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bois en nature de PARCS ou de JARDINS CLOS; ce qui prouve assez que le bois n'est ici que l'accessoire, qu'il doit être assuré à l'habitation à titre d'annexe et pour contribuer à l'agrément ou à l'utilité du domaine. Vainenement objecterait-on l'art. 391 C. pén. qui répute parc ou enclos tout terrain environné de fossés, de pieux, de claies, de planches, etc. La cour de cassation a très-judicieusement écarté l'application de cet article, en matière de défrichements, en faisant observer que la définition de l'art. 391 a un but spécial, un but de répression et de pénalité; que la véritable définition du mot parc, dans la langue forestière, était celle de la loi du 9 floréal an XI, dont l'art. 5 ne permet de réputer parc un bois clos, qu'autant qu'il est attenant à l'habitation principale; ce qui ne peut s'entendre que d'une habitation dont le parc est l'accessoire, et non de celles qui n'y out été établies que pour sa garde, son exploitation et le service des usines qui en dépendent. (Cass. 11 mars 1836, Dalloz, 1836, 1, 332, et R. F. t. 5, p. 366 et suivantes.

Cette doctrine, la seule conforme aux vrais principes, avait été précédemment consacrée par un arrêt de la cour de Nancy, du 22 novembre 1834, rendu sous la présidence de M. Troplong et sur les conclusions conformes de M. Fabvier, alors avocat général. (Dalloz 1835, 2,128). La cour a décidé qu'il ne suffisait pas d'entourer de fossés un bois attenant à une habitation pour l'affranchir de la prohibition de défricher; qu'il faut en outre que, dans la réalité, la forêt soit destinée à l'agrément du propriétaire combiné avec ses intérêts.

Il est vrai qu'antérieurement, et à la date du 15 juin 1833, la Cour avait rendu un arrêt favorable à la faculté de défricher (Voir Bulletin, ann. 1846, art. 423, p. 31, aff. de Villemotte); mais les motifs de cet arrêt ne nous paraissent pas destinés à faire jurisprudence. Il est évident que la cour a jugé sous l'impression des nombreux défrichements effectués en exécution des ventes faites par l'État depuis 1831.

Il ne nous est donc pas possible de répondre d'une manière absolue à la question qui nous est proposée. Néanmoins, dans l'état actuel des choses, il n'est pas possible de regarder le bois dont s'agit comme annexe d'une habitation, puisque l'habitation, aujourd'hui en ruines, était jadis un rendez-vous de chasse. Il est vrai que l'on veut remplacer par une résidence d'été une maison d'agrément; mais c'est plus tard seulement que le défrichement serait possible, et il ne le serait qu'à la condition d'une entière bonne foi, et seulement lorsque le bois pourrait être regardé comme une dépendance, un accessoire de la nouvelle habitation.

Notre correspondant ajoute que cette habitation serait contiguë à la forêt qu'on voudrait défricher : il vaudrait mieux qu'elle y fût renfermée; néanmoins, si, par contiguë, on entend que la maison serait attenante, comme le veut la loi, la condition imposée par l'art. 223 serait suffisamment remplie.

XXXVII. QUESTION.

Les procès-verbaux dressés par les gardes-ventes des coupes adjugées par l'Etat rentrent-ils dans la catégorie de ceux qui doivent être enregistrés en débet, aux termes de l'art. 170 C. for. ?

RÉPONSE. Il paraît que l'administration de l'enregistrement exige sou

vent des gardes-ventes les droits de timbre et d'enregistrement des procès-verbaux par eux dressés.

Notre correspondant nous fait observer que cette prétention, si elle était fondée, aurait pour résultat de laisser à la charge des adjudicataires une dépense sans doute minime, mais réelle. Il est possible, en effet, qu'en constatant un délit, le garde-vente ne puisse, malgré tous ses efforts, en signaler l'auteur, qui demeurera inconnu. En supposant mème que le délit constaté eutraîne une condamnation, la liquidation des dépens comprendra tous les frais de l'instance et par conséquent ceux du procèsverbal, rédigé par le garde, comme ceux du jugement rendu; en cas pareil, c'est le trésor qui recouvre le montant de la condamnation, et il recouvre les frais de timbre et d'enregistrement déjà payés par le garde-vente, en sorte qu'il bénéficie d'une double perception, l'une prélevée sur l'adjudicataire, l'autre sur le condamné!

A notre sens, la prétention de la régie n'est pas admissible, et le texte de la loi, aussi bien que son esprit, exige que les procès-verbaux des gardes-ventes soient enregistrés en débet comme ceux des gardes forestiers.

