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(Roche C. Sève.) — Arrêt.

La Cour; Sur le premier moyen, tiré de la violation des art. 7 et 34 C. P.C.; Attendu en droit, que si, aux termes de l'art. 7 C. P. C., et lorsque le juge de paix ne tient ses pouvoirs que de la volonté des parties qui se présentent devant lui pour lui demander jugement, il faut que l'espèce de compromis qui le constitue juge, soit signé des parties, aucune disposition semblable n'existe à l'égard des consentemens judiciaires qui sont donnés dans une instance dont le juge de paix est saisi dans les formes ordinaires; qu'alors juge naturel des parties, il tient de son caractère et de la loi le pouvoir de constater le contrat judiciaire qui est formé devant lui; que le mineur émancipé, assisté de son curateur, a capacité pour prêter les consentemens judiciaires qui tiennent à la défense à l'action immobilière intentée contre lui, et notamment ceux qui ont pour objet d'éviter les frais, et que la production de témoins par une partie constitue de sa part un consentement à l'enquête, et que, par l'effet de ce consentement, elle devient non-recevable à se prévaloir ultérieurement de ce que cette enquête aurait été faite sans qu'au préalable le juge de paix eût, conformément à l'art. 34 C. P.C., ordonné la preuve et en eût fixé l'objet par un jugement; Et attendu en fait qu'il résulte du jugement attaqué 1° qu'il s'agissait, dans l'espèce, d'une action en complainte qui avait été portée par citation devant le juge de paix compétent; 2o que devant ce juge de paix, comme depuis devant le tribunal statuant sur appel, la demanderesse en cassation, alors mineure émancipée, a agi sous l'assistance de François Raynaud, notaire, son curateur, et a été représentée par Jacques Roche, son père, son fondé de pouvoir; et 3° que ce fondé de pouvoir présent, ainsi que le curateur, à la visite des lieux précédemment ordonnée par le juge de paix, ne s'est pas opposé à l'audition des témoins produits par la défenderesse éventuelle, et en a même produit de contraires, qui ont été entendus immédiatement après; qu'ainsi le jugement attaqué n'a pas violé les articles précités du Code de procédure civile, et n'a fait que se conformer aux principes enmatière de consentement judiciaire ; - Rejette.

Du 27 mars 1832.-Ch. des req.

NOTA. Au lieu de faire des observations sur cet arrêt, nous croyons plus utile pour nos lecteurs de leur présenter un extrait du rapport de M. le conseiller de Broë, dont les paroles ont sans doute déterminé la décision de la Cour suprême.

Voici comment s'est exprimé ce magistrat :

«Ne peut-on pas dire, en droit, que, s'il est vrai qu'aux termes de l'art. 7 C. P. C., il faille que le consentement des parties soit signé par elles, alors qu'il s'agit de conférer au juge de paix, par une sorte de compromis, une juridiction volontaire, il n'en

est pas de même alors que le juge de paix étant le juge naturel et forcé des parties, il ne s'agit, de sa part, que de constater des consentemens judiciaires donnés devant lui; qu'alors la constatation de ces consentemens rentre dans ses fonctions de juge, et que, si les parties ont volontairement consenti à un mode abrégé et même irrégulier de procédure, la preuve de ce contrat judiciaire résulte du procès-verbal ou du jugement du juge de paix, sans qu'il soit besoin des signatures des parties.

» Et ne peut-on pas dire, en fait, que, s'agissant d'une action en complainte, le juge de paix du canton tenait son pouvoir non du consentement des parties, mais de la loi; que s'étant rendu sur les lieux en vertu d'un jugement par lui rendu, et là les parties ayant respectivement et contradictoirement produit des témoins qui ont été entendus, elles ont ainsi fornié, devant leur juge naturel, un contrat judiciaire que ce juge a eu qualité pour constater, et par l'effet duquel elles ont consenti à ce que le juge fit une enquête, sans avoir au préalable ordonné formellement la preuve, et en avoir fixé l'objet ?

» Vous penserez peut-être, Messieurs, être d'autant mieux autorisés à le juger ainsi, que, dans un cas analogue, ces principes ont déjà été consacrés par un arrêt de la chambre civile du 3 octobre 1808.

