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la haie en élargissant sa base, de donner aussi plus de place à chaque plant dans la terre, tout en les rapprochant assez pour qu'ils forment une clôture continue, bien fermée; car les sujets, qui sont à 28 centimètres l'un de l'autre sur chaque ligne, ne présentent réellement, vus par la face extérieure ou intérieure de la haie, qu'un espace moitié moindre (14) centimètres), et cet espace est bientôt rempli par la végétation. Une haie ainsi établie emploie 371 plants 1/2 par décamètre courant, et par conséquent 14,860 plants, si la pépinière étant carrée son périmètre présente un développement de 400 mètres (100 mètres de côté). Lors de la plantation, on rabat la tige des jeunes sujets à 5 centimètres du sol, pour que leur pied devienne plus vigoureux et se garnisse mieux de rejets. Nous indiquerons plus loin, en parlant de l'entretien et de la conduite de la pépinière, les divers soins qu'on doit donner à la haie pour la former, l'élever et la rendre plus promptement défensable. Lorsqu'on a lieu de redouter l'atteinte du grand et du petit gibier à poil, on doit, jusqu'à ce que la haie vive soit défensable, la protéger ainsi que la pépinière par une clôture sèche établie entre le bord intérieur du fossé et la haie vive. Cette clôture sèche est surtout indispensable quand l'enceinte de la pépinière n'est pas entourée d'un fossé, et dans ce cas il faut l'établir solide

ment.

Choix des graines.

La bonne qualité des graines est d'une grande importance. L'emploi de mauvaises semences occasionne une perte certaine de temps et d'argent : quand le semis manque par cette cause on perd, en effet, le prix d'acquisition ou de revient des graines semées, le prix de la nouvelle préparation à donner au terrain, et on est contraint, en outre, de renvoyer le semis à la saison ou à l'année suivante. On ne saurait donc apporter trop de soins dans le choix des semences, surtout si on ne les a pas fait récolter et conserver soi-même. Nous avons dit longuement au chapitre : Récolte et conservation des graines, et pour chaque essence séparément, tout ce qu'il y ́avait à faire pour les récolter, les conserver et constater, au moment du semis, leur bonne qualité; nous ne reviendrons pas sur ces details; seulement, si l'on n'est pas sûr de la graine, si on ne l'a pas conduite en la stratifiant à un commencement de germination, témoignage irrécusable de fécondité, nous rappellerons qu'il est sage de s'assurer de sa qualité par un semis d'épreuve. A cet effet, on prend quelques graines parmi celles à employer, on les fait tremper pendant 20 à 24 heures dans de l'eau à la température d'un appartement clos, on les sème ensuite en terrine ou en pot dans du terreau ou une bonne terre bien émiée, bien arrosée, qu'on humecte presque tous les jours pendant le laps de temps que la graine met ordinairement à lever, et qu'on place en lieu chaud. Si, ce temps écoulé, la graine ne lève pas ou ne présente pas un commencement de germination, il est à peu près certain qu'elle est mau

vaise, puisque les soins donnés au semis et les conditions favorables dans lesquelles on l'a placé auraient dû raccourcir la durée ordinaire de la germination. On pourra se régler, pour l'exécution de ce semis d'épreuve, d'après ce que nous dirons tout à l'heure à l'article semis, sur l'épaisseur de terre qui doit recouvrir les graines, et sur le nombre de jours que chaque espèce met à germer dans les conditions habituelles.

Choix de l'époque des semis.

