAUTIONNEMENT. (ART. 2021-2033.)

SECTION PREMIÈRE.

DE L'EFFET DU CAUTIONNEMENT ENTRE LE CRÉANCIER ET LA CAUTION.
(Art. 2021-2027.)

DES DROITS DU CRÉANcier.

1504. 1° De l'étendue du cautionnement. Distinguons deux

cas:

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A. Les limites de l'obligation de la caution sont strictement déterminées; il faut s'y renfermer;

B. Elles ne le sont pas, et le cautionnement est indéfini; il s'étend alors à tous les accessoires de l'obligation principale, mème aux frais de la sommation et de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution (art. 2016). Car, il serait injuste de faire retomber sur la caution des frais que, faute d'ètre informée de la demande, elle n'a pas pu prévenir. Observ. du tribunat, no 3 (Locré, p. 313).

Le cautionnement comprend aussi les intérêts, les effets de la demeure, les dommages et intérêts et généralement tous les accessoires; mais il ne comprend pas des intérêts conventionnels promis postérieurement au cautionnement. Si la dette se compose de plusieurs échéances, par exemple de loyers, il s'étend à toutes les échéances.

1505. 2o Le créancier peut poursuivre la caution, sans avoir mis le débiteur principal en demeure, si la dette n'a pas été payée à l'époque convenue. Zachariæ, § 426, al. 2; Troplong, no 232. Il y a exception à cette règle si la caution est simplement fidejussor indemnitatis, c'est-à-dire si elle s'est engagée seulement à payer ce que créancier ne pourrait pas obtenir du débiteur principal.

le

1506.5° Les engagements des cautions passent à leurs héritiers, à l'exception de la contrainte par corps, si l'engagement était tel que la caution y fut obligée (art. 2017, 1122 et supra, no 44).

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