Cette solution se déduit de la simple combinaison des art. 31 et 170 C. for. L'art. 31 oblige chaque adjudicataire à avoir un garde-vente, lequel est autorisé à dresser des procès-verbaux tant dans la vente qu'à l'ouïe de la cognée, et il ajoute que les procès-verbaux seront soumis aux mêmes formalités que ceux des agents forestiers, et feront foi jusqu'à preuve contraire.

Or, au nombre des formalités imposées par l'article 170 aux procèsverbaux des gardes forestiers, se trouve l'enregistrement dans les quatre jours, et il doit se faire en débet.

Le législateur, dira-t-on, n'entend point assimiler complétement le garde-vente au garde forestier; le premier reste l'homme de l'adjudicataire, son préposé, son mandataire; il est nommé par celui-ci ; s'il dresse des procès-verbaux, c'est dans l'intérêt de la responsabilité, dont la loi le frappe, en présumant, jusqu'à preuve contraire, que les délits commis dans les ventes et à l'ouïe de la cognée, ont pour auteurs l'adjudicataire ou ses agents (C. for. art. 45). Il n'est point, à proprement parler, un agent de l'administration; aussi, sa prestation de serment n'est-elle soumise qu'au droit fixe d'un franc (Circ. du direct. de l'enregis. 12 sep. 1810) tandis que l'acte de prestation de serment des gardes est imposé à un droit plus élevé (L. frim., an vii, art. 68, § 3, no 3 et art. 14. L. vent. an IX.) — On réfutera l'argument tiré de l'art. 31, en disant que la loi soumet bien les procès-verbaux dont elle parle aux mêmes formalités que ceux des gardes forestiers, sans vouloir leur accorder les mêmes priviléges et en particulier celui de l'enregistrement gratuit, lequel est, en principe, une faveur exclusivement réservée aux actes dont les droits tomberaient à la charge de l'Etat.

Cette argumentation nous paraît plus spécieuse que solide. Le garde-vente a un double caractère; sans doute, il est, avant tout, l'homme de l'adjudicataire qui doit le désigner à l'agent forestier local; mais il faut qu'il soit agréé par cet agent, qui a le droit de le refuser; il est donc placé sous le contrôle de l'administration forestière; en outre, il est soumis à un serment devant le juge de paix de la localité, et il devient ainsi offi

cier de police judiciaire; ses procès-verbaux font foi jusqu'à preuve contraire; et, dans notre opinion, les délits qu'il commettrait dans le triage confié à sa garde, nécessiteraient une répression spéciale et une juridiction exceptionelle.

Le garde-vente est donc à la fois le préposé de l'adjudicataire et celui de P'Etat il surveille dans un double intérêt, et quand il découvre et constate régulièrement un délit, non-seulement il décharge son commettant de toute responsabilité, mais il agit encore et plus particulièrement dans un intérêt général, dans celui de la vindicte publique et de l'Etat lui-même; aussi, n'est-il pas douteux que l'adjudicataire demeurera étranger à la poursuite de ce délit, et que le prévenu sera cité à la requête, soit du ministère public, scit de l'administration forestière (C. for., art. 171; C. pén., art. 388.) C'est à la requête du ministère public que seront exécutées également les condamnations contre la personne; et c'est l'Etat qui profitera seul des amendes et restitutions pécuniaires ordonnées par la justice.

C'est parce que la loi a vu dans les facteurs ou gardes-ventes, après leur présentation par l'adjudicataire, leur agrément par l'agent forestier et leur prestation de serment, des individus investis d'un caractère public, des auxiliaires de l'autorité, qu'elle a imprimé à leurs procès-verbaux un certain degré de certitude en justice, et qu'elle les a soumis aux mêmes formalités que les procès-verbaux des gardes. L'art. 31 est général et n'admet aucune distinction. Les gardes-ventes devront dresser leurs procès-verbaux dans les mêmes formes, les affirmer et les faire enregistrer dans le même délai; pourquoi, en présence d'une assimilation aussi complète, soumettre cet enregistrement à un droit dont les exonère l'art. 170 C. for.? Cette perception, tout arbitraire, n'est fondée sur aucun texte, et, comme nous pensons l'avoir démontré, elle répugne avec tant d'évidence à l'esprit de la loi, qu'il ne nous paraît même pas nécessaire d'insister sur les judicieuses observations que nous adresse notre honorable correspondant, et dont nous avons présenté, en commençant cette discussion, une fidèle analyse.

CONFÉRENCES FORESTIÈRES.

Séance du 25 janvier. — Présidence de M' le baron de Sahune.

(Extrait du procès-verbal.)

M. Michel, au nom de la commission chargée de revoir et de compléter le réglement des conférences forestières, soumet à l'adoption de l'assemblée le projet d'un réglement nouveau. Ce projet discuté par l'assemblée et légèrement modifié par elle en quelques points, sur la proposition de MM. Legros Saint-Ange, le marquis de Saint-Seine et Loiseau, est converti en un réglement définitif voté à l'unanimité.