Le choix de l'époque des semis, si on est libre de le faire, doit être déterminé, selon les circonstances, par la nature du terrain et l'espèce des graines à semer. Dans un terrain humide par excès et non abrité des vents froids, où l'action de la gelée est par cela même plus pénétrante, les graines semées avant l'hiver, surtout celles dont le périsperme ou l'amande est charnue (glands, châtaignes, marrons, etc.), courent le double danger de pourrir si l'hiver est pluvieux, ou de geler s'il est froid. Les semis d'automne, si les souris et les mulots sont nombreux dans la localité, sont encore exposés à être dévorés par ces animaux; enfin, lorsque la terre, par sa nature calcaire, déchausse pendant les gelées, les graines y sont exposées à être rejetées sur le sol, où elles gèlent ou pourrissent. Il est donc toujours prudent, dans ces circonstances de climat et de localité, d'opérer les semis au printemps. Le principal avantage des semis d'automne sur ceux du printemps, est de dispenser de la difficulté de conserver saines durant plusieurs mois, de grandes quantités de graines récoltées en octobre ou en novembre; aussi, pour tous les semis à demeure un peu importants et dans des terrains ne se trouvant pas dans l'exception qui vient d'être indiquée, nous conseillons l'automne, d'autant mieux que dans ces semis on sème généralement beaucoup plus de graines qu'il n'en faudrait pour le peuplement si toutes levaient, afin de faire d'avance la part des accidents. Mais dans les pépinières, où l'on n'a pas ordinairement de grandes quantités de graines à semer, où il est important que toutes les graines semées germent et produisent, puisque le but qu'on poursuit n'est pas de boiser le terrain où l'on sème, mais d'y obtenir le plus grand nombre possible de jeunes plants dans un espace donné, nous n'hésitons pas à recommander les semis du printemps pour toutes les graines qui ne sont pas d'une conservation trop difficile, principalement si l'on dispose d'un local convenable pour les stratifier et les manipuler. Il n'y a que les graines qui s'altèrent promptement et se récoltent d'aif. leurs de bonne heure, telles que celles de l'orme, du bouleau, etc., qu'il serait dangereux de ne semer qu'au printemps suivant et qu'il importe au contraire de semer peu après leur récolte. Les semis du printemps offrent ainsi ce grand avantage pour une pépinière : de préserver les graines semées des gelées et des animaux qui en détruisent toujours une certaine quantité, lorsqu'elles passent l'hiver dans le sol; de s'opérer dans de

meilleures conditions de succès puisqu'il est possible de n'employer que des graines bien conservées, de bonne qualité et dont la germination est à peu près certaine; enfin lorsqu'il s'agit de glands, de châtaignes, de marrons ou de toute autre semence qu'on peut conduire avant le semis, par la stratification, à une germination prononcée, le semis du printemps donne l'assurance que chaque graine mise en terre et présentant déjà le premier développement du rudiment de la plante, produira infailliblement un sujet. Le choix de l'époque des semis ne doit pas faire oublier la recommandation faite plus haut de laisser un intervalle d'un à deux mois au moins entre la préparation du terrain et l'exécution des semis. On devra donc préparer pendant l'automne le terrain des pépinières à semer au printemps et pendant l'été les terrains qu'on se propose de semer en au

tomne.

Ces considérations générales sur le choix de l'époque des semis étant exposées, nous allons indiquer, pour chaque essence séparément, les divers procédés qu'on peut employer dans l'ensemencement des pépi

nières.

(La suite prochainement).

S. SEGURET.

PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE.

Observation sur les résultats de la suppression, par l'action du vent, de l'un des bras d'un arbre bifurqué à 2m 50 du sol.

L'étude de tous les phénomènes, résultant d'accidents ou d'épreuves, et démontrant clairement les vérités naturelles, est la base indispensable de toute science qui doit s'appuyer sur ces vérités en sylviculture, la marche lente et mystérieuse de la végétation appelle surtout l'attention des forestiers, parce que la connaissance de cette marche invariable doit déterminer toutes les opérations que réclame le traitement des forêts. C'est d'après cette idée que déjà je me suis permis de rendre compte de quelques remarques que j'ai été à même de faire dans ma pratique journalière, et c'est dans le même but que je rapporte aujourd'hui les faits que j'ai observés sur un hêtre que je viens de faire exploiter dans la forêt de Compiègne, au canton de Saint-Sauveur.

Ce hêtre, âgé de cent quinze ans, se trouvait bifurqué à 2m 50° du sol; en 1834, un ouragan vint rompre un des bras tout près de la fourche, et réduire ainsi de moitié la tige et la tête de cet arbre qui a continué à vi❤ vre, malgré cette mutilation.

Cependant, la partie rompue commençant à se corrompre, il devenait indispensable d'exploiter l'arbre, ainsi que cela vient d'avoir lieu; et afin

de juger l'effet qu'avait produit l'accident qui l'a frappé, j'en ai fait détacher la partie que je figure ici, et sur laquelle j'ai pu constater les faits que je rapporte.

