Page images
PDF
EPUB

nal avoit dictés, et qui ont été portés avec l'enthou→ siasme le plus vif et le plus unanime, au milieu des cris réitérés de vive l'empereur. Il a été suivi d'un concert, exécuté par les professeurs et les élèves du Conser vatoire, dans le local contigu à la galerie. Cette belle galerie, ornée des drapeaux et des aigles destinés aux gardes nationales, présente une décoration aussi noble que simple, et la plus agréable aux amis de la patrie, qui y trouvent réunis les emblèmes du courage et de l'honneur. Parmi les morceaux de musique exécutés avec un ensemble admirable, on a distingué la Pari-sienne et la Lyonnaise, chants nationaux souvent accueillis et répétés sur les théâtres de la capitale et des départemens, et que les dangers publics avoient dictés au même auteur en 1814. (Journal de l'Empire, du 1er juin 1815.)

No. XLV.

ADRESSE DU CHAMP-DE-MAI.

(N. B. Après l'office divin, l'assemblée centrale, composée de cinq membres de chaque collége électoral, a été conduite par le grand-maître des céré– monies sur les marches du trône. M. Dubois, député du département de Maine et Loire, a lu d'une voix forte l'adresse suivante, que l'assemblée nationale, réunie au Champ-de-Mai, a votée à l'empereur. )

Sire,

Le peuple français vous avoit décerné la couronne, vous l'avez déposée sans son aveu; ses suffrages viennent

( 132 )

132)

de vous imposer le devoir de la reprendre. Un contrat nouveau s'est formé entre la nation et V. M. Rassemblés de tous les points de l'empire autour des tables de la loi, où nous venons inscrire le vœu du peuple, ce vœu, seule source légitime du pouvoir, il nous est impossible de ne pas faire retentir la voix de la France, dont nous sommes les organes immédiats, de ne pas dire, en présence de l'Europe, au chef auguste de la nation, ce qu'elle attend de lui, ce qu'il doit attendre d'elle.

Nos paroles seront graves comme les circonstances qui les inspirent.

Que veut la ligue des Rois alliés, avec cet appareil de guerre dont elle épouvante l'Europe et afflige l'humanité ? Par quel acte, par quelle violation avons-nous provoqué leur vengeance, motivé leur agression?

Avons-nous, depuis la paix, essayé de leur donner des lois? Nous voulons seulement faire suivre celles qui s'adaptent à nos mœurs.

Nous ne voulons point du chef que veulent pour nous nos ennemis, et nous voulons celui dont ils ne veulent pas.

Ils osent yous proscrire personnellement, vous, Sire, qui, maître tant de fois de leurs capitales, les avez raffermis généreusement sur leurs trônes ébranlés !..... Cette haine de nos ennemis ajoute à notre amour pour vous. On proscriroit le moins connu de nos citoyens, que nous devrions le défendre avec la même énergie. Il seroit comme vous sous l'égide de la loi et de la puissance française, défendu des atteintes de l'étranger.

On nous menace d'une invasion! et cependant, res

serrés dans des frontières que la nature ne nous a point imposées, que long-temps et avant votre règne la victoire et la paix même avoient reculées, nous n'avons point franchi cette étroite enceinte, par respect pour des traités que vous n'avez point signés, et que vous avez offert de respecter.

Ne craint-on pas de nous rappeler des temps, un état de choses naguère si différens, et qui pourroient encore se reproduire? Ne demande-t-on que des garanties? elles sont toutes dans nos institutions et dans la volonté du peuple français, unie désormais à la vôtre. Ce ne seroit point la première fois que nous aurions vaincu l'Europe entière armée contre nous.

Ces droits sacrés, imprescriptibles, que la moindre peuplade n'a jamais réclamés en vain au tribunal de la justice et de l'histoire, c'est à la nation française qu'on ose les disputer une seconde fois, au dix-neuvième siècle, à la face du Monde civilisé !