Plusieurs membres déposent sur le bureau les demandes d'admission de dix candidats présentés par eux, soit comme membres résidents, soit comme membres correspondants.

L'assemblée passe ensuite à la discussion préliminaire de la question du boisement, du reboisement et du défrichement. Avant de procéder à

FÉVRIER 1846. — v.

T. V. - 8

la nomination d'une commission chargée de faire un rapport sur cette matière, M. le président observe qu'il importe que des considérations générales soient développées, et que l'assemblée détermine la marche qu'elle entend suivre dans l'étude d'une question si complexe, qui touche à la fois à l'économie politique, à la législation et à l'administration, non moins qu'à la sylviculture et aux travaux d'art.

Plusieurs membres prennent la parole et présentent des observations générales, après quoi on procède à la composition de la commission. Sont nommés membres, MM. le marquis de Saint-Seine, Legros Saint-Ange, Séguret, Ad. Brongniart, Mauny de Mornay, Barral, Lorentz, Loiseau et Michel. M. le président invite en outre MM. le marquis de Chambray, Talotte et Barrault, à s'adjoindre à la commission, si leurs occupations le leur permettent.

La parole est accordée à M. Loiseleur-Deslongchamps, qui donne lec→ ture d'une notice sur le chéne vélani *.

Séance du 8 février. - Présidence de M. le baron de Sahune.

(Extrait du procès-verbal.)

MM. de Sahune et Séguret, de Pinteville et Loiseau, déposent sur le bureau les demandes d'admission de deux candidats nouveaux qu'ils présentent comme membres résidents.

On procède à l'élection des candidats présentés à la dernière séance. Sont élus :

Comme membres résidents,

MM. André Michaux, auteur du Traité des arbres forestiers de l'Amérique Septentrionale; Pepin, chef de l'école de botanique au Jardin du roi; Lefour, agriculteur; Walter, Legat, Bizet, Salme, De Villiers du Terrage, avocats à la Cour royale.

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Comme membres correspondants,

MM.Rieffel, directeur de l'Institut agricole de Grandjouan;

Loiseau, juge de paix à Pontarlier.

M. Brongniart, l'un des membres de la commission du reboisement, donne communication des travaux auxquels elle s'est livrée. Son premier soin a été de rédiger un programme des matières à examiner. Elle a pensé que ce programme devait contenir, outre les questions principales, les questions secondaires; que l'on pourrait embrasser ainsi, d'un coup d'œil, dans son ensemble comme dans ses détails, ce sujet si vaste, et que l'étude en deviendrait plus facile. Elle a recherché ensuite quels étaient les ouvrages et les documents qui pouvaient être consultés avec fruit et jeter quelque lumière sur les questions qu'elle avait posées.

Elle a fait imprimer l'indication de ces documents à la suite du programme des questions, et elle a décidé qu'il en serait remis un exemplaire à chacun des membres des conférences. M. Brongniart donne lecture de ce travail et fait espérer que la commission sera bientôt en mesure, grâce à l'assiduité de ses travaux, de lui soumettre son rapport.

La séance prochaine est indiquée au 8 mars.

1 Nous donnerons cette notice, dans notre prochaine livraison.

Nous l'insérons tout au long p. 103.

PROGRAMME DES QUESTIONS A ETUDIER,

A l'occasion du projet de loi sur le reboisement et le défrichement.

I.

Recherches préliminaires de statistique sur l'étendue du sol boisé et du sol à reboiser.

II.

Causes du déboisement, anciennes et actuelles,

dues :

1o A l'état politique :

Ancienne constitution de la propriété.

Dévastations pendant les troubles civils et les invasions.
Effets du régime communal.

2° A la législation :

Assiette et répartition de l'impôt foncier.
Servitudes et usages dans les forêts.

Insuffisance de la répression des délits.

3o A l'administration :

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-

Autorisation de défrichement.

Aliénations avec faculté de défrichement.

- Insuffisance de l'organisation administrative et du personnel, vices des exploitations.

4o A la constitution spéciale de la propriété forestière :

Insuffisance du revenu donné par la propriété boisée, et excès de ses charges comparées à ses revenus.

Difficultés d'administration de cette nature de propriété. Insuffisance des débouchés, et mauvais état des voies de transport; élévation des droits de navigation, et des droits d'octroi.

Concurrence des bois et des fers étrangers, par suite du taux
minime des droits d'entrée.

Concurrence de la houille et des combustibles minéraux.
Absence d'une surveillance et d'une protection suffisantes.
Abus du pâturage.

III.

Remèdes à ces causes.

1° Dégrèvement de la propriété forestière, et révision de la répartition de l'impôt.

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