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(Cass. 8 déc. 1863.) Nous verrons, à propos de la délimitation, que cela n'est pas toujours facile à déterminer.

Les îles, îlots, atterrissements qui se forment dans le lit des fleuves et rivières navigables et flottables, appartiennent aussi à l'État, mais tombent dans son domaine privé, par conséquent sont aliénables et prescriptibles. (Art. 560, C. civ.)

La France possède environ 8,000 kilomètres de rivières navigables et 9,000 kilomètres de rivières flottables à train et à radeau.

B. Voies de communication. -1° Les canaux de navigation, qui sont la propriété de l'État, font partie de son domaine public. Ils en font partie avec leurs francs-bords, leurs chemins de halage, leurs écluses, les ponts qui servent à les franchir, à moins que ces ponts ne se trouvent dans le parcours des voies appartenant au domaine public départemental ou communal. La navigation sur les canaux est affranchie de toute taxe depuis la loi du 19 février 1880 portant suppression des droits de navigation intérieure, à moins que les canaux ne soient concédés. La France possède environ 5,000 kilomètres de

canaux.

Les canaux d'irrigation et les canaux de dessèchement appartenant à l'État sont aussi considérés comme des dépendances du domaine public.

2o Les chemins, routes et rues à la charge de l'État. a) Cela comprend en premier lieu les routes nationales et les rues des villes, bourgs ou villages qui leur font suite. Ces routes partent de Paris et se rendent, soit à la frontière, soit à un grand port maritime. Un décret du 16 décembre 1811 les divise en trois classes, mais il n'y a pas d'intérêt juridique à cette division. Ces routes ont un développement de 38,000 kilomètres. On peut évaluer leur prix de revient à 1,300 millions, et leur entretien annuel à 30 ou 40 millions.

b) Cela comprend en second lieu les chemins de fer d'intérêt général, qu'ils soient construits et exploités par l'État, ou bien qu'ils soient construits et exploités par des compagnies concessionnaires. Les compagnies n'ont que l'exercice d'un droit de jouissance sur la voie, une possession précaire; elles n'ont pas un véritable droit réel.

La domanialité publique des chemins de fer entraîne, non seulement celle de la voie, mais aussi celle de tous les bâtiments qui servent à l'exploitation; et cela, même dans le système des auteurs qui écartent en principe les bâtiments du domaine public. Cela tient à ce qu'ici les bâtiments sont considérés comme l'accessoire du sol. Et il n'y a point de distinction à faire entre les différents bâtiments, à moins que l'on ne puisse estimer que la propriété en appartient plutôt à la compagnie qu'à l'État (ateliers d'ajustage, fores ou autres).

Le réseau des chemins de fer d'intérêt général en exploitation atteint 33,000 kilomètres. Le coût peut en être évalué à 12 milliard, les recettes nettes à 500 millions.

C. Les bâtiments et terrains affectés aux services publics. - Les citadelles, forteresses et fortifications sont rangées, par l'art. 540, dans le domaine public de l'État. Elles y sont, avec toutes leurs dépendances, telles qu'elles sont énumérées dans la loi des 8-10 juillet 1791, titre Ier, art. 13, remparts, parapets, chemins couverts, fossés, glacis, etc. Les églises cathédrales et métropolitaines, les palais nationaux, les ministères, les hôpitaux nationaux, les grandes écoles, les manufactures de l'État et généralement tous les bâtiments qui sont la propriété de l'État, et qui sont en même temps affectés à un service public, sont dépendances du domaine public de l'État.

372. Domaine public départemental. Le domaine public départemental ne comprend que des dépendances artificielles et elles ne sont pas très nombreuses :

1o Les routes départementales et les chemins de fer départementaux. - Le premier fonds de ces routes a été constitué par le décret du 16 décembre 1811 qui a abandonné aux départements une partie des anciennes routes royales. Ce fonds s'est augmenté depuis. En 1882, on comptait 33,691 kilomètres de routes départementales; leur largeur moyenne est de 12 mètres; elles ont coûté près de 700 millions et leur entretien coûte 9 à 10 millions.

L'histoire des routes départementales aura été assez curieuse en ceci, qu'après avoir été en 1811 données par l'État aux départements, et avoir contribué ainsi à faire admettre la personnalité morale de ceux-ci (V. p. 226), finalement elles seront repassées par les départements aux communes. Nous savons, en effet, qu'il y a actuellement un grand mouvement pour déclasser les routes départementales et les transformer en chemins vicinaux. Le déclassement a déjà été opéré par les conseils généraux dans quarante-cinq départements et bientôt sans doute les routes départementales auront disparu.