» Et quant au contrat judiciaire en lui-même, ne peut-on pas ajouter, 1o en droit, qu'il résulte de l'assistance à l'audition des témoins produits par les défendeurs éventuels, et surtout de la production des témoins par la demanderesse en cassation, que les réserves même spéciales et positives qu'elle aurait faites antérieurement contre l'enquête, se seraient trouvées annulées par le fait contraire de l'assistance à cette enquête et surtout de la production de témoins, points déjà consacrés par plusieurs de Vos arrêts? (Voy, J. A., t. 41, p. 510.)

» Et ne peut-on pas ajouter, 2o en fait, que, dans l'espèce, loin qu'il y ait eu des réserves contre l'enquête, celles dont parle le point de fait s'y appliqueraient si peu, qu'on y voit au contraire que ce fut le sieur Roche lui-même qui demanda l'enquête, et qu'enfin on voit, par les motifs du jugement attaqué, que ces réserves n'avaient trait qu'aux moyens en général, sans concerner spécialement l'enquête qui, au contraire, fut faite d'accord entre les parties.

» Une seule difficulté reste: la demoiselle Roche, alors mineure émancipée, était-elle légalement représentée? et a-t-elle pu donner un consentement valable? Comme mineure émancipée, elle ne pouvait défendre à l'action immobilière dont il s'agissait, qu'avec l'assistance de son curateur. On ne conteste pas que son curateur l'assistât; le jugement attaqué constate la présence du sieur Baquand, notaire curateur à l'émancipation, comme actionné devant un juge de paix. Elle pouvait se faire

T.

XLIII.

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représenter par un fondé de pouvoirs (art. 9 et 13 C. P. C.): le sieur Roche, son père, était son mandataire.

» Or, le mineur émancipé, assisté de son curateur, n'a-t-il pas le droit de prêter en justice un consentement tendant à abréger les formes? Nul doute qu'il ne pourrait pas compromettre (art. 1004 et 83 C. P. C.); peut-être même, par le même motif, ne pourrait-il pas proroger la juridiction du juge de paix, en vertu de l'art. 7; mais, cité en vertu de la loi devant son juge naturel, ne peut-il pas prêter le consentement dont il s'agit? Vous penserez peut-être que oui; car 1o la loi donne la plénitude de l'action, sous la seule condition de l'assistance du curateur; 2° les consentemens donnés en présence et sous la sauve-garde de la justice, pour éviter les préalables d'une enquête à faire, ne peuvent être assimilés à une aliénation d'immeubles; et 3° il serait injuste, tant pour le mineur que pour sa partie adverse, qu'il fût privé du moyen d'éviter des frais inutiles. »>

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COUR DE CASSATION.

Jugement arbitral. — Dépôt. Délai.

2o Jugement arbitral. Conclusions. -Mention. - Annexc.

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1 Une sentence arbitrale est valable, quoique déposée au greffe du tribunal plus de trois jours après sa date. (Art. 102 C. P. C.) (1)

2° Un jugement arbitral ne peut être annulé comme ne contenant pas les conclusions des parties, s'il déclare qu'elles ont été annexées à la minute du jugement même. (Art. 141 C. P.

C.)

3° Les arbitres devant lesquels le directeur d'une compagnie a conclu à des dommages-intérêts contre un de ses agens, à raison des malversations de celui-ci et des injustices de la Compagnie, peuvent, sans excès de pouvoirs, lui en accorder, comme ayant été intempestivement destitué de ses fonctions. (Art. 1006 C. P. C.)

4o Une partie ne peut révoquer en doute, devant la Cour de cassation, un fait formellement constaté dans les qualités d'un arrêt auxquelles elle n'a pas formé opposition.

(Compagnie du Phénix C. Charvet.) — ARRÊT.

La Cour; Sur le moyen fondé sur la violation des articles 1006, 1028 et 141 C. P. C., et que la compagnie du Phénix fait résulter de ce que l'arrêt attaqué n'aurait pas annulé la décision arbitrale dont il s'agit, sur le motif qu'elle n'avait pas

(1) V. l'état de la jurisprudeuce et nos observations, J. A., t. 41, p.699,

et la note.

