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est nommé et communication est immédiatement donnée de la requête au ministre que la matière concerne. Un délai lui est en même temps indiqué pour produire sa réponse, ses observations, et toutes les pièces nécessaires au jugement de 1 affaire.

Mais on prétend que l'administration ne tient pas compte du délai qui lui a été assigné, que trop souvent elle oppose la force d'inertie. Il y aurait là des règles législatives à poser.

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Il faut remarquer: 1° que c'est toujours à un ministre que la communication est faite, de quelque autorité que l'acte attaqué émane; et il n'y a pas à distinguer entre les autorités subordonnées, comme le préfet, et les autorités simplement soumises à tutelle, conseil général ou conseil municipal, parce qu'en effet c'est une affaire de surveillance; 2° que le ministre n'est pas véritable partie en cause; c'est une instance dans laquelle il n'y a pas de véritable défendeur. C'est l'acte lui-même qui est attaqué in rem.

D'autres personnes peuvent être appelées en cause d'ailleurs, si l'acte les intéresse et si la section du contentieux le juge à propos.

Il peut aussi y avoir intervention spontanée, et même sont recevables à intervenir ceux qui n'auraient pas un intérêt absolument direct et personnel. On reconnait plus facilement qualité pour intervenir que pour former le pourvoi Les autorités administratives ne peuvent pas intervenir, puisqu'elles sont représentées par le ministre.

L'affaire est ensuite jugée par l'assemblée du Conseil d'État statuant au contentieux.

94. IV. Nature et effets de la décision. 1° La décision ne peut que rejeter le recours ou prononcer l'annulation de l'acte altaqué. Elle ne peut ni réformer cet acte, ni ordonner aucune des mesures qui pourraient être la conséquence de l'annulation (art. 9, 1. 24 mai 1872).

a) Le Conseil d'État ne peut ni modifier ni amender l'acte, car ce serait fai e un acte administratif nouveau; mais l'annulation peut n'être que partielle. Ainsi, dans un règlement de police, on peut n'annuler que certains articles, ou même certaines prescriptions divisibles d un mème article. Il faut reconnaitre que l'annulation partielle ressemble à une réformation; il subsiste cette différence cependant, qu'il n'y a pas d'élément nouveau introduit.

b) Il n'appartient pas au Conseil d'État de prescrire les mesures qui devront être prises par l'administration comme conséquence de l'annulation prononcée ordonner, par exemple, la réintégration de fonctionnaires indûment révoqués (16 janv. 1874); ordonner la des

truction de travaux exécutés en vertu d'une décision reconnue illégale (20 avr. 1883). Il ne lui appartient pas non plus de statuer sur les réclamations pécuniaires que le demandeur joindrait à son recours, soit qu'il réclame le remboursement de dépenses faites à l'occasion de l'acte annulé (28 juill. 1876; 30 avr. 1880); soit qu'il demande des dommages-intérêts à raison de tout autre préjudice (29 juin 1883). C'est une nouvelle question à débattre au contentieux ordinaire.

2o La décision est soumise à la règle de l'autorité de la chose jugée sous les distinctions suivantes : a) Si le recours est rejeté il n'est pas dérogé aux règles ordinaires de l'art. 1351. Le rejet ne fera donc obstacle à une nouvelle demande que si celle-ci émane de la même partie agissant dans la même qualité, si la demande a le même objet et si elle est fondée sur le même moyen d'annulation.

b) Si l'acte a été annulé, l'annulation produit ses effets erga omnes, parce qu'elle fait disparaître l'acte aussi complètement que s'il était rapporté par son auteur. Si donc l'acte attaqué était un règlement de police municipale, l'annulation profite à tous les habitants de la commune, et même toutes les poursuites engagées pour contravention tombent de plein droit. (Cass. 25 mars 1882.)

CHAPITRE II

LES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES

ET LES FONCTIONNAIRES

Si l'on étudie le personnel administratif en se plaçant au point de vue du rôle qu'il joue dans l'administration, c'est-à-dire dans l'exercice des droits des personnes administratives, on s'aperçoit qu'il se divise en deux grandes catégories : les autorités administratives qui ont le droit de décision, et les simples fonctionnaires qui ne l'ont pas.

95. Les autorités administratives. Les AUTORITÉS ADMINISTRATIVES sont les représentants des personnes administratives qui ont le droit de DECISION dans l'exercice des droits, par conséquent le pouvoir de faire des ACTES D'ADMINISTRATION.

Le principe de la séparation des pouvoirs s'est exercé dans l'organisation des autorités administratives, il a amené la distinction d'un organe exécutif et d'un organe délibérant. L'organe délibérant prend des décisions réfléchies séparées de leur exécution; l'organe exécutif exécute les décisions de l'organe délibérant et prend lui-même des décisions soudaines.

Les affaires sont partagées entre ces deux organes, suivant leur degré d'urgence ou leur degré d'importance et aussi suivant qu'elles peuvent être tranchées par voie de mesure générale ou par voie de décision individuelle.