Les routes départementales seront remplacées dans le domaine public des départements par les chemins de fer départementaux, chemins de fer à voie étroite en général, dont la création a été décidée par beaucoup de départements en vertu de la loi du 11 juin 1880. (V. art. 11.)

2o Les batiments affectés. Tous les bâtiments qui appartiennent au département, et qui sont affectés à un service public, sont des dépendances du domaine public départemental.

Sont dans cette catégorie, d'abord un certain nombre de bâtiments

dont l'État avait fait cadeau au département dans le décret du 9 avril 1811 « édifices et bâtiments nationaux actuellement occupés par le service de l'administration, des cours et tribunaux », donc, les hôtels des préfectures et sous-préfectures, les palais de justice. Ensuite des bâtiments que les départements sont obligés de fournir, comme les évêchés, les asiles d'aliénés, les écoles normales primaires.

373. Domaine public communal. Le domaine public communal ne comprend, lui aussi, que des dépendances artificielles. 1o Chemins et voies de communication. Le domaine public communal peut comprendre de ce chef, des chemins vicinaux, des chemins ruraux, des rues, places et jardins de ville, avec tout ce qui fait corps, comme les colonnes, les grilles, les statues, les becs de gaz, etc.; des chemins de fer, des canaux.

Les chemins vicinaux et les chemins ruraux demandent des développements particuliers.

a) Chemins vicinaux. Les chemins vicinaux sont ceux qui font communiquer entre eux les chefs-lieux de communes et les gros hameaux. Juridiquement, ce sont ceux qui ont été classés comme tels par les autorités compétentes. De plus, toute rue qui est reconnue dans les formes légales être le prolongement d'un chemin vicinal, en fait partie intégrante (1. 8 juin 1864. Il y en a trois catégories : les chemins de grande communication, les chemins d'intérêt commun et les chemins ordinaires. Suivant leur catégorie, ces chemins ont une largeur différente qui est fixée dans chaque département par le conseil général ou par la commission départementale.

La création du réseau des chemins vicinaux date de la loi du 21 mai 1836. La construction, activement poussée grâce à de larges subventions de l'État et des départements, est actuellement presque achevée, et c'est assurément une des œuvres les plus utiles accomplies en ce siècle. On en compte 600,000 kilomètres. La dépense de premier établissement doit être évaluée à plus de trois milliards, l'entretien annuel absorbe une centaine de millions.

Nous avons vu ailleurs (p. 178) que le service des chemins vicinaux de grande communication et d'intérêt commun est départemental. Au point de vue juridique, les chemins vicinaux sont intéressants par plusieurs particularités :

D'abord, parce que, lorsqu'il s'agit de leur élargissement, l'expropriation des terrains se fait d'une façon simple, par arrêté du conseil général ou de la commission départementale. (Art. 15, 1. 21 mai 1836.)

De plus, parce qu'ils sont dotés de ressources spéciales, centimes spé

ciaux et prestations, qui ont assuré leur construction, mais qui deviennent moins utiles maintenant qu'il n'y a plus qu'à les entretenir. (V.1. 21 mai 1836; 1. 24 juillet 1867; 1. 11 juillet 1868, et pour l'impôt des prestations no 441.)

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b) Chemins ruraux. Les chemins ruraux sont les chemins partenant aux communes, affectés à l'usage du public et qui n'ont pas été classés comme chemins vicinaux. Ainsi les définit la loi du 20 août 1881, qui est venue régler la situation de ces chemins jusquelà un peu délaissés.

Au fond, il n'y a pas de différence de nature entre les chemins ruraux et les chemins vicinaux ; seulement, comme ils paraissent moins indispensables que les autres, les communes n'ont pas engagé les procédures nécessaires pour les faire classer comme vicinaux, et ne se sont pas procuré les ressources nécessaires à leur réfection.

Avant la loi du 20 août 1881, la condition juridique de ces chemins était douteuse, on hésitait à les faire tomber dans le domaine public de la commune.