été déposée au greffe du tribunal civil dans le délai prescrit par l'art. 1020;

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Attendu que l'art. 1028 C. P. C. énumère les différentes causes qui peuvent donner lieu à l'annulation des décisions arbitrales, et qu'au nombre de ces causes d'annulation ne se trouve pas comprise l'inobservation de l'art. 1020, relativement au délai de trois jours fixé par cet article pour le dépôt au greffe de la décision arbitrale;

Sur le deuxième moyen, fondé sur la violation des mêmes art. 141, 1006 et 1028, et que la compagnie du Phénix fait résulter de ce que la décision arbitrale dont elle demandait la nullité ne contenait pas les conclusions des parties, qui formaient seules les pouvoirs conférés aux arbitres, et de ce que cette décision aurait accordé au sieur Charvet des dommages-intérêts pour les torts que lui aurait fait éprouver sa révocation intempestive, tandis qu'il n'en aurait demandé qu'à raison des pertes que lui auraient occasionées les malversations du nommé Génot; doo'l ob Le

Attendu que la décision arbitrale porte que les conclusions des parties ont été annexées à la minute de ladite décision, et que cette annexe a rempli le vœu de l'art. 140;

Attendu, d'un autre côté, que les erremens de la procédure, et particulièrement le point de fait de l'arrêt attaqué, constatent que, par ses conclusions prises devant les arbitres, le sieur Charvet avait demandé, entre autres choses, que la compagnie du Phénix fùt condamnée à lui payer la somme de 15,000 fr. pour dommages-intérêts à raison du préjudice qui lui avait été causé par les malversations du sieur Genot, agent de la Compagnie, et l'injustice de ladite Compagnie dans ses actes envers lui, et que ces expressions embrassent dans leur généralité les diverses causes de dommages sur lesquelles les arbitres ont fondé leur décision;

Attendu que la compagnie du Phénix n'ayant pas formé opposition aux qualités de l'arrêt, elle ne peut pas révoquer en doute un fait qu'il a constaté dans des termes aussi explicites, et que, ce point de fait considéré comme constant, il en résulte que l'arrêt a pu, sans violer les art. 1006 et 1028 C. P. G., rejeter la demande en nullité de la décision arbitrale dont il s'agit; Rejette.

Du

29 mars 1832.

Ch. req.

Enquête.

COUR ROYALE DE PARIS,

Témoins instrumentaires. Testament.

Les témoins instrumentaires d'un testament peuvent être entendus

dans l'enquête ouverte sur la demande en inscription de faux dirigée contre cet acte. (Art. 283 C. P. C. ) (1)

(Barbiat C. Gaillard. )— ARRÊT. “

La Cour; Considérant qu'aucune loi ne prohibe l'audition des témoins instrumentaires en l'instruction de faux incident civil, sauf au juge à avoir à leurs dépositions tel égard que de raison; que des dépositions des témoins entendus dans l'enquête il résulte que le notaire n'était point assisté d'eux lorsqu'il a reçu le testament attaqué; que le même fait ressort de l'état matériel des signatures apposées à la minute; qu'ainsi la volonté du testateur, nonobstant les énonciations du testament, n'a point été exprimée dans les formes prescrites par la loi, à peine de nullité;- Confirme, etc.

Du 11 avril 1832.2 ch.

1o Ordre.
2o Ordre.

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COUR DE CASSATION.

Collocation! Radiation. — Tierce-opposition.
Hypothèque. --Inscription. - Renouvellement.

1o Les enfans colloqués dans un ordre par le juge-commissaire comme propriétaires d'un douaire, peuvent former tierce-opposition au jugement rendu sans qu'on les ait appelés et qui les a exclus de l'ordre sur la demande de l'un des créanciers. (Art. 474, 755 C. P. C.)

2° L'inscription hypothécaire d'un créancier qui a moins de dix ans de date au moment de l'ouverture d'un ordre, n'est pas sujette à renouvellement. (Art. 2154 C. C. ) (2)

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La Cour;- Sur le premier moyen tiré de la violation des articles 1350 et 1351 C. C. concernant l'autorité de la chose jugée ; -Attendu que le réglement provisoire de l'ordre ayant colloqué utilement les enfans Esprit pour le fonds du douaire qui leur était propre, et le sieur Renouard de Bussières ayant contesté ce réglement, le jugement qu'il a obtenu en sa faveur, le 8 juillet 1831, a été rendu, sans que lesdits enfans Esprit aient été appelés; Attendu que ce jugement était préjudiciable à leurs droits, et que, n'ayant pas été appelés, ils étaient recevables à y former tierce-opposition, conformément à l'art. 474 C. P. C.; et que l'arrêt attaqué, en recevant leur tierce-opposition, loin d'avoir violé l'autorisation de la chose jugée, a fait une juste application dudit art. 474;

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(1) V. J. A., t. 39, p. 78, et la note.

(2) V. l'état de la jurisprudence, J. A., t. 20, vo Saisie immobilière,

n° 310.

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