On peut dire qu'il est de la nature de l'organe délibérant de ne prendre que des décisions générales, tandis qu'il est de la nature de l'organe exécutif de prendre des décisions individuelles. C'est-à-dire que le pouvoir délibérant est voisin du pouvoir législatif; les délibérations comme les lois doivent avoir un objet général. Le pouvoir exécutif au contraire, qui est un pouvoir de magistrature, est qualifié pour les décisions individuelles.

Ce principe tend à s'affirmer par des décisions positives rendues en matière d'administration départementale. Là, en effet, le conseil générale et le préfet n'ayant pas la même origine, il était à prévoir que des conflits se produiraient qui feraient préciser leurs pouvoirs. Il résulte, par exemple, de nombreux décrets d'annulation de décisions

des conseils généraux, que ceux-ci, s'ils peuvent voter des fonds pour subvention, doivent réserver au prélet la répartition individuelle; qu'en matière de pension, ils ne peuvent pas prendre de décision spéciale à un employé déterminé, etc. (V. D. Cons. d'Ét. 15 mars 1873; 15 avril 1873; 8 novembre 1873; 18 mars 1874, etc.; A. Cons. d'Ét. 17 nov. 1891.) Le même principe pourrait être invoqué en cas de conflit entre le conseil municipal et le maire.

D'après une axiome dû en grande partie aux expériences faites sous la Révolution, la délibération est le fait de plusieurs, l'action est le fait d'un seul. Aussi jusqu'ici, les organes délibérants sont des assemblées, des agences collectives, tandis que les organes exécutifs sont des hommes agissant seuls, le chef de l'État, le préfet, le maire, etc. Il ne faudrait cependant pas exagérer ce point de vue, il y a fréquemment en fait des assesseurs; à côté du chef de l'État, il y a le conseil des ministres; à côté du préfet, la commission départementale; à côté du maire, dans les grandes villes, le bureau municipal.

La séparation des pouvoirs n'est pas accomplie dans tous les établissements publics; beaucoup ont une organisation plus rudimentaire, une seule agence collective qui délibère et exécute elle-même.

Les FONCTIONNAIRES sont les

96. Les fonctionnaires. représentants des personnes administratives qui participent à l'exercice des droits SANS AVOIR LE DROIT DE DÉCISION et par conséquent sans faire d'actes d'administration.

Les fonctionnaires constituent l'immense majorité du personnel administratif; ils sont les auxiliaires des autorités administratives; ils se divisent en employés de bureau qui préparent les décisions; conseil administratifs qui donnent des avis sur les décisions; agents d'exécution qui exécutent les décisions. Les agents d'exécution sont en rapport avec le public. Tous les agents de perception des impôts sont des agents d'exécution (ils peuvent avoir sous leurs ordres des employés de bureau). Une classe spéciale d'agents d'exécution est mise å part par le droit administratif, ce sont les comptables, ceux qui ont le maniement des deniers publics'.

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97. Observation. Cette classification des autorités administratives et des fonctionnaires repose, on le voit, sur la notion même de l'acte d'administration et par conséquent elle s'impose. Elle est

t. Un même agent de l'administration peut avoir à la fois la qualité d'autorité administrative et celle de fonctionnaire, parce que tout en prenant, luimême des décisions exécutoires, il peut être appelé à exécuter des decisions prises par une autorité supérieure; il en est ainsi, par exemple, du préfet qui, tantôt prend des décisions, tantôt exécute les décisions du ministre.

d'ailleurs textuellement indiquée dans la loi du 24 mai 1872, art. 9, à propos du recours pour excès de pouvoir.

Il a été proposé une autre classification qui a eu une certaine fortune, celle en agents directs ou agents ayant autorité vis-à vis du public, et agents auxiliaires ou agents n'ayant pas autorité sur le public. Cette classification est incomplète, elle ne tient compte que des agents du pouvoir exécutif, elle ne met pas en ligne les assemblées délibérantes, conseils généraux, conseils municipaux, qui sont cependant des autorités aussi importantes que le préfet ou le maire. Les actes de ces assemblées n'ont pas en général d'autorité sur le public, mais ce n'en sont pas moins des actes d'administration, c'està-dire des décisions exécutoires. (V. p. 185 et 187.)

Il faut remplacer la notion d'agent ayant autorité sur e public par celle d'agent faisant des actes d'administration. Il suffit pour cela de renoncer à d'anciennes habitudes d'esprit. Il n'y a pas longtemps encore, les assemblées délibérantes telles que les conseils généraux, les conseils municipaux étaient de simples conseils consultatifs qui n'avaient point de pouvoirs propres en administration. Tout cela est changé, ils ont reçu, grâce au mouvement de décentralisation, des pouvoirs propres considérables, mais on est resté pendant quelque temps sous l'empire de l'ancienne conception d'après laquelle le pouvoir ́exécutif était tout.

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