Cette loi a posé les règles suivantes :

Il y a deux catégories de chemins ruraux : 1o ceux qui ont été l'objet d'un arrêté de reconnaissance pris par la commission départementale après les formalités de l'art. 4 et qui sont dépendance du domaine public (art. 6); 2o ceux qui, sans avoir été l'objet d'un arrêté de reconnaissance, sont cependant certainement la propriété de la commune; ceux-là sont dans le domaine privé (art. 3 et 6). La question de propriété est tranchée par les tribunaux ordinaires, mais il y a présomption au profit de la commune lorsqu'il est constaté administrativement que le chemin est affecté à l'usage du public. Cette constatation se fait en suivant les règles de l'art. 2; il faut s'attacher à la destination du chemin jointe à l'un des deux faits suivants : le fait d'une circulation générale et continue, ou bien des actes réitérés de surveillance et de voirie de l'autorité municipale. La présomption au profit de la commune admet, d'ailleurs, la preuve contraire. (Art. 3.)

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Ressources des chemins ruraux. La commune « pourvoit à l'entretien <<< des chemins ruraux reconnus, dans la mesure des ressources dont elle << peut disposer. En cas d'insuffisance des ressources ordinaires, les com<«<<munes sont autorisées à pourvoir aux dépenses des chemins ruraux <«< reconnus, à l'aide soit d'une journée de prestation, soit de centimes << extraordinaires en addition au principal des quatre contributions di« rectes. » (Art. 10, §§ 1 et 2. L. 1881; L. 5 avril 1884, art. 141 et suiv.) Il peut aussi y avoir des subventions industrielles (art. 11) et des souscriptions volontaires (art. 12). Enfin, lorsque la commune n'exécute pas des travaux régulièrement autorisés ou cesse d'entretenir le chemin, les

propriétaires intéressés peuvent se constituer en syndicats pour faire eux-mêmes les travaux. (Art. 19 et s.)

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1o Bâtiments affectés. Le domaine public communal peut contenir de ce chef des objets nombreux.

Dans les communes rurales, il y aura: a) l'église, qui est bien une propriété communale, c'est aujourd'hui universellement admis (Av. Cons. d'Ét., 2 pluviòse an XIII), et qui est de plus une dépendance incontestée du domaine public; b) le presbytère, à condition qu'il soit la propriété de la commune; ceci n'est pas généralement admis, mais c'est une conséquence de notre opinion sur les bâtiments affectés; c) le cimetière; on range assez généralement le cimetière dans les dépendances du domaine public. Quelques auteurs s'y refusent, cependant, sous le prétexte que dans le cimetière il est fait des concessions de terrain perpétuelles qui constituent de véritables aliénations, et que cela est incompatible avec la nature du domaine public inaliénable. Nous verrons plus loin (n° 399), à propos des concessions sur le domaine public, que les concessions dans les cimetières n'ont pas la portée qu'on leur attribue'; d) la mairie et la maison d'école, à condition que ces bâtiments appartiennent à la commune et ne soient point pris en location*; e) la halle ou le marché

couvert.

Dans les villes, il y aura, en outre, ou pourra y avoir :

a) Les casernes et tous les bâtiments affectés à l'instruction publique, facultés, lycées, collèges, etc., soit qu'ils aient été donnés aux villes par l'État (D. 9 avril 1811), soit qu'ils aient été bâtis depuis par les villes en vertu de conventions avec l'État, de même les hôtels des postes et tous les autres bâtiments fournis aux services d'État. b) Les bâtiments fournis aux établissements publics : hôpitaux, hos

1. Toute commune doit avoir un cimetière; il doit être à une certaine distance des maisons d'habitation (D. 23 prairial an XII; O. 6 décembre 1843). Le préfet a le pouvoir d'ordonner la translation d'un cimetière trop rapproché des habitations, après avoir pris l'avis du conseil municipal, mais sans être obligé, de s'y conformer. Ce pouvoir ne lui a pas été enlevé par la loi du 5 avril 1884. (Arr. Cons. d'Ét. 11 décembre 1891.)

2. Toute commune doit avoir au moins une maison d'école publique. Selon la population, cette école est mixte, ou bien il y a école séparée pour les filles et les garçons. De plus, une école de hameau est obligatoire dans les centres d'habitations réunissant au moins vingt enfants d'âge scolaire et distants d'au moins 3 kilomètres d'une autre école. (L. 20 mars 1883, art. 8.) Enfin, même en dehors des conditions précédentes, le conseil départemental peut imposer une école dans un hameau. (L. 30 octobre 1886, art. 13; Arr. Cons. d'Ét. 11 décembre 1891.) L'État donne de fortes subventions pour la construction des maisons d'école et généralement aussi le département.

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