Parce que la France veut être la France, faut-il qu'elle soit dégradée, ou du moins déchirée, démembrée et nous réserve-t-on le sort de la Pologne !

Vainement veut-on cacher des funestes desseins sous le dessein unique de vous séparer de nous, pour nous donner des maîtres avec qui nous n'avons plus rien de commun, que nous n'entendons plus, et qui ne peuvent plus nous entendre; qui ne semblent appartenir ni au siècle, ni à la nation qui ne les a reçus un moment dans son sein que pour voir proscrire et avilir par eux ses plus généreux citoyens.

Leur présence a détruit toutes les illusions qui s'attachoient encore à leur nom.

Ils ne pourroient plus croire à nos sermens, nous ne pourrions plus croire à leurs promesses. La dîme, la féodalité, les priviléges, tout ce qui nous est odieux, étoit trop évidemment le but et le fond de leur pensée, quand l'un d'eux, pour consoler l'impatience du présent, assuroit à ses confidens qu'il leur répondoit de l'avenir.

Ce que chacun de nous avoit regardé pendant vingtcinq ans comme titre de gloire, comme services dignes de récompense, a été pour eux un titre de proscription, un sceau de réprobation.

Des milliers de fonctionnaires, des magistrats, qui, depuis vingt-cinq ans, suivent les mêmes maximes, et parmi lesquels nous venons de choisir nos représentans; cinq cent mille guerriers, notre force et notre gloire; six millions de propriétaires investis par la révolution; un plus grand nombre encore de citoyens éclairés, qui font une profession réfléchie de ces idées devenues parmi nous des dogmes politiques : tous ces dignes Français n'étoient point les Français des Bourbons; ils ne vouloient régner que pour une poignée de privilégiés depuis vingt-cinq ans punis ou pardonnés.

L'opinion même, cette propriété sacrée de l'homme, ils l'ont poursuivie, persécutée jusque dans le paisible sanctuaire des lettres et des arts.

Sire, un trône fondé par les armes étrangères, et environné d'erreurs incurables, s'est écroulé en un instant devant vous, parce que vous nous rapportiez de la retraite, qui n'est féconde en grandes pensées que pour les grands hommes, tous les erremens de notre véritable gloire, et toutes les espérances de notre véritable prospérité.

Comment votre marche triomphale de Cannes & Paris n'a-t-elle pas dessillé tous les yeux ? Dans l'histoire de tous les peuples et de tous les siècles, est-il une scène plus nationale, plus héroïque, plus impo¬ sante? Ce triomphe, qui n'a point coûté de sang, ne suffit pas pour détromper nos ennemis..... En veulentils de plus sanglans? Eh bien ! Sire, attendez de nous tout ce qu'un héros fondateur est en droit d'attendre d'une nation fidèle, énergique, généreuse, inébranlable dans ses principes, invariable dans le but de ses efforts, l'indépendance à l'extérieur, et la liberté au dedans.

Les trois branches de la législature vont se mettre en action; un seul sentiment les animera. Confians dans les promesses de V. M., nous lui remettons, nous remettons à nos représentans et à la chambre des pairs, le soin de revoir, de consolider, de perfectionner, de concert, sans précipitation, sans secousse turité, avec sagesse, notre système constitutionnel et les institutions qui doivent en être la garantie.

avec ma

Et cependant, si nous sommes forcés de combattre, qu'un seul cri retentisse dans tous les cœurs : <«< Marchons à l'ennemi qui veut nous traiter comme la dernière des nations! Serrons-nous tous autour du » trône où siége le père et le chef du peuple et de » l'armée. »

>>

Sire, rien n'est impossible, rien ne sera épargné pour nous assurer l'honneur et l'indépendance, ces biens plus chers que la vie. Tout sera tenté, tout sera exécuté pour repousser un joug ignominieux; nous le disons aux nations: puissent leurs chefs nous entendre !

« PreviousContinue »