B

Α

Lorsque le bras C a été rompu, la tige A s'est trouvée subitement privée de toutes les feuilles que portait ce bras; aussi, l'accroissement de cette tige, indiqué par l'épaisseur des couches annuelles, a-t-il diminué sensiblement à dater de cet accident.

Cependant, les racines n'avaient éprouvé aucune altération; elles pouvaient donc fournir plus largement à la vie du bras B, resté intact; c'est ce qui est arrivé, puisque les couches annuelles de ce bras ont augmenté depuis cette époque dans une proportion à peu près égale à celle de la diminution des couches de la tige.

Ceci prouve clairement: 1° que le nombre de feuilles ou plutôt la somme de surface qu'elles présentent est, à conditions égales de climat, de sol et d'exposition, la proportion rigoureuse de l'accroissement que l'on doit attendre d'un arbre;

2o Que l'état des racines exerce une influence très-prononcée sur l'accroissement, puisque l'on voit le bras qui a survécu profiter, par un grossissement plus fort, de la richesse de la racine qui nourrissait d'abord les deux bras;

3o Que la nature a pourvu les plantes de tous les moyens de parer aux accidents qu'elles éprouvent, et que tout, dans la végétation, tend à réparer ces accidents, et à rétablir l'harmonie qui doit exister entre toutes les parties qui constituent la plante: puissance des racines; volume de la tige et surface des feuilles.

J'ai pensé que ces courtes réflexions sur une question déjà traitée, et qui n'a besoin désormais que de corollaires, pourraient tenir utilement leur place dans un numéro des Annales Forestières, et c'est dans ce but que je les ai rédigées.

A. POIRSON,

Inspecteur de la forêt de Compiègne. J

OBSERVATIONS SUR QUELQUES OBSTACLES

QUE RENCONTRERA LE REBOISEMENT DES MONTAGNES.

Monsieur le directeur,

Au moment où vous vous occupez d'étudier la question du reboisement des montagnes, permettez-moi de vous soumettre sur ce sujet quelques réflexions : je ne vous entretiendrai pas des causes du déboisement, vous les connaissez; mais parmi les moyens qui seront indiqués pour remédier au mal qui existe aujourd'hui, il en est un qui sera peut-être négligé et qui cependant serait susceptible d'amener des résultats satisfaisants, s'il était mis à exécution; je vais avoir l'honneur de vous en entretenir.

Pendant un court séjour dans les Pyrénées (10 mois, de 1843 à 1844), j'eus lieu de reconnaître combien ce pays était arriéré sous les rapports forestiers et agricoles, et je cherchai à m'en expliquer la cause; je ne pus que l'attribuer à la trop grande quantité de terrains de toute nature que possèdent les communes. En effet, ces terrains, dont beaucoup sont susceptibles d'être convertis en terre arable, restent en vaine pâture et sont livrés au parcours des bestiaux qui, comme vous le savez, forment la richesse du pays; je remarquai que les habitants n'étaient pas seuls à faire pacager leurs troupeaux sur le territoire de leurs communes; que pendant la belle saison, les pasteurs de la plaine se réunissaient à ceux de la montagne et que ces derniers allaient à leur tour passer l'hiver dans la plaine: or, si on parvenait à mettre en culture les terrains en plaine restés jusqu'à ce jour incultes, (et on le pourrait, ce me semble, par le partage qu'on autoriserait par une loi entre les habitants, avec cette condition), on retiendrait ainsi chez eux les habitants de la plaine et on diminuerait par là le nombre des bestiaux qui vont pâturer sur la montagne. Je ne me dissimule pas qu'une semblable mesure trouvera de l'opposition de la part des communes, et en voici le principal motif : lorsque des pasteurs étrangers viennent faire paître leurs troupeaux sur le territoire d'une commune, ils paient au maire une somme quelconque; cette redevance, dont le maire rend un compte plus ou moins exact à ses administrés, ne figure pas dans le budget de la commune et forme ce qu'on appelle la masse noire (on doit comprendre que la place de maire est fort enviée dans le pays). Les habitants des montagnes possèdent généralement peu d'argent, et comme les hommes valides ne sont presque jamais au pays, la commune pourvoit elle-même aux besoins des habitants nécessiteux; elle s'abonne, par exemple, avec un médecin, non-seulement pour les soins à donner aux malades, mais encore pour la fourniture des médicaments; je connais

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