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No. XX.

MARIE-THÉRÈSE DE FRANCE, FILLE DE FRANCE, DUCHESSE D'ANGOULÊME, AUX BORDELAIS.

Braves Bordelais !

Votre fidélité m'est connue. Votre dévouement sans bornes ne vous laisse entrevoir aucun danger; mais mon attachement pour vous, pour tous les Français, m'ordonne de les prévenir. Mon séjour plus long-temps prolongé dans votre ville pourroit aggraver votre position, et faire peser sur vous le poids de la vengeance. Je n'ai pas le courage de voir les Français malheureux.

Je vous quitte, braves Bordelais, pénétrée des sentimens que vous m'avez exprimés; je vous donne l'assurance qu'ils seront fidèlement transmis au Roi : bientôt, avec l'aide de Dieu, dans des circonstances plus heureuses, je vous témoignerai ma reconnoissance et celle du prince que vous chérissez.

Signé MARIE-Thérese.

Bordeaux, le 1er avril 1815.

No. XXI.

PROCLAMATION DU LIEUTENANT-GÉNÉRAL MORAND, AUX HABITANS DES DÉPARTEMENS DE L'OUEST ET DU MIDI.

Notre auguste et magnanime empereur m'a confié le commandement d'une armée nombreuse qui, divisée en plusieurs colonnes, parcourt en ce moment vos villes et

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vos campagnes, pour assurer la tranquillité des bons Français, des citoyens paisibles, que prétendroient en vain troubler quelques hommes ivres et toujours altérés du sang français, qui, comme les démons poursuivis par leurs crimes, leurs remords et leur désespoir, voudroient répandre encore sur nous tous les maux qui déchirent leur cœur.

Ne devroient-ils pas être las et rassasiés, ces traîtres infâmes qui, depuis vingt-cinq ans, agitent parmi nous les brandons de la discorde, qui ont appelé et introduit l'étranger pour dévaster la patrie, qui ont uni constam

ment leurs armes et leurs forces aux meurtriers de leurs frères?

Que veulent-ils encore? N'ont-ils pas livré nos villes, vendu nos arsenaux, nos vaisseaux, dépouillé les trésors de l'Etat, outragé notre empereur et notre gloire? N'ontils pas rendu assez d'indignes hommages aux ennemis de la France, qui sont encore étonnés de leur lâche trahison, de leur bassesse et de leur ignominie?

N'ont-ils pas livré ce héros protecteur, qui pendant vingt ans avoit éloigné de nos frontières les désastres d'une guerre que leur orgueil avoit allumée, et qu'il entretenoit; ce héros qui nous avoit élevés au plus haut degré de grandeur et de puissance, qui alloit anéantir, d'un dernier coup de massue nos ennemis déjà tant de fois

vaincus?

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Que veut cette femme qui se prosterne dans nos temples? (1).....

(1) Ici notre plume se refuse à retracer les horrible accens dans lesquels l'auteur de la proclamation, sans être arrêté par les respects qu'inspirent le comble des infortunes royales et

Ils savent bien tous qu'ils sont indignes de notre généreuse nation: aussi que n'ont-ils pas fait pour nous avilir, pour flétrir nos lauriers, pour arracher de nos âmes l'amour sacré de la gloire de la patrie, et tous les sentimens sublimes qui font notre force et le désespoir de nos ennemis?

Peuple français, nobles enfans de la victoire, vous l'avez vu en frémissant : des traîtres infâmes, des assassins, des voleurs de grand chemin, avoient revêtu les marques de l'autorité sur vous; ils étoient couverts de distinctions qui ne s'accordent qu'aux services rendus à la patrie, à l'honneur et à la loyauté.

Pourquoi tant d'agitations, tant de crimes, tant de fureurs depuis vingt-cinq ans? C'est pour asservir, pour humilier un peuple fier et généreux, pour l'attacher au joug de quelques nobles avilis, qui demandent le privilége de le dépouiller et de lui arracher le produit de ses pénibles travaux.

Des nobles! Eh quoi! tous les Français libres et victorieux ne sont-ils donc pas tous également nobles? Le sang qui coule dans les veines des braves, n'est-il donc pas le plus pur et le plus noble? N'avons-nous pas fait pour la gloire de la France, dans vingt-cinq années, plus qué nos pères dans quatre siècles?

l'héroïsme de la résignation, calomnie ce que le monde venère; que dis-je, poursuit jusqu'au pied de ees autels, seuls confidens de ses vœux et de ses prières pour la France, l'héritière des vertus de Louis XVI; et, cherchant dans son propre cœur les sentimens de MADAME, nous peint la fille de saint Louis sous les traits d'une femme furieuse qui demande à Dieu le pouvoir da se venger, de faire couler le sang français!

Notre avilissement et de l'or: voilà ce qu'ils veulent, voilà pourquoi ils on! attiré sur nous les malheurs d'une guerre si longue, voilà pourquoi ils appellent la guerre civile et tous les forfaits.

Prêtres de notre religion sainte, jetez-vous entre les démons du sang et les hommes qu'ils veulent séduire ; rappelez au peuple cette époque si glorieuse pour notre magnanime empereur qui a relevé nos autels, et que nous ne pouvons méconnoitre pour l'homme de la Providence, au miracle qui nous le rend. Dites-leur comment, livré par la trahison à nos ennemis, il ordonna à ses guerriers fidèles de remettre le glaive dans le fourreau: pour que leur résistance n'accrût pas les dangers et les désastres de la patrie, il se résigna à l'exil, brava tous les outrages de la lâcheté et de la peur, pour empêcher l'effusion du sang français.

Il est arrivé dans sa capitale, porté comme un père sur les bras de ses peuples, au milieu de leurs cris d'allégresse, de leurs bénédictions, et couvert du bouclier de l'Eternel. Plein de la pensée de ses grandes destinées, inaccessible à toutes les misérables passions humaines, il vient nous arracher aux assassins dont le bras étoit déjà levé sur nous, qui alloient couvrir notre patrie de cadavres et en faire la proie de nos voisins. Son retour nous sauve d'une guerre civile affreuse et inévitable, de la honte et de la destruc

tion.

Proclamé empereur sur le champ de la victoire, il dut suivre l'impulsion du grand peuple, diriger son élan vers la gloire, et ses efforts vers la grandeur et la prospérité qu'il vouloit; chargé de ses destinées et de son avenir, il jeta les fondemens d'un empire qui devoit nous assurer

pour jamais l'indépendance, et le repos de la puissance et de la force.

La trahison à creusé l'abìme qui a englouti tant d'illustres travaux; les barrières que la victoire avoit placées autour de nous ont été ouvertes ou livrées; mais le secret de nos forces est dans nos cœurs, notre puissance dans la grandeur de nos courages, dans le génie de notre empereur, dans l'amour de la patrie, dans la générosité de nos sentimens. Il connoit ce secret.

Si la première époque de son règne fut consacrée à la gloire des armes autant qu'à la création des grandes institutions et de nobles monumens, la seconde époque le sera particulièrement à nous faire jouir de tout le bonheur dont le germe est dans le cœur de l'homme, au développement de ce que Dieu y a placé de grand et de sublime, à la jouissance de toute la liberté qui rend la patrie chère. La France, ravie de son retour, le sera bien davantage de ses grandes et hautes conceptions pour le bonheur de ses peuples, la prospérité de l'agriculture, du commerce et des beaux arts.

Vive l'Empereur !!!

Au quartier-général à Nantes, le 3 avril 1815.

Le lieutenant-général, aide-de-camp de l'empereur, commandant l'armée d'observation.

Signé comte MORAND.

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