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DEPUIS

EPUIS cinq ans que l'Annuaire historique universel est établi, sa publication a été, chaque année, retardée d'un mois depuis cinq ans aussi notre tâche s'est agrandie; nos matériaux sont devenus plus abondans, et des affaires particulières, des pertes douloureuses ont, récemment encore, interrompu notre travail. Nous ne l'avons pas moins repris avec le même zèle, de nouveaux preuve; il a reçu et ce volume en est la perfectionnemens.

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Cette année a vu de grands événemens s'accomplir ou se préparer. Dans sa première partie, l'Annuaire historique donne à considérer deux sessions législatives, des conspirations, et des procès à classer entre les faits historiques les plus importans. Dans sa partie étrangère, on verra les suites de la querelle de l'Orient; l'aigle russe attendant toujours le signal des combats; le Divan résistant aux efforts de la diplomatie austrobritannique; une guerre sanglante, atroce, désespérée; des exploits qui rappellent les trophées de Mycale, et qui soulèvent la poussière héroïque des Thermopyles et de Platée; d'un autre côté, l'Espagne

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en proie aux fureurs des factions, aux horreurs d'une guerre civile, et s'irritant de ses malheurs; un grand procès porté au congrès de Vérone; l'Amérique entière échappant à la tutelle de l'Europe, et dans cette agitation universelle, la vieille Angleterre, appuyée sur son trident, forte d'une constitution infusée dans ses mœurs, riche de son industrie et de son commerce, souffrant dans son agriculture, en état de guerre avec l'Irlande, en paix avec le reste du monde, apportant au congrès une médiation de forme, écoutant les leçons du temps, calculant les hasards de l'avenir, relâchant à propos les anneaux d'un système qui avait fondé sa puissance, et se préparant à profiter de toutes les révolutions chez tous les peuples.

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Tel est l'ensemble du grand tableau dont ce volume va développer les détails appuyés de tous les documens qui peuvent servir à l'expliquer.

Nous n'entrerons pas dans les considérations qu'un tel sujet peut inspirer. Ce serait mettre un livre à la tête d'un livre: il est temps de donner au public celui-ci.

Paris, ce 12 septembre 1823.

HISTORIQUE UNIVERSEL

POUR 1822.

PREMIÈRE PARTIE.

HISTOIRE DE FRANCE.

CHAPITRE PREMIER.

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Associations secrètes.

SITUATION de la France au commencement de 1822. -Complots de Béfort, de Toulon et de Nantes. Suite de la session de 1821. - Question de compétence agitée dans la chambre des pairs. - Présentation à la chambre des députés d'un projet de loi sur la presse périodique. Rapport sur celui relatif à la répression des délits de la presse, et changemens proposés par la commission.

L'ANNÉE dont nous allons offrir le tableau est, comme 1816, pleine des agitations, des désordres, des maux que peuvent enfanter les passions politiques. Au milieu des symptômes d'une prospérité toujours croissante, des progrès de l'industrie nationale et du crédit public, la discorde fermente en France comme aux approches d'une guerre civile. Des mouvemens séditieux se succèdent, et semblent se répondre d'un bout du royaume à l'autre. Les ressentimens qu'ils aigrissent se mêlent à toutes les affaires publiques et privées. Tous les esprits en sont agités dans les chaumières comme dans les salons, dans les cours de justice comme à la tribune législative.

Ces mouvemens, ces complots, presque aussitôt connus et réprimés que conçus, ont été signalés dans des réquisitoires et des discours assez fameux pour être mis au rang des documens historiques, comme l'effet d'une conspiration permanente, comme l'œuvre d'une Annuaire hist. pour 1822.

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vaste association secrète formée récemment en France, à l'imitation de celles d'Allemagne et d'Italie, mais plus savamment échelonnée. Des aveux irrécusables en ont prouvé l'existence; mais la source, l'action, les rapports et la direction de cette puissance mystérieuse sont restés sous un voile que l'ardente activité du ministère public n'a pu parvenir à soulever.

On a vu (Annuaire hist. pour 1821, pag. 246) que, vers la fin de décembre dernier, il se tramait, au sein de l'école d'instruction de cavalerie établie à Saumur, un complot dont le but aurait été de s'emparer du château de cette ville, d'arborer le drapeau tricolore, de proclamer Napoléon II, ou du moins d'opérer un changement de gouvernement; mais, l'autorité militaire instruite à temps par des révélations de quelques sous-officiers qu'on y avait entraînés, les conspirateurs avaient été arrêtés sans coup férir, à l'exception de celui qui paraissait en être le chef, Honoré-Édouard Delon, lieutenant d'artillerie à cheval, le seul officier compromis dans cette affaire, qui avait disparu dans la nuit du 23 décembre, et qu'on retrouvera dans une conspiration moins obscure que celle-ci.

Dans le même temps, il devait en éclater une autre en Alsace; mais les autorités civiles et militaires en étaient encore averties par des révélateurs engagés dans le complot, sous-officiers dans le 29o régiment d'infanterie, en garnison à Béfort. Depuis quelques jours on avait observé plusieurs étrangers arrivés en cette ville, de divers points de la France, quelques mouvemens dans les casernes, des réunions suspectes dans une auberge; enfin, dans la soirée du 1er janvier, le lieutenant de Roi (M. Toustain) aperçoit, en faisant sa ronde, près de la porte de France, quatre individus portant des moustaches, qui pressaient le portier de les laisser sortir. Il demande leurs passeports: il y voit qu'ils s'appellent Pégulu, Desbordes, Brue et Lacombe. Tous quatre avaient été impliqués, mais acquittés, dans la cause portée en 1821 devant la cour des pairs. Alors le lieutenant de Roi, soupçonnant qu'ils n'étaient point étrangers à une nouvelle conspiration, les met en état d'arrestation et sous la surveillance de l'officier du poste. Mais le lieutenant de Roi était à peine sorti du corps-de-garde, que cet officier,

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